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Crise, crises

Publié le 31/10/2025
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Le terme de crise désigne, conformément à son étymologie (du latin « crisis », assaut, et du grec « krisis » séparation) un événement brutal, une rupture. Mais il désigne aussi une évolution longue qui révèle des faiblesses structurelles, inhérentes à un système. La crise serait une rupture de la stabilité d’un système, ce qui conduit à réfléchir sur les temporalités de la crise.

Le terme est d’un usage fréquent, aussi bien chez les économistes (notion de crise économique, de « secteur en crise », de « crise de la dette »…), que chez les sociologues (« crise sociale »…) ou chez les géographes : on parlera par exemple de crise démographique, de crise de l’accueil migratoire, de crise sanitaire, ou encore de crise climatique. Ce dernier terme, souvent employé à propos du changement climatique, insiste donc sur l’aspect rapide, brutal et inéluctable du phénomène. La notion de crise est donc caractérisée par sa nature polysémique, ce qui représente un défi de conceptualisation.

D’un point de vue économique, la crise ne doit pas être réduite à sa définition strictement économique, mais entendue au sens large du fait de ses implications sociales, démographiques, politiques… d'où l'usage courant du pluriel « crises ». Les crises étaient liées, dans les sociétés préindustrielles, à la sous-production agricole (crise frumentaire). Elles sont liées, avec l'industrialisation, à un déséquilibre entre la production et la demande solvable. Elles sont devenues de plus en plus des phénomènes d'ordre financier, quand faillites bancaires ou krach boursiers précèdent la baisse de l'activité, comme ce fut le cas lors de la Grande Dépression de 1929 ou de la Grande Récession de 2007–2008.

Le terme de crise est souvent employé en géographie des risques. Accidents, catastrophes et situations de crise sont souvent associés dans la perception qu'en a le grand public. Le mot est suremployé par les médias mais sa signification scientifique est floue. Dans la médecine hippocratique, le terme de crise désignait le moment où la maladie touchait à son terme. La crise n’était donc pas un signe de maladie, mais plutôt de résistance à la maladie. Dans la tragédie grecque, la crise est le moment de vérité où le passé est révélé. Edgar Morin (1976) notait qu'on en arrive aujourd'hui à des retournements complets de sens. Ce qui désignait à l'origine « décision, moment décisif d'un processus incertain », en arrive à pointer son contraire : « crise signifie indécision : c'est le moment où, en même temps qu'une perturbation, surgissent les incertitudes ».

Dans le cadre de la cybernétique (théorie des systèmes), la crise s'accompagne d'une bifurcation, d'un changement radical de direction, la crise caractérisant les systèmes en mutation. Aux évolutions lentes, sur le long terme, succèdent des évolutions très brutales sur des échelles de temps très courtes.

Les catastrophes peuvent être les révélateurs des états de crise, ce qui ne sera alors pas sans conséquences dans l'évolution des systèmes socio-spatiaux (organisation de l'espace, gestion du territoire). Pour apprécier les comportements humains en situation de crise, des recherches pluridisciplinaires (cindyniciens, psycho-ethnologues, anthropologues, sociologues, ergonomes, etc.) ont été menées. Il convient de distinguer ce qui est à la source de la crise et ce qui permet de la gérer : la gestion de crise.

Le terme de crise est également employé en géographie de la santé (crise sanitaire). Ainsi, la première phase de la pandémie actuelle de covid 19 est aussi appelée « crise du covid 19 »). L'état de crise sanitaire menace la santé d'une part plus ou moins importante d'une population, à des échelles temporelles et territoriales et selon des mécanismes diversifiés : crises virales (covid 19, sida), zoonoses (grippes « aviaire » et « porcine », encéphalopathie spongiforme bovine…), crises sociales et environnementales (mésothéliome dû à l'amiante, canicule, chikungunya, chlordécone, choléra, microplastiques et PFAS…), etc.

En France, la loi de santé publique du 9 août 2004 définit le dispositif d'alerte et de gestion des situations d'urgence sanitaire de la façon suivante : obligation d'alerte des pouvoirs publics par l'Institut de veille sanitaire (InVS) ; mobilisation de tous les acteurs concernés ; mobilisation des moyens de lutte selon un « Plan blanc d'établissement » de santé. La loi du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur a mis en place un Département d'urgences sanitaires (DUS) au sein de la Direction générale de la santé.

À des niveaux d'échelle plus petits peuvent intervenir : le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (Cepcm), le réseau mondial d'alerte et de réponse aux épidémies (Goarn) de l'OMS.

(ST) juin 2012, (MCD) 2015, réécriture partielle (SB et CB) septembre 2025


Référence citée
  • Morin Edgar (1976). « Pour une crisologie ». Communications, p. 149–163
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