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Ghetto

Publié le 25/11/2024
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Le terme de ghetto désigne un quartier d'une ville bien individualisé où sont regroupés les membres d'une communauté plus ou moins homogène. Le lieu éponyme se situe à Venise : l'île de Ghetto a été un lieu d'installation des Juifs chassés d'Espagne (1516). Le terme s'est ensuite étendu à l'espace de relégation des juifs dans les villes d'Europe centrale et orientale. Sous l'impulsion de l'École de Chicago, le ghetto a progressivement désigné, dans les villes américaines, un espace de regroupement communautaire pour les immigrants de fraîche date (Little Italy, Chinatown...) et pour les Afro-américains. 

Par extension, le terme de ghetto désigne tout quartier qui connaît une mise à l'écart subie ou voulue (dans le cas des gated community). Central par sa localisation dans l’agglomération, le ghetto subi est dans une situation de marge urbaine par la position sociale de ses habitants. De l'intérieur, le territoire est porteur d'une forte identité ; de l'extérieur, il est porteur de représentations fantasmées ainsi que d’assignations ou de stigmates spatiaux. La limite du ghetto est bien marquée dans les perceptions de ses habitants.

Le terme est plus fréquemment attribué aux quartiers pauvres qu’aux quartiers riches. Dans les faits, on observe une plus forte diversité sociale dans les quartiers populaires que dans les « ghettos de riches » socialement sélectifs, d’autant plus que même le personnel de maison vient en grande partie de l’extérieur, en parcourant parfois de longs trajets tous les jours. D’une façon générale, les scientifiques estiment depuis longtemps que, en France en tout cas, le quartier populaire comme ghetto est un mythe, qui sert souvent un projet politique en arrière-plan (Wacquant, 1992 ; Gilbert, 2024).

La ghettoïsation désigne, au sens strict, le processus de transformation d'un quartier en territoire isolé et fermé. Dans un sens plus large, couramment employé, la ghettoïsation désigne tous les processus de ségrégation spatiale.

 
Encadré 1. Les ghettos afro-américains des villes étatsuniennes

Les sociologues Loïc Wacquant et W.J. Wilson ont retracé la généalogie du mot « ghetto » aux États-Unis. Ils distinguent une première période (1880–1968) où le ghetto noir se situe dans la trajectoire du ghetto juif dans les villes américaines et correspond à la concentration des Noirs dans les quartiers industriels. Puis l’hyperghetto (1968–1990) subit un processus de marginalisation socio-spatiale avancée, par le délitement des formes de solidarité communautaire, dans un contexte de désindustrialisation des économies urbaines, coupant ces populations d’un accès aux bassins d’emploi en périphérie. Plus récemment (depuis les années 1990), les politiques urbaines adaptées à la mondialisation (désinvestissement public dans les quartiers pauvres) ont conduit à l’émergence d’une troisième figure du ghetto noir : le glocal ghetto.

Les mutations rapides à l'œuvre dans les métropoles américaines peuvent faire parler de fin des ghettos noirs. En effet, les forces du marché et les politiques publiques conduisent au démantèlement ou à la dilution des ghettos et à la reconstruction d’autres formes socio-spatiales de ségrégation. Peter Marcuse distingue ainsi le ghetto dispersé, le hard ghetto (ou hyperghetto), le weak ghetto (ou ghetto dilué) et le ghetto abandonné. Toutefois localement, les habitants des ghettos manifestent des formes de résistance au déclin de leur territoire.


 

(MCD) juillet 2015, dernières modifications (JBB, SB et CB) : décembre 2023, novembre 2024.


Références citées
Pour compléter avec Géoconfluences
Pour aller plus loin
  • Pour l'usage du terme en France : Hervé Vieillard-Baron, « Ghetto », Hypergéo
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