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10 ans d’industrie manufacturière en France : entre désindustrialisation et spécialisation industrielle

Publié le 13/03/2018

L’Insee a publié en février 2018 une analyse de dix ans d’évolution de l’industrie manufacturière* en France. L’article décrit une diminution des emplois dans tous les secteurs, à l’exception de l’agroalimentaire et la construction aéronautique qui se maintiennent. En France, sur l’ensemble de la période, sur les 3,3 millions d’emplois dans l’industrie manufacturière en 2006, il ne restait que 2,7 millions en 2015 (–16 %). C’est le secteur du textile et de l’habillement qui est le plus touché (–35 % d’emplois), mais aussi l’industrie du bois et du papier (–26 %) ou celle du caoutchouc et du plastique (–23 %).

Nicolas Bignon, Farida Djeffal et Sylvie Rousseau , « L’industrie manufacturière de 2006 à 2015 : l’agroalimentaire et la construction aéronautique et spatiale résistent au repli du secteur », Insee Première, n° 1689, Paru le 14/02/2018

 
Perte d'emploi par secteur manufacturier en France, 2006-2015
  Effectif 2006 (en milliers) Effectif 2015 (en milliers) Évolution entre 2006 et 2015 (en %)
Fabrication de textiles, industries de l'habillement, industrie du cuir et de la chaussure 156 102 –35
Cokéfaction et raffinage 12 9 –27
Travail du bois, industries du papier et imprimerie 243 181 –26
Fabrication de produits en caoutchouc et en plastique ainsi que d'autres produits minéraux non métalliques 339 260 –23
Autres industries manufacturières ; réparation et installation de machines et d'équipements 330 262 –21
Fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques 162 129 –20
Industrie pharmaceutique 92 75 –18
Fabrication d'équipements électriques 134 111 –17
Fabrication de machines et équipements n.c.a. 213 177 –17
Fabrication de matériels de transport 415 353 –15
Métallurgie et fabrication de produits métalliques à l'exception des machines et des équipements 442 377 –15
Industrie chimique 166 142 —15
Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac 562 560 0

Source : Nicolas Bignon, Farida Djeffal et Sylvie Rousseau , « L’industrie manufacturière de 2006 à 2015 : l’agroalimentaire et la construction aéronautique et spatiale résistent au repli du secteur », Insee Première, n° 1689, Paru le 14/02/2018 

 

Le nombre d’établissements dans l’industrie manufacturière a aussi diminué en passant de 150 600 à 123 300 en seize ans. Malgré ces nombreuses pertes d’emplois (dans certains secteurs et dans la fonction production), la valeur de la production n’a jamais été aussi élevée. Elle peut être saisie par la valeur de la production en milliards d’euros courants : entre 2000 et 2016, elle est passée de 760 à 888 milliards d’euros (+ 128,2 milliards, + 16,8 %, Insee, 2018). Si la production totale en volume est restée stable malgré la crise de 2008 (97 % de son niveau de l’an 2000), elle a augmenté dans certains secteurs : c’est le cas de l’agroalimentaire (103,7 %) et de la fabrication de matériel de transport (111,8 %). Si le commerce extérieur de produits manufacturés ne cesse d’augmenter en valeur depuis l’an 2000, passant 300 à 450 milliards d’euros de produits exportés, la balance de ce secteur est négative avec un solde commercial de –23,5 milliards d’euros en 2016 (+12 milliards en 2000). 

  Nombre d'établissement, emploi industriel, production et commerce extérieur manufacturier, France 2005-2016  

Une étude détaillée montre des trajectoires sectorielles bien différenciées. La France tend à se spécialiser dans la division européenne et mondiale du travail dans certains points forts (aéronautique armements, pharmacie, agro-alimentaire, automobile…) au détriment du reste de l’appareil productif face à la pression concurrentielle à la fois des grands pays développés (Allemagne, États-Unis, Japon…) dans les secteurs à forte valeur ajoutée, et des pays à bas salaires dans les secteurs à faible valeur ajoutée (Carroué, 2013).

 
Spécialisation commerciale de la France par catégorie (production et services), 2005–2015
AVANTAGES COMPARATIFS secteur contribution au solde, en millièmes du total des échanges, 2015 Évolution 2005-2015, en points de millièmes
Aéronautique et espace 22,8 +11,1
Produits de toilette 8,3 +1,2
Boissons 8 +0,9
Voyages 7,8 –4,6
Produits pharmaceutiques 5,7 –1,7
Autres services aux entreprises 5,1 –1
Céréales 4,9 +1,1
 Services financiers 4,6 +3,9
 Éléments de véhicules automobiles 3 –1,2
Moteurs 2,8 +0,2
DÉSAVANTAGES COMPARATIFS secteur contribution au solde, en millièmes du total des échanges Évolution 2005-2015, en points de millièmes
Pétrole brut –14,6 +11,9
 Automobiles particulières, cycles –7,6 –12,5
Gaz naturel –6,3 –0,1
Produits raffinés du pétrole –6,2 –3,6
Matériel informatique –5 +2,3
Vêtements de bonneterie –4,6 –0,9
Vêtements de confection –4 0
Matériel de télécommunication –3,4 –3,4
Meubles –3 0

Source : CEPII, base de données CHELEM, juillet 2017

 

Rappelons que ce qu’il est courant d’appeler la désindustrialisation correspond à la disparition des emplois industriels en partie remplacés par des emplois dans les secteurs de service, mais pas à la disparition de la production industrielle. Au contraire, les gains de productivité peuvent accompagner la perte d’emplois d’une augmentation de la production et de la valeur ajoutée industrielle. En France, si la part de la valeur ajoutée de l'industrie dans la valeur ajoutée totale recule depuis plusieurs décennies, cette part reste élevée au regard de la part des emplois industriels par rapport aux emplois de services. Par ailleurs, une partie des emplois apparemment détruits dans l'industrie ont en fait été transférés statistiquement aux services : c'est le cas lorsqu'une entreprise industrielle externalise des services autrefois comptabilisés comme de l'emploi industriel.

Causes de la destruction d'emplois industriels en France d'après la Direction Générale du Trésor (1980-2007)
  Volume annuel moyen d’emplois industriels détruits Effet externalisation vers le secteur des services Effet des gains de productivité Effet de la concurrence commerciale internationale
1980-2007 71 000 25 % 29 % 13 %
2000-2007 65 000 5 % 65 % 28 %

Note : La somme des trois effets est différente de 100 %, la décomposition effectuée ne prétendant ni à l’exhaustivité, ni à l’indépendance des effets pris en compte.

Source : DG Trésor sur la base des données Insee, 2010. 

 

Valeur ajoutée par branche, 1949-2016

Valeur ajoutée par branche en 2016 France Insee

Source : Insee 2016

 

* Définition de l'Insee : « Les industries manufacturières sont des industries de transformation des biens, c'est à dire principalement des industries de fabrication pour compte propre mais elles concernent aussi la réparation et l'installation d'équipements industriels ainsi que des opérations en sous-traitance pour un tiers donneur d'ordres. »

 

Pour compléter