Économie de la santé
L'économie de la santé est l'application aux domaines médical et socio-sanitaire des concepts et des méthodes de l'économie. Elle évalue le coût de la santé et de son incidence sur l'économie générale, sur le budget de la nation et des ménages, sur la gestion des entreprises et sur la politique sociale. Elle analyse l'offre et la demande de soins, le marché des biens et des services médicaux, le fonctionnement et le financement du système de santé.
Les économistes s'accordent pour faire de l'article de K. J. Arrow, « Incertitude et Économie du bien-être en santé » (Uncertainty and the Welfare Economics of Medical Care), paru en 1963 dans l'American Economic Review, l'acte fondateur de l'économie de la santé (Chambaretaud et Hartmann, 2004). L’interdisciplinarité est une des caractéristiques de cette discipline qui entretient de nombreux liens avec l’épidémiologie, les sciences humaines et sociales, et les diverses branches du domaine médical. Ainsi, l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), créé en 1985, est un Groupement d’Intérêt Public (GIP) qui regroupe des chercheurs en géographie, en économie, des médecins, des statisticiens… Leur programme de recherche repose sur de nombreux thèmes ayant une dimension territoriale : « l'analyse de l'équité et de l'accès aux soins, les comportements des producteurs de soins, l'accessibilité territoriale, les déterminants de l'état de santé et du recours aux soins, l'accès à l'assurance maladie, la régulation des marchés pharmaceutiques, les variations des pratiques médicales, les comparaisons internationales » (IRDES 2024).
Au cours des cinquante dernières années, l’économie de la santé a donc connu un développement considérable fondé, entre autres, sur une plus grande disponibilité des données et, peut-être surtout, sur la croissance soutenue des dépenses de santé. Le vieillissement de la population, le progrès technique dans les traitements thérapeutiques, l’accroissement des dépenses de santé et leur mécanisme de financement questionnent aujourd'hui les économistes, qui cherchent à résoudre la confrontation entre des ressources contraintes et des besoins illimités.
L'économie de la santé s’est développée autour de deux composantes majeures, distinctes mais complémentaires : l’analyse du comportement des acteurs (behavorial science) et la recherche d’instruments d’analyse et d’action adaptés aux caractéristiques économiques du bien santé. Plus récemment, on a assisté à l'adoption progressive, voire à la généralisation, de la rationalité économique dans le monde médical. Si, en 1963, Arrow soulignait que « la croyance selon laquelle l’éthique de la médecine requiert un traitement indépendant de la disposition à payer du patient est fortement ancrée », autrement dit que « la santé n’a pas de prix », il rappelait également qu’« un temps viendra où l’éthique médicale devra être considérée à la lumière sévère de l’économie ». Aussi les arbitrages se font ou se feront autour des questions suivantes : quelle est l’efficacité de la dépense en matière de santé ? Comment évaluer la performance des systèmes de santé et comment les orienter, les piloter ? Dans les États-Providence, comment juger de l’efficacité de la dépense publique de santé au regard notamment des arbitrages macroéconomiques, de l’état sanitaire de la population, des préoccupations de redistribution et de justice sociale ?
La crise de Covid 19 qui a touché le Monde à partir de 2020 a contribué à développer et à populariser les thématiques propres à l’économie de la santé. En 2020, l’Organisation mondiale de la santé a créé un « Conseil sur l’économie de la santé pour tous », comprenant des économistes, mais aussi de nombreux scientifiques d’autres disciplines. De nombreuses recherches ont été menées en économie de la santé pour évaluer le coût de la pandémie, notamment en France, pour comprendre quelles ont été les conséquences économiques du « Quoi qu’il en coûte » (les plans d’aide aux entreprises et à la société durant cette crise) ?
En France, les dépenses de santé, que l’on appelle plus précisément « dépenses courantes de santé », représentent environ 10 % du PIB en 2023. Elles prennent en compte les soins aux personnes âgées en établissement, les indemnités journalières (arrêt de travail), les subventions au système de soins, la prévention organisée (vaccination, médecine du travail, dépistage organisé, éducation à la santé, sécurité sanitaire de l’alimentation), les dépenses de recherche médicale et pharmaceutique, la formation des personnels médicaux, le coût de gestion de la santé et la consommation de soins (soins hospitaliers, soins ambulatoires, transports sanitaires) et de biens médicaux (médicaments et autres biens médicaux tels l’optique et les prothèses).
(ST), juin 2012, dernière modification (SB et CB) mars 2024.
Références citées
- Le site de l’IRDES (Institut de recherche et documentation en économie de la santé)
- Chambaretaud Sandrine et Hartmann Laurence, « Économie de la santé : avancées théoriques et opérationnelles », Revue de l’OFCE, Observatoire français des conjonctures économiques, Centre de recherche en économie de Sciences Po, n° 91, juillet 2004.
Pour compléter avec Géoconfluences
- Virginie Chasles, « Les inégalités de santé dans les pays émergents, le cas de l’Inde », Géoconfluences, septembre 2022.
- Alexandra Pech, « Quand notre environnement nous rend obèses : comment l’environnement influence-t-il nos pratiques alimentaires ? », Géoconfluences, mai 2021.