Résidence de luxe face à la favela : l’immeuble rendu célèbre par le cliché de Tuca Vieira menace de tomber en ruine

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Le célèbre immeuble et la favela de Paraisópolis en 2004 et en 2024. Images Google Earth. En 2024, au sud-est de Paraisópolis, en bas à droite de l’image, un rideau de bâtiments collectifs a été constriut pour cacher la favela, selon un modèle d’immeubles à haute densité dit « Cingapura » car rapporté de Singapour par un gouverneur de São Paulo. Coordonnées : -23.614, -46.730.

Un article paru dans Veja São Paulo en 2024 retrace l’histoire de cet immeuble qui a marqué une génération d’écoliers, depuis son inauguration en 1984. La photographie de cette tour résidentielle dont chaque étage a une piscine, au pied duquel s’étale la favela de Paraisópolis, a été utilisée par de nombreux manuels scolaires jusqu’à la fin des années 2010. Cette image devenue emblématique de la fragmentation urbaine, de la ségrégation spatiale et des contrastes de richesse. La photographie en question, datant de 2007, est reproduite dans un article d’Hervé Théry qui lui est consacré. Paru en 2015 dans la revue Justice spatiale, ce texte revient sur le succès planétaire de la photographie. On peut y lire ce témoignage de Tuca Vieira :

L’article de 2024 dans Veja São Paulo contient de nombreuses photographies concernant l’état du bâtiment, fortement délabré. La valeur immobilière des appartements n’est plus à la hauteur des charges, qui restent élevées, et la proximité du bidonville est l’une des raisons de sa désaffection partielle. L’article raconte que lorsque la tour, alors luxueuse, a été inaugurée, le bidonville était encore assez loin. Ce n’est que dans les années 1990 qu’il s’est étendu jusqu’au pied de l’immeuble. En 2007, à l’époque de la célèbre photographie de Tuca Vieira, les images aériennes montrent déjà une favela qui s’étend jusqu’à l’immeuble. Toujours d’après le journal, le contraste saisissant visible sur la photographie de Tuca Vieira n’est pas représentatif de la ségrégation urbaine à São Paulo, où les favelas, à de rares exception près, sont éloignées des quartiers les plus riches, les contrastes de richesse se donnant plutôt à voir à l’échelle de l’agglomération (voir les cartes d’Hervé Théry).

Cette photographie appartient donc désormais à l’histoire de l’art et à l’histoire des représentations scolaires. D’autres ressources permettent de montrer de façon saisissante des contrastes de richesse ou de formes urbaines, par exemple le site Unequal Scenes.

Le double immeuble de Morumba reconstitué en trois dimensions sur Google Maps.

Références citées

• Hervé Théry, « Une photo pour penser les inégalités », Justice spatiale | spatial justice, n° 7 janvier 2015.
• Guilherme Queiroz, “Prédio famoso pelo contraste com comunidade enfrenta dívidas e processos”, Veja São Paulo, 16 février 2024.
• Johnny Miller, Unequal Scenes

Pour compléter avec Géoconfluences

• Hervé Théry, « Portrait de São Paulo (1) : une capitale du Brésil », Géoconfluences, novembre 2016.
• Hervé Théry, « Portrait de São Paulo (2) : contrastes, problèmes, défis », Géoconfluences, novembre 2016.