Vocabulaire et notions générales
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Un glossaire pour : questionner, problématiser ; identifier et comprendre des mots-clefs ; faire des recherches en ligne.Afro-pessimisme
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L'Afrique noire est mal partie ! Ce titre de René Dumont, datant de 1962 , est repris à l'envi au fil de bien des ouvrages, articles et propos divers concernant le continent.
La perception des réalités africaines est bien souvent catastrophiste et revient régulièrement sur les "malédictions" qui frappent le continent (famines et pénuries, épidémies, guerres et guerillas, catastrophes et aléas naturels de toute nature, etc.) et sur les nombreux déficits (éducatifs, démocratiques, de gouvernance, etc.) qui le pénalisent.
L'afro-pessimisme radical de certains est nourri de l'idée qu'il y a des blocages entretenus par les Africains eux-mêmes, qu'aucune aide au développement ne suffira à surmonter. Violences, conflits, mauvaises gestions, corruption, trafics illicites et mafieux feraient partie d'une africanité indépassable. Les sociétés africaines ne seraient pas faites pour la démocratie, ni pour le respect des droits de l'homme, ni pour bénéficier d'un État de droit équitable dans les domaines politique, économique et social ! L'afro-pessimisme peut aussi reposer sur le cliché d'une acceptation fataliste des africains à leur propre sort.
Ces différentes formes d'afro-pessimisme aboutissent à abandonner le continent à son propre sort ou aux simples intérêts à court terme de ceux qui en exploitent les hommes et les ressources (factions au pouvoir, entreprises peu scrupuleuses, etc.). La marginalisation du continent noir dans les échanges économiques et culturels mondiaux en est la conséquence.
À cet afro-pessimisme tente de s'opposer une vision plus positive des réalités africaines, sur la base de l'énergie, des capacités créatives, imaginatives et d'adaptation des sociétés africaines. Le processus de mondialisation qui bénéficie actuellement au développement de nombreux pays de la planète, pourrait, sous certaines conditions d'accompagnement et d'aide, bénéficier aussi à l'Afrique subsaharienne.
La confrontation de ces points de vue peut être illustrée par le débat autour d'un film documentaire traitant de la situation des populations vivant de la pêche dans les étendues d'eau douce de l'est africain, plus particulièrement celles du lac Victoria. Il s'agit du film Le cauchemar de Darwin d'Hubert Sauper (distribué en France en mars 2005), aux tonalités apocalyptiques, qui évoque, pêle-mêle, les dégâts écologiques, la dissémination de la prostitution, du Sida, le financement de trafics d'armes, etc. Ce film a bénéficié d'un assez large succès dans les pays développés d'Europe. Mais un article du East African Standard évoque les propos du Dr Alice Kaudia, directrice régionale de l'IUCN pour l'Afrique orientale, contestant l'image négative que donne le film sur la situation et lui reprochant, notamment, d'occulter les effets positifs des pêcheries sur le développement de la région. De son côté, Thomas Maembe, directeur de l'Organisation des pêcheries du lac Victoria dénonce, dans une lettre adressée à Hubert Sauper, une vision européenne stéréotypée sur l'Afrique ("There were better sides of the story, but the documentary preferred to confirm the stereotypical image of Europe towards Africa ... the documentary does not depict how East Africa gains from the export of fish").
Selon une formule de Sylvie Brunel, l'Afrique peut-elle être pensée comme "un continent en réserve de développement" ? Le pari est engagé, le débat est ouvert.
- Un article de Géoconfluences, dans le cadre des "brèves" :
La pêche dans le lac Victoria : un exemple de mal-développement ?
- Par François Garcon, une étude critique du film documentaire d'H. Sauper, "Le cauchemar de Darwin") sur RFI : www.rfi.fr/radiofr/editions/082/edition_80_20070121.asp
- Georges Courade (dir. de recherches, IRD) - Quel avenir pour l’Afrique sub-saharienne ? :
www.univ-perp.fr/perspectives/article.php3?id_article=11
- L'article de Harold Ayodo pour le East African Standard (Nairobi, 14 décembre 2005) disponible sur le site Allafrica - http://allafrica.com/stories/200512130768.htmlNo publisherDéveloppement, inégalités, richesse et pauvretéAfrique subsaharienne : territoires et conflits2022-01-05T02:49:56ZPloneGlossaryDefinitionAgriculture pluviale
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L'agriculture pluviale ou agriculture sous pluie est une forme d'agriculture qui se différencie de l'agriculture irriguée. Ce type d'agriculture suit le cycle des précipitations annuelles. Avec une évaporation modérée, en dessous de 200 mm de pluie par an, l'agriculture pluviale n'a que peu de chances de produire une récolte. En Afrique, en moyenne, l'agriculture pluviale devient impossible à moins de 300 mm de pluie par an, et l'élevage à moins de 200 mm (Denmat et Gonin, 2022, p. 131).
Elle est largement pratiquée en climat dit tempéré sans saison sèche. En climat méditerranéen, l'agriculture pluviale (ou secano, par opposition au regadio) est possible avec des plantes capables de se contenter d'une pluviométrie réduite (blé, légumineuses) ou capables d'aller puiser profondément dans les réserves hydriques du sol (oliviers). Elle est pratiquée durant la saison humide en climat tropical, avec parfois une complémentarité avec l'élevage qui exploite les chaumes pendant la saison sèche.
(MCD) mai 2016. Dernière modification (JBB), juillet 2023.
Références citées
- Denmat Pierre et Gonin Alexis (2022), « Les défis multiples des agricultures africaines » in Libourel Éloïse et Gonin Alexis, Agriculture et changements globaux, Atlande.No publisherL'Amérique latine : émergence, inégalités, défisAfrique subsaharienne : territoires et conflits2023-07-04T08:37:42ZPloneGlossaryDefinitionChinafrique
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La très rapide montée en puissance de la présence chinoise dans une large partie de l'Afrique a incité à parler d'une Chinafrique, qui supplanterait une Françafrique à l'agonie et, plus généralement, les intérêts occidentaux sur le continent. Ce concept a été largement repris par les journalistes et le monde des médias.
Précisons tout d'abord que l'expression, qui intègre l'ensemble des États du continent africain, permet mal de saisir des situations économiques pourtant très variées à l'intérieur du continent.
Au-delà des fantasmes, partons des constats. Entre 2000 et 2015, les échanges chinois avec le continent ont été multipliés par 30, pour atteindre la barre des 300 milliards de dollars. Depuis 2011, la Chine est le premier partenaire commercial de l'Afrique sud-saharienne prise comme un ensemble. Elle a consolidé ses positions dans les secteurs des industries extractives et des infrastructures. Elle a aussi commencé à investir dans l’industrie manufacturière, mais les flux restent encore assez modestes (officiellement 22 milliards de dollars en 2012 mais probablement beaucoup plus).
Les grands sommets entre les représentants de la Chine et les gouvernements africains se multiplient, ce qui traduit l'intérêt réciproque pour ces relations. Avec la création du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC), l’an 2000 constitue un tournant à partir duquel les relations sino-africaines connaissent un essor particulièrement rapide. La Chine multiplie les gestes de séduction, en annulant la dette de plusieurs pays africains par exemple. Lors du sommet du Focac de Johannesburg en décembre 2015, le président chinois Xi Jiping a annoncé une enveloppe de 60 milliards d'aide financière pour l'Afrique incluant 5 milliards de prêts à taux zéro et 35 milliards de prêts à taux préférentiels.
Les Chinois sont aussi présents dans les opérations de maintien de la paix en Afrique et la Chine use de son droit de veto au Conseil de sécurité des Nations Unies pour entraver les possibles ingérences internationales dans les affaires africaines, ce qui lui sert de monnaie d'échange diplomatique et économique. Inversement, Pékin convoite les voix des États africains pour défendre ses propres intérêts dans les instances internationales (dans ses relations avec Taïwan par exemple) et le temps où les ex-colonies votaient comme un seul homme à l'ONU derrière l'ancienne puissance tutélaire est fini.
Contrairement aux Occidentaux, la Chine n'impose pas de conditions politiques en échange de ses investissements et ne pose pas de questions sur les Droits de l’Homme. Les Chinois s'efforcent d'emporter l'adhésion des gouvernants africains et, autant que possible, des populations en se centrant sur un échange largement fondé sur les extractions de matières premières contre des infrastructures : construction de ports, de routes, de barrages (par exemple, sur l'Omo en Ethiopie, barrage de Merowe au Soudan), de stades et d'hôpitaux, de zones industrielles (parc industriel sino-éthiopien de Dukem). Ils prennent souvent en charge une large partie, voire la totalité des travaux et s'installent alors parfois durablement, créant de véritables villages ou quartiers chinois, multipliant les installations d'entreprises ou de commerces. On compte plus de 2 500 entreprises chinoises installées sur le continent en 2015. En Algérie, la Chine a détrôné la France depuis 2012 comme premier partenaire du pays en remportant quasiment tous les grands appels d’offres dans le BTP, comme la construction de la grande mosquée d’Alger, la troisième plus grande au monde, ou encore l’agrandissement de l’aéroport de la capitale. Partout sur le continent, les produits chinois bon marché remplacent peu à peu ceux importés d'Occident mais aussi les productions locales et africaines.
Au demeurant, ce qui pourrait sembler une forme de néo-colonisation de l'Afrique peut être confronté à certaines limites et réactions. Bon an, mal an, une part des pays africains est engagée dans des processus de démocratisation et l'opinion publique, la société civile se font de plus en plus entendre. La présence chinoise est parfois perçue comme une menace ou une forte concurrence pour les productions et les emplois locaux et des incidents, voire des émeutes populaires, en résultent parfois. Dans certains pays l'immigration massive de travailleurs chinois est mal vécue, en Algérie par exemple, des émeutes ont éclaté.
Certains auteurs comme Thierry Pairault (2018) estiment que l'expression est à bannir. Parmi d'autres arguments, ils estiment qu'elle donne une vision trop uniforme des pays du continent, que l'attitude de la Chine n'est en rien comparable à celle des anciennes puissances coloniales. Thierry Pairault insiste sur le fait que les chiffres des investissements chinois en Afrique sont souvent gonflés, ou portent sur des annonces de projets plutôt que sur des réalisations concrètes. De plus, dans de nombreux cas, les transferts de capitaux correspondent plutôt à des commandes africaines que des investissements chinois, et l'implication locale de la Chine ne dure que le temps du chantier.
Dans le cadre de la compétition mondiale entre la Chine et l'Occident, les Africains ont compris qu'ils seront de plus en plus courtisés et ils sont bien décidés à faire monter les enchères. La Chine contribue certainement à la « désoccidentalisation » de l'Afrique. Elle contribue aussi largement à l'actuel décollage économique de certains pays africains comme l'Éthiopie et au transfert de nouvelles technologies adaptées au continent. Plusieurs pays africains sont considérés, de plus en plus souvent, comme des émergents. C'est un retournement de perspective susceptible de s'accélérer avec la montée en puissance des échanges Sud-Sud et avec le renforcement du rôle d'autres nouveaux intervenants que sont le Brésil et l'Inde. Dans ce contexte, parler de « Chinafrique » est un moyen de souligner le rôle de la Chine dans l'insertion plus générale des pays africains au système économique mondial multipolaire.
(La rédaction) mise à jour : janvier 2017 ; mars 2018.
Pour compléter avec Géoconfluences
- Karine Bennafla et Hala Bayoumi, « Démonstration de puissance ou aveu d’impuissance ? La nouvelle capitale administrative de l’Égypte », Géoconfluences, mars 2023.
- David Bénazéraf, « Les Chinois, faiseurs de villes africaines », Géoconfluences, février 2016.
- Jean-Pierre Cabestan, « Les relations internationales de la Chine après la crise de 2008 », Géoconfluences, février 2016.
- La Chinafrique, mythe ou réalité ?, brève de Géoconfluences, mars 2018, avec le café géographique ci-dessous. Pour aller plus loin
- Thierry Pairault, « Quelle présence chinoise en Afrique ? », Les cafés géographiques, janvier 2018.
- Forum sur la coopération sino-africaine (Focac), site développé par le Ministère des Affaires Etrangères de la RPC
- Chinafrica.info site du journaliste Sébastien Le Belzic
- Ressler, N., 2016, « La Chine en Afrique, une implantation pas si simple », Carto n° 38, novembre-décembre 2016.
- J.-J. Gabas & J.-R. Chaponnière (éds), 2012, Le temps de la chine en Afrique : enjeux et réalités au Sud du Sahara. Karthala-GEMDEV, collection « Hommes et sociétés », 216 p.
No publisherLa Chine, la modernisation encadrée d'un territoire globalAfriques : dynamiques régionalesDéveloppement, inégalités, richesse et pauvretéAfrique subsaharienne : territoires et conflits2023-03-30T07:28:34ZPloneGlossaryDefinitionColonialisme
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« En France, les quatre années de l'occupation allemande sont encore très présentes dans les mémoires. Nous, nous avons subi un siècle de colonisation et le silence pèse encore »... ainsi s'exprime le romancier ivoirien Ahmadou Kourouma. Cette quête de mémoire pèse encore et est un enjeu dans les relations internationales. On peut y voir les racines de certaines situations de violence à travers le continent.
Les mécanismes économiques du système colonial sont bien connus : les colonies devaient fournir des matières premières aux métropoles qui, en retour, y déversaient, à l'abri de barrières douanières, les surplus de leur production manufacturière. Sur le plan humain et politique, le colonialisme reposait sur un racisme institutionnalisé selon lequel l'humanité serait divisée en groupes de valeur inégale, et ce même dans les colonies des régions arctiques (Groenland danois, Sibérie russe).
De nos jours, l'économie africaine hérite encore pour une large part de ce système caractérisé par la dépendance vis-à-vis des capitaux, des technologies, des marchés extérieurs. Ses taux de dépendance envers l’exportation de produits primaires sont très élevés. Ces schémas n’ont pas fondamentalement changé et ils entretiennent frustrations et rancœur. Le manque d’autonomie et d’initiative locale dans des systèmes productifs dont les décisions essentielles sont prises à l’extérieur est une donnée structurelle du mal-développement africain.
Les recettes tirées des produits du sous-sol ont partout créé l’illusion du développement. Mais les termes de l'échange (différence entre le prix des importations et celui des exportations) n'ont cessé de se dégrader en défaveur de l'Afrique subsaharienne dont la part dans le commerce mondial a chuté de 6 % en 1980 à 0,68 % en 2004.
Au demeurant, plus d'un demi-siècle après la vague des indépendances de 1960, les impasses du développement africain ne peuvent être toutes imputées exclusivement au colonialisme et au néo-colonialisme. Quelques comparaisons internationales, avec de nombreux pays d'Asie par exemple, suffisent à discréditer cette approche. Beaucoup s'accordent pour tenter d'analyser avec lucidité les causes endogènes des "malheurs" africains afin de parvenir à mieux les surmonter.
Longtemps envisagé comme un rapport entre des espaces (relation de domination d'un État sur un autre), le colonialisme est aujourd'hui de plus en plus considéré sous l'angle des rapports entre les individus entre eux à l'intérieur d'une société. Le « colonisé », aujourd'hui, n'est plus l'habitant d'une colonie, mais la personne assignée à une position dominée en raison de son appartenance ethnique, raciale ou religieuse.
(Coll.) mises à jour : octobre 2016, juin 2020.
No publisherMondes arctiques, espaces, populations, sociétésAfriques : dynamiques régionalesAfrique subsaharienne : territoires et conflits2013-01-11T13:02:51ZPloneGlossaryDefinitionConflictualité
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Alors que la guerre est censée être un état de fait manifeste et perceptible par tous, le terme de conflictualité, souvent au pluriel, permet de rendre compte des nombreux états intermédiaires existant entre la paix parfaite et la guerre totale.
L’étude de la conflictualité permet d'analyser et caractériser un éventail vaste de situations de violence collective. Elle tire son origine dans la guerre froide, lorsque les deux grandes puissances mondiales se sont opposées et affrontées avec une très grande violence, sans pour autant prendre la forme d’un conflit mondial comme pendant la première moitié du siècle. L’escalade nucléaire, le financement ou le soutien à des coups d’États ou des guérillas, ou encore des guerres localisées dans un théâtre d’opération circonscrit (Vietnam, Afghanistan), ont obligé les spécialistes des relations internationales à repenser la dualité entre guerre et paix.
L’après guerre froide a débouché sur l’étude de nouvelles conflictualités. L’ouverture ou la confirmation de nouveaux espaces de conflits (cyberespace, usage militaire de l’espace…) et l’apparition de nouvelles formes de conflictualités (conflits asymétriques, terrorisme, guerre de l’information, cyberguerre, guerre économique…) ont renouvelé les questionnements sur l’étude des guerres et des conflits.
Une partie des auteurs insiste sur la diminution globale du niveau moyen de violence, en établissant par exemple que le nombre de morts provoqué par les conflits armés diminue tendanciellement sur le temps long. Pour d’autres, cette réalité masque en fait une normalisation de la violence : des formes moins évidentes de violence (violence de la menace nucléaire par exemple) ont transformé la conflictualité, l’ont intégrée aux mentalités, sans la faire disparaître pour autant. L’apparent état de paix perpétuelle ne serait pas simplement troublé par des conflits localisés, mais masquerait en réalité un état permanent de conflictualité. La baisse du nombre de morts dans les conflits s’explique aussi par la doctrine du « no boots on the ground » (qu’on peut traduire par « aucun soldat sur le terrain ») pratiquée par les grandes puissances (qui privilégient des frappes ciblées ou des opérations menées par les forces spéciales) et par les progrès de la médecine : la mesure de la conflictualité basée sur le nombre de morts oublie les blessés et les victimes de séquelles psychologiques. Or le nombre de morts par an est le principal indicateur permettant de qualifier l’intensité d’un conflit (seuls ceux de la plus forte intensité étant considérés comme des « guerres »), même si les organismes de recherche spécialisés dans cette question ne fixent pas les mêmes seuils (David et Rapin, 2018, p. 30).
(JBB) mars 2019.
Références
- Charles-Philippe David et Alexis Rapin, « Quantifier l’inquantifiable : de la mesure de la guerre », in Benoît Pelopidas et Frédéric Ramel (dir.), Guerres et conflits armés au XXIe siècle, Presses de Sciences Po, 2018. Pour compléter
- Ninon Briot, Jean-Benoît Bouron et Pauline Iosti, « Les frontières disputées et conflictuelles dans le monde », carte à la une de Géoconfluences, décembre 2021.No publisherRisques et sociétésAfrique subsaharienne : territoires et conflits2021-12-15T07:44:58ZPloneGlossaryDefinitionConflit
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Dans leur ouvrage Géographie des conflits, Amaël Cattaruzza et Pierre Sintès (2011) proposent la définition suivante du mot « conflit » : « situation relationnelle structurée autour d’un antagonisme » (p. 15) ; cette situation serait caractérisée par « la présence de forces opposées, […] un désaccord, […] une rivalité ou à une inimitié » (p. 15). Par ailleurs, ces auteurs rappellent que « les conflits peuvent avoir différentes formes et être considérés selon leur degré de gravité ou selon la profondeur des dissensions entre les différents acteurs » (p. 15).
La notion de « conflit » serait privilégiée à celle de controverse par la recherche géographique en France sur les situations conflictuelles. Si les définitions et les typologies de conflits sont nombreuses dans la littérature scientifique contemporaine (Lecourt 2003 ; Dziedzicki 2003), l'ensemble des travaux s'inscrit dans la lignée du sociologue Georg Simmel (1995), décrivant les situations conflictuelles comme des formes positives de socialisation et non comme des pathologies sociales (Lascoumes 2001). Amaël Cattaruzza et Pierre Sintès (2011, p. 10) soulignent que « depuis plusieurs années, l’étude des conflits connaît un regain d’intérêt ». D’une part, l’engouement des sciences humaines et sociales pour l’étude des conflits s’expliquerait par des relations géopolitiques de plus en plus complexes à l’échelle mondiale depuis la fin de la Guerre Froide. D’autre part, il serait lié à l'émergence de nouveaux mouvements sociaux, à des conflits environnementaux (Charlier 1999) ou d'aménagement (Lecourt 2003) capables d'inverser des rapports de force et de bloquer des projets d'aménagement (Darly et Torre 2008).
En amont du conflit, des « tensions » peuvent être analysées (Depraz 2016) : « la tension sociale peut être définie comme la manifestation (verbale, symbolique) de jeux d’opposition n’ayant pas encore produit de démonstrations effectives et collectives de refus ». Plutôt que de s’intéresser à la formation d’un « système d’action » (Melé et al. 2004), les géographes étudiant les tensions sociales chercheraient à « mettre à jour les potentiels conflictuels dans le débat public, sans certitude de leur manifestation effective à terme » (Depraz 2016).
Silvia Flaminio, février 2017.
Pour compléter avec Géoconfluences
- Clara Loïzzo, « La crise en mer Rouge, révélatrice de la vulnérabilité des grandes routes maritimes mondiales », Géoconfluences, janvier 2024.
- Ninon Briot, Jean-Benoît Bouron et Pauline Iosti, « Carte à la une. Les frontières disputées et conflictuelles dans le monde », Géoconfluences, décembre 2021. Pour aller plus loin
- Cattaruzza, Amaël, et Sintès, Pierre. 2011. Géographie des conflits. Paris, Bréal.
- Cattaruzza, Amaël, et Sintès, Pierre. 2016. Géopolitique des conflits. Paris, Bréal.
- Charlier, B. 1999. La défense de l’environnement: entre espace et territoire. Géographie des territoires environnementaux déclenchés en France depuis 1974. Thèse de doctorat. Pau, Université de Pau et des Pays de l’Adour.
- Darly, Ségolène, et Torre, André . 2008. « Conflits liés aux espaces agricoles et périmètres de gouvernance en Ile-de-France ». Géocarrefour 83 (4): 307–319.
- Depraz, Samuel. 2016. « Introduction générale : Pourquoi et comment travailler l’acceptation sociale dans les territoires ? » Acceptation sociale et développement des territoires, dirigé par Samuel Depraz, Ute Corenc, et Ulrike Grabski-Kieron. Lyon, ENS Éditions.
- Dziedzicki, Jean-Marc. 2004. « Au-delà du Nimby: le conflit d’aménagement, expression de multiples revendications ». Conflits et territoires, dirigé par Patrice Melé, Corinne Larrue, et Muriel Rosemberg. Tours, Presses Universitaires François Rabelais, 34–64.
- Lecourt, Arnaud. 2003. Les conflits d’aménagement: analyse théorique et pratique à partir du cas breton. Thèse de doctorat. Rennes, Université Rennes 2.
- Melé, Patrice, Larrue, Corinne et Rosemberg, Muriel. 2004. Conflits et territoires. Tours, Presses Universitaires François Rabelais.No publisherLa France : des territoires en mutationMobilités, flux et transportsLa frontière, discontinuités et dynamiquesAfrique subsaharienne : territoires et conflits2024-03-08T15:42:40ZPloneGlossaryDefinitionConsensus de Washington
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Le « Consensus de Washington » est un accord tacite visant à conditionner les aides financières aux pays en développement à des pratiques de bonne gouvernance telles que définies par le Fonds Monétaire International et la Banque mondiale. Ces « bonnes pratiques » d'inspiration fortement néo-libérales ont été formalisées en 1989 par John Williamson. Elles visent notamment à la dérégulation de l'économie. Elles ont ensuite été vivement critiquées pour les conséquences dramatiques qu'elles ont pu avoir dans les pays où ces politiques ont été appliquées avec le plus de rigueur.
Les dix recommandations de John Williamson (1989)
- Discipline budgétaire stricte (équilibre des dépenses et des recettes),
- Réorientation de la dépense publique (vers des secteurs de forts retours économiques sur investissements, diminution des inégalités de revenu),
- Réforme fiscale (élargissement de l'assiette fiscale, diminution des taux marginaux),
- Stabilité monétaire (inflation faible, réduction des déficits du marché, contrôle des réserves d'argent),
- Adoption d'un taux de change unique et compétitif,
- Libéralisation du commerce extérieur,
- Élimination des barrières à l'investissement direct étranger,
- Privatisation des entreprises publiques (pour une meilleure efficacité et pour réduire l'endettement),
- Dérèglementation des marchés (fin des barrières à l'entrée ou à la sortie),
- Prise en compte des droits de propriété (incluant la propriété intellectuelle).
Source : La Toupie
No publisherAfriques : dynamiques régionalesAfrique subsaharienne : territoires et conflits2017-07-13T09:40:12ZPloneGlossaryDefinitionCorne de l'Afrique
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L'expression "corne de l'Afrique" désigne cette péninsule de l'Est africain, à la forme évocatrice, qui s'étend au sud du golfe d'Aden. Par extension elle forme un ensemble régional dans lequel sont en général rangés : l'Éthiopie, l'Érythrée, la Somalie et Djibouti. Sa situation, au débouché de la mer Rouge, en fait une zone sensible dans le contexte géopolitique mondial contemporain. À Djibouti, la France et les États-Unis entretiennent des bases militaires permanentes.
Cette région fut longtemps un des théâtres africains de la Guerre froide, avec des retournements spectaculaires d'alliances et des conflits cristallisés autour de la maîtrise des territoires de l'Ogaden et de la revendication indépendantiste de l'Erythrée.
À partir de 1990, si les affrontements directs entre les États se sont atténués, certaines crises ont pu légitimer des interventions externes dans la région : par exemple, de la part de la France, au nord de Djibouti après la rébellion des Afars. L'État somalien s'est effondré sous la pression de factions armées, la famine qui a suivi légitimant alors l'opération multinationale Restore Hope de l'ONU (1992 - 1994). Une tentative de reconstitution de l'État somalien est en cours, le nord du pays (Somaliland) bénéficiant d'une autonomie de fait.
Entre Éthiopie et Érythrée une situation de guerre l'emporte depuis 1998, générant des combats très meurtriers. L'ONU, plus particulièrement la Mission des Nations unies en Éthiopie et en Érythrée (MINUEE) en place depuis juillet 2000, semble largement impuissante.No publisherAfriques : dynamiques régionalesAfrique subsaharienne : territoires et conflits2013-01-11T12:28:01ZPloneGlossaryDefinitionCoupeurs de route
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Les tensions territoriales sont aussi entretenues et aggravées en Afrique subsaharienne par les problèmes d'insécurité et par les obstacles à la circulation sur les routes ou les pistes. On désigne souvent par l'expression (vulgarisée par la presse au cours des années 1990) de "coupeurs de route" ceux qui contribuent à entraver les mobilités, les échanges et les investissements licites mais qui vivent au contraire des opportunités d'un large secteur informel florissant. Cette activité est liée à l'affaiblissement généralisé de l'État de droit et à l'aggravation de la corruption associant gardiens de l'ordre et délinquants. En voici un exemple, dans l'ensemble régional du lac Tchad, décrit par Janet Roitman* :
"Un trajet sur les routes qui relient les différents États-nations du bassin du lac Tchad est une expédition fort hasardeuse. On est sans cesse obligé de faire des embardées et de négocier des virages pour éviter des cratères sur les quelques axes goudronnés, de contourner des ornières et des trous sur les pistes poussiéreuses. Certaines régions sont particulièrement périlleuses : on y est à la merci d’une rencontre avec les nombreux gangs armés qui sillonnent les routes à la recherche d’argent et de biens de valeur, érigeant des barrages routiers, brandissant des fusils faits maison et surtout des kalachnikovs. Bien qu’opérant dans des espaces bien délimités, ces "gangs de grand chemin", connus localement sous le nom de "coupeurs de route", sont perçus comme un phénomène régional lié à des flux transnationaux. Y participent des nationaux de tous les pays du bassin du lac Tchad – Nigérians, Camerounais, Tchadiens et Centrafricains (peut-être aussi des Nigériens, des Sénégalais et des Soudanais itinérants). Connectés aux marchés régionaux et internationaux d’armes légères et de fausse monnaie, ces "bandits" s’insèrent dans un réseau d’échanges économiques et de relations de travail qui est à la base d’un important mode d’accumulation dans la région. Ce dernier, s’étendant au-delà des formes violentes d’appropriation, est également composé d’une foule d’activités économiques non régulées qui ont transformé la brousse et les frontières internationales en un espace de grand business et couvrent aussi bien la contrebande de quincaillerie, d’électronique et de tissus que le commerce d’essence sur le marché noir, de 4 x 4 volés, d’ivoire, de cornes de rhinocéros et d’or. (...)
Ce phénomène a été exacerbé par la chute des prix des matières premières comme le coton et l’arachide sur les marchés mondiaux, et par les recompositions récentes dans la production industrielle, privilégiant les marchés du travail de l’Asie du Sud-Est, de l’Asie du Sud et de l’Amérique latine. D’où la migration massive de nombreux "réfugiés économiques" vers ces espaces frontaliers, où ils sont employés comme transporteurs, gardes, guides et porteurs dans le commerce non régulé, puis l’arrivée des "réfugiés militaires" nés des programmes de démobilisation et de l’incapacité des armées nationales à subvenir aux besoins de leur personnel. (...) Souvent, ils "entrent en brousse", comme ils disent (...). Ce mouvement d’hommes a transformé les régions frontalières et les périphéries de certaines villes, aujourd’hui tachetées de campements, d’entrepôts ou de dépôts et de points d’éclatement. Bien qu’inscrits sur les marges, ces espaces ne sont nullement marginaux. À l’instar des activités qu’ils hébergent, ils reposent en grande part sur des relations commerciales et financières qui les relient aux villes. Ils sont nés, et dépendent, du lien militaro-commercial, qui est particulièrement bien saisi par le lieu et la métaphore de la garnison-entrepôt. En tant que matérialité, la garnison-entrepôt concentre et résume à elle seule, en effet, le lien militaro-commercial. Bien qu’ils fassent sans aucun doute partie des plus démunis, ceux qui sont impliqués dans ces activités sont très souvent financés et encadrés par le personnel militaire, les douaniers, les gendarmes, les riches marchands et les chefs locaux (...)" - D'après Janet Roitman (CNRS-MALD) - "La garnison-entrepôt, une manière de gouverner dans le bassin du lac Tchad" - Centre d'études et de recherche internationales, Sciences Po - Critique internationale, n°19, avril 2003 : http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=CRII_019_0093
- Autour du lac Tchad, intégrations et désintégrations - dossier de Politique africaine dossier réalisé avec le soutien du Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest / OCDE, n° 94, juin 2004 :
www.politique-africaine.com/numeros/094_SOM.HTM
- Mutations africaines dans la longue durée (MALD / CNRS, UMR 8054) : http://mald.univ-paris1.fr/index.htmNo publisherAfrique subsaharienne : territoires et conflits2013-01-11T13:00:45ZPloneGlossaryDefinitionDécoupage frontalier issu de la (dé)colonisation
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/decoupage-frontalier
Le discours qui consiste à souligner, pour le déplorer, le caractère artificiel et arbitraire du découpage colonial ne mène pas loin même s'il ne faut pas perdre de vue que la balkanisation coloniale et post-coloniale de l'Afrique a une part de responsabilité dans les crises qui agitent le continent. Mais, plus que le tracé des frontières, c'est le modèle étatique d'encadrement de l'espace et de la société qui a bouleversé l'Afrique. Par ailleurs si la détermination des frontières africaines, issue de la colonisation, a pu paraître arbitraire, elle ne s'est pas faite sans principes ni logiques. La partage de l'Afrique congolaise, par exemple, a mis en jeu une représentation naturaliste du monde liée à la théorie des bassins hydrographiques. C'est ainsi que le bassin de l'Ogooué donne, dans l'ensemble, une unité formelle au Gabon. Il est intéressant de voir comment une unité plutôt abstraite, dérivant d'un naturalisme indifférent au substrat humain, a pu servir de fondement à une entité territoriale revendiquée aujourd'hui comme nation. L'État colonial, puis l'État indépendant qui en a poursuivi l'action, ont, à travers leur action administrative et organisatrice, "produit du territoire", nouveau modèle de contrôle social surimposé aux anciens modes de relation socio-spatiales. R. Pourtier*, à propos du Gabon, s'interroge en ces termes : "Pourquoi le Gabon, comment le Gabon ? Que signifie cette figure spatiale, espace clos dont la carte atteste l'indubitable réalité ? Quels sont les fondements de son identité ? Par quelles mutations une étendue forestière inorganique est-elle devenue territoire d'État ? Comment s'est effectué le passage d'un espace fluide à un espace encadré ? Ce ne sont pas des questions académiques car on s'aperçoit que les transformations socio-spatiales résultent, pour une part déterminante, de la dynamique, largement exogène, de l'État." On notera que les "frontières chaudes", conflictuelles, ne sont pas une spécialité de l'Afrique et ne sont pas générales en Afrique. On y rencontre plus souvent des espaces vides, sans fonctions, où l'État est peu présent ainsi que des espaces transfrontaliers perméables aux échanges licites ou illicites. Mais les groupes ethniques transfrontaliers ne constituent pas, le plus souvent tout au moins, une remise en question du contour des États. Contrairement à ce que prétendent certains analystes, les frontières africaines en général ne sont pas globalement contestées même si l’idée de redessiner l’Afrique a toujours des adeptes. Certes, les découpages frontaliers voulus par les colonisateurs pour des raisons économiques, militaires et stratégiques, peuvent paraître inadaptés aux réalités du peuplement et de la mobilité. La délimitation, orthogonale à la côte, du territoire de certains pays côtiers correspondait à la volonté de drainer les richesses vers les ports (Ghana, Côte d’Ivoire, Nigeria, Cameroun), ou à celle de donner aux zones sahéliennes un débouché sur la mer (Bénin, Gambie, Togo). Ce découpage avait été dicté par la Conférence de Berlin (1885) au cours de laquelle les grandes puissances européennes s'étaient partagé le continent. De tels "espaces couloirs", de petite taille et sans réelle homogénéité, posent problème et les États sahéliens, vastes et peu peuplés ont des difficultés à assumer leur souveraineté nationale et à freiner les velléités indépendantistes. Mais, malgré tout, ces frontières sont désormais stabilisées, à la suite d'une Conférence de l’OUA (devenue l'UA) de 1964, qui, dès les débuts des indépendances et craignant l'implosion du continent, a réaffirmé l’intangibilité des frontières. Cette charte de 1964 a cependant été écornée une fois, en 1993, lorsque l'Érythrée a fait sécession avec l'Éthiopie. Il apparaît plutôt aujourd'hui qu'au-delà des États, l'avenir de l'Afrique passe par des formes de concertation et d'organisation régionales supra-nationales. Les frontières étatiques, en Afrique comme ailleurs, sont en partie subverties par les logiques de la globalisation, par les flux "invisibles" licites et illicites et par les impératifs d'actions d'ingérence aux contours discutés.
- Dans ce dossier,
par Christian Bouquet, "La crise ivoirienne par les cartes"
par Eric Bordessoule, "L’État-nation en Afrique subsaharienne"
- Roland Pourtier - Derrière le terrain, l'État - Histoires de géographes, textes réunis pas Chantal Blanc Pamard - Éditions du CNRS - 1991No publisherLa frontière, discontinuités et dynamiquesAfrique subsaharienne : territoires et conflits2024-02-20T10:23:19ZPloneGlossaryDefinitionDéveloppement (économique)
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/developpement-economique
Le concept de développement désigne l’ensemble des transformations techniques, sociales, territoriales, démographiques et culturelles accompagnant la croissance de la production. Il traduit l’aspect structurel et qualitatif de la croissance et peut être associé à l’idée de progrès économique et social.
Après avoir privilégié la seule croissance de la production de richesses par des indicateurs comme le PIB, le concept de développement s'est élargi pour inclure différentes dimensions constitutives du bien-être, voire du bonheur : l'état global de santé des populations, les niveaux d'instruction, d'une manière générale, les conditions de vie.
La réflexion sur les indicateurs pertinents pour mesurer le développement prend de plus en plus en compte la dimension du bien-être (et/ou du bonheur) et il y a profusion d'indicateurs économiques, sociaux et environnementaux qui tentent de l'évaluer, le mesurer.
(ST), 2006.
Pour compléter avec Géoconfluences
- Vincent Capdepuy, « Le Sud global, un nouvel acteur de la géopolitique mondiale ? », Géoconfluences, septembre 2023. Pour aller plus loin
- Sur le site partenaire SES ENS : Peut-on mesurer le bonheur ? Réflexions sur les indicateurs de bien-être. Note au lecteur : les informations contenues ci-dessous n'ont pas été mises à jour depuis 2006. Développement en Afrique Le développement économique et social a partie étroitement liée avec la pacification et l'atténuation des conflits, en Afrique ou ailleurs dans le monde. Parmi les 10 pays en bas de tableau de l'IDH en 2004, neuf ont connu un conflit violent depuis les années 1990.
Le développement peut être mû par des mécanismes endogènes. Mais, dans le cas des pays d'Afrique subsaharienne les plus démunis, divers mécanismes d'aide internationale paraissent indispensables.
L'Onu avait défini en 2000, des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD)* visant à réduire l'extrême pauvreté d'ici à 2015. De nombreux États africains sont concernés. Les fonds nécessaires à leur mise en œuvre doivent être rassemblés pour 2010, l'Aide publique au développement (APD) devrait alors atteindre 130 milliards d'USD (contre 80 en 2004), soit 50 milliards supplémentaires, dont la moitié destinéeà l'Afrique. Mais, selon les derniers engagements pris par les pays développés du G8, il n'est pas précisé si les mesures d'annulation de la dette feront partie de ces montants.
Des mécanismes de taxation redistributive ont également été proposés. Par exemple, le Trésor britannique espère lever 4 milliards d'USD d'ici à 2015 par le biais d'un système de "Facilité financière internationale". Les Français, suivis par les Chiliens et les Britanniques, ont proposé une taxe sur les billets d'avion qui devrait être effective en France pour la mi-2006.
Mais l'aide au développement ne se résume pas aux différentes formes d'aide publique. Les règles des échanges mondiaux définies dans le cadre de l'OMC, ou dans des cadres bilatéraux, peuvent inciter ou, au contraire, freiner, le développement économique des pays les plus pauvres. Les financements privés, par le biais de fondations d'entreprise par exemple, jouent aussi leur rôle (par exemple, la fondation Bill et Melinda Gates, dotée de 30 milliards de dollars, investit beaucoup dans le domaine de la santé et de la lutte contre le sida). Le bilan global est donc délicat à faire.
À moins de 10 ans de l'échéance de 2015, les OMD des pays d'Afrique subsaharienne paraissent souvent loin d'être acquis : 42 des 47 pays concernés ne pourront pas atteindre la moitié d'entre eux et 12 pays ne devraient en atteindre aucun. Au demeurant, la définition de ces objectifs a mobilisé la coopération internationale contre la pauvreté en la dotant d'un contrat collectif et d'un calendrier, premier exemple d'une planification de développement à l'échelle mondiale. La gestion de l'aide a été recentrée sur la recherche de résultats plutôt que sur le suivi des moyens mis en œuvre. Des cercles vertueux d'un développement durable en Afrique pourraient en être favorisés.
La réflexion sur les conditions du développement en Afrique passe aussi par l'examen du couple développement x gouvernance. Comment fonctionne leur corrélation ? Une bonne gouvernance est-elle la condition d'un développement vertueux ou l'inverse ?
La Banque mondiale, dans son dernier rapport sur la "gouvernance mondiale" (2005), a passé en revue 209 pays en fonction de 352 critères provenant de la Banque mondiale elle-même mais aussi de la fondation Freedom House ou du cabinet d'audit PriceWaterhouseCoopers. Son constat est le suivant : l'amélioration des conditions de vie est le résultat d'une meilleure gouvernance et non l'inverse. C'est donc la démocratie qui prime, pas l'économie, du moins pour une majorité de pays car il peut y avoir des exceptions (la Chine ou les pétro-monarchies du Golfe, par exemple, dont les caractéristiques sont à bien des égards particulières). D'une manière générale, une bonne gouvernance, à savoir une redistribution équitable des richesses et des ressources, des transferts raisonnés en faveur de l'éducation, de la santé, débouche sur des conditions de vie meilleures et sur une réduction renforcée de la pauvreté. Les effets sont rapidement efficaces : l'amélioration des droits humains, l'efficacité de l'administration et des régulations publiques, la lutte contre la corruption, le respect de règles de droit ont, d'après le rapport de la Banque mondiale, des résultats en moins de 10 ans.
Rédigé en 2006.
Sur le même thème, voir le glossaire Afrique subsaharienne : territoires et conflits Développement en Chine De 1980 à 2005, le taux de croissance annuel moyen du PIB de la RPC a été d'environ 8%. La Chine, par son PIB de 7 430 milliards d'USD (en parité de pouvoir d'achat), est devenue la cinquième économie mondiale en 2004, après les États-Unis, le Japon, l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France. Et si elle ne pèse encore que 5% dans le PIB mondial, très inférieur au poids de sa population, elle contribue pour 20% à la croissance mondiale (données 2006). Ces chiffres sont à prendre avec précaution et il faut tenir compte de l'importante économie parallèle qui échappe aux statistiques, soit environ 20% d'économie "non-fiscalisée". Certains économistes pensent donc qu'ils sont sous-évalués et que les taux officiels seraient volontairement minorés pour limiter la méfiance et les accusations de surchauffe des partenaires commerciaux de la Chine.
Cette croissance rapide s'explique par un "effet de rattrapage" et elle partage plusieurs points communs avec d'autres "miracles" de la zone Asie-Pacifique (Japon, Corée du Sud, Taiwan, Singapour) : une stratégie de développement industriel volontariste et fondée sur l'ouverture libérale et la conquête des marchés extérieurs, une population travailleuse et économe dont l'épargne finance en partie le développement. Mais la croissance économique chinoise a ses spécificités : c'est avant tout une économie de flux dont l'évolution repose sur une très rapide privatisation et sur la restructuration du secteur étatique.
Un tel rythme de croissance, concernant une population aussi importante, n'est pas sans conséquences : pression sur les ressources (énergie, matières premières) tant à l'échelle régionale que mondiale, dégâts environnementaux, risques de surchauffe, risques d'amplification des disparités. Les goulets d'étranglement traditionnels de l'économie chinoise s'aggravent ainsi qu'en attestent les pénuries énergétiques (fréquentes coupures d'électricité), les engorgements des infrastructures de transport. En l'absence de correctifs adaptés, les tensions induites pourraient provoquer un ralentissement de la croissance chinoise à plus ou moins court terme.
La compétitivité de l'économie chinoise a des composantes contrastées : si elle a un faible coût du travail, elle souffre de facteurs moins favorables en termes de gouvernance, de qualité des infrastructures, de gestion environnementale. Les autorités chinoises mettent, depuis 2003, officiellement du moins, l'accent sur la "qualité de la croissance" et les "respect des grands équilibres", dans les campagnes par exemple. Parallèlement, des efforts importants sont réalisés pour compenser le retard chinois en Recherche & développement : le développement scientifique et technologique est prioritaire dans le cadre du XIe plan quinquennal (2006-2010). La Chine recrute ses meilleurs chercheurs au même niveau de rémunération qu'aux États-Unis et bénéficie du retour d'une diaspora de scientifiques formés dans les laboratoires occidentaux, principalement anglo-saxons ("reverse brain drain"). En 2003, la Chine occupait le cinquième rang mondial pour la production scientifique derrière les États-Unis, le Japon, le Royaume-Uni et l'Allemagne avec 5,1% des publications internationales. Et elle cherche à s'affranchir de sa dépendance à l'égard des brevets étrangers en concevant de nouveaux produits, avec de nouveaux standards, basés sur des brevets chinois.
Rédigé en 2006.
Sur le même thème, voir le glossaire La Chine entre espaces domestiques et espace mondial
Développement en Russie La croissance du PIB russe est soutenue : selon le FMI, elle devrait atteindre 6% du PIB en 2004 (7,3% en 2003 et 4,7% en 2002). De 1998 à 2003, le PIB a augmenté en Russie de 25%, les investissements de 35% et la production agricole de 20%. Cette croissance est largement tirée par l'effet des recettes d'exportation, résultat du renchérissement des prix des hydrocarbures et de l'ensemble des matières premières sur les marchés mondiaux. Les secteurs pétrolier et gazier contribuent à environ 12% du PIB et 1/5e de la croissance serait exclusivement due à la hausse des cours du pétrole (données 2003). Cette rente a également permis de ramener la dette publique à 33% du PIB (contre plus de 98% en 1998). Notons aussi qu'une part non négligeable de l'économie russe relève du secteur informel, échappant donc tout à la fois aux statistiques et à l'impôt.
Mais la croissance n'est pas le développement. La dynamique d'un réel développement de la Russie n'est pas encore enclenchée. Si l'on se reporte à l'indicateur de développement humain (IDH), qui donne une mesure plus globale du niveau de bien-être, le recul de la Russie est notable : elle occupait le 34e rang en 1991, mais le 71e en 1997, se situant alors derrière la Belarus, pour revenir au 57e en 2003 (0,795).
L'économie russe n'a pas encore acquis une dynamique propre combinant production et consommation domestiques. L'exploitation de la rente énergétique place l'État dans une situation de dépendance et de vulnérabilité aux variations des cours des matières premières, d'autant plus que les recettes fiscales tirées de la vente de ces ressources alimentent en grande partie le budget fédéral. Drainant l'essentiel des investissements (75%), le secteur énergétique tend à brider le développement des autres secteurs d'activité (ce que les économistes appellent le "syndrome hollandais"). L'économie domestique n'est, de ce fait, pas en mesure de répondre à la demande intérieure, en particulier en matière de biens de consommation courante, ce qui favorise les importations.
Rédigé en 2005.
Sur le même thème, voir le glossaire Russie : des territoires en recompositions
No publisherGéographie critique des ressources : énergies, matières, foncierLa Russie : des territoires en recompositionDéveloppement, inégalités, richesse et pauvretéLa Méditerranée, une géographie paradoxalegénéralLa Chine, la modernisation encadrée d'un territoire globalL'Amérique latine : émergence, inégalités, défisAfrique subsaharienne : territoires et conflits2023-09-25T14:37:01ZPloneGlossaryDefinitionEnfants soldats
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/enfants-soldats
Le nombre des enfants recrutés ou utilisés par les groupes et forces armés dans le monde est estimé à 250 000 en 2007. En Afrique, en 2007, ils étaient estimés à 27 346 en RDC, 20 000 en Ouganda, 16 400 au Soudan, 11 780 au Liberia, 3 200 en Angola, 3 015 au Burundi, 1 194 en Côte d'Ivoire, 360 en Somalie, etc. Plusieurs pays bénéficiaient de programmes de prise en charge par l'ONU/UNICEF des enfants démobilisés : Côte d'Ivoire, Somalie, Soudan, Ouganda, Rwanda, Burundi, RDC, Angola.
La communauté internationale s'est progressivement mobilisée sur ce problème : le 26 août 2006 a marqué le dixième anniversaire du rapport des Nations Unies intitulé "L’impact des conflits armés sur les enfants" (A/51/306), souvent appelé "Rapport Machel", du nom de Mme Graça Machel, experte du Secrétaire général. Le rapport de 1996 proposait un programme d’action général pour améliorer la protection des droits des enfants et leur traitement dans les situations de conflits. En dix ans, au plan mondial, des progrès ont été réalisés pour favoriser l’application, sur les territoires de conflits armés, des normes et des critères internationaux en matière de protection de l’enfance. Ainsi, l’adoption des "Principes du Cap" (1997) sur le recrutement des enfants a établi les normes que devaient respecter les groupes armés engagés dans les conflits, complétés par les Protocoles facultatifs (2000) de la Convention relative aux droits de l’enfant (1989). Parallèlement, des programmes de démobilisation et de réintégration comprennent des mesures spéciales pour les enfants, et les violations des règles relatives au recrutement des enfants font l’objet de poursuites auprès des tribunaux internationaux et d’actions en justice. Un Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés à l'ONU a été constitué. L’adoption récente (2005) de la résolution 1612 du Conseil de Sécurité donne mandat au Secrétaire général d’instituer un mécanisme de surveillance et de communication de l’information sur les violations graves des droits des enfants, accentuant de façon significative la pression internationale.
À l'initiative de l'Unicef, une "Conférence internationale consacrée aux enfants associés aux groupes et forces armés" a élaboré des "Principes de Paris" (5-6 février 2007) qui actualise les "Principes du Cap" en incitant à l’élaboration de nouveaux programmes de libération, de protection et de réinsertion des enfants soldats. Elle définit ainsi le cadre d’une intervention efficace sur le terrain à la lumière des expériences acquises depuis dix ans.
(ST) 2008
Pour compléter - le site de l'ONU sur les enfants et les conflits armés : http://childrenandarmedconflict.un.org/fr/
Proposition d’examen stratégique du "Rapport Machel", L’impact des conflits armés sur les enfants (11- 2006) : http://childrenandarmedconflict.un.org/fr/qui-sommes-nous/les-rapports-machel/
- L'Unicef : http://www.unicef.fr/contenu/tags/enfants-soldats
- La résolution 1612 du Conseil de sécurité : http://www.un.org/french/documents/view_doc.asp?symbol=S/RES/1612(2005)
- Jean-Hervé Jezequel : "Les enfants soldats d’Afrique, un phénomène singulier", article publié initialement dans la revue Vingtième siècle. Revue d’histoire, n°89, janvier-mars 2006 :
www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/0605-JEZEQUEL-FR-2.pdf
- Coalition to stop the use of Child Soldiers : www.child-soldiers.org
- À lire : Ahmadou Kourouma, Allah n’est pas obligé, Éditions du Seuil, 2000. Compte-rendu dans le volume 35, n°1 (2003) des Études littéraires, "Afrique en guerre" :
lhttp://www.erudit.org/revue/etudlitt/2003/v35/n1/008631ar.htmlNo publisherAfrique subsaharienne : territoires et conflits2013-01-11T12:29:11ZPloneGlossaryDefinitionEnvironnement, environnements
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/environnement
Environnement en Afrique | Environnement au Brésil | Environnement en Chine | Environnement en Russie
L'environnement traite de la combinaison des éléments naturels (le champ de forces physico-chimiques et biotiques) et socio-économiques qui constituent le cadre et les conditions de vie d'un individu, d'une population, d'une communauté à différentes échelles spatiales. Ce vieux mot français qui vient du verbe « environner », dans le sens d'« entourer », qui évoque le contour, la totalité, les environs d'un lieu, a été employé par un certain nombre de géographes comme synonyme de « milieu géographique », par exemple chez Élisée Reclus ou plus tard chez Albert Demangeon. Si les deux termes sont opposés sur le plan de la géométrie, ils ont une signification proche en géographie.
L'une des définitions de l'Union européenne est : « l'ensemble des éléments qui dans la complexité de leurs relations constituent le cadre, le milieu et les conditions de vie pour l'homme ». En droit français de l'environnement, le terme recouvre la nature, c'est-à-dire les espèces animales, végétales, les équilibres biologiques et les ressources naturelles (eau, air, sol, mines) ainsi que les sites et les paysages (loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ; loi du 19 juillet 1976 concernant les installations classées pour la protection de l'environnement, première loi à utiliser le terme dans son titre). Cette approche plus restrictive incite à parler de "géo-environnement" qui met l'accent sur les lieux et les formes d'inscription des groupes humains : ils agissent sur l'environnement et leurs actions entraînent des effets de chaîne, des rétroactions positives ou négatives. Une Charte de l'environnement est désormais adossée à la Constitution française.
D'autres disciplines enseignées sont partie prenante dans l'approche environnementale : les sciences de la matière (physique, chimie), les sciences de la vie et de la Terre (biologie, géologie, géophysique, climatologie), les sciences humaines (anthropologie, sociologie), les sciences économiques et juridiques. Pour la géographie, les sociétés humaines et leurs aménagements sont parties intégrantes de l’environnement.
Aujourd'hui, la géographie tend de plus en plus à substituer au singulier le pluriel « les environnements » : c'est à la fois une manière d'insister sur leur diversité pour éviter d'essentialiser la nature, et un moyen de rappeler la nécessité d'une démarche multiscalaire : l'environnement de l'échelle locale n'est pas celui de l'échelle nationale et encore moins celui de l'échelle mondiale. La Géographie de l'environnement de Paul Arnould et Laurent Simon (dir., 2007) est ainsi devenue une décennie plus tard la Géographie des environnements (2018).
(ST) largement inspiré d'Yvette Veyret, Géo-environnement, Sedes, coll. Campus, 1999.
Dernière mise à jour (JBB) : septembre 2020.
Pour compléter avec Géoconfluences
- Yves-François Le Lay, Émeline Comby et Jean-Benoît Bouron, « Notions en débat. Milieu, environnement et nature », Géoconfluences, novembre 2023. Environnement en Afrique (2005) Les dégradations environnementales peuvent être, tout à la fois, cause et conséquence de situations conflictuelles. La raréfaction de ressources comme l'eau, le bois, cristallisent les conflits locaux et régionaux. La protection de la biodiversité suppose des arbitrages délicats entre des enjeux parfois contradictoires susceptibles de déboucher sur des situtations de violence nécessitant des moyens de surveillance, de contrôle et d'encadrement dont beaucoup d'États ne disposent pas.
Le paradigme de la "conservation" et de la protection de la biodiversité oppose parfois les perceptions qu'en ont pays du Nord et du Sud (Pierre Jacquet). Le lien entre biodiversité et développement est complexe, ambigu et met en jeu une double tension. Entre les individus tout d'abord : la collectivisation de la ressource empêche son utilisation par d'autres et l'apprentissage social de l'action collective, dans laquelle chacun accepte de perdre un peu pour que tous gagnent beaucoup, est insuffisant. Entre le court terme et le long terme ensuite : si l'extinction de la ressource prive l'individu ou les générations futures de son utilisation ultérieure, pour les sociétés les plus pauvres, l'urgence du court terme occulte les enjeux de moyen et plus long terme. Interdire l'exploitation pour empêcher la surexploitation entre en conflit avec l'objectif de développement et de réduction de la pauvreté dans des pays où la ressource naturelle reste l'atout essentiel.
Les "projets participatifs" mis en place autour des aires protégées impliquent les populations dans la recherche d'une répartition équitable des contraintes et des bénéfices de la protection environnementale. Les programmes de gestion concertée de la forêt du bassin du Congo étendent cette approche à des zones d'exploitation forestière et des programmes de "pêche durable" reposent sur des principes similaires. L'élaboration d'une gouvernance mondiale pourrait progressivement faciliter la production de biens publics tels que la biodiversité. Elle peut justifier l'attribution de financements compensatoires au profit des pays les plus démunis. Ainsi, à Kinshasa, en 2005, une première conférence sur la survie des grands singes menacés d'extinction a décidé de la mise en place de "plans nationaux" de sauvegarde financés par divers pays donateurs.
(ST) 2005.
- Martin Luther Djatcheu, « Fabriquer la ville avec les moyens du bord : L’habitat précaire à Yaoundé (Cameroun) », Géoconfluences, septembre 2018.
- Bernadette Mérenne-Schoumaker, « Afrique du Sud, les défis énergétiques et miniers d'un pays émergent », Géoconfluences, janvier 2018.
- Géraud Magrin, « Orpaillage illégal au Fitri (Tchad central) », image à la une de Géoconfluences, octobre 2017.
- Léa Benoît, Bernard Calas, Sylvain Racaud, Olivier Ballesta et Lucie Drevet-Demettre, « Roses d'Afrique, roses du monde », Géoconfluences, septembre 2017.
- Fabrice Folio, Que nous apprennent les initiatives écotouristiques en Afrique australe ? Leçons d’expériences croisées en Afrique du Sud et au Mozambique, 2011 Environnement au Brésil C'est au Brésil, à Rio de Janeiro, en 1992, qu'a été adoptée la première Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et que fut médiatisée à l'échelle mondiale la notion de développement durable ... tout un symbole ! Plus de quinze ans après cette conférence, où en est le Brésil lui-même ?
Derrière les tonnages produits et sa place dans les exportations mondiales, le dynamisme conquérant du système agroalimentaire brésilien ne va pas sans poser des problèmes environnementaux. Quel en est le prix ? Déforestation, pollution de l'eau, dégradation de la biodiversité, ..., les problèmes sont divers mais attirent l'attention de manière inégale. La situation de l'Amazonie et de sa déforestation est certainement celle qui focalise le plus l'attention des ONG et des médias. Mais le déboisement des derniers lambeaux de la "Mata atlantica", la forêt littorale atlantique, est largement ignoré. Les menaces de drainage et de pollution de la vaste zone humide du Pantanal, aux conséquences importantes, intéressent peu ainsi que la désertification du Nordeste, qui, après avoir attiré l'attention au cours des années 1970, fait également moins recette.
Mais la pression exercée par les ONG nationales brésiliennes ou internationales gagne progressivement en efficacité. Ainsi, l'action des Procureurs de l'environnement (Procuradores do meio ambiente) est assez puissante dans différents États. Certaines ONG ont recours aux résultats de la recherche universitaire pour nourrir leurs constatations et leurs propositions.
Différents types d'actions gouvernementales, telle celle menée à travers le Programa Piloto para a Proteção das Florestas Tropicais do Brasil (PPG7), visent à contrôler les avancées pionnières et à en limiter les dégradations environnementales. Fondé en 1992 et toujours en vigueur en 2006, le PPG7 est financé par des dons des pays du G7 (devenu G8) et piloté par le gouvernement brésilien. Il vise à protéger les forêts tropicales de déboisements massifs et rapides par la diffusion et la vulgarisation des connaissances et des techniques de gestion des ressources. Il se décline en plusieurs programmes localisés dont la majorité visent l'État du Pará.
- Marion Daugeard et François-Michel Le Tourneau, « Le Brésil, de la déforestation à la reforestation ? », Géoconfluences, octobre 2018.
Environnement en Chine (2016) Le rythme du développement économique en Chine est tel qu'il ne peut manquer d'engendrer des problèmes environnementaux, parfois graves, et qu'il en hypothèque certaines dynamiques. Tout d'abord, la pression sur les ressources nationales ou mondiales est intense, en proportion de ses immenses besoins actuels et prévisibles. Pour l'ensemble du pays, les coûts liés à la pollution représenteraient, selon les estimations, de 8 à 15 % du PNB chinois. La Chine est devenue, en 2006, le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre devant les États-Unis. Selon la Banque mondiale, ses émissions par habitant (6,7 t pour 2011-2015) sont inférieures à celles d’un Américain (17) mais supérieure à celles d’un Français (5,2). La concentration en particules fines (PM 2,5) lors des crises comme à Pékin en novembre et décembre 2015 peut être plus de cinquante fois supérieure aux recommandations fixées par l’OMS.
Si certains événements, très médiatisés, mobilisent l'attention internationale (par exemple, la disparition probable du dauphin d'eau douce du Yangzi, le "baiji", déesse du fleuve), ils ne doivent pas faire oublier les problèmes d'un quotidien, trop banalisés, où les catastrophes industrielles et minières se succèdent. La disparition des terres arables semble prendre une ampleur inquiétante. Les statistiques officielles font état d'une expansion des espaces désertiques de 9 800 km² par an et en Chine du Nord, la désertification progresse provoquant des vents de sable chaque printemps sur Pékin : des opérations de reboisement conséquentes ont dû être engagées. En y ajoutant les affectations des terres au profit de l'expansion urbaine et des différentes zones d'activité et de loisirs qui lui sont associées, les terres arables ne représentent plus que 123 millions d'ha soit 12,8 % de la superficie totale de la Chine. Par habitant, elle atteint à peine 40 % de la moyenne mondiale, ce qui donne une idée de la tension croissante entre population et ressources disponibles. 20 % des terres agricoles sont contaminées. Par ailleurs, parce qu'elles accueillent les usines les plus polluantes et les moins scrupuleuses, les campagnes chinoises font face à une crise écologique aigüe, cause de fréquents mouvements de protestation. Les rejets industriels sont à l'origine de nombreuses affaires de santé publique, parfois dénoncées par les médias et les organisations de la société civile, lorsqu'elles parviennent à se faire entendre.
La gestion de la ressource en eau est un autre défi majeur. Avec 7 % seulement des réserves en eau de la planète pour le quart de sa population, la Chine n'arrive pas à faire face : les deux tiers des villes chinoises subissent des pénuries d'eau, et les coupures d'eau sont monnaie courante (deux millions de personnes dépendant de l'eau du lac Taihu dans le bas Yangzi ont été privées d'eau courante pendant plusieurs semaines en 2007). La pollution de l’eau reste un problème majeur. Ainsi près de trois quarts des lacs et rivières chinois sont hautement pollués, et la vie aquatique a disparu de plusieurs fleuves et cours d’eau. La pollution est aussi élevée le long des côtes, et oblige les pêcheurs à abandonner leur métier ou à aller pêcher toujours plus au large. Près de 60 % des nappes phréatiques sont polluées et ne peuvent servir à la consommation humaine. Enfin, contrairement au Japon ou à la Corée du Sud, l’eau du robinet n’est pas potable en Chine, et ce même dans les villes les plus développées telles que Pékin ou Shanghai. Cette mauvaise qualité de l'eau est due à de multiples causes dont les rejets industriels et l’utilisation massive de produits chimiques dans l’agriculture.
La culture du secret entretenue en Chine a ici ses limites. On assiste, parallèlement au développement du pays, à l'éveil encore timide d'une société civile qui demande des comptes à ses dirigeants et qui veut être informée, entre autre, sur les questions environnementales. Selon une enquête réalisée en 2015, trois quarts des Chinois considéraient la pollution de l’air et de l’eau comme un important ou très important problème pour leur pays, seule la corruption était jugée comme un problème encore plus inquiétant. Ils se montraient aussi assez pessimistes au sujet de l’amélioration de leur environnement. Pour un tiers d’entre eux, la pollution de l’air et de l’eau s’aggraverait dans les cinq prochaines années. Ces préoccupations sont bien visibles sur l’Internet chinois, où les questions concernant la pollution et la santé sont parmi les sujets les plus discutés. Par ailleurs, les pouvoirs officiels commencent aussi à mesurer les problèmes et à vouloir les affronter, les autorités officielles ont pris conscience de la gravité des questions environnementales. En 2008, la State Environment Protection Agency (SEPA), agence gouvernementale de protection de l'environnement, a eu le statut de ministère (Ministry of Environmental Protection, MEP) ce qui devrait lui donner davantage de moyens d'action et d'effectifs, restés très modestes jusqu'à présent (300 à 400 employés permanents !). L’agenda environnemental de la Chine s’est accéléré depuis le début des années 2010 et les préoccupations environnementales de sa population semblent avoir été prises en compte dans la politique énergétique. Les positions tenues par la Chine à l’occasion de la COP21 tenue en décembre 2015 à Paris illustrent ce changement.
Une nouvelle politique énergétique se dessine. Selon une étude réalisée par BP, la consommation chinoise d’énergie augmentera de 60 % d’ici à 2035. Mais, dans le même temps, Pékin s’est engagé à diminuer ses émissions de gaz carbonique au plus tard pour l’an 2030. Cela veut dire que la Chine va devoir développer des énergies plus propres. Ce résultat ne sera obtenu que si la Chine renonce au charbon et développe de nouvelles énergies comme le solaire. Pékin est déjà le premier producteur mondial de panneaux photovoltaïques et ambitionne d’atteindre une production d’au moins 100 gigawatts d’origine solaire pour 2020. De même, la Chine est la première puissance éolienne du monde et a pour objectif de doubler ses capacités entre 2013 et 2017. La Chine mise aussi sur l’énergie nucléaire pour rompre sa dépendance au charbon. Le pays compte en 2015 23 centrales nucléaires, 26 autres sont en construction. La Chine devrait devenir, à partir de 2020, la seconde puissance nucléaire après les États-Unis.
Dans son XIIe plan quinquennal (2011-2015), la Chine s’est engagée à réduire son intensité énergétique de 16 %, mais celle-ci reste très élevée en comparaison avec les pays plus avancés. Ainsi faut-il deux fois plus d’énergie à la Chine pour produire le même montant de richesse que le Japon ou l'Allemagne. Une politique nationale volontariste mobilisant un effort financier conséquent a d'ores et déjà permis une baisse de 20 % de la consommation énergétique par point de PIB entre 2005 et 2010. Les établissements les plus obsolètes ont fermé, le recours aux énergies renouvelables progresse et la tertiarisation de l'économie y contribue aussi. Le principal bras industriel et financier de l'État dans le secteur de l'"économie verte", la China Energy Conservation Investment Company, devient un acteur puissant de ces évolutions.
Les initiatives locales et les expérimentations se multiplient : zones à "basse intensité carbone" à Nanjing, cités et îles écologiques comme à Chongming (embouchure du Yangzi). Si le projet de cité "verte" de Dongtan (dans l'arrondissement de Chongming à l'embouchure du Yangzi, son modèle de première ville entièrement "écologique", devait servir ailleurs en Chine), annoncé à grand bruit, semble avoir fait long feu et si la Chine ne cesse d'annoncer l'éclosion d'écocités qui ne voient pas le jour, les idées qui fondent ces projets inspirent malgré tout certains aménagements urbains. Résoudre les problèmes d’environnement n’est pas seulement un enjeu social, c’est aussi une question d’image pour les villes chinoises.
Pour prolonger, compléter :
- Sébastien Goulard, « Les réactions sociales face aux défis environnementaux en Chine », 2016.
- Visages médiatiques du barrage des Trois-Gorges : l’analyse statistique des données textuelles en géographie
- Ministry of Environmental Protection of the People's Republic of China, http://english.mep.gov.cn
Mise à jour : février 2016
Environnement en Russie (2007) Selon les présupposés idéologiques soviétiques, les crises écologiques ne pouvaient être répandues que dans le système capitaliste, la planification du système créant les conditions d'une utilisation optimale des ressources. Le combat écologiste était perçu comme une tentative occidentale pour affaiblir le pays. Cependant, avant même la dissolution du régime, dès le début des années 1980, les mouvements "informels" furent légalisés et ont vit apparaître de nombreuses associations de défense de la nature, tout particulièrement après la catastrophe de Tchernobyl (25 Avril 1986). Paradoxalement, cette pression se relâche au cours des premières années du post-communisme du fait de l'affaiblissement de l'appareil d'État et des contrôles sur les entreprises. Le nouveau citoyen russe, confronté à d'autres difficultés essentielles, reste alors relativement indifférent aux problématiques environnementales au cours de ces premières années de transition. Un capitalisme sans règles, les trafics en tout genre qui se développent dans la Russie post-communiste ne sont guère propices à un "développement durable" et les contre-pouvoirs de la société civile sont très insuffisants.
L'éclatement de l'URSS en 1991 a permis à la Russie d'échapper en partie à ses responsabilités, puisque certains des sites les plus dévastés se trouvent désormais hors des frontières russes, particulièrement en Asie centrale très touchée par la politique soviétique d'industrialisation intensive et par la course aux armements qui a accompagné la Guerre froide. Pour n'en citer que quelques-uns parmi les plus emblématiques : Tchernobyl en Ukraine ; la mer d'Aral au cœur de l'Asie centrale ; le polygone d'essais nucléaires de Semipalatinsk dans le Kazakhstan ; etc.
La situation évolue progressivement cependant. De nombreux organes officiels se préoccupent d'environnement en Russie dont : le Rosgidromet (monitoring écologique), le ministère des Situations extrêmes (catastrophes écologiques et autres, effets des guerres), le Rosleskhoz (forêts), le Gosatomnadzor (surveillance des équipements nucléaires), etc. Les préoccupations écologiques ont été systématiquement introduites dans les textes de lois et règlements en tous genres, à commencer par la loi sur l'environnement de 1991, sous B. Eltsine, qui prévoit l'intervention des citoyens et de leurs organisations. La publication de bilans environnementaux a permis de dresser une hiérarchie des problèmes rencontrés. La pollution des sols, de l'eau et de l'air vient au premier rang des préoccupations. En 2001, le Gosstroï (Comité d’État pour la Construction, le Logement et les Services Urbains) a lancé un grand programme de réformes qui devrait introduire des changements en faveur du développement durable des services urbains.
Au total, on évalue aujourd'hui à 40% la proportion du territoire russe qui serait gravement ou moyennement pollué et à 75% la proportion des eaux de surface devenues impropres à la consommation.
La Russie dispose d'abondantes ressources en eau mais elles sont souvent polluées. Les fleuves de la partie européenne, qui ont fait l'objet d'importants travaux hydrauliques dès le XIXe, connaissent des situations préoccupantes. Le projet Sibaral de détournement d'une partie des fleuves sibériens est abandonné, mais d'autres pourraient lui succéder, autour de la Volga et de la Caspienne. La gestion de l'eau comme ressource naturelle est effectuée principalement par le Ministère des Ressources Naturelles et ses représentants territoriaux. Mais la politique de l'eau souffre d'un manque de définition claire des compétences de chaque organe et d'un manque de coordination et de planification à long terme au niveau des bassins. La situation pourrait s'améliorer avec l'arrêt des gaspillages d'eau d'irrigation en rénovant les réseaux, le développement des équipements d'épuration des entreprises et des villes, la modernisation des équipements domestiques. Le marché est considérable puisque 60% des infrastructures sont aujourd’hui jugées obsolètes selon la Mission économique en Russie (DREE)*, les grands groupes internationaux du secteur (dont les français Véolia, ex- Vivendi et Suez - Lyonnaise des eaux) s'y intéressent de près.
La situation des sols et des terres cultivables est préoccupante. La pollution industrielle des sols est importante, les travaux de restauration seront localement longs et difficiles. Par ailleurs, une part importante des terres serait touchée, entre autre, par des phénomènes d'érosion, par la salinisation, ou par les retombées de la période de rejets chimiques intenses des années 1960 - 1970.
La forêt couvre 37% du territoire russe. Il est difficile d'en estimer l'exploitation réelle car les coupes de contrebande seraient importantes, tout particulièrement en Extrême-Orient, aux confins de la Chine. Les coupes à blanc et les coupes sur pentes fortes sont fréquentes, le gaspillage au cours des opérations de transport et de transformation non négligeable. Enfin, les incendies, en grande partie d'origine naturelle, parcourent chaque année près de 700 000 ha selon les statistiques officielles.
(ST) septembre 2007No publisherLa Russie : des territoires en recompositionLe développement durable, approches géographiquesgénéralLa Chine, la modernisation encadrée d'un territoire globalLes systèmes socio-écologiques face aux changements globauxL'Amérique latine : émergence, inégalités, défisAfrique subsaharienne : territoires et conflits2024-02-07T08:45:53ZPloneGlossaryDefinitionEsclavage
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/esclavage
Esclavage rural et travail forcé au Brésil | esclavage moderne en Afrique
L'esclavage est une situation historique dans laquelle, dans une société donnée, une partie des individus est dépouillée de tout droit et est considérée comme un bien appartenant à d'autres individus, au même titre que les objets ou les animaux domestiques. L'esclavage a existé sous des formes très diverses selon les époques et les sociétés, selon qu'il était généralisé ou toléré, central dans l'économie ou relativement marginal. Un processus progressif d'abolition a été entamé au XVIIIe siècle a connu une accélération au XIXe siècle. Si l'esclavage est aujourd'hui officiellement illégal partout dans le monde, la servitude d'être humains subsiste aujourd'hui sous des formes variées et parfois insidieuses.
(2020)
Esclavage rural et travail forcé au Brésil Les origines du peuple brésilien sont étroitement liées à la traite des esclaves. Entre le XVIe siècle et le XIXe siècle, près de 4 millions d’esclaves africains seraient arrivés au Brésil, or, en 1872, la population esclave y était estimée à 1,5 million ! Ce qui montre la dureté particulière de leur condition (par comparaison, les États-Unis ont reçu environ 400 000 esclaves africains pendant toute la période de la traite atlantique et comptaient, en 1860, plus de 4 millions d’esclaves). Les esclaves débarquaient dans les ports de Rio de Janeiro, Salvador, Recife et São Luis, où ils étaient entassés dans des baraques en attendant d’être vendus.
Des mouvements de rébellion se sont organisés en communautés d’esclaves marrons appelées quilombos. Le quilombo le plus important, celui de Palmares à l’intérieur de l’État d’Alagoas, fut fondé au XVIIe siècle et devint, avec la figure légendaire de Zumbi (arrêté et exécuté en 1695), le centre de la résistance contre l’esclavage. La traite des esclaves fut interdite en 1850 mais, d'étape en étape, il fallut attendre 1888 pour que l'esclavage soit totalement aboli (lei Aurea). Ainsi, le Brésil aura été l’un des derniers pays au monde à abolir l’esclavage et, au début du XXIe siècle, différentes formes de travail forcé y subsistent encore, surtout dans le monde rural. La Commission pastorale de la terre (CPT) est particulièrement active pour dénoncer ces pratiques d'un autre temps, par ses enquêtes et ses signalements du travail esclave.
Esclavage moderne en Afrique (2005) Des formes modernes d'esclavage sévissent encore de nos jours dans le monde et plus particulièrement en Afrique subsaharienne. Les Cahiers d’études africaines y ont consacré un numéro. Pour Roger Botte, anthropologue à l’EHESS, s’il existe des zones résiduelles d’esclavage en Afrique (Mauritanie, Niger), on ne peut plus parler d’esclavage en tant que tel sur ce continent. Mais de nouvelles formes d’assujettissement sont apparues comme le travail forcé, l’exploitation de travailleurs migrants, de la main d’œuvre enfantine ou l’esclavage domestique. Définie par le Bureau international du travail (BIT/OIT) en 1993, la notion d’esclavage moderne a été ensuite abandonnée pour retenir celle de travail forcé, qui ne fait pas intervenir la notion de propriété. Mais utiliser le terme d’esclave à la place de celui de travailleur exploité porte préjudice au combat contre le travail contraint illégal, souligne Roger Botte. Un point de vue partagé par plusieurs chercheurs comme Alain Morice (CNRS-URMIS, Paris), qui critique cette notion fourre-tout où se retrouve un ensemble hétéroclite de rapports d’oppression et de travail contraint ou sous la menace.
Mike Dottridge, ancien directeur de l’ONG Anti-Slavery International, dresse une typologie des différentes formes de travail forcé et de violations en Afrique subsaharienne. De son côté, Suzanne Miers (Ohio University, États-Unis) fait le point sur le nouveau visage de l’esclavage contemporain, de la servitude pour dettes à la prostitution forcée, en passant par le trafic d’êtres humains, le travail des enfants, l’exploitation de la main d’œuvre, le tourisme sexuel, les enfants soldats et l’adoption d’enfants en vue de leur exploitation. Enfin, Françoise Vergès, professeur au Goldsmiths College (Londres), s’interroge sur les "troubles de la mémoire" concernant la traite négrière et l’esclavage.
Plusieurs articles de la revue étudient en détail les pratiques d’esclavage qui perdurent en Afrique ainsi que leur prolongement dans les pays traditionnels d’émigration. Florence Boyer (France) parle de l’esclavage chez les Touaregs de Bankilaré (Niger). Issa Saïbou (Cameroun) évoque la survivance de l’esclavage royal dans la partie nord du Cameroun. Mathias Deshusses (Genève) livre les résultats d’une étude menée sur les petites bonnes ivoiriennes victimes d’esclavage domestique en France. Fabio Viti (Italie) parle de l’exploitation de jeunes apprentis déqualifiés dans les métiers artisanaux du secteur informel urbain en Côte d’Ivoire. Nasima Moujoud et Dolorès Pourette (France) évoquent la "traite" des femmes migrantes originaires de pays défavorisés orientée vers la domesticité et la prostitution. D’autres articles constatent également la survivance de liens de dépendance et de clientélisme entre descendants d’esclaves et descendants de maîtres comme à Madagascar, en Tunisie ou en Mauritanie.
Source : MFI, Isabelle Verdier www.rfi.fr/Fichiers/MFI/CultureSociete/1733.asp
et Cahiers d'études africaines, n° 179-180 (2005) : "Esclavage moderne ou modernité de l’esclavage ?" http://etudesafricaines.revues.org/sommaire5572.htmlNo publisherL'Amérique latine : émergence, inégalités, défisL'Amérique latine : émergence, inégalités, défisAfrique subsaharienne : territoires et conflits2023-01-10T09:32:13ZPloneGlossaryDefinitionEthnies, ethnicité et nations
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/ethnies-ethnicite-et-nations
Ethnies, ethnicité aux États-Unis | Ethnies, ethnicité et nations en Afrique subsaharienne
Une ethnie est un groupe humain de taille intermédiaire entre le clan et la nation, relativement homogène sur le plan culturel. Aucun critère distinctif objectif de permet de différencier nettement une tribu d'une ethnie, d'un peuple ou d'une nation, et le terme a été surtout employé de l'extérieur pour nommer des groupes humains n'appartenant pas au groupe dominant, notamment les indigènes, ou peuples autochtones, par opposition aux nations coloniales. La distinction entre un groupe ethnique et un groupe national peut se fonder sur l'usage d'une langue vernaculaire pour le premier et d'une langue véhiculaire pour le second mais ce critère n'est pas toujours opérant.
L'ethnicité, ou appartenance ethnique, est aujourd'hui une assignation sociale et une représentation attribuées à un individu, ou à un groupe humain, en fonction de critères culturels ou de leur apparence physique (couleur de peau notamment). Comme la notion de « race », elle est sujette à caution tant elle dépend de considérations subjectives, bien plus que de critères objectifs. Comme l'indique Gavan Tredoux « l’identité ethnique n’est pas affaire de choix, mais elle est prescrite par d’autres, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’ethnie » (traduit par François Durand-Dastès, 2006).
(JBB) octobre 2021.
Pour compléter
- Durand-Dastès François, « Ethnie », Hypergéo, 2006.
- Tredoux Gavan, Ethnicity and ideology. Stalking the wild taboo. 1990.
Ethnies, ethnicité aux États-Unis (2015) À la classification selon la race, le recensement de la population aux États-Unis ajoute une différenciation selon l'origine ethnique. Il y a deux catégories minimum d'ethnies selon l'U.S. Office of Management and Budget’s (OMB) : les Hispaniques et Latinos et les non-Hispaniques et Latinos.
Dans le recensement de 2010, les origines hispaniques, latinos (terme ajouté en 2010) ou espagnoles, et la race, font l'objet d'une question à part : « S’il vous plaît, répondez à la fois à la question sur l’origine hispanique et à la question sur la race », la modalité « hispanic » ne figurant pas dans les modalités de réponse à la question sur la race. Les Hispaniques et Latinos peuvent être de n'importe quelle race. Près de 20 millions de Latinos ont coché la case « autre race » en 2010 (15 millions en 2000) arguant du fait qu'ils ne se reconnaissent pas dans les catégories de race proposées dans le questionnaire.
(MCD) 2015.
Pour compléter
- US Census, "Overview of Race and Hispanic Origin: 2010", 2010 Census Briefs, 2011, 23 p. Ethnies, ethnicité et nations en Afrique subsaharienne (2006) L’Afrique subsaharienne se caractérise par une extraordinaire diversité ethnique. Par exemple, dans la seule République démocratique du Congo, les ethnologues ne répertorient pas moins de 250 groupes différents. Sans fétichiser l’ethnie ni chercher dans le "tribalisme" le deus ex machina des affrontements, guerres civiles, violences au quotidien, comme ont tendance à le faire les médias, on se gardera de minimiser l’importance des facteurs ethniques dans les dynamiques socio-politiques contemporaines en Afrique (Pourtier, 1991).
En termes d’analyse géopolitique, des questions en découlent : la diversité ethnique est-elle un obstacle à la formation de l’unité nationale ? la présence de groupes ethniques en position transfrontalière est-elle un facteur d’instabilité régionale ? Des exemples passés peuvent alimenter la réflexion.
Le Rwanda a connu l'expérience absolue des ravages de l'ethnisme lors du génocide des Tutsis par les Hutus en 1994. Le pouvoir actuel du Paul Kagamé (tutsi, ayant accédé à la présidence en 2000) s'efforce d'appliquer une politique volontariste consistant à nier le fait ethnique afin de tenter de bâtir une nation rwandaise qui ne comporterait plus ni Hutus, ni Tutsis. Une telle politique n'est-elle qu'un leurre ? Les modalités de la réconciliation entreprise peuvent laisser perplexe.
Autre exemple, au Burundi voisin où, depuis les massacres de 1972, les conflits entre Tutsis et Hutus avaient fait environ 300 000 victimes. Pour tenter de mettre fin à la spirale des sanglants affrontements, à base ethnique, un accord de paix, inspiré par Nelson Mandela, a été signé à Arusha, en Tanzanie, en août 2000. Au lieu de nier la question ethnique, l'esprit de cet accord l'assume et en fait un point de départ. Il s'agit alors d'assurer une représentativité équitable des composantes de la population (composée à 15 % de Tutsis, à 85 % Hutus). D'une manière générale, la réactivation du concept d'ethnie en Afrique subsaharienne est également venue de la mise en place du processus démocratique qui a fréquemment entraîné la résurgence de l'appartenance ethnique pour fonder le multipartisme.
Il apparaît que la multiplicité des ethnies n’est pas en soi un obstacle au fonctionnement de l’État dans la mesure où l'appartenance ethnique ne constituerait qu’un cadre de référence identitaire parmi d’autres, à une échelle située entre le groupe familial de proximité et l’État. Ethnie et État peuvent alors cesser d’apparaître comme des catégories antagonistes dès lors qu’on raisonne en termes d’emboîtements et non d’exclusion (Pourtier, 1991). Les appartenances ethniques participent alors aux dynamiques linguistiques et culturelles qui transcendent les groupes et les frontières et constituent ainsi autant de strates pouvant favoriser les processus d’intégration.
(ST) 2006.
Pour compléter
- Éric Bordessoule, « L’État-nation en Afrique subsaharienne, un modèle en crise ? », Géoconfluences, 2006
- Marc Lavergne, « Darfour : impacts ethniques et territoriaux d'une guerre civile en Afrique », Géoconfluences, 2006.
- Roland Pourtier - Derrière le terrain, l'État - Histoires de géographes, textes réunis pas Chantal Blanc Pamard - Éditions du CNRS - 1991 No publisherAfrique subsaharienne : territoires et conflits2022-10-24T12:39:15ZPloneGlossaryDefinition