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Dépendance automobile

Publié le 21/01/2025
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La notion de « dépendance automobile » est apparue au début des années 1990. Vincent Kaufman et Jean-Marie Guidez (1998) utilisent souvent le terme de dépendance pour traiter du recours systématique à l'automobile, y compris pour des trajets très courts. Gabriel Dupuy en donne une définition précise : elle désigne un système complexe dans lequel l'usage de l'automobile est central. La connotation est négative, selon Gabriel Dupuy (1999, p. 7) qui se réfère aux drogues qui fournissent des satisfactions momentanées au prix de dommages à long terme. On peut ajouter que comme dans le cas des addictions, les doses augmentent graduellement avec l’accoutumance, et il est difficile de revenir en arrière.

Gabriel Dupuy s'appuie sur le « cercle magique » du développement de l'automobile aux États-Unis. Décrit par les ingénieurs des ponts et chaussés américain, il implique que l'extension des réseaux routiers conduit à utiliser davantage l'automobile, ce qui nécessite des investissements routiers supplémentaires améliorant temporairement les conditions de circulation, ce qui favorise alors l'arrivée de nouveaux automobilistes jusqu'à saturation, et ainsi de suite… C’est le paradoxe de Braess. Cet engrenage fonctionne encore en bien des lieux du Monde, et continue même à se développer par effet cumulatif. Une boucle de rétroaction pérennise le système et marginalise dans le même temps les non motorisés dont le potentiel d'accessibilité se réduit, du fait de la dé-densification et de l’étalement progressifs des espaces urbains.

Gabriel Dupuy formalise le système, selon l'hypothèse qu'« on ne saurait désormais comprendre le rôle de l'automobile sans une vision systémique incluant l'ensemble des éléments qui en font ce qu'elle est : un véhicule auto-mobile (au sens fort des deux termes) pour le plus grand nombre » (1999, p. 13). S'inspirant des travaux de Peter Hall, il pose les éléments du système : une production de masse permettant de démocratiser l'acquisition d'automobiles ; des codes uniformes, des règles et des normes (conduite, signalisation…) ; des réseaux techniques ; des équipements annexes destinés à faciliter la vie des automobilistes.

Le fonctionnement du système automobile repose alors sur des interactions, qu'elles soient positives tel que l'effet de club (l'accroissement du nombre d'automobilistes améliore les avantages et aménités) ou négatives (internes – congestion – ou vers l'extérieur du système – pollution, sécurité…). Le système tend donc à s'auto-renforcer.

Toujours pour Gabriel Dupuy « l'entrée dans le système automobile se traduit, au-delà de l'utilité individuelle du bien acquis et employé, par une sorte de bonus d'origine collective » (1999, p. 14). Si le bonus est perçu individuellement, il faut rappeler que la dépendance n'est pas individuelle mais plutôt collective. Ainsi « c'est par le comportement des autres que nous sommes incités à utiliser l'automobile et que nous en sommes, par là même, dépendants » (ibid.). Mais ce « cercle vertueux d'effets positifs (…) enroule avec lui un cercle vicieux d'effets négatifs dus au développement de l'automobile » (p.15). La dépendance peut alors être définie comme « effet négatif d'origine interne au système et résultat du bonus et de cercle magique… » (ibid.). La dépendance affecte aussi ceux (utilisateurs ou non-utilisateurs et collectivités) qui pâtissent des effets négatifs de l'automobile tels que pollution, congestion et insécurité.

Manuel Appert, mars 2009. Dernières modifications (JBB), janvier 2025.


Références citées
  • Dupuy Gabriel, 1999. La dépendance automobile - Symptômes, analyses, diagnostic, traitements, Economica, coll. « Villes », 160 p.
  • Kaufmann Vincent et Guidez Jean-Marie, 1998, Les citadins face à l'automobilité, Lyon, éditions du CERTU, 122 p.
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