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Cyberespace

Publié le 08/12/2025
Auteur(s) : Laurent Carroué, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, directeur de Recherche à l’IFG - université Paris VIII
Jean-François Perrat, agrégé et docteur en géographie, enseignant d'histoire-géographie - lycée Frédéric Faÿs (Villeurbanne)
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Le cyberespace est à la fois le réseau international créé par l’interconnexion et l’intégration des systèmes d’information et de télécommunication et l’espace numérique de communication mondial constitué par ce réseau. Il est fondé sur quatre composantes majeures : les infrastructures logistiques (câbles en fibre optique...) et de gestion (protocoles, routeurs, serveur racine des systèmes d’adresses internet ou courriels, fournisseur d’accès...) constitutives de l’internet ; les équipements – professionnels ou personnels, publics ou privés (centres de données ou data centers, calculateurs, ordinateurs, tablettes, téléphones portables...), les applications et les données (ANSSI, 2025). À partir du cyberespace, un nombre croissant d’experts identifie la constitution d’une datasphère (Douzet, 2020).

Pour le grand public, la difficulté à l’appréhender le cyberespace s’explique par le hiatus existant entre sa réalité matérielle et territoriale d’un côté, les représentations produites et véhiculées (selon lesquelles il serait hors-sol, virtuel, déterritorialisé, immatériel...) de l’autre et enfin, ou surtout, par l’expérience de sa pratique. Ainsi, les usagers ne savent que très rarement où, par qui et comment sont stockées leurs données ; alors que les États-Unis et leurs géants du net, ou GAFAM, abritent 60 % des capacités mondiales de traitement et de stockage des centres de données (Carroué, 2025). De même, la circulation dans la fibre optique de l’information à la vitesse de la lumière est si rapide et les temps de latence du trajet si faible (Portugal–Brésil : 6 200 km en 0,06 seconde par le câble EllaLink que la traversée de l’espace mondial devient « transparente » pour un usager. À condition cependant qu’il dispose de l’électricité, d’un bon équipement informatique et que le système soit efficient : l’accès au cyberespace n’est donc en rien isotropique et reflète directement les fortes inégalités caractérisant l’espace mondial (Bouron et al., 2022).

Encadré 1. Le cyberespace, imaginé dans la fiction avant de devenir une réalité quotidienne

Le cyberespace n’est en rien « virtuel » ; s’il n’est à proprement parler ni un espace géographique, ni un lieu, ni un territoire (Deforges, 2014), il est un immense réseau de fibres et de nœuds inscrit concrètement dans des espaces, des territoires et des lieux. Malgré parfois la séparation par d’énormes distances, il permet à un groupe de personnes interconnectées – donc mises en réseaux, pour telle ou telle raison (familiale, politique, associative, syndicale...) – de se penser comme une « communauté ».

Du fait de son rôle critique dans le bon fonctionnement des États, des économies et des sociétés (opinions publiques...), de son poids croissant (explosion des centres de données lié à l’intelligence artificielle) et de ses aspects névralgiques, le cyberespace est devenu un champ géopolitique privilégiés de rivalités et de conflits. Cet espace numérique doit être pensé comme un espace stratégique (Taillat et al., 2023). Ainsi, alors que l’affrontement fait rage entre les États-Unis, qui cherchent à consolider son hégémon mondial sur le cyberespace, et la Chine, qui veut préserver son indépendance, de nombreux régimes autoritaires ou dictatoriaux en interdisent l’accès à leur population en bloquant internet à l’échelle nationale ou dans ses liaisons avec l’étranger. La cyberpuissance (cyberpower) désigne la capacité à contrôler le cyberespace.

À partir de la racine cyber–, on assiste enfin à la déclinaison d’un nouveau vocabulaire annexe renseignant sur les enjeux majeurs de sécurité qui se posent : cyberattaque, cybercriminalité, cyberespionnage, cyberdéfense ou cybersécurité (ANSSI, 2025). L’intégrité et la sécurité des systèmes – parfois d’importance vitale (défense, banques, énergie, transports, télécommunications..., mais souvent vulnérables – sont mises en cause par le développement d’activités criminelles (pirates informatiques ou hackers, infection par un virus, rançongiciels – programmes malveillants bloquant un système jusqu’au paiement d’une rançon –, fraude à la carte bancaire...). Les activités criminelles les plus sensibles et dangereuses se retrouvent au sein du cyberespace dans le darknet. Enfin, les opérations de déstabilisation (comme celles menées par la Russie pendant l’invasion de l’Ukraine), de manipulation des opinions publiques (fausses informations ou fakes news), d’ingérences étrangères ou d’espionnage entre services de renseignements militaires et civils des États sont aujourd’hui généralisées. 

Laurent Carroué, décembre 2025. Dernière modification (JBB), décembre 2025.


Références citées
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