Territoires européens : régions, États, Union - Géoconfluences
Comment définir les services ?
D'une manière générale, dans les pays développés, on assiste au long déclin de la proportion de main-d’œuvre directement occupée à la production de biens au profit de la main-d'œuvre employée dans l’économie des services. Dans les pays européens, l’emploi dans les services a crû au cours des années 1980 et 1990, atteignant dans plusieurs d’entre eux près des trois quarts du total des emplois. Or on constate une très nette corrélation entre le revenu du travail par habitant et la part des services dans l’emploi.
1 - Lorsque l'on parle des services, de quoi parle-t-on au juste ?
L’emploi dans le secteur tertiaire est défini
par la Classification internationale type, par industrie (CITI)
de façon négative comme tout ce qui n’entre pas dans l’agriculture
ni l’industrie. Or, cette catégorie résiduelle en est
venue à représenter près des trois quarts de l’emploi
total dans certains pays de l’OCDE.
De fait, la décomposition du secteur des services en un nombre limité
de sous-secteurs implique des arbitrages difficiles car les activités
de service peuvent être regroupées en fonction de bien des critères
différents. La classification mise au point par Elfring (1988) pour
répartir l’emploi total dans le secteur des services entre ses
principales composantes, outre son attrait théorique, est celle qui
permet le mieux les comparaisons avec d’autres études car plusieurs
chercheurs ont adopté ultérieurement cette classification (ou
des variantes proches), par exemple, Castells, Esping-Andersen, Storrie. Les
regroupements d’activités opérés par Elfring sont
fondés sur trois critères : la fonction économique remplie
par le service ; le service s’adresse-t-il aux entreprises ou aux particuliers
; et est-il essentiellement marchand ou non marchand ? Le secteur des services
est divisé en quatre grands sous-secteurs : services aux producteurs
; services de distribution ; services aux particuliers ; et services sociaux.
Les deux premières catégories de services concourent, pour l’essentiel,
aux activités de production et de commercialisation des entreprises
productrices de biens, tandis que les services aux particuliers et les services
sociaux font généralement l’objet d’une consommation
directe par les ménages. Dans la plupart des pays de l’OCDE,
les services sociaux sont financés et assurés essentiellement
par l’État bien que, dans certains pays, l’enseignement
et les soins de santé privé soient importants.
Définir l’emploi dans le secteur des services en fonction du
produit principal de l’employeur est quelque peu arbitraire, car la
distinction entre un bien et un service du point de vue économique
n’est pas toujours claire. Trois caractéristiques sont généralement
citées comme facteurs de différenciation entre un service et
un bien : un service présente un caractère immatériel
; il est difficile à stocker ; il suppose un contact direct entre le
producteur et le consommateur. Selon ces critères, la consultation
d’un médecin est un service, un réveille-matin est un
bien. D’autres cas sont toutefois moins simples (par exemple, le système
d’exploitation Windows), et les changements intervenus récemment
au niveau de la technologie et de l’organisation des entreprises semblent
rendre la distinction plus floue encore. C’est ainsi, par exemple, que
les entreprises manufacturières mettent de plus en plus l’accent
sur la production "en flux tendu" de produits adaptés aux
exigences de chaque client, en même temps que sur le service après-vente
(c’est le cas, par exemple, des producteurs de micro-ordinateurs). De
même, certaines sociétés de services ont adopté
des pratiques issues de la production afin d’exploiter les économies
d’échelle en réalisant des produits standardisés
(c’est le cas des chaînes de restauration rapide) et nombre de
services à forte intensité informationnelle (par exemple, les
logiciels informatiques) sont faciles à stocker et à transporter
jusqu’à des clients éloignés. Il existe une part
importante d’activités de service dans les entreprises dont le
produit principal est incontestablement un bien. Ainsi, la comptabilité
et les tâches juridiques effectuées pour un constructeur aéronautique
peuvent être classées parmi les services ou la production de
biens selon que l’activité est réalisée en interne
ou confiée à une société de services spécialisée.
L’externalisation de services de ce type par les entreprises productrices
de biens semble s’être accrue au fil du temps et varier selon
les pays de sorte que les comparaisons de l’importance de l’emploi
dans le secteur des services risquent d’exagérer les différences
entre les types de tâches effectivement réalisées.
2 - L'emploi dans les services : situation, tendances
Ce sont les services de distribution et les services sociaux
qui représentent les plus fortes parts de l’emploi total. Parmi
les services de distribution, la plus forte part de
l’emploi se situe dans le commerce de détail, tandis que les
activités de santé sont la principale composante des services
sociaux dans la plupart des pays de l'Union. Dans les services aux producteurs,
ce sont les services aux entreprises et les services professionnels qui représentent
la plus forte part de l’emploi, tandis que, dans les services aux particuliers,
ce sont les hôtels et restaurants qui comptent le plus d’emplois.
Services aux producteurs et services sociaux enregistrent la croissance la
plus rapide ces 20 dernières années.
Le PIB par habitant a, sur la part globale des services, un impact positif qui est particulièrement net pour les services aux producteurs et les services sociaux. Un taux d’activité des femmes élevé et une place importante occupée par l’État providence vont de pair avec des parts d’emploi étendues dans les services sociaux et les services aux producteurs, tandis qu’une législation relativement stricte en matière de protection de l’emploi est associée à des parts d’emploi plus limitées dans ces mêmes sous-secteurs.
Évolution de la part des services dans l’emploi total, 1984-98
Elfring (étude de 1988 à 1992) constate que la part des services
dans l’emploi total – en moyenne pour l’ensemble de ces
pays – est passée de 46 à 65 pour cent. La part des services
aux producteurs, sous-secteur qui était le plus restreint dans les
années 60, a plus que doublé. En revanche, la part des services
de distribution qui constituaient, au début des années 60, le
plus gros sous-secteur, est restée stable (sauf au Japon, où
elle a fortement augmenté). Pour les services aux particuliers, le
schéma est très variable selon les pays, mais la tendance d’ensemble
aura été à la stabilité, avec une faible augmentation
à partir du milieu des années 70. Enfin, ce sont les services
sociaux qui ont connu la plus forte expansion, devenant le plus gros sous-secteur
dans les années 70.
L’évolution à la hausse des 15 dernières
années a été plus accentuée dans les pays où
les parts initiales étaient les plus faibles (Grèce, Espagne,
France et Portugal). On peut donc penser que les écarts vont continuer
de se réduire. Les données relatives à la répartition
de l’emploi par professions confirment que l’augmentation tendancielle
de la part du secteur des services dans l’emploi total traduit une réduction
réelle du nombre d’emplois liés à la production
directe de biens par rapport au nombre d’emplois liés à
des activités de service. Il y a une forte corrélation inverse
entre la part des emplois de "cols bleus" (emplois liés directement
à la production de biens) et la part d’emploi revenant au secteur
des services. Une augmentation de la part du secteur des services va de pair
avec une augmentation de la part de l’emploi non manuel dans toute l’économie,
la part de ce type d’emploi augmentant à l’intérieur
même du secteur de la production de biens.
D'après une étude de l'OCDE : Perspectives de l'emploi - Juin
2000 :
www.oecd.org/dataoecd/10/47/2079569.pdf
Pour citer cet article :
« Territoires européens : régions, États, Union - Géoconfluences », Géoconfluences, décembre 2012.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/etpays/Bresil/popup/Tabarly2.htm