Paroles de cartoneros (versions française et espagnole)
1) Les coopératives del Oeste et Reciclando suenos, LTDA - Villa Soldati
Entretien avec Miguel et Valentín HERRERA, secrétaire de la Cooperativa del Oeste et coordinateur de la coopérative Reciclando Sueños, entretien du 19 mars 2008
Dans les deux cas, les coopératives ont commencé avec la crise de 2001, la crise économique. On a commencé à collecter [les déchets] dans la rue, on s'est fait une sorte de clientèle qui donnait les matériaux quand on passait. Et c'est comme ça qu'on commence, petit à petit, pour vendre [les matériaux], avoir des prix de gros et du volume. Plus il y a de volume, meilleurs sont les prix. Après, on s'est associés en coopératives légalement constituées et enregistrées. Mais je te le dis, avant tout par nécessité économique.
Nous, on allait à Liniers, à la Paternal. On était à six cuadras du centre commercial de Liniers. On ramassait les matériaux que les gens laissaient dans la rue, c'était des couvercles de carton, des journaux. Et une empathie se crée. Les gens qu'on voyait, soudain, te disent qu'ils te gardent [des déchets recyclables]. "si tu passes tous les jours à 5 heures ou 6 heures, je te le garde, sonne et je te le donne avant de le sortir dans la rue".
Et une relation s'est constituée, avec le temps. C'est comme pour tout, il y a des gens qui collaborent tous les ans, il y a des gens qui collaborent au début et après la fureur de la crise économique, la porte est fermée. On était solidaires entre nous, les cartoneros, dans la rue, et un contact s'est créé. Ce n'était plus aussi nécessaire de sortir dans la rue… Il y a des gens qui sont conscients, qui pensent que tout cela c'est un travail qui aide, le fait que ces matériaux ne soient pas enfouis, qu'il soit réutilisables.
Il s'est formé un grand commerce de la part des entreprises, qui finissait par un intérêt personnel. Le personnel de nettoyage, le personnel qui finissait par vendre [les matériaux] dans la rue. Il y avait des cartoneros qui allaient directement dans la rue pour entrer en contact avec les supermarchés, les entreprises pour voir s'ils ne pouvaient pas acheter leur carton…
Las cooperativas del Oeste et Reciclando suenos, LTDA - Villa Soldati
La cooperativa en ambos casos comenzamos con la crisis del ano 2001, la crisis económica. Fuimos recolectando en la calle, y se hizo como una especie de clientela que vos pasas y van dando el material. Y se comienza así de a poco para venderlo, conseguir precios grandes, tener volúmen. Para mayor volúmen, mejores precios. Luego nos asociamos en cooperativas legalmente constituidas, adentro del registro. Pero te lo digo, por necesidad económica.
Nosotros íbamos en Liniers, y en la Paternal. Estabamos a seis cuadras del centro commercial de Liniers. Ibamos nosotros recogiendo material que se dejaba en la calle y que consistía en tapas de carton, diario. Y ahí se va creando una empatía. La gente que veíamos, de repente, te dice que te lo guarda: “si pasas todos los dias a las 5, las 6 te lo guardo, tocas el timbre, y te lo doy antes de ponerlo a la calle”.
Y ahí se fue formando con el tiempo uan relación. Es como todo, hay gente que colabora todos los anos, hay gente que colaboró al principio y luego pasado el furor de la crisis economica se encontró cerrada la puerta. Estabamos solidarios nosotros los cartoneros en la calle y se fue creando una relación. No era tan necesario salir a la calle…
Hay gente conciente que lo toma que todo es un trabajo que ayuda, el hecho de que no se entierre este material, que sea reutilizable.
Se formó un gran negocio de parte de las empresas que terminaba personal. Gente de limpieza, gente de personal que terminaba vendiendo a la calle. Se necesitaba la materia prima sobre todo, carton, papel. Algunos cartoneros salían directamente a la calle a contactarse con los supermercados, las empresas, para ver si podían comprárselo, el cartón.
2) La coopérative El Ceibo
Entretien avec Cristina LESCANO, coordinatrice de la coopérative El Ceibo, 22 avril 2008
Quand on a commencé, on était 103. On a commencé en 1997, avec l'idée qu'on pouvait arrêter de fouiller dans les sacs poubelle. On n'a pas commencé en 2000, avec la crise. On vient d'avant (…). On vivait presque tous ici, à Palermo, et on avait tous travaillé au projet des maisons squattées [1]. Palermo, Villa Crespo, on vivait en majorité ici. La seule option que nous avions pour entrer dans la légalité, c'était la coopérative.
(...) Nous avons commencé avec la collecte au porte à porte parce qu'il y avait la loi avec le fameux article qui disait que si nous prenions les ordures sur le trottoir, il fallait qu'on aille en prison. Quand Macri [2] a dit qu'on devait aller en prison, bon, ça ne plaît pas aux gens mais c'était vrai parce qu'il y avait une loi qui disait que quand on prenait des ordures sur le trottoir on volait (…).
Alors on s'est mis à sonner au porte-à-porte, on nous faisait déguerpir, les gens avaient peur, comme cela nous arrive à tous, on s'est fait chasser, jusqu'à ce que les gens s'habituent. On s'est mis des dossards d'identification, on a informé la population et on a fait une campagne avec GreenPeace. Ce n'est qu'en 2000 qu'on a commencé à aller dans la rue pour faire de la promotion, mais il fallait une formation. Ce n'était pas facile.
Avant, on allait récupérer rue par rue. On allait chez les voisins qui voulaient participer. L'espace s'est agrandi, rétréci. Et ça a été tout un travail. Pourquoi cette zone ? On a fait toute une enquête. On a choisi les immeubles, les écoles, il fallait que nous fassions un recensement, un travail de marketing et on ne savait rien de tout ça, nous. Après, des gens qui ont fait des études nous ont dit qu'on a fait un travail de marketing terrible !!! On a collé sur un plan les endroits où on mettait les promoteurs [environnementaux]. C'est comme ça qu'on a commencé et on est restés là parce qu'il y a des immeubles, des commerces, des maisons individuelles, des écoles.
On a fait le projet comme ça, avec la division du travail : le promoteur, c'est celui qui parle avec l'habitant et qui lui explique comment il faut qu'il sépare les matériaux. Le récupérateur s'y rend avec la logistique qu'on lui fournit, il sonne, l'habitant descend et lui remet en main propre les déchets (…). On pensait pouvoir faire comme dans les autres pays, tu sais, où certains jours on collecte des choses et d'autres jours d'autres choses. Mais on n'en est pas encore là.
L'idée, c'était de travailler tous les jours, d'avoir plus d'habitants, de faire un système de postes. Pour que le récupérateur n'arpente pas autant et qu'il y ait un stand avec un promoteur qui viendrait et qui dirait ce qu'il faut mettre dans le sac [de récupération] à tel endroit, et puis il appelle le camion qui passe, ramasse le sac et l'emporte. Sinon, ils [les récupérateurs] doivent marcher 20 cuadras et revenir avec le sac plein. Toute une logistique et beaucoup d'argent, et c'est ce qu'on n'a pas, c'est ce qu'a le gouvernement et quelques ONGs qui ne l'utilisent pas pour ce genre de choses (…)
Maintenant, on a 2 200 adhérents. C'est peu. On a une seule camionnette. Les chariots [de collecte manuelle] se cassent. On est là dedans, en ce moment, on a demandé un camion au gouvernement de la ville. En plus, les grandes entreprises se rajoutent, maintenant, et la camionnette va au centre le mardi et le vendredi. Ce sont des demandes spéciales. Il faut qu'on avance peu à peu, à ce sujet, parce qu'on ne peut pas dire à l'habitant qu'on ne passera pas.
La cooperativa El Ceibo
Entrevista con Cristina LESCANO, coordinadora de la cooperativa El Ceibo, 22 de abril de 2008
Cuando empezamos, éramos 103. Empezamos en 1997 con la idea de dejar de revolver las bolsas de basura. No es que empezamos en el 2000, con la crisis. Veníamos de antes (...). Vivíamos casi todos acá en Palermo y veníamos con el trabajo de las casas tomadas de Palermo [3]. Palermo, Villa Crespo, la mayoría éramos de acá. La cooperativa fue la única salida que teníamos para hacernos legal.
(...) Empezamos con la recolección puerta a puerta porque estaba la ley, el famoso artículo que decía que si sacábamos basura de la vereda había que llevarnos presos. Cuando Macri[4] dijo que a nosotros tenía que llevarnos todos presos, está bien, no le gustó a la gente, pero era real porque había una ley que decía que quien sacaba basura de la vereda estaba robando (...).
Entonces tocabamos timbre por timbre, puerta por puerta, nos sacaban corriendo, tenía miedo la gente, como nos pasa a todos, hubo mucho rechazo, hasta que bueno se fueron acostumbrando, pusimos una pechera de identificación, hubo información, hicimos una campana con Greenpeace. Recién en el 2000 con Greenpeace, salimos a la calle a hacer promoción pero se necesitaba capacitación. No es fácil.
(...) Antes ya salíamos calle por calle. Tomando los vecinos que querían. Se fue agrandando, achicando. Y fue toda una tarea. ¿Porque esta zona? Hicimos todo un relevamiento. Se tomo edificios, escuelas, teníamos que hacer un censo, un trabajo de marketing, que nosotros de eso no sabíamos nada. Después, estudiosos, nos dijeron que hicimos un terrible trabajo de marketing. Pegamos en un mapa los lugares con los promotores. Así empezamos y quedó esta zona porque tiene edificios, negocios, casas bajas, escuelas.
El proyecto estaba armado así, con división de trabajo: el promotor es el que habla con el vecino y le explica como tiene que separar los materiales. El recuperador, va con la logística que le proveemos, toca el timbre, el vecino baja y entrega en mano los residuos (...).
Nosotros teníamos la idea de hacer como en otros países que, viste, retiran algunos días unas cosas y otros días otras. Pero todavía no llegamos a esto.
La idea es trabajar todos los días, tomar más vecinos y hacer el sistema de postas. Para que el recuperador no venga acá tanto, poner stand, con un promotor, que venga y diga que hay que poner el bolsón en tal lugar, se llama al camión que pasa, retira y se lo lleva. Sino van caminado veinte cuadras y tienen que volver con el bolsón lleno (...).
Toda una logística y mucha plata que es la que no tenemos, que es la que tiene el gobierno y algunas ONGs que no la usan para este tipo de cosas (...).
Ahora tenemos 2200 vecinos. Poquitos, son. Tenemos una sola camioneta. Los carros se van rompiendo. Ahora estamos con el tema, pedimos un camión al gobierno de la ciudad. Se nos agregan las grandes empresas ahora, que sale la camioneta los martes y viernes al centro. Son pedidos especiales. Tenemos que crecer con este tema despacito porque no podemos decir al vecino que vamos a no ir.
Notes
[1] La coopérative El Ceibo dispose d'une branche "Logement social", qui consiste à formaliser la "prise" de maisons abandonnées dans le quartier de Palermo, suite à un projet avorté de construction d'une autoroute, au moment de la dernière dictature (1976-1983). Les maisons situées sur le tracé de cet axe routier et abandonnées par leur propriétaire ont été investies par les plus pauvres qui y voyaient une opportunité de logement gratuit.
[2] Mauricio Macri, chef du gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires depuis 2007.
[3] La cooperativa El Ceibo también tiene un ramal dedicado al hábitat que trata de formalizar las casas tomadas del barrio de Palermo, después del proyecto abandonado de construcción de una autopista, durante la última dictadura (1976-1983). Las casas localizadas sobre el trazado de este eje, abandonadas por su propietario fueron ocupadas por los más pobres que veían una oportunidad de alojamiento gratuito.
[4] Mauricio Macri es el jefe del gobierno de la ciudad Autónoma de Buenos Aires desde 2007
Marie-Noëlle Carré,
pour Géoconfluences, novembre 2008
Pour citer cet article :
« Paroles de cartoneros (versions française et espagnole) », Géoconfluences, mai 2014.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/transv/DevDur/popup/CarreCartoneros.htm