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Prix du livre de géographie 2024 : les textes des lycéens et des étudiants

Publié le 03/07/2024
Auteur(s) : Maie Gérardot, agrégée de géographie, docteure en géographie et aménagement, professeure en CPGE - lycée Georges-de-la-Tour, Metz
Comme chaque année, nous publions des textes et des productions graphiques réalisées par les lycéens et étudiants, lycéennes et étudiantes, en partenariat avec le prix du livre de géographie décerné cette année à l'ouvrage dirigé par Marion Tillous.
Le Prix du Livre de Géographie des Lycéens et Étudiants

Créé en 2020 et décerné pour la première fois en 2021, ce prix a pour objectif de faire aimer la géographie à des lycéens (lycée général, technique et professionnel) et des étudiants (CPGE, université, BTS), de leur faire découvrir et lire des ouvrages montrant la diversité des écrits géographiques, des terrains et thèmes de recherches, des formes littéraires et scientifiques associées. Il se déroule sur une année scolaire, avec une remise du Prix lors du Festival International de Géographie de Saint-Dié des Vosges.

Pour tout renseignement : https://prixdulivredegeographie.blogspot.com
 

Le 31 mai, les votes ont cessé pour le Prix du Livre de Géographie 2024, et le décompte des voix a placé en tête l’ouvrage collectif dirigé par Marion Tillous, Espace, genre et violences conjugales, ce que révèle la crise de la Covid-19. Comme pour les éditions précédentes, cinq livres étaient en compétition. Étaient ainsi sélectionnés, outre l’ouvrage finalement récompensé :

Gilles Fumey, Alexandre de Humboldt. L’eau et le feu, Double ligne, 2022 ; Raphaël Mathevet et Roméo Bondon, Sangliers. Géographies d’un animal politique, Actes Sud, 2022 ; Basile Michel, Les quartiers culturels et créatifs, Le Manuscrit, 2022 et Nephtys Zwer (dir.), Ceci n’est pas un atlas, Éditions du commun, 2023. Comme en 2023, le scrutin a été très serré.

Voici les mots de Marion Tillous à l’annonce du résultat : « Recevoir le prix du livre de géographie 2024 est une joie, mais le plus intéressant et passionnant est ce qui l'a précédé. Pendant l'année 2023-2024, nous avons été invité·es à le présenter devant de nombreuses classes de lycée, de BTS, de licence et de master. Nous avons entendu la lecture qu'en ont fait les élèves et étudiant·es, nous en avons discuté avec elles et eux, nous avons écouté leurs questions et tenté d'y répondre. Leurs interrogations ne ressemblent pas aux questions policées du cadre académique ; elles sont plus sincères, plus ancrées dans la vie, plus urgentes. Je garde un souvenir ému de la discussion que nous avons eues avec les élèves du BTS tourisme du lycée Colbert à Lyon, que nous n'arrivions pas à finir malgré la sonnerie qui retentissait, tant elle nous passionnait. Elle portait sur la jalousie, abordée sous son angle spatial : est-ce normal de toujours dire à son amoureux·se où l'on se trouve ? Est-ce acceptable de partager sa géolocalisation avec elle ou lui ; de le lui demander ? Y a-t-il des jalousies moins graves que d'autres, des « jalousies mignonnes » ? J'ai aussi été frappée, rétrospectivement, qu'absolument aucun·e élève d'aucun·e classe n'ait posé de question concernant l'écriture inclusive employée dans le livre. Nous avions échangé nos doutes sur la question avec l'équipe organisatrice du prix, au FIG, en octobre 2024. Et pourtant, cela a semblé tout naturel à la jeune génération, cela n'a pas semblé freiner leur lecture ; ce que l'on reproche généralement à l'écriture inclusive. Et cette absence de question nous a fait beaucoup de bien. On parle d'une période où chaque mail écrit en écriture inclusive que l'on envoie sur une liste de diffusion de géographie nous vaut des messages de réponses enragés et insultants, sans que les personnes qui modèrent la liste n'y voient rien à redire. Je suis très reconnaissante aux élèves et étudiant·es rencontrées de nous avoir fait comprendre qu'il ne s'agissait que d'un mauvais moment à passer. Un grand merci à tous·tes pour le prix, et tous les moments intenses qui l'ont précédé : merci aux élèves et étudiant·es, merci à leurs enseignant·es, merci à l'équipe organisatrice du prix, et à celles et ceux du FIG ».

Comme chaque année, nous allons mettre en lumière les textes des participants, sur l’ouvrage lauréat mais aussi sur les quatre autres ouvrages en compétition, chacun ayant trouvé son public et d’ardents défenseurs ((Cet article, publié par Géoconfluences avec nos plus vifs remerciements, sera complété par un autre texte, à paraître dans la revue de l’APHG, Historiens et Géographes. Ces deux textes permettront de citer le plus possible de votes de participants.)).

Marion Tillous (dir.), Espace, genre et violences conjugales, ce que révèle la crise de la Covid 19

Les élèves et étudiants ont beaucoup aimé que l’ouvrage parle des femmes et soit écrit par des femmes, même si le thème des violences conjugales donnait parfois lieu à des passages difficiles à lire.

Les votes sont souvent partis de la construction même de l’ouvrage. L’« introduction présente quatre points essentiels ; le rôle des violences dans la reconduction des rapports de domination de genre, le continuum (spatial) des violences faites aux femmes, la division public-privé et la responsabilité de l’État dans les violences « domestiques », les politiques menées en réponse à la crise sanitaire » (terminale HGGSP, lycée Chateaubriant, Rennes).

Les textes ont également insisté sur la méthodologie très rigoureuse sur laquelle s’appuie l’ouvrage : « un bon ouvrage de recherche (transparence sur la collecte des données ; croisement des méthodes quantitatives et qualitatives ; rédaction sobre et factuelle, sans pathos ni persuasion, ce qui en renforçait encore davantage la force ; mise en avant d'outils conceptuels comme la roue des violences, et de l'épistémologie de la géographie du genre dans l'introduction » (L3 ENS de Lyon).

« Dans ce livre une collaboration entre plusieurs femmes a été réalisée, cela nous a particulièrement plu. En effet ce livre est une co-écriture, entre différentes femmes qui ont toutes une place importante et permet une approche différente. Les autrices sont : Eva San Martin qui a rédigé une thèse sur la dimension spatiale des violences conjugales, Pauline Delage qui est une spécialiste des politiques de luttes contre les violences de genres, Julie Bulteau, une spécialiste des politiques de mobilité durable et inclusive, toutes sous la coordination de Marion Tillous, une maîtresse de conférences à l’Université Paris 8. Toutes ces femmes sont spécialisées dans leurs domaines et cela permet une grande qualité d’écrit et une analyse profonde avec une diversité de connaissance et d’approche. La rédaction par ces femmes a été réalisée selon les principes de l’écriture inclusive, nous avons apprécié cela, car nous retrouvons cette volonté et cette mise en avant d’égalité des genres même à travers la forme et la manière d’écrire ce livre » (première et terminale HGGSP, lycée Nelson-Mandela, Pibrac).

Comme le note donc Marion Tillous, l’écriture inclusive n’a pas été un problème pour les lecteurs, bien au contraire, puisqu’elle soutient les propos et l’argumentation : « L’utilisation de l’écriture inclusive est plus qu'un choix stylistique ; elle souligne l'importance de la visibilité et de l'inclusion dans le discours » (HK Maison d’Éducation de la Légion d’Honneur, Saint-Denis) ; « C’est un livre très engagé, dans lequel les auteur.ices assument leurs convictions féministes en utilisant le féminin et l’écriture inclusive, discutant ainsi les règles grammaticales établies, qui font toujours la part belle au masculin. Ce livre s’inscrit dans une perspective de géographie sociale et féministe, explorant les impacts de la crise du covid 19 sur les violences conjugales et les dynamiques de genre » (première, lycée Fulgence Bienvenüe, Loudéac).

« Ce livre était très touchant notamment grâce aux multiples témoignages qui étaient d’une violence et d’une tristesse inouïes » (première HGGSP, lycée Stéphane-Hessel, Vaison-la-Romaine).

Lycée Brassens, Rive de Gier.

 

Les élèves et étudiants ont également vu la pertinence de cette géographie, pourtant non évidente, des violences conjugales : « Ce livre recourt à la géographie pour étudier ce phénomène à différentes échelles, dans le but de localiser ces violences faites aux femmes. C’est en s’appuyant sur des données chiffrées ainsi que des témoignages que les autrices parviennent à mettre en lumière des faits et expériences frappantes, pour sensibiliser le lecteur et le confronter à la réalité vécue par de nombreuses femmes (BTS Tourisme, lycée d’hôtellerie et de tourisme, Guyancourt) ».

« "Je n'en avais pas, d'espace de liberté, je n'avais même pas de liberté dans ma tête…" Cette citation d’Espace, genre et violences conjugales nous a particulièrement touchés et permis de comprendre le réel enjeu autour de ce livre et de cette étude scientifique. En effet, cet ouvrage écrit en 2022 nous a intrigués au début car nous ne comprenions pas réellement le lien entre la géographie et les violences conjugales. Il permet une certaine réflexion sur la spatialité des violences domestiques, une dimension souvent oubliée dans les écrits et débats publics à ce sujet » (première et terminale HGGSP, lycée Nelson Mandela, Pibrac).

« Ce livre offre une vision sociologique et géographique très subtile et précise, avec l’analyse des déplacements des individus pendant le confinement » (première HGGSP, lycée Stéphane-Hessel, Vaison-la-Romaine).

« Nous ne savions pas que le champ d’étude de la géographie était si large, nous imaginions que la notion d’espace se mesurait à l’échelle d’un pays, d’un continent. Cela nous a permis de mieux comprendre cette notion d’espace en géographie, mais aussi de mobilité » (terminale HGGSP, lycée Joseph-Desfontaines, Melle).

HK Maison d’Éducation de la Légion d’Honneur, Saint-Denis ↑→

Première HGGSP, lycée Saint-Jude, Armentières

 

L’utilisation de l’espace pour créer et décupler la violence envers les femmes (et les enfants) a été au cœur de bien des textes, éclairant ce que peut être la géographie : une science utile dans le débat public, engagée, en lien avec l’actualité (en l’occurrence ici la lutte contre les violences faites aux femmes en France et la pandémie).

« Tout d'abord, nous avons trouvé que cet ouvrage universitaire se démarque des autres grâce à une thématique redessinant les frontières d'un problème connu et médiatisé qu'est la violence domestique. Le livre aborde la question des violences sexistes et domestiques sous un angle encore peu présent dans le débat public. Développer dans l’analyse le rôle de la crise sanitaire de 2020, permet de faire coïncider trois thèmes dont on parle très fréquemment mais rarement ensemble » (première HGGSP, lycée Alfred-Mézières, Longwy).

BTS Tourisme, lycée Colbert, Lyon.

 

« La Covid 19 ayant entraîné un confinement, a isolé encore plus les victimes et a rendu leur « sauvetage » complexe voire impossible. Il est important de tenir compte de ce facteur dont on ne parle que trop peu » (première HGGSP, lycée Jean-Calvin, Noyon).

« L’ouvrage se distingue de nombre de précédents en ce qu'il rend compte concrètement des différentes logiques de domination masculine, notamment par une étude de la répartition de l’espace occupé par les deux genres : l’espace public assigné au masculin et l’espace privé considéré comme le lieu du féminin. En cela, la géographie expérimentée dans cet ouvrage nous apparaît comme un outil essentiel pour analyser les inégalités de genre inhérentes à notre société, et pour travailler à la remise en cause des comportements sexistes institutionnalisés et à leur suppression définitive » (HK, lycée Auguste-Blanqui, Saint-Ouen).

« Le livre prouve que la société délimite des espaces précis pour chaque sexe et cela influence les déplacements, par exemple les femmes sont restreintes à l’espace alentour du foyer, alors que les hommes se déplacent dans un espace plus vaste. Cette délimitation n’est pas forcément consciente, le livre nous a permis de nous en rendre compte (…) Nous avons choisi ce livre parce que ce dernier pousse la réflexion plus loin que la description des violences et sert d’outil de prévention et d’émancipation pour les femmes » (Lycée de la Plaine de l’Ain, Ambérieu-en-Bugey).

Recueil de poèmes, première HGGSP, lycée international des Pontonniers, Strasbourg

 

Paragraphe

Fourre-tout en toile, première HGGSP, lycée international des Pontonniers, Strasbourg

 

Au détour d’un texte, cette phrase, qui témoigne des croisements entre le Prix et la scolarité des participants, de ce que le Prix peut apporter aux élèves et étudiants pour la suite de leur parcours : « L’une d’entre nous a d’ailleurs décidé de présenter un sujet de grand oral sur le confinement et les violences faites aux femmes en s’appuyant sur cet ouvrage mais également en allant chercher d’autres ressources et articles, ce sera un sujet de grand oral de SES (sciences économiques et sociales) mais avec de la géographie dedans car d’après notre professeure "tout est géographie" ((Nous ne pouvons que souscrire à cette affirmation ! La géographie est partout, et sans géographie vous êtes nulle part !)) » (terminale HGGSP, lycée L’Emperi, Salon-de-Provence).

Si vous doutez encore de l’intérêt de l’ouvrage dirigé par Marion Tillous, lisez ces lignes des élèves de Première HGGSP du Lycée Louis-Armand (Villefranche-sur-Saône) : « Nous recommandons donc vivement Espace, genre et violences conjugales, ce que révèle la crise de la Covid 19 à tous les lycéens, étudiants ou adultes intéressés par les thématiques abordées. Il permet de découvrir un ouvrage de géographie du sensible ancré dans le réel, basé sur une enquête rigoureusement menée, à travers un événement récent, rédigé par des universitaires, mais qui est accessible. De plus, il est en lien direct avec les enjeux sociétaux autour des violences multiformes qui touchent les femmes. Nous aimerions à la suite de cette lecture que le plus grand nombre de personnes puisse le lire pour qu’il y ait une réelle prise de conscience collective, afin que les femmes ne subissent plus de discriminations et de violences au sein de la société en raison de leur genre ».

Gilles Fumey, Alexandre de Humboldt. L’eau et le feu.

Si l’ouvrage de Gilles Fumey a plu, c’est d’abord parce qu’il raconte le parcours hors-norme d’un homme, Alexandre de Humboldt, assez méconnu malgré des apports extraordinaires à différentes sciences.

« Le choix de vulgariser l’expédition de Humboldt n’est sans doute pas innocent de la part de Fumey. Il s’agit en effet à de nombreux égards d’un personnage fondateur dans le domaine scientifique. Ainsi, sa grande rigueur dans la description de ce nouveau monde a posé les bases des explorations scientifiques. Cela est probablement dû au caractère exceptionnel de son expédition puisqu’il n’était engagé par aucune grande puissance. À la fin de son ouvrage, Fumey énumère les sciences dont Humboldt serait le fondateur et il faut constater que c’est impressionnant : il serait l’inventeur de la géographie, de l’océanographie, de la météorologie et de la climatologie. De plus, on observe tout au long de cette expédition des descriptions des populations locales qui rappellent celles des premiers ethnologues. Ainsi, plus d’un siècle avant Lévi-Strauss, Humboldt décrit les physiques des Indiens (et les compare à des statues de bronze), explique leur langue et la différence entre la langue masculine et la langue féminine, étudie leurs coutumes en observant le traitement fait aux morts, observe leurs tatouages et déduit le véritable rôle social de ceux-ci et tout cela en vivant auprès de ces populations. Il est également considéré comme une influence majeure pour la théorie de l’évolution de Darwin. Ainsi, en plus de l’influence déjà considérable sur les sciences, Humboldt est également considéré comme le père de l’écologie. En effet, au cours de son voyage, c’est le premier à mettre en relation l’environnement et les organismes qui le peuplent ce qui inspirera à Haeckel le concept d’écologie » (L3 Sorbonne Université, Paris).

« En tant qu’étudiant en histoire, j’ai apprécié la volonté de Gilles Fumey de remettre au goût du jour un personnage historique qui plus de 150 ans après sa mort continue de nous éclairer et de nous influencer » (L3 Sorbonne Université, Paris).

Première, lycée Émilie-du-Châtelet, Serris.

Première HGGSP, lycée Victor-Hugo, Paris.

 

C’est aussi l’écriture de Gilles Fumey qui a séduit, tout en fluidité et simplicité, écriture appuyée sur de nombreuses illustrations. « L’accessibilité, le style d’écriture, l’apport de connaissances, le dynamisme du livre puis la facilité de lecture globale, son aspect romancé, ses illustrations sous forme de dessins, croquis et gravure, mais aussi un apport de connaissance important et une découverte de Alexandre de Humboldt, vu comme père de la géographie moderne ainsi que de l’écologie » (L2 Université Jean-Moulin Lyon 3).

« L’auteur réussit à rendre cet ouvrage digeste malgré des sujets souvent perçus comme lourds et fastidieux, tels que l’histoire de la géographie classique et son épistémologie. Il sait rendre intéressants des moments qui peuvent sembler sans intérêt de par leurs lenteurs et leurs redondances. Au cours de l’expédition, ces moments sont nombreux, avec un temps important passé en transit. Il en fait alors un véritable récit d’aventure au point que l’on en oublie qu’il s’agit avant tout d’un ouvrage à portée scientifique et historique » (L2 Université Jean-Moulin Lyon 3).

S’adressant à Gilles Fumey, une étudiante de L3 Sorbonne Université (Paris), écrit : « Un homme dont la vie est pleine d’aventures et qui mérite une littérature. C’est ce que tu tentes de faire par ton écriture. Plus que dans une biographie, tu me plonges dans un poème d’aventure, dans une géographie qui a de l’allure. Par cette manière, tu te démarques de tes pairs. Passionnant ! ton livre l’est assurément. Le lire, c’est faire un voyage initiatique avec un personnage écologique montrant les rapports harmonieux entre l’homme et son milieu. C’est aussi percevoir un homme destructeur de son propre cœur : la nature. Nature modifiée, dépouillée, saccagée, asphyxiée. Une harmonie attaquée, par un homme insensé, qui en détruisant la nature multiplie ses propres blessures ».

Enfin, la résonnance avec les enjeux environnementaux actuels a été bien des fois soulignée, par de jeunes lecteurs soucieux du monde en plein bouleversement dans lequel ils vivent :

« Il a compris la valeur de l’eau dans cette région et celle de la forêt amazonienne, qui sont à protéger. Encore aujourd’hui ses conclusions résonnent en nous, écocitoyens de demain » (première professionnelle boulangerie-pâtisserie, lycée des métiers du Détroit, Calais).

« Ainsi, alors que le monde fait face à une grave crise écologique, vouloir faire connaître celui qui est considéré comme le père de l’écologie n’a rien d’innocent, d’autant plus que, déjà de son temps, Humboldt s’alarmait sur les conséquences de l’activité humaine sur un lac. De plus, toujours dans cette perspective, grâce à ces descriptions scientifiques, Humboldt nous livre une photographie de la forêt amazonienne au début du XIXe siècle et permet alors au lecteur contemporain de comparer cette forêt avec l’actuelle. Fumey, en passant par Humboldt, peut ainsi dénoncer les ravages humains faits en deux siècles sur cet espace naturel et s’arrête un instant sur une espèce animale décrite par Humboldt et qui a depuis complètement disparue. Humboldt revêt alors ici un rôle très actuel ce qui explique la volonté de le vulgariser pour le grand public » (L3 Sorbonne Université, Paris).

« Les problèmes écologiques rencontrés de nos jours entrent en résonance avec les premières découvertes de Humboldt il y a deux siècles. Ce titre de « père de l’écologie » lui fait retrouver un intérêt fort dans l’actualité » (HK Lycée Giocante-de-Casabianca, Bastia).

L’ouvrage a parfois eu un écho très fort, en lien avec le parcours du lecteur : « En tant qu'étudiante américaine, la lecture des voyages de Humboldt m'a immédiatement rappelé les explorations de Lewis et Clark à travers le territoire de la Louisiane (1804-1806). Avec l’achat du territoire Louisiane en 1803, les États-Unis ont doublé de taille. Le président des États-Unis, Thomas Jefferson, a parlé de son nouveau territoire avec Humboldt, et Humboldt l’aidait avec une cartographie de la région. En entendant les détails du voyage de Humboldt, Jefferson a créé l’expédition de Lewis et Clark pour traverser, cartographier et trouver des plantes et animaux de cette nouvelle région du pays. Je suis sûre que ce voyage aurait pu avoir lieu sans l’aide de Humboldt, mais l’aide d’un Français qui était aussi géographe était essentielle pour le succès de l’expédition. Pendant les années du voyage de Humboldt, les États-Unis étaient un pays avec un vrai système de gouvernement depuis seulement vingt ans. Un pays jeune, sans beaucoup d'institutions universitaires, il n’existait aucune étude formelle de la géographie avant la création du département de la géographie à Berkeley en 1898. Humboldt était déjà mort au moment de l’ouverture, mais il était très connu aux États-Unis et son influence restait évidente. Grâce à ses études en Amérique, son anniversaire en 1869 a été célébré avec des défilés et des fêtes à travers le pays. Le courant américain de la géographie adorait Alexandre de Humboldt, et cette popularité demeure encore parmi les géographes américains aujourd’hui » (L3 Sorbonne Université, Paris).

Première HGGSP, lycée Saint-Jude, Armentières.

 

Si vous deviez encore être convaincu d’ouvrir (et de dévorer) le livre de Gilles Fumey, faites confiance aux hypokhâgneux du lycée Henri IV de Béziers : « Ce livre est un bon compromis entre un roman d’aventures et une biographie scientifique ».

Raphaël Mathevet et Roméo Bondon, Sangliers. Géographies d’un animal politique.

Un ouvrage surprenant, par son titre, son objet, mais aussi des textes écrits du point de vue du sanglier. Là encore, les participants ont pu appréhender la richesse de la géographie.

« Nous n’aurions pas imaginé avant que le sanglier pouvait être un objet de recherche en géographie » (première, lycée Nicolas-Brémontier, Bordeaux).

« L’ouvrage est déroutant par son organisation interne, alternant propos scientifiques et récit à "hauteur de sanglier", plaçant le lecteur du côté de l’animal, de ses perceptions. Ce changement de regard qui déstabilise au début est ensuite attendu au fil de la lecture. Ce procédé réussit parfaitement à faire réfléchir sur la condition animale en décentrant le regard » (HK lycée Carnot, Dijon).

Les participants ont apprécié de lire un ouvrage sur l’animal, de plus en plus présent en géographie : « l’ouvrage est original et innovant, apportant une nouvelle vision de la géographie animale dans les espaces anthropisés. Il aborde différents champs d’études : la géographie sociale, urbaine, environnementale autour d’un vocabulaire précis. C’est le cas, par exemple autour des conflits d’acteurs entre chasseurs et défenseurs de l’environnement, abordant des individus de la société autour d’un aspect sociologique, mais aussi des individus sensibles à la protection environnementale » (L2, Université Jean-Moulin Lyon 3).

Mais Sangliers ne parle pas que du sanglier, bien au contraire. L’étude de notre société, de notre histoire, de notre rapport à la nature et au « sauvage », à notre environnement est au cœur de l’ouvrage.

« Sangliers, géographies d’un animal politique est ainsi un livre qui permet de mieux nous comprendre, à travers la manière dont on traite notre environnement. C’est une prise de recul sur notre point de vue anthropocentriste qui nous permet de nous poser de nombreuses questions. On explore le sujet à travers de nombreux points de vue, témoignages et mises en situation. À lire pour mieux nous comprendre ainsi que le monde qui nous entoure, et ainsi porter un regard nouveau sur cet animal passionnant à qui on mène la vie dure » (diplôme national métiers d’arts et du design, majeure patrimoine, première année, lycée professionnel du bois et de l’ameublement, Revel).

« C’est un livre qui parle de la société sans que ce soit le sujet principal » (première, lycée Nicolas-Brémontier, Bordeaux).

La chasse était bien évidemment présente dans l’ouvrage, mais les propos des auteurs, argumentés, sourcés, nuancés et fins, n’ont suscité aucune indignation chez des participants parfois eux-mêmes chasseurs ou en lien (familial ou amical) avec des chasseurs.

« Nous avons choisi ce livre pour la proximité que nous avons avec ce sujet, tous habitant dans ou non loin de la Camargue, ce sujet est “simple” et enrichissant pour nous. De plus, ayant des parents agriculteurs, c’est une problématique à laquelle tous les paysans sont confrontés et nous avons trouvé très intéressant d’avoir un point de vue qui diffère de la réalité vécue par le monde agricole. De plus, le fait que le livre parle de l’impact de la chasse sur cette espèce nous a beaucoup touchés étant donné l’implication de plusieurs d’entre nous dans cette activité “traditionnelle” dans notre région. Nous recommandons fortement de lire cet ouvrage à tous ceux qui sont attachés à leurs traditions mais qui détiennent un esprit ouvert aux critiques fondées des auteurs » (terminale HGGSP, lycée Saint-Charles, Saint-Martin-de-Crau).

« Ce raisonnement rigoureux m’a ainsi rendu confiant dans la lecture que je faisais, pour aborder un animal et la chasse dont il fait l’objet, souvent très critiqués aujourd’hui pour de multiples raisons ; ce livre en donne de bonnes, dont j’ai apprécié la justesse et la clairvoyance, sans excès. Pour me situer à vos yeux, je chasse occasionnellement dans des battues villageoises en tant que rabatteur, et le sujet m’intéresse en général. Le premier angle abordé est très gestionnaire, et m’a révélé tout un pan de la chasse que j’ignorais, en équilibrant avantages et inconvénients, à l’appui d’un remarquable "épluchage" du droit de la chasse. D’une part, les auteurs montrent que la chasse permet le maintien de certaines solidarités rurales, de certains héritages, et d’une économie traditionnelle qui continue à servir les sociétés. De l’autre, ils pointent le nourrissage d’animaux destinés à être abattus – ce qui dérègle tout l’écosystème –, l’industrie abusive de prestige et d’affaires, et les conflits d’acteurs entre les différents corps de la société (…). Par ailleurs, le livre expose l’enjeu de la régulation des espèces animales sauvages, par la chasse notamment. C’est surtout l’ambiguïté de cette pratique qui pose problème : les chasseurs ayant un positionnement flou, investis d’un rôle institutionnel de régulation, mais pratiquant aussi la chasse par pur plaisir individuel » (L3 Sorbonne Université, Paris).

HK lycée Faidherbe, Lille.

« La démarche est certes scientifique, mais le propos ne devient jamais complexe, ni trop scientifique justement. Il s’agit bien d’un ouvrage de géographie à destination des géographes mais aussi d’un public plus large, désireux d’en apprendre plus sur le sanglier, sur la chasse mais aussi sur le monde rural. Les descriptions sont très fines et réalistes. L’étude s’appuie sur de nombreuses données issues d’organismes scientifiques ou de collecte de statistiques. Les auteurs nous entrainent avec eux dans leurs investigations, sur les traces des sangliers dans les campagnes françaises. Ce fut donc une lecture intéressante et éclairante pour la plupart d’entre nous » (licence 2, Université Bretagne Sud, Lorient).

« Sangliers se présente comme un livre original, grâce à une nouvelle façon d’appréhender la littérature scientifique en géographie. Le sous-titre et sujet central, Géographies d’un animal politique, met l’accent sur les rapports que les humains entretiennent avec les sangliers. Le point de vue ouvre une nouvelle perspective en alternant un regard scientifique tout à fait humain avec un regard animal dans de courts récits, « à hauteur de l’animal ». Sangliers propose donc une nouvelle manière d’écrire la géographie, en résonnance avec notre époque, et cible un public bien plus large que le seul lectorat universitaire » (L3 Sorbonne Université, Paris).

Première HGGSP, lycée Victor-Hugo, Paris.

 

Pour cet ouvrage aussi, les liens avec les programmes du lycée ont été soulignés : « en spécialité HGGSP, nous avons évoqué le thème de la frontière, or cet animal ne connait pas ces limites administratives et politiques or, l’exemple des maladies infectieuses permet d’identifier qu’il peut être un agent de diffusion, aussi a-t-il été traqué entre France et Belgique » (première HGGSP, lycée Saint-Jude, Armentières).

Diplôme national métiers d’arts et du design, majeure patrimoine, première année, lycée professionnel du bois et de l'ameublement, Revel.

Cube sensoriel, première HGGSP, lycée international des Pontonniers, Strasbourg.

 

Si vous n’avez pas encore ouvert Sangliers, voici une vidéo qui pourrait vous en donner l’envie, réalisée par les élèves du Lycée Jeanne Baret (Montreuil) : Sangliers, Montreuil.

Basile Michel, Les quartiers culturels et créatifs

De nombreux textes ont noté l’éditeur de l’ouvrage de Basile Michel : « Avant même d’évoquer le propos de l’auteur, si l’on est assez attentif et observateur, on remarque que le livre de Basile Michel a été édité par la maison d’édition Le manuscrit savoir, dans la collection Devenirs urbains. Le nom de cette collection est assez révélateur du contexte social et démographique dans lequel elle a été fondée. Les différents ouvrages de cette collection sont des œuvres (livre scientifique, atlas…) qui se focalisent sur une géographie de l’urbain, de la ville, et qui tentent d’en explorer les mutations et d’en approfondir les problématiques actuelles. Cette collection s’inscrit donc dans le contexte de l’urbain généralisé et vise à employer la géographie comme un outil de compréhension du monde actuel. Si l’on se concentre à présent sur le propos de l’auteur, dès l’introduction, on comprend que dans ce contexte de l’urbain généralisé et de concentration des pouvoirs et richesses dans les villes, les quartiers créatifs et culturels ont un rôle important à jouer. En particulier dans les villes marquées par la désindustrialisation, où ces espaces représentent souvent un espoir de renouveau et de dynamisme économique » (L3 Sorbonne Université, Paris).

« La "ville post-industrielle", au cœur de l’ouvrage de Basile Michel, s’insère dans les travaux des années 1960 et 1980 qui amorçaient alors une réflexion sur la société post-industrielle avec les ouvrages de Daniel Bell The Coming of Post-Industrial Society et d’Alain Touraine La Société post-industrielle. Dans cette société post-industrielle, qu’est-ce que la ville post-industrielle ? Quelles mutations sociales, économiques, culturelles et politiques s’opèrent actuellement dans cette ville et la ville en général ? Ces premières questions que je soulève sont également celles qu’examine la collection « Devenirs urbains » dirigée par Didier Desponds. Et plus particulièrement dans Les quartiers créatifs et culturels. Ambivalence de l’art et de la culture dans la ville post-industrielle, Basile Michel interroge la place de l’art et de la culture dans l’aménagement et le réenchantement des villes post-industrielles. Dès lors, l’art est-il un fait majeur des nouvelles villes post-industrielles ? » (L3 Sorbonne Université, Paris).

Un sujet original et récent, des terrains très variés et faisant écho au vécu des lecteurs, une écriture limpide et fluide : voici les ingrédients du succès des Quartiers culturels et créatifs.

« Tout d'abord le sujet a plu, car il change de sujets plus classiques (les frontières...) ou depuis des années à la mode (le climat...). En plus ici ce n'était pas que de la culture, c'était intégré à la vie » (atelier Sciences Po de Cherbourg, lycées Millet, Grignard, Tocqueville et Hélye).

« Depuis la lecture de ces pages, j’ai remarqué que je fréquentais dans la vie quotidienne le genre de quartiers que Basile Michel évoque. Ma production urbaine est même déterminée certains jours en fonction de ces quartiers » (L3 Sorbonne Université, Paris).

Résonnance avec le vécu, mais aussi avec la scolarité : « En tant qu'étudiants en BTS tourisme, ce livre nous a paru pertinent. On a eu envie de faire la fête dans ces lieux « créatifs », aller boire un verre dans les bars branchés, participer à un festival, s'arrêter devant des murs qui racontent une histoire. On s'est projeté comme guide touristique ou tout simplement comme visiteurs... D'un point de vue géographique, ce livre a fait écho à l'enseignement que l'on reçoit en tourisme et territoires. De nouvelles études de cas, des termes ou thématiques que l'on voit en cours comme l'étude des représentations ou des imaginaires... Les différents processus que l'on étudie, comme la diversification, la marchandisation des quartiers, la gentrification, la durabilité. Certes, il n'est pas toujours facile d'accès pour nous. Le vocabulaire est précis, les références nombreuses et souvent inconnues. Mais finalement, on a réussi à extraire des éléments pour mieux comprendre la mise en tourisme de ces territoires urbains » (BTS, lycée Saint-Joseph-Bossuet, Lannion).

Première HGGSP, lycée Jeanne d’Arc, Bayeux.

Première HGGSP, lycée Saint-Jude, Armentières.

HK lycée Montesquieu, Le Mans.

Si vous souhaitez une présentation vidéo de cet ouvrage, regardez celle des élèves du lycée Melkior-Garré (Cayenne). Nous vous conseillons aussi de lire l’article réalisé par les élèves sur leur participation au Prix.

Nephtys Zwer (dir.). Ceci n’est pas un atlas.

Ceci n’est pas un atlas, mais ceci est rempli de cartes ! Ouvrage intriguant donc, qui a beaucoup plu aux lecteurs. Ouvrage richement illustré et de lecture aisée, sans qu’un ordre précis doive être suivi.

« Ce qui frappe à l’abord de cet ouvrage, c’est son titre : ceci n’est pas un atlas. Cette négation demeure le fil rouge du début à la fin, des exemples de « contre-cartographies » à la conclusion qui n’en est pas une (« ceci n’est pas une conclusion »). Au-delà du paradoxe provocateur, cette négation a une portée forte, en ce qu’elle s’inscrit dans la démarche globale des auteurs : déconstruire, remettre en question, s’opposer à des discours imposés » (L3 Sorbonne Université, Paris).

« Le format choisi à un côté esthétique qui attire le lecteur et l’incite à lire l’ouvrage. Les articles sont d’une longueur modérée qui en facilite la lecture sans se sentir obligé de lire du début à la fin. De plus, les sujets traités portent sur des espaces variés et internationaux » (club lecture première / terminale, lycée français Charles-de-Gaulle, Londres).

« C’est un livre accessible à toutes et tous, quel que soit le niveau de la personne en géographie. Cela permet de diffuser du savoir à l’ensemble des gens et pas juste à des spécialistes » (première, lycée Nicolas-Brémontier, Bordeaux).

« Ainsi, ce qui compte dans ma géographie, c’est la méthode d’écriture. J’ai besoin que ma géographie soit concrète et colorée. Ce sont les couleurs et la mise en forme qui me parlent. Depuis toute petite, j’ai besoin de pratiquer la couleur, et cela se retrouve dans mes dessins d’enfants. Désormais, ce sont mes cours que je surligne selon une colorimétrie particulière : une couleur pour les idées principales d’un paragraphe, le bleu pour les acteurs importants, le jaune quant aux évènements à retenir et le fuchsia pour les dates. C’est la meilleure façon que j’ai trouvée pour intégrer des connaissances. Je dois visualiser pour pouvoir apprendre ou interpréter. Selon moi, c’est pour cela que la cartographie sous toutes ses formes me parle beaucoup plus qu’un texte ou un document statistique. J’adore approcher les savoirs de manière visuelle et concrète, ce qui est le fondement même d’une représentation. Ma géographie est une géographie axée sur le social qui a beaucoup été influencée par l'apprentissage scolaire mais qui commence petit à petit à se décloisonner en intégrant des expériences et des analyses personnelles. Ma géographie est culturelle et sensible, et aime mettre en avant la subjectivité, que ce soit la subjectivité des acteurs interrogés ou la mienne en tant que géographe » (L3 Sorbonne Université, Paris).

Ceci n’est pas un atlas car ceci relève de la contre-cartographie, que les lecteurs connaissaient peu, mais ont eu plaisir à découvrir (et, nous le verrons plus tard, à pratiquer !) : « Le thème abordé – la contre- cartographie, qui peut également être appelée cartographie critique, radicale, alternative, collaborative… – est en effet très peu présent dans les programmes d’enseignement, et les membres de notre groupe ont eu, de ce fait, le sentiment d’une découverte » (HK lycée Condorcet, Paris).

« La contre-cartographie s’inscrit dans le cadre d’une géographie critique soucieuse de donner à voir et à comprendre des sujets souvent négligés par la géographie conventionnelle. L’ouvrage livre donc une réflexion épistémologique très efficace sur les évolutions de la cartographie » (HK lycée Jean-Vilar, Meaux).

Ceci n’est pas un atlas, car ceci n’est pas neutre, ceci est un outil de lutte !

« Les auteurs de l’atlas prennent un parti audacieux : celui d’exposer leurs pensées et réflexions aux lecteurs. Ils ne prétendent pas à une parfaite impartialité, ce qui apporte une dimension d’honnêteté à l’ouvrage » (HK lycée La Bruyère, Versailles).

« Au fur et à mesure du livre, la définition de la carte, ou plutôt de la « contre-carte », est précisée, affinée, remise en question et adaptée : par exemple, les données sont collectées, retravaillées en enfin utilisées pour la création des productions graphiques. (…) Un des exemples qui nous a marqué est le dossier complet sur la lutte contre l’éviction dans la baie de San Francisco. Les chiffres, déjà impressionnants en eux-mêmes, sont enrichis par des affiches de mécontentement, par une carte représentant les quartiers les plus touchés à San Francisco. Cet ensemble de documents met au jour une triste vérité affectant de nombreuses villes partout dans le monde, mais aussi les réactions des habitants face à cette problématique » (HK lycée Henri IV, Paris).

« En tant qu’étudiants et jeunes citoyens, nous apprenons aussi de nouveaux termes à savoir ceux de cartographie participative et de cartographie radicale dont le but est de saisir les différents aspects de la vie quotidienne au-delà des sciences sociales, dont les observations sont parfois lacunaires. Modes d'expression alternatifs, elles abordent souvent des sujets sensibles, parfois tabous, généralement ignorés voire tus dans les sociétés – comme les violences faites aux femmes dans l’espace public, l’appropriation des terres indigènes à des fins extractivistes – et comblent ainsi le vide d'informations des cartes officielles. De fait, elles présentent aussi une série de contre-lectures de l'utilisation des espaces. La contre-cartographie offre donc un autre regard sur la manière de voir le monde, les interactions entre les êtres humains et leur environnement » (HK, lycée Montesquieu, Le Mans).

« On a une vision très occidentale du monde et masculine alors que dans l’ouvrage, sont représentées de nombreuses communautés différentes, ainsi que des femmes. Nous avons particulièrement aimé l’article sur le nom des rues à Vienne qui font référence principalement à des hommes et comment cela est en train d’évoluer » (club lecture première / terminale, lycée français Charles-de-Gaulle, Londres).

« On a aussi apprécié la diversité des territoires cartographiés. Il n'y a pas de hiérarchie, de Nord/Sud etc.… cela est montré dès le sommaire où le planisphère est déconstruit pour remettre en question nos représentations du monde, souvent centrées sur l'Europe et modelés par les très nombreuses cartes qu'on a l'habitude de voir. Cela mène à une réflexion autour du rapport à l'espace, notamment de l'espace vécu. Ces cartes ont permis de cartographier ceux qui sont « invisibles ». Cela sort aussi des règles académiques de la discipline. Les cartes sont aussi réalisées par ceux qui ont vécu les événements. Les cartes faites par les migrants sont intéressantes et belles car seuls ceux qui ont vécu la migration peuvent dessiner ces cartes. L'humain transparaît très fortement au travers de ces cartes » (première et terminale Lycée Saint-Adjutor, Vernon).

Première HGGSP, lycée Victor-Hugo, Paris.

 

« Nous souhaitons alors conclure par une citation directe de l’ouvrage résumant la portée du récit cartographique des minorités et le combat mené par les auteurs et les individus indûment marginalisés : "Raconter, documenter, imaginer nos luttes par les cartes et les récits nous confère un pouvoir réel qui vaut plus que tous les moyens financiers de nos adversaires. Notre force est de nous mélanger, d’échanger, de renforcer mutuellement nos expériences collectives, constituant le maillage serré et dense d’une culture commune. C’est ce à quoi ce livre souhaite contribuer en partageant ces exemples de pratiques qui prennent racine" » (HK lycée Pasteur, Besançon).

« Cet atlas permet également de percevoir le monde d’un autre œil tout en donnant de la visibilité à une large variété de sujets et d’enjeux, aussi bien sociaux, qu’économiques et politiques, qui font l’actualité de ces dernières années. Il était intéressant de pouvoir comprendre les contextes de recherches et la démarche adoptée par les géographes participant à cet ouvrage. Ce n’est pas la géographie que nous avons l’habitude d’étudier au lycée » (terminale, lycée Vauban, Luxembourg).

« Ce livre ouvre la porte à une cartographie collaborative, où les citoyens ou les populations autochtones participent à l’élaboration de cartes, pour répondre à différents besoins. La pluralité des auteurs donne lieu à une certaine variété dans la conception des cartes et leurs styles (…). Le livre offre aussi une approche multiscalaire allant d’une échelle ultra-locale (de la taille d’un village) à une échelle régionale » (L2 Géographie sociale, Université Jean-Moulin, Lyon 3).

« Après avoir étudié le livre Ceci n’est pas un atlas, j’ai pris conscience de l’importance des cartes, en tant qu’outil géographique mais surtout en tant qu’outil de lutte : une carte est vraiment politique puisqu’elle correspond à la vision qu’on a d’un espace, d’un lieu : on choisit ce qu’on met sur une carte. Il était donc très intéressant d’observer la perception que les populations ont d’un territoire, et de comparer, notamment dans le cas d’un territoire colonisé, la perception des autochtones à celle des institutions. J’ai aussi découvert des cartes sous de nouvelles formes, comme des tapisseries » (première HGGSP, lycée Victor-Hugo, Paris).

Ceci n’est pas un atlas, ceci est de l’art ! C’est ce qu’en disent les élèves de première du Lycée Nicolas-Brémontier de Bordeaux : « le livre montre que la carte est aussi un objet d’art ».

Première, lycée Fénelon Sainte-Marie, Paris.

 

Et ceci n’est pas un atlas, ceci est un mode d’emploi ! Et ceci a inspiré bon nombre de lecteurs.

« L’auteur a décidé d’intégrer à la fin de son livre une notice incitant à nous saisir de la cartographie participative, ce qui explique aujourd’hui le rendu de notre production finale. "Ceci n’est pas une prépa", en retraçant le parcours quotidien de trois étudiants entre leur domicile et la CPGE Fénelon Sup’ de Clermont-Ferrand, met en exergue les inégalités socio-spatiales auxquelles les étudiants sont confrontées : éloignement des parents, temps de trajet, utilisation et durée de temps libre… autant de facteurs qui influencent nécessairement, à grande ou petite échelle, à long ou à court terme, les conditions de travail des étudiants et in fine, peut-être, leurs réussites ou leurs échecs. La cartographie participative permet ainsi un travail collaboratif et un vrai focus sur des enjeux géographiques importants, tout en démocratisant la géographie auprès d’un public nouveau » (HK et KH, lycée Fénelon, Clermont-Ferrand).

HK et KH lycée Fénelon, Clermont-Ferrand.

Seconde FLE, lycée Maurice-Utrillo, Stains.

Pour illustrer cet ouvrage, j’ai choisi un pays limitrophe de la France, dans lequel j’ai séjourné lors de mes vacances : l’Italie. Pour le représenter, j’ai choisi un élément qui lui a permis de se faire connaître à l’échelle mondiale : sa culture gastronomique et plus précisément ses pâtes. Ainsi, chacune des 20 régions italiennes sont démarquées par un type de pâte montrant ainsi que la nourriture est très importante et diversifiée en Italie. Première, lycée Fénelon Sainte-Marie, Paris.

Seconde, lycée Pierre-du-Terrail, Pontcharra.

Si tout ceci ne vous a pas encore convaincu, suivez l’avis des hypokhâgneux du Lycée Bertran-de-Born (Périgueux) : « Si ce livre mérite de remporter le prix de géographie c’est pour la prise conscience qu’il permet au lecteur (…). Par exemple, saviez-vous qu’il était possible de réaliser une carte sur les lieux où des enfants noirs ont été tués à Détroit ? ».

Le(s) mot(s) de la fin

Pour terminer, nous souhaitons mettre en lumière le témoignage d’un enseignant, puis celui d’un groupe d’élèves de première HGGSP.

« Participer à ce prix était un souhait depuis l’an dernier et j’ai franchi le pas cette année, motivé par l’idée de donner la possibilité aux élèves de rencontrer des objets géographiques qui sortent un peu des limites fixées par les programmes du secondaire. C’est une porte ouverte vers la géographie universitaire et la sélection renforce l’accessibilité des sujets de recherche auprès d’un large public. (…) Les élèves ont particulièrement apprécié la sélection dans sa globalité et le temps d’échanges et de débats sur les livres avant de procéder au vote leur a permis d’exposer leurs points de vue et de proposer une analyse de chaque livre » (Yoann André, professeur au Lycée Nicolas-Brémontier, Bordeaux).

« La majorité d’entre nous n’avions lu jusqu’à maintenant que des bandes dessinées, des pièces de théâtre, des nouvelles et des romans dans le cadre scolaire. Participer au prix du livre de géographie des lycéens et des étudiants de CPGE nous a permis de nous familiariser avec des ouvrages universitaires plus pointus, de percevoir autrement la géographie et de comprendre la démarche suivie par des chercheurs/euses en sciences humaines » (première HGGSP, lycée Louis-Armand, Villefranche-sur-Saône).

Ces deux témoignages, parmi tant d’autres, soulignent l’intérêt du prix, du lycée à l’université, en passant par les lycées techniques et professionnels, les BTS et les classes préparatoires. Chacun peut lire de la géographie, faire de la géographie, réfléchir en géographe.

Enfin, le comité ((Pour le Prix 2024 : Maie Gérardot, Guillaume Barral, Farid Benhammou, Aurélien Broisat, Pierric Calenge, Caroline Émin, Claire Gérardot. Pour le prix 2025 : Maie Gérardot, Farid Benhammou, Alice Bombardier, Aurélien Broisat, Pierric Calenge, Caroline Émin, Claire Gérardot.)) tient à remercier infiniment les collègues qui participent au prix, qui nous suivent dans cette aventure depuis le début ou nous rejoignent en route, qui prennent du temps pour lire la sélection et guider leurs élèves tout au long de l’année pour le choix de leur lauréat ; nous tenons aussi à remercier les élèves et les étudiants, dont les textes, les dessins, les vidéos, les cartes ou encore les couvertures d’ouvrages ne cessent de nous surprendre et de nous émouvoir. C’est grâce à vous tous que ce prix vit, et nous vous en sommes très reconnaissants.

Nous vous donnons rendez-vous pour l’édition 2025 : le lien d’inscription sera mis en ligne à la toute fin du mois d’août.

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Maie GÉRARDOT

Porte-parole du Prix du livre de géographie des lycéens et étudiants, agrégée de géographie, docteure en géographie et aménagement, professeure en CPGE - lycée Georges-de-la-Tour, Metz.

 

Édition et mise en web : Jean-Benoît Bouron