Vous êtes ici : Accueil / Glossaire / Conquête spatiale, extra-globalisation

Conquête spatiale, extra-globalisation

Publié le 13/05/2024
PDF

Les expressions « conquête spatiale » ou « conquête de l’espace » pose problème aux géographes à cause de la polysémie du mot « espace ». On trouvera des occurrences anciennes pour parler ainsi de la conquête de l’espace terrestre, d’autres utilisations, au début du XXe siècle, pour s’enthousiasmer des premiers vols aériens, mais depuis les années 1950, pour tout un chacun, le sens est cependant évident : il s’agit bien de l’espace extra-atmosphérique, dans la mesure où l’atmosphère est incluse dans la définition du globe terrestre, comme les autres « sphères » (lithosphère, hydrosphère, troposphère, etc.). La conquête spatiale désigne l’ensemble des missions exploratoires entreprises depuis la mise en orbite, par l’URSS, du premier satellite artificiel en 1957 (Spoutnik) jusqu’au projet d’exploration habitée de Mars, et la compétition à laquelle les grandes puissances se sont adonnées dans cette « course à l’espace » : d’abord entre les États-Unis et l’URSS pendant la guerre froide, auxquels s’ajoutent aujourd’hui l’Union européenne, la Chine, l’Inde et d’autres États.

Le traité sur l’espace de 1967 a affirmé clairement que « l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, doivent se faire pour le bien et dans l’intérêt de tous les pays, quel que soit le stade de leur développement économique ou scientifique ; elles sont l’apanage de l'humanité tout entière. » Il ne peut pas y avoir stricto sensu de conquête, au sens d’une appropriation nationale. Le drapeau états-unien planté sur la Lune le 20 juillet 1969 n’avait pas plus de valeur juridique que le drapeau norvégien planté au pôle Sud le 14 décembre 1911.

Comment nommer la conquête de l’espace extra-terrestre ? En 1963, Günther Anders a parlé d’« Extraglobalismus » en allemand, traduit en français par « extra-globalisation ». Le mot pourrait servir à dénommer ce processus par lequel l’humanité a entrepris l’exploration de l’espace outre-globe et la poursuit. L’extra-globalisation, c’est la continuation de la globalisation par d’autres moyens, au-delà des limites de la sphère terrestre. En l’absence de toute colonisation, cependant, on ne pourra pas vraiment parler d’extension de l’écoumène ni de mondialisation extra-globale. Pas encore : il est prévu, à l’horizon des années 2030, d’installer des établissements temporaires sur la Lune, avec une présence comparable à celle en Antarctique : des bases permanentes, mais habitées par roulement (donc des habitants, mais temporaires, et aucun résident permanent).

Vincent Capdepuy, mai 2024.


Références citées
  • Anders Günther, 2022, Vue de la Lune : réflexions sur les vols spatiaux, trad. par Annika Ellenberger, Perrine Wilhelm et Christophe David, Genève, Éditions Héros-Limite.
  • Nations Unies (1967), Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d'exploration et d'utilisation de l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, résolution 2222 votée par l’Assemblée générale des Nations unies le 19 décembre 1966, texte ouvert à signature à Moscou, Londres et Washington le 27 janvier 1967.
Pour compléter avec Géoconfluences
Affiner les résultats par :