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Mobilités, flux et transports

Le détroit de Malacca : porte océane, axe maritime, enjeux stratégiques

Publié le 29/11/2004
Auteur(s) : Nathalie Fau - université de Paris 7 Denis Diderot

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Un détroit est un passage maritime exigu entre deux terres faisant communiquer deux mers. C'est, au même titre que l'isthme ou le canal, un axe à la fois stratégique et structurant des échanges maritimes mondiaux. Cet espace particulier et complexe de l'interface maritime et terrestre est devenu un enjeu majeur au XXe siècle avec la volonté des États riverains de se projeter de plus en plus loin vers le large et d'étatiser les espaces maritimes.

1. Un couloir intense de circulation maritime
2. Un espace stratégique
3. Frontière maritime et espace international

Un détroit est un passage maritime exigu entre deux terres faisant communiquer deux mers. C'est, au même titre que l'isthme ou le canal, un axe à la fois stratégique et structurant des échanges maritimes mondiaux. Cet espace particulier et complexe de l'interface maritime et terrestre est devenu un enjeu majeur au XXe siècle avec la volonté des États riverains de se projeter de plus en plus loin vers le large et d'étatiser les espaces maritimes.

Un couloir intense de circulation maritime

Les détroits : des "portes océanes"

La concentration du trafic maritime international dans les détroits, véritable "porte océane" pour reprendre une heureuse expression de Jean-Claude Lasserre (Lasserre, 2003), se renforce avec la maritimisation de l'économie mondiale. Le trafic maritime mondial augmente fortement avec la mondialisation des échanges. Ses volumes augmentent de 67% entre 1970 et 2000 (2,3% par an), pour dépasser les 5,88 milliards de tonnes en 2001. La flotte marchande a vu son tonnage multiplié par 2,5 sur la même période et en 2000. Le commerce maritime représente 75% du commerce mondial en poids et 66% en valeur. La forte croissance des échanges des biens manufacturés à moyenne et haute valeur ajoutée se traduit également par l'essor du transport de conteneurs. Points de passage obligés, les détroits concentrent ces flux toujours croissants et constituent des maillons sensibles des routes maritimes.

Le détroit de Malacca : un axe majeur de la circulation maritime mondiale

Situation du détroit de Malacca dans le système de transport mondial

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Le détroit de Malacca est à la rencontre des lignes transocéaniques entre l'Océan Indien et le Pacifique, des lignes intra-asiatiques et des routes maritimes circumterrestres est-ouest de marchandises. En dépit de son importance, le trafic dans le détroit de Malacca n'a jamais été connu précisément et on dispose uniquement d'estimations ou d'études ponctuelles. On estime ainsi qu'en 1997, le nombre moyen de navires en transit est de 300 par jour. Cette évaluation se fonde sur la croissance du nombre de navires accostant dans le port de Singapour : 130 333 en 1997, contre 21 999 en 1976, soit en tonnage une augmentation de 630 761 tonnes. Le Système d'Information du Trafic des Navires (Vessel traffic international system - VTIS) de Singapour comptabilise quotidiennement une moyenne de 1 000 navires (tous types de flux confondus) quittant ou se dirigeant vers le port et empruntant le détroit de Singapour.

Le détroit de Malacca est emprunté par les deux routes principales de navigation qui relient l'Europe et le Moyen Orient à l'Asie Orientale. La plus importante et la plus ancienne est la grande voie de navigation directe, venant de Suez via la mer Rouge, doublant le cap Guardafui, traversant les Maldives, contournant le Sri Lanka par le sud et empruntant le détroit de Malacca pour accéder à la mer de Chine méridionale. La seconde a pour origine le Golfe Persique et le détroit d'Ormuz. Elle dessert de nombreux ports d'Asie Méridionale (Karachi, Bombay, côte de Malabar, Colombo, golfe de Bengale) avant de se rendre vers l'Asie du Sud Est (Denécée, 1999, 84-86).

L'essor du trafic dans le détroit de Malacca a pour origine la forte croissance du trafic maritime en Asie Orientale, pour les flux de conteneurs en particulier.

À l'échelle mondiale, le trafic conteneur connaît une très forte croissance ces vingt dernières années : le nombre de conteneurs manutentionnés est de 171,5 millions d'EVP* en 1998 contre seulement 42,8 millions d'EVP en 1992, soit une multiplication par cinq de ce trafic. Or, le volume total des conteneurs transitant par les ports de l'Asie Orientale a augmenté de 270% entre 1985 et 1995. Le trafic conteneur de l'Asie Orientale est désormais deux fois plus important qu'en Europe.

En 1997, les ports d'Asie Orientale concentrent ainsi 43,1% des conteneurs manutentionnés dans le monde, tandis que la part de ceux de l'Union Européenne est de 22,7% et celle de l'Amérique du Nord de 14,4%. De même, si, sur la période 1990-1997, le taux de croissance du trafic conteneurisé est de 8,5% à l'échelle mondiale, l'Asie Orientale est bien au-dessus de ce taux moyen avec un taux de croissance de 15% par an.

EVP : Equivalent ving pieds, mesure nominale de capacité des navires porte-conteneurs, calculée en nombre de conteneurs de 20 pieds de longueur.

Le détroit de Malacca : une artère vitale du commerce intrarégional

Le détroit de Malacca profite également du renforcement de la route maritime asiatique et de l'intégration régionale. Le trafic interrégional asiatique supplante désormais en volume le commerce transatlantique et les routes maritimes conteneurisées qui concentrent les volumes de trafic les plus importants convergent vers l'Asie. Si au milieu des années 1980, la route transpacifique (États-Unis/Asie) dépasse en volume de flux conteneurisés la route transocéanique, elle est à son tour concurrencée par la route maritime régionale de l'Asie Orientale (Frémont, 2003). Le trafic intra-asiatique est de 8,5 millions d'EVP en 2000 et son taux de croissance moyen annuelle est de 10,1% entre 1992 et 1997, passant de 4,8 millions d'EVP à 7,7 millions d'EVP. La crise économique de 1997 a ralenti cette croissance ; à la différence des autres routes maritimes mondiales, le flux de conteneurs décline de 5,8% sur la route de l'axe oriental. Ce déclin est cependant temporaire et le taux de croissance est de 11% en 1999.

Un espace stratégique

Conflits entre souverainetés nationales et droit international

Les détroits internationaux ont également une importance géopolitique. La proximité des rives confère à ces lieux une dimension géostratégique particulière. La logique militaire a toujours justifié de garder les détroits ouverts. Les détroits des Dardanelles ou d'Ormuz sont ainsi restés célèbres dans l'histoire. Ils sont restés dans les mémoires comme des enjeux majeurs pour les questions de sécurité et pour le déploiement des forces navales. Les détroits sont ainsi souvent gardés par des bases militaires et demeurent des "points chauds".

Dans les détroits reconnus internationaux, les États riverains ne peuvent aménager et gérer ces espaces sans tenir compte du droit international. Ils ne peuvent pas ainsi affirmer unilatéralement leur souveraineté sur les eaux des détroits et restreindre leur franchissement à des navires étrangers. Ils ne peuvent pas non plus imposer des taxes aux navires empruntant ces détroits ou y entraver la circulation. Les détroits présentent des enjeux non seulement pour les États riverains, mais aussi et surtout pour les États utilisateurs, parfois très éloignés, et les compagnies maritimes.

Les tentatives d'appropriation du détroit de Malacca par l'Indonésie et la Malaisie

Les tentatives d'appropriation du détroit de Malacca par l'Indonésie et la Malaisie au lendemain de l'indépendance ont ainsi échoué et cristallisé les enjeux géopolitiques de la Guerre froide. À la suite de la convention de Genève de 1958, les gouvernements indonésien et malaisien étendent la limite de leurs eaux territoriales à 12 milles nautiques (22,2 km). Le détroit de Malacca, dont la largeur est inférieure à 20 milles dans sa partie la plus étroite, se trouve donc recouvert par les eaux nationales des deux pays, menaçant la libre circulation maritime. Le 16 novembre 1971, les deux gouvernements déclarent conjointement que le détroit de Malacca n'est pas un détroit international, mais ils autorisent son franchissement par des navires étrangers en vertu du principe de "passage innocent". Singapour prend note de cette décision sans s'y associer (Leifert, 1978 : 48).

Cependant, en pleine période de Guerre froide, la fermeture potentielle d'un détroit porte directement atteinte au déploiement des flottes navales et donc au maintien de l'équilibre des puissances militaires dans un monde bipolarisé. Les Américains et les Soviétiques se retrouvent donc sur le principe de la libre circulation, lors de la 3e Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer en 1974, et dénoncent les tentatives de mainmise des États riverains sur les détroits. De plus, les Soviétiques rejettent le concept de "passage innocent", sujet selon eux à une interprétation trop subjective et jouant en leur défaveur depuis le rapprochement de l'Indonésie de Suharto avec les États-Unis.

Le gouvernement chinois soutient au contraire les revendications de l'Indonésie et de la Malaisie. Il prend la défense d'un droit de la mer qui est favorable aux États côtiers et qui interdit la traversée du détroit aux bâtiments de guerre. Cette position s'explique en grande partie par l'importance de la présence navale soviétique en Extrême-Orient et dans l'océan Indien, qui menace la Chine d'encerclement. La fermeture du détroit rendrait difficiles les liaisons entre l'Europe et l'Extrême-Orient soviétique, les autres voies étant moins fiables (le Transsibérien longe la frontière chinoise) ou impraticables une grande partie de l'année (la route maritime du nord passe par l'Arctique, voir la carte ci-dessus). (H. Couteau-Bégarie, 1987 : 104-107; 190-195; E. Dénecé : 169-171; 157-164).

La Convention de Montego Bay de 1982 règle finalement ce différend en définissant et légifèrant le régime de passage en transit : cette disposition est un compromis entre le "droit de passage inoffensif" et "la libre circulation maritime et aérienne en haute mer". Elle garantit la liberté d'accès au détroit tout en accordant aux États riverains des garanties en matière de sécurité, de souveraineté nationale et d'environnement. La Malaisie et l'Indonésie sont donc contraints d'adopter le régime du "passage en transit" et de respecter le libre passage des navires sur une voie navigable internationale.

Une artère vitale pour le Japon

Le détroit de Malacca est une artère vitale pour l'économie japonaise, tant pour son approvisionnement en matières premières que pour ses exportations vers l'Europe de produits manufacturés. Par lui transitent près de 41% des importations totales de l'archipel nippon et notamment 80% de son pétrole, en provenance du golfe arabo-persique. La libre circulation et la sécurité dans ce détroit sont donc une priorité stratégique et le Japon met tout en oeuvre pour coopérer avec les États riverains. En 1968, le ministre japonais des transports, en coopération avec des entreprises pétrolières, des transporteurs et des organismes liés au domaine maritime (assurances, constructions navales, propriétaires de navires, etc.) fonde le Malacca Strait Council (MSC) chargé de l'amélioration des conditions de navigation dans le détroit en proposant une aide technique et financière. Sous son égide et en coopération avec la Malaisie, l'Indonésie et Singapour, les Japonais procèdent à des campagnes de relevés hydrographiques du détroit de 1968 à 1978 afin de mettre en place un système de séparation du trafic. Le MSC finance aussi le système électronique d'aide à la navigation et crée en 1981 un "Fonds pour la prévention et la suppression de la pollution dans le détroit de Malacca".

Les nouvelles ambitions de la Chine

Dans les années 1980, le détroit de Malacca devient également un passage stratégique pour la Chine du fait de ses ambitions en mer de Chine méridionale. Les accords signés avec le gouvernement du Myanmar lui permettent d'occuper des bases navales de la mer d'Andaman. Depuis 1992, la Chine développe des infrastructures militaires sur les petites îles de Hainggyi, à l'embouchure du fleuve Irrawady et sur les îles Coco, situées dans le golfe du Bengale à 300 km au sud de la Birmanie continentale. Elle est ainsi en mesure de contrôler les flux entre l'Océan Indien et la mer d'Andaman. Depuis l'été 1994, Rangoon accorde des facilités supplémentaires d'installation à la République Populaire de Chine dans les îles de Sittwe et Zadetkyi, localisées au large de la côte de Tenasserim, à proximité de l'entrée nord du détroit de Malacca. La Chine dispose ainsi d'une présence militaire des deux côtés du détroit de Malacca, et d'avant-postes maritimes défensifs protégeant son flanc sud. Elle devient donc une menace potentielle pour les pays de l'Asean et pour le Japon : les flottes militaires chinoises ont désormais la possibilité de bloquer l'accès au détroit de Malacca.

Le renforcement de la présence des États-Unis dans le détroit depuis le 11 septembre

Après la chute du bloc de l'Est, les États-Unis maintiennent leurs forces militaires en Asie. Leur départ forcé des bases des Philippines (1992) n'a guère affaibli leur déploiement et de plus en plus d'États leur octroient des facilités navales. Ils ont conservé leurs alliances bilatérales traditionnelles avec l'Australie, le Japon, la Corée du Sud, la Thaïlande et les Philippines. De plus, la politique indienne de non-alignement, qui contestait naguère la présence des bases américaines, appartient au passé. L'Inde développe une coopération de défense avec les États-Unis de plus en plus active. Après les attentats du 11 septembre 2001, la militarisation de l'Océan Indien et le rapprochement militaire entre les États-Unis et l'Inde se sont accélérés et le détroit de Malacca est placé sous une surveillance accrue. Les marines nationales américaines et indiennes ont notamment intensifié leurs patrouilles communes dans le détroit de Malacca : plus de 200 en 2002 contre seulement 25 en 1998.

Frontière maritime et espace international

Les spécificités d'une frontière maritime

La frontière maritime est un type de frontière bien particulier "tandis que le dyade de la frontière terrestre évolue sur le plan de la double dimension, avec une ligne et des contacts de part et d'autre, en travers, la frontière maritime fonctionne en triade, en espace de trois dimensions puisque s'y ajoute le passage en long" (Pelletier, 2003). Cette troisième dimension joue à plein dans le cadre d'un détroit puisqu'elle participe directement aux relations entre les États riverains et soulève la question des relations entre riverains et États utilisateurs. L'article 43 [1] de la Convention de Montego Bay (UNCLOS) de 1982 définit ainsi précisément la responsabilité des États riverains et des utilisateurs des détroits concernant l'entretien et le financement des infrastructures de navigation dans les détroits. Du fait du statut international des détroits, le droit international oblige les États riverains à coopérer afin d'y assurer la sécurité du trafic maritime.

Le détroit de Malacca : un espace maritime commun

Depuis le communiqué commun du 16 novembre 1971, les États riverains du détroit de Malacca sont responsables de la gestion du détroit. Une coopération trilatérale est donc indispensable. Elle suit deux orientations principales.

La première concerne la sécurité de la navigation. En février 1977 et en décembre 1998, la Malaisie, Singapour et l'Indonésie ont signé un accord de séparation du trafic dans le détroit avec la mise en place de couloirs de navigation et de systèmes d'aides à la navigation.

La seconde vise à lutter contre une piraterie quasi-endémique dans le détroit et en pleine recrudescence au début des années 1990. En 1992, les trois États riverains signent une série d'accords bilatéraux afin de coordonner les missions de surveillance, d'organiser des patrouilles communes et d'autoriser les forces navales à poursuivre les pirates dans leurs eaux territoriales respectives. En coopération avec la fédération internationale des armateurs, ils créent également en février 1993 à Kuala Lumpur un centre régional de lutte contre la piraterie (Chalk, 1998 et Frécon, 2003).


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Les difficultés d'une coopération transnationale

En dépit de la nécessité de gérer en commun le détroit de Malacca, les concurrences entre les États riverains demeurent. La sophistication des systèmes de séparation du trafic implique certes une gestion transnationale, mais pas une véritable coopération à l'échelle du détroit de Malacca. Les conférences et les traités ratifiés depuis 1971 envisagent en effet le détroit de Malacca uniquement comme un axe international, en oubliant qu'il est aussi une mer intérieure. Cette différence de perception du rôle du détroit entre Singapour d'une part, et la Malaisie et l'Indonésie d'autre part, attise les conflits entre les États riverains.

Lors de la deuxième conférence internationale sur les détroits de Malacca et de Singapour organisée, à Singapour en 1999, conjointement par le Singapore's Institute of Policy Studies et l'Organisation Maritime Internationale (OMI), les prises de position des représentants indonésiens, malaisiens et singapouriens soulignent explicitement la permanence des tensions et des revendications. Les discussions tournent majoritairement autour de l'article 43 de la convention de Montego Bay de 1982, notamment sur la responsabilité des États riverains et des utilisateurs dans l'entretien et le financement des infrastructures de navigation des détroits de Malacca et de Singapour. Une question est récurrente dans la majorité des interventions : qui doit payer la maintenance et la construction des infrastructures de navigation ? Elle débouche inévitablement sur deux autres questions connexes : qui sont les utilisateurs du détroit ? Qui profite des améliorations de la navigabilité du détroit de Malacca ? La question avait déjà été posée lors de la première conférence internationale de 1996. Gerard Peet (1997) identifie alors trois types d'intérêts. Le premier est celui des ports riverains du détroit de Malacca qui accueillent les flux internationaux et en tirent donc des dividendes directs. Le second est celui des compagnies maritimes internationales, dont la sécurité de navigation dans le détroit est assurée par des améliorations techniques et un bon entretien des infrastructures existantes. Le dernier est celui des États, dont la régularité des flux et le coût import - export dépendent directement de la qualité de la navigation dans le détroit de Malacca. Or sur ces trois points, les intérêts des gouvernements indonésien, malaisien et singapourien divergent très nettement.

Dr. Hasjim Djalal (1999) et B.A. Hamzah (1999), les représentants respectifs de l'Indonésie et de la Malaisie, ont des discours similaires. Ils remarquent tous deux que les compagnies maritimes internationales ne s'arrêtent pas dans leurs ports, mais privilégient surtout le port de Singapour. Les retombées de la navigation internationale sur leurs économies portuaires demeurent donc marginales. D'autre part, les infrastructures développées dans le détroit de Malacca servent uniquement aux grandes compagnies maritimes et aux flux de transit, tandis qu'aucune coopération n'est mise en place pour l'amélioration des flux de cabotage et des flux maritimes entre les deux rives. L'Indonésie et la Malaisie ne possèdent pas de superpétroliers de type VLCC (Very Large crude carrier) ni de compagnies maritimes nécessitant la qualité des infrastructures disponibles dans le détroit. La sophistication et le coût des équipements maritimes implantés dans le détroit dépassent les besoins de ces deux pays.

La nécessaire et tardive prise en compte des flux internes au détroit

Il faut en fait attendre la ratification du dispositif de séparation du trafic du 1er décembre 1998 pour que soit enfin soulevé le problème de la diversité de la navigation interne au détroit (flux de cabotage et flux transversaux) et celui de la nécessité de légiférer pour leur réserver des zones maritimes distinctes. De même le nouveau projet d'autoroute maritime électronique [2] qui émerge à la fin des années 1990 ne vise pas seulement à une amélioration de la sécurité de la navigation dans les détroits. Il est motivé également par un souci environnemental. Les États riverains prennent conscience de la dégradation rapide de l'écosystème et des littoraux du détroit de Malacca. Pour y remédier, ils envisagent de lancer des études qui intègrent enfin les littoraux et leurs arrière-pays donnant sur les détroits. Cette évolution pourrait donc être le point de départ d'une intégration spatiale transnationale plus élaborée.

 

Notes :

[1] L'Article 43 (voir note infra) de la Convention de Montego Bay (UNCLOS) de 1982 : "Navigational and safety aids and other improvements and the prevention, reduction and control of pollution. User States and States bordering a strait should by agreement cooperate: (a) in the establishment and maintenance in a strait of necessary navigational and safety aids or other improvements in aid of international navigation ; and (b) for the prevention, reduction and control of pollution from ships."

[2] Ce projet consiste en l'association de plusieurs innovations technologiques majeures (cartes marines digitales, système de positionnement global, ordinateur à bord) à des fins de gestion entièrement informatisée des détroits de Malacca et de Singapour.


Références bliographiques

  • Denécé É. - Géostratégie de la mer de Chine méridionale et des bassins adjacents - Paris, L'Harmattan - 1999
  • Fau N. - "Enjeux et organisations spatiales du détroit de Malacca", Intégrations régionales en Asie Orientales sous la direction de Christian Taillard - Les Indes Savantes, pp. 295-315 - 2004
  • Fau N. - Le nord de Sumatra : une périphérie indonésienne sur le détroit de Malacca. Un espace partagé entre intégration nationale et recompositions transnationales - Thèse d'Université de Paris X Nanterre - 2003
  • Fau N. - Le rôle des infrastructures dans l'organisation spatiale du détroit de Malacca (Indonésie, Malaisie, Singapour) - Cahier du GEMDEV n° 29, Développement durable : quelles dynamiques ?, pp. 163-184, 2003
  • Herbert V. - La Malaisie et le détroit de Malacca, gestions, conventions, coopération - Cahiers Nantais, n°52, pp. 45-63 - 1999
  • Herbert V. - Le trafic maritime dans le détroit de Malacca et ses effets sur la côte occidentale de la Péninsule Malaise - Thèse université de Nantes - 1999
  • Lasserre J.-C. - Le Pas-de-Calais et le détroit de Gibraltar. Quels enjeux géopolitiques ? - Études Internationales, n°2, Volume XXXIV, pp. 195-213 - 2003
  • Pelletier Ph. - "L'Extrême Océan, enjeux territoriaux dans les mers entourant le Japon", Intégrations régionales en Asie Orientale sous la direction de Christian Taillard - Les Indes Savantes, pp. 239-263 - 2004
  • Pelletier Ph. - "L'Extrême Océan, enjeux territoriaux dans les mers entourant le Japon" - Nouvelles Organisations Régionales en Asie orientale, Vol. II, à paraître - 2003
  • Picouet P., Renard J.-P. - Les détroits : de nouveaux territoires ? L'exemple du Pas de Calais - Mappemonde, 65, pp. 7-11 - 2002
  • Renard J.-P. - Le Pas-de-Calais, un espace terraqué - BAGF-Géographie, n°2, pp. 113-125 - 2003 www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M102/Picouet-Renard.pdf
  • Segaud M. - Channel's fate : terraqué ? - Hommes et Terres du Nord, n°2, pp.3-6. - 2002

 

Numéros spéciaux sur les détroits :

Pour compléter, des ressources sur le Web

Un site consacré au détroit de la Manche :

  • L'Atlas Transmanche / Cross Channel Atlas résultant d'une collaboration scientifique franco-britannique (Universités, CNRS, INSEE, Ministère de l'Équipement du côté français - Universités du côté anglais) afin de contribuer à la connaissance des dynamiques d'une zone transfrontalière d'intégration européenne forte. L'Atlas Transmanche couvre le sud de l'Angleterre et le Nord-Ouest de la France. Il comprend cartes, textes, photos, tableaux et graphiques. http://infodoc.unicaen.fr/OhRAGE/atlas/Presentation/geographes.html


Compléments sur les transports maritimes dans le monde

  • Les cartes du Centre d'Étude en Transports Maritimes : Trafics conteneurisés 2003 (Asie Pacifique, Europe, Amérique du Nord, Est-Ouest). Les géants de la manutention mondiale. Les pollutions maritimes depuis 1967. www.isemar.asso.fr/bibliotheque/cartographie.htm
  • Des cartes ressources sur le site de l'Isemar :

> Trafic conteneurisé Est-Ouest www.isemar.asso.fr/bibliotheque/pdf/Trafic%20conteneurs%20Est%20Ouest%202003.pdf
> Trafic conteneurisé de l'Asie Pacifique 2003 www.isemar.asso.fr/bibliotheque/pdf/Trafics%20conteneurs%20ports%20Asie%20Pacifique%202003.pdf
> La répartition du trafic conteneurisé mondial en 1998 et évolution depuis 1978 www.isemar.asso.fr/bibliotheque/pdf/carte7.PDF

  • Une mallette pédagogique du Ministère des Transports, février 2002

> Lexique sur le transport maritime www.ac-nancy-metz.fr/enseign/TransportsLP/PDF/lexique%20maritime.pdf
> Les acteurs d'un port : clients, services aux navires, services administratifs, services aux marchandises, entreprises de manutention, transports terrestres. www.ac-nancy-metz.fr/enseign/TransportsLP/PDF/gens%20du%20port.pdf
> La conteneurisation www.ac-nancy-metz.fr/enseign/TransportsLP/PDF/conteneur%20mer.pdf
> Les échanges de marchandises dans le monde par voie maritime www.ac-nancy-metz.fr/enseign/TransportsLP/PDF/avantagesmaritime.pdf
> Les ports français au cœur de l'espace maritime européen www.ac-nancy-metz.fr/enseign/TransportsLP/PDF/atouts%20ports%20français.pdf
> Les fiches pratiques sur les transports (routiers, ferroviaire, aérien, maritime, multimodal) de l'Académie de Nancy Metz : www.ac-nancy-metz.fr/enseign/TransportsLP/pedagotrans.htm#Transport%20routier

  • Revue Stratégies de la DREE : Ports de transbordement régionaux : un nouveau modèle de développement logistique face à l'explosion du trafic de conteneurs : www.dree.org/documents/303/73841.pdf

 

Nathalie Fau,
Maîtresse de conférences en géographie, Université de Paris 7 Denis Diderot, LASEMA, UPR 297 du CNRS et SEDET, UMR 7135,
pour Géoconfluences le 15/11/2004

Mise à jour :   29-11-2004

Pour citer cet article :  

Nathalie Fau, « Le détroit de Malacca : porte océane, axe maritime, enjeux stratégiques », Géoconfluences, novembre 2004.
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/transv/Mobil/MobilScient4.htm