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Océan Arctique : des frontières maritimes à l'épreuve d'une nouvelle donne climatique

Publié le 15/09/2009
Auteur(s) : Sylviane Tabarly, professeure agrégée de géographie, responsable éditoriale de Géoconfluences de 2002 à 2012 - Dgesco et École normale supérieure de Lyon

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Cinq pays sont riverains de l'océan Arctique : les États-Unis (via l'Alaska), le Canada (dont le territoire inuit du Nunavut), le Danemark (via le Groenland [1]), la Norvège, dont l'archipel du Svalbard (ou Spitzberg) et la Russie.

Compte tenu des conditions climatiques et océanologiques générales, l'espace arctique n'a longtemps intéressé qu'à travers les expéditions à caractère sportif et/ou scientifique dont il était le théâtre, ou par ses enjeux géostratégiques, principalement dans le contexte de la guerre froide.

Mais, les effets des changements climatiques sur ces espaces extrêmement sensibles d'une part, les ressources naturelles, potentielles ou prouvées, qu'ils pourraient receler d'autre part, ont changé la donne au début du XXIe siècle. En effet, d'après une estimation de l'USGS (US Geological Society, agence gouvernementale américaine de recherche géologique) en juillet 2008, l'Arctique recèlerait "22% des ressources énergétiques non découvertes mais techniquement exploitables" de la planète. Il s'agirait, non seulement d'hydrocarbures mais aussi de possibles gisements de nickel, fer, cuivre, étain, or, etc. D'autre part, la déglaciation saisonnière de l'océan Arctique permettrait d'y ouvrir de nouvelles voies maritimes.

À mesure que la durée et l'expansion de la banquise diminuent, il devient envisageable d'emprunter le passage du Nord-Est le long de la côte septentrionale russe et le passage du Nord-Ouest, le long du Groenland, du Canada et de l'Alaska, qui est libre de glaces en été depuis 2006.

Évolutions récentes des températures et de la banquise de l'océan Arctique

Au-delà des oscillations saisonnières et annuelles de l'extension de la banquise, la tendance générale observée sur la période 1978 à 2008 est celle d'une réduction, particulièrement nette en fin d'été (septembre), et qui semble s'accélérer depuis 1998.

Source : AMAP 2009, "Update on selected climate issues of concern". Arctic Monitoring and Assessment Programme (AMAP) > Assessment Results > AMAP's Assessments > Popular (non-technical) Reports
http://amap.no


Voir aussi :

En théorie, s'il était régulièrement ouvert, le passage du Nord-Est ramènerait la distance entre Rotterdam et Yokohama de 11 200 à 6 500 milles nautiques, soit 42% de moins que le trajet par le canal de Suez. Le passage du Nord-Ouest réduirait le trajet de Rotterdam à Seattle de 2 000 milles marins, soit 25% de moins que par le canal de Panama. La différence serait beaucoup plus grande encore pour les très gros navires (over-Panamax ou post-Panamax) qui ne peuvent emprunter les canaux et doivent passer par le Cap Horn ou le Cap de Bonne Espérance. Cependant, du fait des vents et des courants dominants qui font dériver les glaces (carte ci-dessous à gauche), le passage du Nord-Ouest restera moins facilement navigable et durablement fermé pendant l'hiver.

Courants dominants, routes maritimes et ressources en hydrocarbures

Source : Arctic Monitoring and Assessment Programme (AMAP) - http://amap.no

Quant au trafic par le passage du Nord-Est, il se limitera sans doute, pendant longtemps encore, à la desserte régionale des nouvelles plates-formes pétrolières et gazières offshore (document ci-dessus à droite). Ce passage n'est d'ailleurs pas à proprement parler une nouvelle voie car la Russie utilise depuis longtemps ce qu'on appelle en russe la Route maritime du Nord (Sevmorput). À l'ère soviétique, une flotte de puissants brise-glaces à propulsion nucléaire maintenait le passage ouvert mais il n'y avait pas de trafic régulier au-delà de la mer de Kara et de la zone minière de Norilsk.

Aux postes-avancés des nouvelles frontières de l'Arctique : le port de Churchill, Canada

La saison navigable du port de Churchill, sur la côté ouest de la baie d'Hudson, est passée de six semaines à près de trois mois en quelques années. Le gouvernement canadien l'avait vendu en 1997 à OmniTRAX, un opérateur privé qui l'a modernisé. Situé en eaux profondes, ce port permet un accès direct à l'océan. Il dispose aussi d'une liaison ferroviaire avec le reste de l'Amérique : la Hudson Bay Railway permet d'accéder à l'ensemble du système ferroviaire nord-américain par l'intermédiaire du Canadian National Railway.

Le port dispose d'un élévateur de 140 000 tonnes et il peut accueillir des navires de dimension "Panama". Il compte quatre postes à quai (berth) pour le chargement ou le déchargement des céréales, des marchandises diverses (general cargo) et des pétroliers. Il permet d'exporter les céréales, les produits manufacturés et miniers et les produits forestiers de l'ouest canadien.

Aux importations : de l'acier, des matériaux de construction et des produits pétroliers destinés aux territoires du cœur du Canada et des États-Unis.

Le port joue un rôle important dans le ravitaillement des populations du Nunavut.

Compte tenu du retrait constaté de la banquise estivale, la saison de navigation, actuellement de la mi-juillet à début novembre, pourrait s'allonger au gré du réchauffement climatique s'il s'avérait durable et régulier.

Ces nouvelles possibilités de navigation pourraient ouvrir de nouveaux marchés européens, russes, asiatiques. Différents scénarios sont envisagés, dont la possibilité de relier le port russe de Mourmansk au port de Churchill afin de  créer une "autoroute arctique" entre la Russie et le Canada.

Au demeurant, d'importantes incertitudes demeurent sur l'intérêt économique et logistique de ces "futures" (?) routes maritimes qui, par ailleurs, ne seraient pas sans impacts environnementaux et géo-économiques. On peut s'interroger sur leur rentabilité réelle et se demander si une voie de navigation qui n'est pas ouverte toute l'année et qui nécessite la mise en place de convois précédés de puissants brise-glaces est compatible avec les exigences du transport moderne et avec la ponctualité qu'il implique. Ces voies nouvelles ne seraient pas linéaires et resteraient soumises aux aléas climatiques ce qui rallongera les distances réelles à parcourir. Les eaux souvent peu profondes du passage du Nord-Est en limite l'intérêt en termes de tirant d'eau.

Toutefois, les nouvelles technologies de la construction navale pourraient réduire la nécessité du recours aux brise-glaces. Le Conseil de l'Arctique a procédé à une "Évaluation de la navigation maritime dans l'Arctique" (Arctic Marine Shipping Assessment, AMSA, 2005-2009) afin d'identifier les facteurs déterminants de la navigation dans cette zone d'ici 2050. Il envisage le rallongement de la saison moyenne de navigation de 20 à 30 jours en 2004 à 170 jours si l'océan Arctique était libre de glaces en été aux environs de 2050. Pour en tirer parti, les investisseurs privés construisent déjà des navires-citernes spéciaux, capables d'atteindre les futurs champs pétroliers et gaziers de l'Arctique sans avoir recours aux brise-glaces.

L'AMSA met en garde cependant contre la rareté des moyens de secours prépositionnés dans la région, souligne la nécessité d'augmenter les capacités de recherche et de sauvetage et relève également l'absence de communications, de cartes marines et d'aides à la navigation. Il faudrait en outre élaborer un système de réglementations pour renforcer la sécurité maritime et la protection de l'environnement tout en respectant les principes existants de liberté de la navigation.

L'exploitation des ressources minières de l'Arctique, à elle seule, va probablement induire un accroissement du trafic maritime au cours des cinquante prochaines années. Devant les projets des compagnies minières et pétrolières, les sociétés de navigation envisagent d'accélérer la construction de navires pouvant assurer le transport des ressources naturelles, puisque les coûts de transport et de construction pourront être rentabilisés face à une demande en expansion et à l'envol des cours des matières premières.

Les ressources du monde arctique objets de convoitises

Accessibilité technique des zones maritimes arctiques à potentialités en hydrocarbures

L'empressement actuel des pays riverains de l'océan Arctique à cartographier les fonds marins, outre la découverte, possible mais peu probable, de bassins sédimentaires encore inconnus, réside sans doute dans l'anticipation de précaution, au cas où de nouvelles ressources y seraient découvertes, et dans la perspective de l'exploitation future des gisements d'hydrates de gaz (ou clathrates), ces combinaisons de glace et de méthane que l'on trouve dans les grands fonds océaniques, sous forte pression. Or, la plupart de ces gisements se trouveraient au-delà de la limite des 200 milles nautiques. Notons que leur exploitation libèrerait de très grandes quantités de méthane, important gaz à effet de serre.

Géopolitique de l'Arctique : la course pour les ressources, synthèse

Arctique carte synthèse Rekacewicz

 

Source : Carte extraite d’un projet de recherche mené par Philippe Rekacewicz, Visionscarto, 2015

Les bassins sédimentaires, où se trouvent les gisements potentiels d'hydrocarbures, sont pour la plupart situés en deça de la limite des 200 milles nautiques. L'extension de cette limite ne serait donc pas forcément utile du point de vue de la maîtrise de ces ressources, sauf dans le cas de la dorsale Lomonossov qui prolonge peut-être la plaque du Groenland dans l'océan Arctique.

Les frontières maritimes arctiques sont devenues des enjeux importants, objets de grandes manœuvres internationales car l'accès facilité aux ressources, probables ou prouvées, attise les convoitises. Contrairement à l'Antarctique [2], l'Arctique n'est pas protégé par un traité international. Dans un tel contexte, les contentieux se sont exprimés au grand jour : par exemple, celui qui concerne le contrôle de la dorsale de Lomonossov, une chaîne de montagnes sous-marines étirée sur 1 800 km, en écharpe à travers l'océan Arctique depuis les îles de Nouvelle-Sibérie jusqu'au large de l'île Ellesmere.

Quelques événements se sont enchaînés depuis 2007 témoignant de cette récente course aux territoires et aux ressources de l'océan Arctique.

- Le 2 août 2007, dans le cadre d'une expédition russe (Arktika 2007), des submersibles de type MIR ont atteint, pour la première fois, le plancher océanique à la verticale du pôle Nord, sur la dorsale Lomonossov. De manière symbolique et très médiatique, un drapeau russe fut planté et des échantillons du fond sous-marin furent prélevés. En effet, dans le cadre des procédures internationales suivies par la Commission des limites du plateau continental (voir infra), il est déterminant de connaître les structures géologiques des plateaux continentaux pour établir leur continuité avec les pays riverains.

- En août 2007, le premier ministre canadien, Stephen Harper, a annoncé l'adoption par son gouvernement d'une "stratégie intégrée pour le Nord", stratégie inspirée du principe suivant : l'exploiter ou le perdre (use it or lose it). Le discours du Trône d'octobre 2007 a consacré la "stratégie pour le Nord" à titre de priorité fondamentale du gouvernement. Cette stratégie passerait par la mise en service d'une patrouille de navires dédiés à l'Arctique (huit navires extracôtiers de classe polaire 5), par un centre d'entraînement militaire à Resolute Bay (localisé près de l'entrée orientale du passage du Nord-Ouest), par la construction d'un port en eau profonde à Nanisivik, ancien site minier encore utilisé pour des dépôts de matériaux et carburants. La construction du port devrait commencer en 2010 pour s'achever cinq ans plus tard. Par ailleurs, un fonds de 100 million de $ a été attribué à la réalisation de cartes géologiques d'inventaire des ressources énergétiques et minérales de l'arctique canadien [3].

- En août et septembre 2008, le brise-glace Louis S. Saint-Laurent de la garde côtière canadienne et le garde-côte américain Healy ont appareillé pour une mission conjointe de collecte de données géologiques, sédimentologiques et bathymétriques en mer de Beaufort (confins du Yukon et de l'Alaska) afin de délimiter le plateau continental de ce secteur de l'Arctique (documents ci-dessous) et de trouver un terrain d'entente pour le partager.

L'exploration scientifique : une coopération pragmatique entre les États-Unis et le Canada

Source : National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) ; Credit : USGS
www.noaanews.noaa.gov/stories2009/.../.html

Le brise-glace Louis S. Saint-Laurent de la garde côtière canadienne et le garde-côte américain Healy en mission conjointe de collecte de données géologiques, sédimentologiques et bathymétriques en mer de Beaufort (confins du Yukon et de l'Alaska) afin de délimiter l'extension du plateau continental de ce secteur de l'Arctique (10 août 2009), en vue du dépôt d'un dossier de revendication auprès de la CLCS (voir infra)

- En août 2008, S. Harper a annoncé que tous les navires qui se rendent dans l'Arctique canadien devront le signaler à l'agence "Système de trafic de l'Arctique canadien" de la Garde côtière canadienne. Parallèlement, Peter MacKay, ministre canadien des Affaires étrangères, déclarait : "Pour développer le Nord, nous devons connaître le Nord. Pour protéger le Nord, nous devons contrôler le Nord. Et pour atteindre ces objectifs pour le Nord, nous devons être dans le Nord" [4].

- Depuis 2002, le Groenland a accéléré l'exploration pétrolière sur sa côte occidentale et plusieurs vagues de vente de concessions se sont succédé.


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Ainsi, les États riverains de l'océan Arctique se sont engagés dans les processus de la juridiction internationale destinés à faire valoir leurs droits (voir pop-up ci-dessous) tout en faisant l'inventaire des ressources réelles ou potentielles du plateau continental au large de leurs côtes. En 2009, tous, sauf les États-Unis (voir infra), ont ratifié la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS, entrée en vigueur en 1994). Les États peuvent alors revendiquer, au titre de l'article 76 de la Convention, la souveraineté économique sur les ressources des fonds marins au-delà de la limite initiale des 200 milles nautiques de la Zone économique exclusive (ZEE). Cette extension peut aller jusqu'à 350 milles nautiques des lignes de base ou jusqu'à 100 milles de l'isobathe 2 500 mètres. Les États doivent déposer leur revendication, fondée sur un dossier technique (données géologiques, sédimentologiques et bathymétriques) et juridique, auprès de la Commission des limites du plateau continental (CLPC - Commission on the Limits of the Continental Shelf / CLCS). Composée de 21 membres issus de tous les continents, la Commission compte dans ses rangs sept experts scientifiques (géophysiciens, hydrographes, sédimentologues, géographe, etc.) chargés d'étudier les dossiers déposés et elle se réunit deux fois par an à New York pour examiner et statuer sur les demandes. Les États ayant ratifié la Convention avant 1999 devaient avoir déposé leur dossier pour 2009 au plus tard. Ceux qui l'ont ratifié après 1999 doivent déposer leur dossier au plus tard au bout de dix ans.

Juridictions et frontières maritimes : l'exemple de l'hémisphère oriental

Adaptation : Maritime jurisdiction and boundaries in the Arctic region. International Boundaries Research Unit (IBRU), Durham University, 24 juillet 2008 www.dur.ac.uk/ibru/resources/arctic

En pop-up : Frontières, zonages et délimitations maritimes, les principes internationaux

Mots clefs : mer territoriale, plateau continental, plateau continental étendu, UNCLOS, ZEE, etc.

La page d'accueil de la Commission des limites du plateau continental (CLPC - Commission on the Limits of the Continental Shelf / CLCS) : www.un.org/Depts/los/clcs_new/clcs_home.htm

L'état des ratifications (alphabétique et chronologique) :

 

En 2009, tous les États riverains de l'océan Arctique ont ratifié la Convention sauf les États-Unis par contre.

Mais la CLCS refuse d'examiner les demandes conflictuelles. Les États sont donc contraints de se mettre d'accord pour présenter une demande commune ou doivent garantir une négociation amiable ultérieure ou sinon recourir à un arbitrage international.

Les États riverains de l'océan Arctique et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer
Pays
Date de ratification de la Convention
Date butoir de la soumission des revendications d'extension de ZEE
Soumission
de la revendication
Canada
7 nov. 2003
2013
 
Danemark
16 nov. 2004
2014
29 avril 2009**
États-Unis*
 
  
 
Norvège
24 juin 1996
2009
27 novembre 2006***
4 mai 2009****
Russie
12 mars 1997
2009
20 déc. 2001

* Les États-Unis avaient signé dès 1994 un "Agreement on Implementation of UNCLOS" qui leur accordait quelques aménagements de la Convention, mais le Sénat ne l'a jamais ratifiée et la diplomatie américaine a longtemps considéré que c'était contraire à leurs intérêts et à leurs principes car restreignant la souveraineté du pays. Cette position a évolué. L'administration de G.W. Bush a fait pression sur le Sénat pour obtenir la ratification du traité afin d'appuyer les revendications des États-Unis sur une partie du plateau continental arctique. C'est à présent l'administration de B. Obama qui en fait une de ses priorités. Le processus de ratification, qui bénéficie d'un soutien élargi des associations environnementalistes jusqu'aux compagnies pétrolières, pourrait alors finir par aboutir.

** Demande partielle présentée par le Danemark portant sur le nord des îles Féroé. Le sud des îles Féroé ainsi que les zones situées au nord, au nord-est et au sud du Groenland feront l'objet de demandes distinctes.

*** Demande de la Norvège portant sur trois secteurs distincts des océans Atlantique et Arctique : le Loop Hole (mer de Barents) ; le bassin Nansen occidental ; le Banana Hole en mer de Norvège. Résumé du dossier : www.un.org/Depts/los/clcs_new/submissions_files/nor06/nor_2006_f.pdf

**** Demande de la Norvège qui concerne l'île Bouvet (Bouvetoya) et la Terre de la Reine-Maud en Antarctique

Entre rivalités et partenariats, les pays du monde arctique sont donc engagés dans de grandes manœuvres scientifiques et géopolitiques pour défendre et promouvoir leurs intérêts, anticiper l'avenir en faisant le pari d'un réchauffement climatique prolongé et amplifié.

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Notes

[1] Bien que proche de l'Amérique du Nord, le Groenland est rattaché à l'Union européenne (UE) en tant que territoire autonome du Danemark auquel le statut d'automie interne de 1979 accordait la gouvernance locale. En 1982, les Groenlandais avaient choisi par référendum de ne plus faire partie de la Communauté européenne à partir de 1985. Dès 1984, une commission groenlando-danoise a eu pour objectif d'élaborer une proposition de loi sur l'autonomie renforcée débouchant sur le référendum du 25 novembre 2008 qui a vu la victoire du "Oui" à l'autonomie avec plus de 75% des votants. Cette autonomie renforcée, effective depuis le 21 juin 2009, peut ouvrir la voie à une indépendance totale car elle reconnaît au peuple groenlandais le droit à l'autodétermination, conformément au droit international. D'ores et déjà, elle accorde au territoire une trentaine de domaines de compétences dont la police, la justice, le droit de la famille, et aussi la gestion de ses matières premières et de ses ressources. De plus, l'inuit kalaallisut est devenu la langue officielle du Groenland.

En attendant, le Danemark continue de diriger la politique étrangère du Groenland et lui versait, en 2009, une subvention annuelle de 457 millions d'euros représentant les 2/3 du budget groenlandais. En vertu de l'accord de partenariat 2007-2013 avec l'UE, le territoire bénéficie aujourd'hui du statut de "pays et territoire d'outre-mer" (PTOM) et d'aides s'élevant à environ 25 millions d'euros par an. Bien que formellement exclu de la zone Schengen, le pays y est intégré dans la pratique.

[2] L'adoption d'un traité international sur l'océan Arctique est peu probable à court terme. Les cinq pays riverains de l'Arctique (Canada, le Danemark, la Norvège, la Russie et les États-Unis) préfèrent s'en tenir à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

La Déclaration d'Ilulissat, qu'ils ont signée le 28 mai 2008 au Groenland, stipule qu'ils continueront à s'y référer pour "les droits et obligations concernant la délimitation des limites du plateau continental, la protection de l'environnement marin incluant les zones couvertes de glace, la liberté de navigation, la recherche scientifique et les autres usages de l'océan. […] Nous ne voyons donc pas de besoin de développer un nouveau cadre législatif international pour gouverner l'océan Arctique." Les cinq pays réaffirment que les revendications concurrentes dans l'Arctique seront réglées selon le cadre établi par les traités internationaux régissant la région.

Les commentaires de la conférence d'Ilulissat font état d'un esprit de conciliation. Le litige opposant le Danemark et le Canada sur la possession de l'île Hans au milieu du détroit entre l'île Ellesmere et le Groenland ne semble plus faire obstacle à la collaboration des deux pays qui entendent finaliser leurs activités cartographiques conjointes dans le Nord. La Russie aussi a changé d'attitude en revenant sur la controverse relative au drapeau déposé à l'aplomb du pôle Nord dans le cadre de l'opération Arktika 2007. Elle a assuré que ce geste n'était pas une revendication territoriale mais plutôt une démonstration de leur savoir-faire technologique et de leur contribution à la recherche scientifique.

[3] Dans le cadre des activités des Années polaires internationales de 2007-2008 et de 2008 - 2009 et des objectifs de la Commission pour la cartographie géologique du monde (Commission for the Geological Map of the World / CGMW), sept pays du monde arctique (Canada, Russie, Etats-Unis, Danemark, Norvège, Finlande et Suède) ont coopéré pour produire un atlas complet des formations géologiques sous-marines ou terrestres des régions polaires situées au nord du 60e parallèle. Les 1 222 cartes de l'atlas ont été réalisées par la Commission géologique du Canada (CGC). Elles sont destinées à faire l'inventaire des ressources minérales et énergétiques de la région et elles participeront aussi à la réalisation des dossiers techniques nécessaires aux arbitrages des différends territoriaux entre pays riverains du Grand Nord, par exemple celui qui concerne la souveraineté sur la dorsale de Lomonossov.

Pour télécharger la version simplifiée (au 1/5 000 000e) et publique de la carte géologique de l'Arctique (différents formats disponibles), sur la base MIRAGE (Map Image Rendering dAtabase for GEoscience) : http://apps1.gdr.nrcan.gc.ca/mirage/prepare_download.../mn01.sid

[4] La déclaration de Peter MacKay en anglais : "To develop the North, we must know the North. To protect the North, we must control the North. And to accomplish all our goals for the North, we must be in the North."

 

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Sources et ressources

Informations et bases de données générales sur le monde Arctique

Autour du Conseil de l'Arctique (Arctic Council)

 

 

Questions frontalières
Enjeux géopolitiques, passages maritimes et ressources
  • Frédéric Lasserre,

> De nouvelles routes maritimes dans l'arctique ? Géopolitique des Passages du Nord-ouest et du Nord-est, 2007 - www.lecerclepolaire.com/art_f_lasserre_routes_maritimes_arctique_01-2007.htm
> Les détroits arctiques canadiens et russes. Souveraineté et développement de nouvelles routes maritimes, Cahiers de géographie du Québec, Volume 48, numéro 135, décembre 2004. Avec des cartes assez précises des deux passages. www.erudit.org/revue/cgq/2004/v48/n135/011799ar.html

 

Observation scientifique de la glace et du climat en Arctique

 

Ressources à objectifs éducatifs

 

 

Sélection documentaire, conception et mise en page web :

Sylviane Tabarly, pour Géoconfluences, le 15 septembre 2009

 

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Mise à jour :   15-09-2009

 

 

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Pour citer cet article :  

Sylviane Tabarly, « Océan Arctique : des frontières maritimes à l'épreuve d'une nouvelle donne climatique », Géoconfluences, septembre 2009.
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/typespace/frontier/FrontDoc5.htm