Structurant (effet)
Les effets structurants liés à l’implantation de nouvelles infrastructures de transport sont les modifications (économiques, sociales, paysagères, etc.) engendrées par ces infrastructures. Ces effets sont les plus visibles quand on ouvre un axe là où il n'en existait aucun, par exemple dans le cas des fronts pionniers (on peut penser au Rondônia étudié par Hervé Théry depuis 1975, lire : Théry, 2022).
La question se pose différemment dans le cas d'axes s'ajoutant aux réseaux existants. C’est au début des années 1970 que le ministère en charge de l’équipement s'est intéressé à la question des « effets structurants » des autoroutes. Elle a d'abord été posée dans une logique d'aménagement du territoire : au-delà des seules conséquences sur le trafic, il s’agissait de voir si la réalisation de nouvelles infrastructures de transport était à même de susciter ou d'accélérer le développement économique dans les régions concernées.
En fait, les nouvelles facilités de transport n'apportent pas nécessairement aux régions traversées richesse et prospérité, et l'apparition d'une nouvelle infrastructure de transport n'entraîne pas d'effets automatiques. Il s'agit d'une relation complexe qui articule l'ensemble du système de transport (et non la seule infrastructure) au territoire desservi. Se poser la question des effets structurants des infrastructures de transport revient en définitive à s'interroger sur les transformations qui apparaissent dans un territoire lorsque les conditions de transport qui le caractérisent sont modifiées. Le transport apparaît alors comme un des éléments qui, tout à la fois, accompagne et permet les grandes mutations de notre société. Compte tenu d'études récentes, aux échelles européenne et française, on peut dire que les réseaux de transport n'ont pas d'effets automatiques et que chaque infrastructure est un cas spécifique. Les nouvelles infrastructures amplifient souvent les tendances existantes, mais elles peuvent aussi donner naissance à de nouvelles stratégies spatiales.
Il faut donc se garder de toute vision mécaniste ou déterministe dans le rôle des réseaux sur le développement. Voir un « effet structurant » des réseaux sur l’espace est une forme de spatialisme. Le mythe de l’« effet TGV », et plus généralement de l’effet d’entraînement des réseaux de transport sur les territoires, a été déconstruit dès 1993 par un article fréquemment cité depuis (Offner, 1993) et dont l’auteur a retracé la postérité vingt ans après (Offner, 2014). Les effets des transports seraient surtout structurants… dans la pensée et l’action des élus (Delaplace, 2014). Trente ans de travaux de géographes ont montré que les effets d’entraînement n’ont lieu que lorsque la dynamique est déjà en place : autrement dit il n’y a pas de différence entre la substance active et le placebo.
(ST). Dernière modificationd (LF), juillet 2021 et (JBB), février et septembre 2022.
Références citées
- Delaplace Marie, 2014, « Dessertes ferroviaires à grande vitesse : des effets structurant toujours… la pensée et l’action publique » in Collectif, « Les effets structurants des infrastructures de transport », L’Espace géographique, 2014/1 (tome 43), p. 51-67.
- Offner Jean-Marc, 1993, « Les "effets structurants" du transport : mythe politique, mystification scientifique », L'Espace géographique, 22-3, p. 233-242.
- Offner Jean-Marc, 2014, « Les "effets structurants" du transport : vingt ans après » in Collectif, « Les effets structurants des infrastructures de transport », L’Espace géographique, 2014/1 (tome 43), p. 51-67.
- Hervé Théry, « Rondônia : "anthropisation" d’un État amazonien, 1975-2020 », Géoconfluences, septembre 2022.
Pour compléter
- Dossier : Les réseaux transeuropéens de transport : relier pour intégrer ?
- Dossier : Mobilités, flux et transports
Liens externes
- Revelli Bruno, « Un effet de structuration des territoires ? Le rail comme outil et symbole pour “faire région“ en Occitanie », Flux, n° 122, 2020, p. 53-68.