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L'impossible géographie de Jérusalem

Publié le 12/12/2017

Le mercredi 6 décembre 2017, le président des États-Unis Donald Trump a reconnu Jérusalem comme capitale de l'État d'Israël. Voir ce qu'il faut en retenir, par Le Monde, et cet article dans The Conversation

  • Spyros Sofos et Vittorio Felci, « Jérusalem, le nœud gordien des Israéliens et des Palestiniens », The Conversation France, 7 décembre 2017. (version originale en anglais) : « La décision de Trump méconnaît totalement la fragilité de la coexistence entre Israéliens et Palestiniens à Jérusalem. Elle fait fi aussi de la signification que revêt la cité pour l’identité palestinienne et pour ses aspirations nationales, ainsi que l’impact dévastateur qu’elle va avoir sur un processus de paix déjà moribond. »
Quelques ressources pour faire le point :
  • Un article de la revue L'Histoire dont le titre a inspiré celui de cette brève : « L'impossible capitale » de Vincent Lemire, avec des cartes et une chronologie. 
  • Pierre Magnan, « Tel Aviv, Jérusalem : quelle est la vraie capitale d’Israël ? », Géopolis, France TV info, 30 janvier 2017. La proclamation de Jérusalem « une et indivisible » par la Knesset en 1980 a été condamnée par le Conseil de sécurité de l’ONU (résolution 476). L’auteur de l’article rappelle que « si Jérusalem n'est pas reconnu comme capitale d'Israël par le droit international, la ville abrite de fait les institutions politiques et étatiques israéliennes et tous les chefs d'État ou de gouvernement se sont rendus à Jérusalem pour rencontrer les autorités du pays, voire s'exprimer devant la Knesset. »
  • La résolution 476 de 1980 par l’Organisation des Nations Unies : « Déplorant qu’Israël persiste à modifier le caractère physique, la composition démographique, la structure institutionnelle et le statut de la Ville sainte de Jérusalem » et « Gravement préoccupé par les mesures législatives entamées à la Knesset israélienne en vue de modifier le caractère et le statut de la Ville sainte de Jérusalem. »
  • Hervé Amiot, « Jérusalem, une ville divisée chargée de symboles », Les clés du Moyen-Orient, 9 octobre 2013, republié le 8 décembre 2017. « Ainsi, on voit que la vieille ville s’inscrit dans des rapports de force symboliques. Par exemple, les Israéliens mènent des fouilles archéologiques pour montrer que Jérusalem était la capitale du royaume de David. Mais les rapports de force sont aussi réels : les Israéliens acquièrent de plus en plus de logements dans le quartier musulman, souhaitant affirmer leur présence dans la vielle ville, face notamment à la démographie de la population (sic) musulmane (les chrétiens sont très peu nombreux). »
Des cartes de Jérusalem

L'article évoqué ci-dessus propose trois cartes claires et pédagogiques :

 

 

Un livre

L’ouvrage d’Irène Salenson, Jérusalem. Bâtir deux villes en une, permet de faire un pas de côté en analysant, par l’urbanisme, la manière dont la ville et sa morphologie cristallisent le conflit.

  • Irène Salenson, Jérusalem. Bâtir deux villes en une. Éd. de l’Aube, 2014, 256 p. L’ouvrage a fait l’objet de plusieurs comptes-rendus, par exemple :
  • Compte-rendu d’Éric Verdeil, dans son carnet de recherches Rumor : « Ce petit livre courageux synthétise une thèse très dense, soutenue en 2007 au terme d’un travail de terrain long et méticuleux, et actualisée ici sur certains points. L’auteure fréquente Jérusalem depuis quinze ans. Elle parle l’hébreu, comprend l’arabe […] »
  • Compte-rendu de Clémence Vendryes, dans Géocarrefour : « Depuis 1948, c’est en effet un problème de souveraineté et d’aménagement de l’espace qu’a cristallisé le conflit israélo-palestinien à Jérusalem. D’une part, l’approche urbanistique s’intéresse au contenu de ces unités contradictoires et, d’autre part, l’approche par les acteurs étudie les jeux d’addition, de soustraction et de division opérés par les bâtisseurs de Jérusalem. »
  • Compte-rendu de Benoît Montabone et Joni Aasi dans la Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée : « [Irène Salenson] démontre que les trois stratégies de peuplement affichées (densification du centre, poursuite de développement des colonies, construction de nouveaux quartiers) répondent directement au sentiment de peur démographique des Israéliens. »
Le regard d'un écrivain-géographe
  • Emmanuel Ruben « Jérusalem sous le ciel exactement », Libération, 10 décembre 2017. L'auteur raconte comment l'enfant qu'il était, persuadé que Jérusalem était la capitale indiscutable d'Israël, fut confronté à d'autres points de vue. « Donald Trump est un petit colon en culottes courtes, capricieux, assis seul sur son strapontin de président, dans le wagon bondé du XXIe siècle. Il regarde la carte du monde et il ne comprend pas toutes ces subtilités, toutes ces bigarrures qui l’inquiètent et ne collent pas avec l’image qu’il se fait de la réalité. »
    (Sur les écrivains-géographes, voir aussi notre brève du 6 décembre : Michel Bussi dans la lignée des écrivains géographes)
Sur la dimension historique du conflit
  • Depuis 1967 : Samy Cohen, « Juin 1967, la guerre la plus longue », The Conversation France, 14 juin 2017. Pour l’auteur, la guerre des Six jours a en fait duré cinquante ans, puisqu’elle ne s’est jamais terminée. La situation actuelle est pour l’auteur le résultat de cette victoire rapide qui s’est transformée, sur le long terme, en défaite de la paix.
  • Depuis 1900 : Vincent Lemire, Jérusalem 1900, la ville sainte à l’âge des possibles. Paris, Armand Colin, 2013, 251 pages. Compte-rendu d'Irène Salenson, dans Les Cahiers d’EMAM [En ligne], 27 | 2015,
  • Depuis 70 ap. J.-C. : Michaël Girardin, « Il y a 1 947 ans, les Romains détruisaient le temple de Jérusalem », The Conversation France, 14 novembre 2017. L’auteur montre que la diaspora ne date pas de la destruction du Temple en 70, contrairement à une idée reçue. C’est en 135, avec la transformation de la province de Judée en Syrie-Palestine par le pouvoir romain, que le judaïsme prend conscience que le temple ne sera pas reconstruit, et opère une transformation importante.
D'autres entrées pour explorer la géographie de Jérusalem
  • Par le tramway : David Amsellem, et Carine Dupeyron, « La cartographie pour anticiper, appréhender et convaincre : l’affaire du tramway de Jérusalem », Sécurité et stratégie, vol. 16, n° 1, 2014, p. 27–34. Le conflit autour de la construction, par des entreprises françaises, d'une ligne de tramway traversant des colonies israéliennes et des quartiers arabes, est l'occasion de montrer les usages possibles de la cartographies dans un conflit d'acteurs urbain.
     
  • Par le genre : Valérie Pouzol, « ‪‪Les Femmes du Mur (Jérusalem, 2016-1880)‪‪ », Clio, vol. 44, n° 2, 2016, p. 253–263. Le Mur des Lamentations est géré par les autorités juives orthodoxes qui veillent à la séparation stricte des genres. Un groupe féministe, les femmes du Mur, mène un combat pour plus de mixité, qui a aussi une dimension politique plus large.
     
  • Par la langue : Elsa Grugeon, « L’islam en ses langues. Réalités et enjeux des usages linguistiques sur l’Esplanade des mosquées à Jérusalem », Les carnets de l'Ifpo, mai 2014. L'accès à l'Esplanade des mosquées, encadré par les autorités israéliennes, est parfois difficile pour les arabophones. Entre pèlerinages et mise en tourisme, l'article rappelle brièvement les enjeux géopolitiques autour de ce lieu saint et montre la variété des langues utilisées par les visiteurs musulmans.

Au premier plan, la borne du chemin est identifiée par le code couleur bleu et blanc, qui reprend les couleurs symboliques du judaïsme, présentes aussi sur le drapeau israélien. Le sentier s'avance vers le sud, rejoignant des sites d’intérêt archéologique tout en ignorant le quartier palestinien de Ras al-Amud visible à gauche à l’arrière-plan. Sur la droite, l’itinéraire prend de la hauteur pour rejoindre la route qui mène à la porte des Lions vers le nord ou à la porte des Déchets (accès au Kotel) vers le sud.

Source : Clémence Vendryes, « Jérusalem, une guerre pour l’éternité. Conflits territoriaux autour des cimetières musulmans et juif de Bab ar-Rahma, Yosefiya et Har HaZeitim », Géoconfluences, décembre 2016.