Un glossaire pour comprendre la géopolitique des hydrocarbures - Géoconfluences
NB. Le contenu de cet article donne des informations disponibles au moment de sa publication en 2007.
Un glossaire pour comprendre la géopolitique des hydrocarbures
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Le brent, ou panier Brent Forties Oserberg / BFO (du nom des trois principaux gisements de mer du Nord qui le composent) est devenu le pétrole de référence pour le marché européen et d'autres pétroles en Afrique tels que le Bonny Light (Nigeria). Ce sont des pétroles de qualité intermédiaire qui font l'objet de transactions sur le marché à terme de Londres (International Petroleum Exchange / IPE) où le cours du BFO donne la tendance du jour. Ces transactions représentent environ les deux tiers des quantités vendues dans le monde.
Aux États-Unis, le brut servant de référence aux transactions est le West Texas Intermediate (WTI). En effet, le pétrole américain du Texas reste une référence parmi les pétroles d'excellente qualité (un pétrole très léger contenant très peu de soufre) où l'on compte aussi l'Arabian Light d'Arabie saoudite. Le WTI est coté au New York Mercantile Exchange (NYME) qui permet d'établir le prix d'un brut fictif, appelé Light Sweet Crude.
De son côté le pétrole de Dubaï est représentatif des variétés des pays du Golfe, des pétroles légers mais qui contiennent plus de soufre que le WTI. Son prix sert de référence pour les principaux consommateurs asiatiques.
Enfin, l'OPEP donne un prix de référence calculé à partir d'un panier de différents prix de bruts produits par ses États-membres.
Il faut noter qu'il existe d'autres marchés dont le volume des transactions sont plus modestes (Urals, Alaska North Slope, Oman) que la corrélation entre ces différents cours est très forte et les écarts n'excèdent généralement pas quelques %.
La densité du pétrole brut est généralement mesurée en degrés, conformément à une échelle mise au point par l'Institut américain du pétrole (American Petroleum Institute / API). Un pétrole est qualifié de léger (light) si son degré API est supérieur à 31,1°, de moyen (medium) si'l est compris entre 22,3° et 31,1°, de lourd (heavy) s'il est compris entre 10° et 22,3° et d'extra lourd s'il est inférieur à 10°. Ces bruts "conventionnels" sont extraits par forage.
Chaque gisement (champ) possède ses caractéristiques (densité, teneur en soufre, etc.). Les bruts les plus recherchés et donc les plus chers, sont les plus légers qui fournissent l'essence, le kerosène. Les bruts les plus lourds ont l'apparence du goudron. Les condensats ou les gaz naturel liquéfiés (GNL) sont souvent mélangés avec des bruts plus lourds pour éviter un colmatage des pipelines.
Les bruts inférieurs à 10° API sont des bitumes, extraits de sables, de grès ou d'autres roches sédimentaires, qui nécessitent un traitement spécial visant à séparer le pétrole du sable, de l'eau et des minéraux, puis il est dilué avec du condensat.
Les pétroles de la mer du Nord, comme le Brent et l'Ekofisk, le brut nigérian (comme le Bonny Light) et d'autres pétroles africains sont des bruts légers, alors que la plus grande partie du pétrole du Moyen-Orient est de type brut lourd. Le bitume est quant à lui produit à partir des sables bitumineux du Canada et du Venezuela.
Les contrats de concession ont évolué considérablement depuis leur création au début des années 1900, lorsqu'ils étaient des contrats unilatéraux et que bon nombre de pays riches en ressources étaient des colonies ou des protectorats. Gouvernements et compagnies indépendantes peuvent toujours recourir à des négociations directes mais, aujourd'hui, ces dernières sont souvent mises en concurrence à travers des processus d'appel d'offres pour obtenir la concession de ces droits.
S'ils font appel à des investisseurs privés étrangers, ils doivent s'inscrire dans le cadre d'un système contractuel avec un opérateur. Un accord est passé en vertu duquel l'opérateur prend à sa charge l'ensemble des coûts et des risques d'exploration et l'ensemble des coûts de développement et de production, en contrepartie d'une part stipulée de la production résultant de ses efforts. Le plus souvent, le pays hôte conserve le titre de propriété de toutes les réserves d'hydrocarbures.
Différents systèmes contractuels sont envisageables : un contrat de concession, une joint-venture (JV) ou un contrat de partage de production (CPP / APP / PSA). Chaque forme de contrat présente des avantages et des inconvénients.
Après avoir été extrait par forage, le gaz peut être acheminé par voie terrestre et sous marine par gazoduc. Des stations de compression sont alors réparties le long du tube afin de maintenir une pression suffisante.
Mais le gaz peut aussi être mis en phase liquide par l'abaissement de sa température à -163°C ce qui permet de réduire 600 fois son volume ce qui facilite donc son transport sur de grandes distances. Des usines de liquéfaction produisent ce gas naturel liquéfié (GNL / LNG). Il peut alors être stocké ou transporté par des camions-citernes ou des navires dédiés, les méthaniers.
Les compagnies peuvent acheter du pétrole de différentes manières : dans le cadre de contrats à long terme avec les pays producteurs, sur le marché spot* ou au comptant, ou par la fourniture physique des contrats achetés sur le principal marché à terme*, le New York Mercantile Exchange (Nymex). Ce dernier est le marché de loin le plus actif dans le domaine des transactions pétrolières internationales, devant son cousin basé à Londres, l'International Petroleum Exchange (IPE). Sur ces marchés libres, un grand nombre d'acheteurs et de vendeurs potentiels sont en concurrence pour obtenir les prix les plus compétitifs.
À eux tous, ces produits forment le "complexe des produits pétroliers" (petroleum complex).
* Marché à terme : un contrat à terme permet aux parties d'acheter ou de vendre à un prix défini, pour une fourniture ultérieure.
* Marché spot : marché au jour le jour portant sur des cargaisons. S'oppose aux contrats à terme.
La formule du PSA a été utilisée, en 1966, pour la première fois en Indonésie dont le gouvernement ne voulait plus attribuer de nouvelles concessions dans les formes habituelles de l'époque héritées du passé. Il a introduit la "formule indonésienne", que l'on connaît maintenant sous le nom de PSA, dans laquelle l'État garde la propriété des ressources et négocie un système de partage de bénéfices. Au départ, les compagnies étrangères, surtout les majors, ont fermement résisté au changement, inquiètes à l'idée de créer un précédent qui affecterait leurs concessions dans d'autres zones. Toutefois, des compagnies indépendantes ont commencé à conclure des PSA et les majors n'ont pas eu d'autre choix que de suivre le mouvement. Ainsi la formule s'est progressivement répandue dans le monde entier pour devenir courante au début du XXIe siècle.
Les PSA ont évolué et il en existe aujourd'hui de nombreuses versions différentes qui se ressemblent dans leur concept de base, le partage du profit. Souvent, la compagnie pétrolière nationale rejoint le consortium au sein du PSA. Ce partenariat avec une compagnie nationale peut être stratégique, indispensable aux compagnies étrangères qui souhaitent accéder aux réserves. Mais elles peuvent alors se heurter au manque de transparence dans la gouvernance et dans les comptes des compagnies nationales qui, lorsqu'elles sont publiques, sont souvent réticentes, au nom du secret et de la confidentialité d'État, à fournir des informations (financières, techniques, géologiques) dont l'exploitation soit possible. Des détournements de fonds, des opérations de bluff sont alors envisageables.
Le gouvernement hôte, qui ne risque pas d'encourir de lourdes pertes autres que le coût des négociations, peut choisir de recevoir sa rémunération de différentes manières. La méthode la plus courante consiste à percevoir une prime de signature, un paiement d'avance versé par une compagnie lorsqu'elle accepte d'explorer et de développer un bloc. La prime de signatures fournit au gouvernement un bénéfice immédiat, tout en signifiant un engagement ferme de la compagnie.
En cas de découverte de pétrole, un gouvernement peut percevoir sa rémunération en conservant une partie de la production de pétrole, en recevant des taxes sur celle-ci ou une part des bénéfices, ou en obtenant des royalties (redevances). Dans certains cas, le gouvernement hôte reçoit un pourcentage inférieur à celui de la compagnie, voire aucune part de la production, jusqu'à ce que la compagnie ait amorti son investissement.
Ces précautions étant, si l'on se réfère une des publications majeure dans le domaine, la BP Statistical Review, l'évaluation des réserves prouvées mondiales serait de 1 200 milliards de barils, correspondant à 41 années de consommation actuelle. Les autres organismes collecteurs de données les situent entre 1 050 et près de 1 260 milliards de barils suivant la prise en compte ou non des réserves d'huiles extra lourdes canadiennes. Ces chiffres, qui ne représentent que les volumes contenus dans les gisements découverts ou en cours de production, pourraient augmenter grâce à la mise en développement des futures découvertes et des innovations technologiques. Mais, quoiqu'il en soit, le renouvellement des réserves n'est plus assuré depuis les années 1980 : les pétroliers extraient davantage d'hydrocarbures qu'ils n'en découvrent, ce qui sous entend l'arrivée inéluctable d'un déclin de la production. Ce point d'infléchissement ou "pic" de la production, c'est le "peak oil" ou pic de Hubbert du nom du géologue américain qui, dans les années 1950, en a théorisé l'existence.
La date du "pic" ne fait pas non plus l'unanimité. Elle est prévue entre 2010 et 2020 par les membres du club de l'Association for the study of Peak Oil and Gas (ASPO), au plus tôt pour 2024 par l'United Sates Geological Survey (USGS). Pour Yves Mathieu de l'Institut français du pétrole, il y aurait plutôt un plateau de production survenant entre 2010 et 2028 au plus tard, avant le déclin géologique. À partir de là les hydrocarbures proviendraient essentiellement des pétroles de haute technologie, dits non conventionnels, nécessitant d'importants investissements. Par ailleurs, un premier déclin de production, lié au manque d'investissements et d'équipements au cours des années 1990 et 2000, pourrait se produire entre 2006 et 2009.
La situation est un peu différente pour le gaz dont la demande mondiale croit rapidement mais qui offre davantage de perspectives prometteuses en exploration, repoussant le déclin de sa production au delà de 2035 ou 2050.
On distingue trois types de réserves. Les quantités de pétrole qui ont une probabilité de récupération supérieure ou égale à 90% grâce aux techniques et aux conditions économiques du moment sont dites "1P" ou "réserves prouvées". Les quantités de pétrole plus importantes dont la probabilité de récupération atteint 50% sont les "réserves probables" ou 2P. Enfin, quand la probabilité de récupération dans un gisement descend à 10%, on parle alors de "réserves possibles" ou 3P. Ce mode de classification est contesté par certains experts.
La question de l'évaluation des réserves d'hydrocarbures, prouvées et probables, est l'objet de débats et source d'un certain nombre de divergences statistiques entre experts selon le monde auxquels ils appartiennent et aussi selon les intérêts qu'ils défendent.
Les déclarations des compagnies relatives au volume de leurs réserves sont avant tout destinées à leurs banques, à leurs actionnaires ou à leurs interlocuteurs étatiques. Elles ne sont donc pas communiquées sans arrières pensées. La Royal Dutch / Shell a fait la une des médias en 2004 pour avoir reconnu que les données communiquées sur ses réserves prouvées étaient surévaluées. La bonne foi de la compagnie était cependant possible car, il faut le reconnaître, ce n'est que lorsqu'on ferme un puits qu'on peut connaître avec certitude sa production finale !
En pratique, les réserves probables sont des réserves contiguës aux réserves prouvées dont l'existence est démontrée avec un degré raisonnable de certitude. Leur exploitation dépend alors largement d'un problème de coût : la ressource existe mais la question est de savoir combien les sociétés consommatrices sont prêtes à payer pour la récupérer et l'utiliser. L'évaluation des réserves probables évolue donc en fonction des progrès techniques et du cours des hydrocarbures. Des prix élevés peuvent justifier l'emploi de nouvelles technologies plus coûteuses d'exploration et d'exploitation qui repoussent les limites.
Au total, en 2007, les ordres de grandeur seraient les suivants :
- les réserves de pétrole dites prouvées sont estimées à environ 1 à 1,3 milliard de barils, 150 milliards de tonnes environ soit une production d'une quarantaine d'années au rythme actuel,
- en tonnes d'équivalent pétrole, les réserves gazières représentent un volume du même ordre de grandeur que celui des réserves pétrolières, mais ces quantités correspondent à un ratio réserves / production de plus de 60 ans.
Sur ces bases, la perspective du début du déclin inéluctable de la ressource, le fameux "peak oil", semble se rapprocher.
Mais certaines données ne font pas consensus, tout particulièrement celles qui concernent l'état des réserves sujet sur lequel, pour diverses raisons, compagnies ou États entretiennent mystère ou désinformation. C'est ainsi que depuis 2002 en Russie, révéler la moindre information sur les réserves est un crime d'État passible de sept années de prison.
Des sociétés se sont spécialisées dans la fourniture d'informations stratégiques sur les productions : PetroLogistic, Information Handling Services Energy par exemple.
Dans la plupart des cas, lorsque l'exploitation des ressources naturelles domine une économie, lorsqu'une richesse est acquise hors du cycle de production, ce processus est observé. Il est amplifié dans les États qui présentent de graves défauts de gouvernance.
La production de gaz naturel est convertie selon un facteur de 6 000 pieds cubes de gaz pour un baril de pétrole.
On utilise le baril équivalent pétrole (bep) ou la tonne équivalent pétrole (tep) pour exprimer la production ou l'utilisation d'autres formes d'énergie primaire, comme par exemple le gaz, le charbon, l'énergie nucléaire ou hydraulique, de manière à pouvoir les comparer directement avec le pétrole et entre elles.
Principales sources :
- Institut français du pétrole (IFP),
- Revenue Watch Institute,
- Agence internationale de l'énergie (AIE / IEA),
- Académie des technologies (Commission Energie et Changement climatique),
- glossaire de Gaz de France,
- dossier Journal du Net - Sciences, "Pétrole, faut-il croire à la pénurie ?" :
www.journaldunet.com/science/environnement/dossiers/06/0606-petrole/1.shtml
- etc.
Sélection et synthèse : Sylviane Tabarly
Géoconfluences le 27 septembre 2007
Pour citer cet article :
« Un glossaire pour comprendre la géopolitique des hydrocarbures - Géoconfluences », Géoconfluences, septembre 2007.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/transv/DevDur/popup/GlossaireHydrocar.htm