Archive. Territoire des animaux, territoire des hommes : aspects et enjeux du retour des grands prédateurs

NB. Le contenu de cet article donne des informations disponibles au moment de sa publication en 2008.

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Les animaux font partie de ces "oubliés de la géographie" (Blanc et Cohen, 2001). Même la biogéographie, qui a su replacer ses approches dans un cadre social et culturel, néglige le champ de la grande faune, ce qui est déploré par Paul Arnould (1994). Pourtant, nombre d'espèces animales posent des problèmes territoriaux, écologiques et socio-culturels. L'étude des grands prédateurs en France (ours, lynx, loup) est un cas d'école pour aborder les relations société / nature. Ses problématiques renvoient aux aspects politiques et conflictuels inhérents aux questions environnementales. Les territoires des zones rurales concernées, souvent marginales, sont l'objet d'une demande d'environnement qui parcourt toute la société mais qui n'est pas sans rencontrer des résistances. Les enjeux prennent souvent des formes plus complexes que la caricaturale opposition entre des ruraux a priori hostiles à la conservation de la nature et des citadins écologistes rêvant d'une nature sans hommes et soutenus par un État central.
L'ours (Ursus arctos), le loup (Canis lupus) et le lynx (Lynx lynx), encore largement présents sur le territoire français au XVIIIe siècle, ont quasiment tous disparu au milieu du XXe siècle, victimes de la chasse, du piégeage, de la destruction des milieux naturels et seuls quelques ours persistaient dans les Pyrénées. Depuis les années 1980, ils ont le statut d'espèce protégée (Convention de Berne), conforté par la directive Habitat de 1992 [2]. Si ces trois espèces ont fait leur retour en France dans des territoires aux caractéristiques proches, leur état de conservation et leurs dynamiques de croissance territoriale sont néanmoins distincts.
Après avoir abordé les conditions et le contexte du retour des prédateurs sauvages en France, nous verrons en quoi ces espèces emblématiques sont des analyseurs des évolutions de certains territoires et de notre société, puis nous ouvrirons sur les perspectives qu'offre leur conservation.
De leur disparition à leur retour, des animaux sans frontières
L'ours dans les Pyrénées (Béarn et Pyrénées centro-orientales)
L'ours est dans une situation précaire malgré une opération de réintroduction en 1996-97, qui, si elle n'est pas poursuivie, conduira à la disparition de l'espèce dans les Pyrénées. Au fil des années, ce dossier a fini par devenir emblématique des problèmes de conservation de la faune en France. Le déclin de la population s'est particulièrement accéléré au XXe siècle (Camarra et Parde, 1992 ; Caussimont, 1993). Cette espèce, dont l'aire de répartition s'est réduite en îlots éloignés, de plus en plus petits, se trouve aujourd'hui dans une position critique. La population actuelle, de 15 à 19 individus, provient de deux origines différentes et jusqu'à une époque très récente, le dossier de l'ours recouvrait deux volets territoriaux distincts.
Cartorama : régression de la population d'ours dans les Pyrénées du début du XIXe siècle aux années 1990
Le volet béarnais correspond à un reliquat de population autochtone, qui regroupait moins d'une dizaine d'individus au début des années 1990. Aujourd'hui, il ne comporte vraisemblablement plus que quatre ours, la dernière femelle, Cannelle, ayant été abattue par un chasseur en novembre 2004. Sans intervention, la population est condamnée à l'extinction. Les tentatives des années 1980 pour mettre en place une gestion concertée de cette population béarnaise d'ours ("Plan Ours" de 1984, "Directive Ours" de 1988) se sont heurtées à une résistance obstinée soutenue par le ministère de l'Agriculture, par ses services déconcentrés et les établissements publics. Des conflits intenses ont défrayé la chronique dans les années 1980 et 1990, culminant avec la "guerre de l'ours" autour, entre autre, de la mise en réserve d'un espace minimum vital pour la préservation des derniers ours pyrénéens : les "réserves Lalonde" (Dendaletche, 1993). Le climat est alors d'autant plus agité qu'en 1990-1992, sont venus s'ajouter les antagonismes au sujet de l'axe routier E7 et du tunnel du Somport en vallée d'Aspe.
À la suite de cet épisode, certains acteurs locaux (élus, chasseurs, socio-professionnels agricoles) aidés par des services du ministère de l'Agriculture, remportent l'épreuve de force et obtiennent, en 1993, que leur soit confiée la gestion de l'ours et des aménagements associés à sa conservation. À cette fin, un Syndicat mixte, l'Institution patrimoniale du Haut Béarn (IPHB), est créé en 1994 (Mermet, 2001 et 2002). Les acteurs locaux et nationaux favorables à l'ours sont alors largement dépossédés du dossier de l'ours en Béarn et voient s'éloigner la perspective d'un renforcement de la population d'ours jugé pourtant nécessaire par de nombreux experts (AScA et Servheen, 1996).
Un deuxième volet du dossier ours s'ouvre alors dans les Pyrénées centrales, plus à l'est. En effet, un groupe d'élus locaux de la Haute-Garonne montagnarde, encouragé par ARTUS, une importante association de défense de l'ours (11 000 membres donateurs à son apogée, d'importants moyens de communication), décide de créer en 1991 l'Association pour le développement économique et touristique de la haute vallée de la Garonne (ADET, devenue par la suite Pays de l'ours - ADET). Son objectif est de réintroduire des ours afin de valoriser écologiquement et économiquement cette zone rurale fragile. Cependant, le ministère de l'Environnement est réticent. À l'époque, il ne resterait qu'un seul ours autochtone dans les Pyrénées centrales. À partir de 1993, le blocage de la situation dans le Haut-Béarn conduit le ministère à changer de stratégie. Il soutient alors le dossier de l'ADET, qui prend forme assez rapidement. |
Où sont les ours en 2005 ? |
Une réintroduction de trois ours originaires de Slovénie (pour des raisons génétiques, géopolitiques et de stocks), deux femelles et un mâle, a donc lieu en 1996 et 1997. Les lâchers sont faits dans la forêt de Melles en Haute-Garonne. Les femelles étant pleines, quatre oursons issus de deux portées survivent. Une des ourses est abattue par un chasseur. Le grand mâle slovène ainsi que les ours issus des reproductions ultérieures débouchent sur un effectif de 11 à 15 ours (DIREN Midi-Pyrénées, 2005). Ces ours, notamment les jeunes, sont beaucoup plus mobiles que certains ne l'avaient prévu et se trouvent répartis des Pyrénées-Atlantiques aux Pyrénées-Orientales, soit sur toute la chaîne des Pyrénées. Ainsi, c'est à l'échelle du Massif pyrénéen que les acteurs hostiles et favorables à l'ours se structurent.
Le loup, des Alpes du Sud à l'Ain
Les loups connaissent un meilleur sort que les ours, alliant croissance territoriale et des effectifs. Alors qu'ils avaient disparu du territoire national depuis près de 50 ans, deux canidés ressemblant à des loups y ont été aperçus lors d'un comptage de chamois et de mouflons en vallon de Molières en 1992. Environ six mois tard, après vérifications et tergiversations, la présence du loup est officiellement reconnue en France. S'agit-il d'une réintroduction, artificielle et donc aidée par l'homme, ou d'un retour naturel ? Un groupe de pression agricole tente de démontrer que l'espèce a été réintroduite mais une réapparition naturelle spontanée est la plus vraisemblable (encadré ci-dessous).
La progression du loup de l'Italie vers la France
Source :Gruppo Luppo Italia, 1997.
Pour comprendre la réapparition du loup en France, il suffit de voir ce qui se passe de l'autre côté de la frontière, en Italie où il n'a jamais disparu. Il en reste moins de 100 spécimens lorsque sa protection a débuté en 1973. Il commence sa reconquête territoriale à partir du bastion principal que constitue le massif des Abruzzes. En quelques années, il réapparaît dans de nouvelles zones, profitant des milieux naturels très favorables (zones de forêt) et des milieux péri-urbains où ordures et chiens constituent son alimentation principale. Tout à fait capable de traverser routes, autoroutes, voies ferrées et ponts, les loups pionniers peuvent parcourir de 80 à 100 km en 24 heures. En effet, une meute a besoin d'un territoire de 150 à 200 km² pour vivre, chasser et se reproduire. Or, le nombre de loups sur un territoire étant à peu près stable au regard de ce que peut fournir le milieu, la meute exclut régulièrement des jeunes à la fin de leur croissance. Ce sont ces derniers, vagabonds, endurants mais exposés à une forte mortalité qui vont errer jusqu'à trouver un partenaire du sexe opposé pour fonder une nouvelle meute. Cela explique la colonisation aléatoire des loups qui pratiquent une expansion par bond et non en tache d'huile.
On profite du nom de la sous-espèce du loup italien "loup des Abruzzes" pour sous-entendre que les loups colonisateurs des Alpes françaises sont directement originaires de ces montagnes du cœur de l'Italie. Or ce massif est trop éloigné et les populations de loups discontinues ainsi que le montre cette carte d'expansion du loup selon le Groupe Loup Italie (regroupement d'experts du loup). En mars 2004, un loup italien renversé par une voiture près de Parme a été, après avoir été soigné, équipé d'un radio-émetteur puis relâché. Le dispositif de suivi indique qu'il avait, en novembre 2004, parcouru 400 km vers le nord-ouest, en direction des Alpes françaises et de la zone frontalière du Mercantour : une preuve supplémentaire du retour naturel du prédateur.
Dès le début des années 1990, des spécialistes italiens alertent, sans retenir beaucoup leur attention, des biologistes français et la direction du Parc du Mercantour de l'arrivée imminente du loup. Pourtant ce sont bien des Canis lupus italicus qui foulent les Alpes françaises. Le dynamisme de la colonisation est surprenant. Dès 1997, les loups fréquentent le Plateau de Canjuers (Var), le massif du Queyras et les Hautes-Alpes. En 1998, leur présence est attestée dans les Monges (Alpes-de-Haute-Provence), puis dans les massifs du Vercors (Drôme, Isère) et de Belledonne (Isère, Savoie) l'année suivante en 1999. De 2000 à 2003, le loup montre sa trace dans les Préalpes de Grasse non loin de Nice, en Maurienne (Savoie) et dans le Bugey (Ain). Sa présence est même attestée dans les Pyrénées-Orientales.
Cette dynamique de colonisation peut paraître surprenante. Cependant, le rythme de progression du loup est comparable à celui observé en Italie. De plus, de nombreux facteurs socio-territoriaux et écologiques favorisent cette colonisation dans les zones de montagne françaises particulièrement touchées par des modifications d'usage et par l'extension d'espaces peu perturbés par les activités humaines. Parallèlement, l'imposition des plans de chasse et les différents programmes de réintroduction du gibier ont contribué à reconstituer des populations de proies nécessaires au loup (chamois, mouflons, cervidés). Pour différentes raisons, ces territoires bénéficient fréquemment du statut d'aires plus ou moins protégées : réserves naturelles, parcs naturels régionaux, parcs nationaux [3], ce qui a pour effet d'accroître le degré de protection de l'espèce.
Encadré 1. Le lynx : l’Est et les Alpes
Les lynx connaissent une expansion territoriale dont on connait mal les effectifs. Dans le Jura et dans les Alpes suisses, une opération de réintroduction a été menée dès le début des années 1970. La recolonisation du Jura français où le lynx refait parler de lui en 1974, s'inscrit naturellement dans cette opération. Dans le sud des Vosges, sous l'impulsion de protecteurs de la nature puis des pouvoirs publics, une réintroduction a lieu de 1983 à 1993 avec une vingtaine de lynx.
Même si on estime les effectifs français de 100 à 150 lynx, il est plus juste de raisonner en terme d'aires de présence plus aisément quantifiables (Stahl et al., 2002). Ainsi dans le Jura français, 7 300 km² sont concernés par la présence du félin. La population y a une bonne croissance (18% /an) tempérée par le fait que la plupart des secteurs sont déjà occupés. En revanche, cette croissance est plus forte dans les Vosges et atteint près de 35% par an. Les lynx occupent au moins 4 800 km² dans les Vosges avec une présence quasi permanente entre le val de Villé et la vallée de Masevaux. Cependant, la population demeure fragile en raison de facteurs de mortalité liés aux activités humaines (tirs, route).
Actuellement une jonction entre les populations vosgiennes et jurassiennes est possible puisqu'en 1998 elles étaient distantes de moins de 100 km. Dans les Alpes, la présence est plus incertaine en fonction du peu d'indices récoltés et 3 200 km² sont concernés. Même si divers massifs ont recelé des indices (Chartreuses, Bauges, Hautes-Alpes, Vercors…), parfois depuis plus de 20 ans, la présence de lynx n'y paraît pourtant pas aussi stable que dans les Vosges et le Jura.
Les réactions ont été différentes en fonction des contextes locaux. Dans tous les cas, les lynx se sont bien adaptés aux grandes forêts où abonde sa proie de prédilection : le chevreuil. Dans le Jura, ce sont surtout les éleveurs de moutons qui se sont fortement opposés à la présence du lynx car il arrive que le félin s'attaque aux brebis ou aux agneaux. Leur système d'exploitation est devenu très extensif dans un cadre de parcs clôturés, entourés ou très proches de la forêt, sans gardiennage. De plus, la déprise entraîne un embroussaillement très fort favorable au peuplement de lynx.
Dans les Vosges alsaciennes où la réintroduction du lynx a été très populaire localement, la fronde est venue principalement des chasseurs. En effet, l'Alsace et la Moselle ont gardé l'organisation de la chasse issue de l'époque allemande. Le système fonctionne par lots qui sont l'objet d'adjudications représentant des sommes d'argent importantes. Le nombre de chasseurs par lot devait être limité pour restreindre le nombre de chasseurs en des temps des faibles densités d'ongulés sauvages. La conséquence est que le chasseur a l'impression que le territoire et le gibier lui appartiennent et le lynx apparaît bien souvent comme "un braconnier à quatre pattes". Alors que les chasseurs ont l'impression de gérer les effectifs de gibier "en bon père de famille", l'idée que les lynx, prolifiques, déciment les populations d'ongulés (chamois et surtout chevreuils) est très activement relayée et dénoncée.
Compte tenu des faibles impacts du lynx sur l'élevage de mouton, des études contredisant la baisse des effectifs de chevreuil et de la grande discrétion du félin, la situation est en général beaucoup moins tendue que dans les territoires à ours et à loups.
FB, 2006.
Les prédateurs sauvages marqueurs des évolutions territoriales
Une théorie du complot
"On sent bien que ce sont nos territoires qui sont convoités pour servir à autre chose (…). On a trop laissé la parole à d'autres qui n'avaient pas nos références historiques, culturelles, à d'autres qui n'étaient pas issus du milieu agricole, rural pyrénéen, il fallait qu'on reprenne l'initiative (…). C'est Nous les Pyrénées, c'est pas Eux qui vont nous imposer ça" affirme une éleveuse des Hautes-Pyrénées, responsable d'une association anti-ours. Pour plusieurs éleveurs des Pyrénées, les prédateurs sauvages et la réintroduction de l'ours ne sont que des moyens utilisés pour se débarrasser d'eux. Mais cette théorie du complot a deux visages. D'un côté, ces acteurs pensent que l'on veut les remplacer par une nature sauvage où ils n'auraient plus leur place. De l'autre, ils refusent le renvoi d'une image archaïque qui les infantilise et les empêche d'être des hommes du XXIe siècle. En Béarn, les jeunes éleveurs ont souvent une image très négative du gardiennage permanent assuré par les bergers. Pour eux, c'est une régression, un retour au cadet de famille sacrifié pour veiller sur le troupeau.
Les éleveurs reçoivent des subventions agricoles depuis les années 1960. Mais nombre d'entre eux supportent mal de recevoir de l'argent "des prédateurs", ils ont là un ennemi concret. À travers l'ours ou le loup, c'est bien souvent l'extérieur qui est stigmatisé et caricaturé : les "écolos", Paris, Bruxelles, la Politique agricole commune. Mais en fait ces espèces incarnent des peurs légitimes qui ont davantage trait aux évolutions des sociétés rurales françaises. La montagne a connu la même évolution culturelle que le reste de la France urbaine et rurale. De la représentation de l'espace aux modes de vie, les populations dites rurales ont changé et se rapprochent fortement des populations urbaines. La campagne est devenue surtout un lieu de vie plus qu'un lieu de production. Beaucoup d'habitants du Haut-Béarn travaillent à Oloron ou à Pau, plusieurs habitants des vallées du Mercantour possèdent des biens immobiliers sur la Côte d'Azur et la bi-résidence est fréquente. Les activités principales concernent désormais le tourisme et les services. Un brassage sociologique s'est produit inévitablement et comme l'écrit Henri Mendras, "les sondages récents montrent qu'il n'y a plus guère de différences entre urbains et ruraux, tant par les attitudes que pour les modes de vie (…). Les Français, urbains et ruraux, témoignent d'un fort attachement à la campagne, à la nature, à l'environnement". Mais ces évolutions, accompagnées d'un changement de l'occupation de l'espace, heurtent certains groupes, comme les agriculteurs, maintenant minoritaires en campagne et en montagne.
Des boucs émissaires des difficultés du pastoralisme ?
Depuis une cinquantaine d'années, l'agriculture et le pastoralisme de montagne ont dû s'adapter aux changements (Legeard, 2000), et bien souvent disparaître, sans que cela semble alerter les pouvoirs publics et la communauté scientifique outre mesure. Les évolutions des systèmes d'élevage ont conduit à une spécialisation pastorale qui n'a pas toujours eu les meilleurs impacts sur l'entretien du milieu, des pâturages et sur les possibilités de valorisation économique (Dorioz, 1998) [4].
Le loup en particulier et les grands prédateurs en général sont les révélateurs et les boucs émissaires de la mutation douloureuse du pastoralisme [5] de montagne. La présence d'ovins en montagne n'est pas toujours signe de vitalité humaine et la présence de l'homme peut y être réduite. La Politique agricole commune a, par une politique de primes liée au nombre de têtes (cf. pop-up sur la PAC infra), favorisé le quantitatif au détriment du qualitatif. Dans les Pyrénées centrales mais surtout dans les Alpes du Sud, notamment dans le Mercantour, les autres activités agricoles associées à la polyculture traditionnelle n'étaient plus viables et l'élevage ovin s'est imposé comme la seule activité possible. En l'absence de prédateurs les pratiques pastorales ont permis de concentrer et d'accroître les troupeaux tout en ne maintenant qu'un gardiennage limité. Comme les ressources générées par cet élevage (exclusivement la viande) sont modestes, l'embauche d'un berger [6] pour l'estive par un groupement d'éleveurs ne devient rentable que pour 1 000 à 2 000 brebis. Les évolutions des pratiques ont eu tendance à marginaliser les bergers alors que la taille des troupeaux augmentait et que leur nombre diminuait.
Le Mercantour entre déprise pastorale et reconquête forestièreCliché Farid Benhammou, octobre 2002. |
Formes de mobilisation "anti-loup" dans le VercorsCliché : Ruud Van Der Helm, 2003 Reconquête forestière et dispersion des troupeaux non-gardés dans le Mercantour (Alpes du sud). Dans cette zone à loup, les rhododendrons (qui ressortent en vert) et la bruyère remplacent peu à peu les pâturages avant d'être supplantés à leur tour par les mélèzes. L'action sélective des brebis sans conduite humaine n'empêche pas la modification des paysages.
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En l'absence de bergers, les éleveurs visitent leurs troupeaux moins souvent d'autant que le travail pastoral repose souvent sur une seule personne, de plus en plus âgée, qui doit assumer toutes les tâches d'entretien des bêtes, de récolte du foin, de surveillance, de gestion administrative, etc. Dans ces conditions, l'arrivée d'un prédateur a pu rendre plus criante la précarité croissante de l'activité ovine d'autant que la plupart des systèmes d'exploitation ovine ne prenaient pas en compte la prédation, de quelque nature qu'elle soit. Or, les mesures de protection qu'ont bien voulu mettre en place plusieurs éleveurs de la zone à loup ne sont pas toujours la panacée mais elles peuvent réduire, voire quasiment éliminer, le problème. Dans le Mercantour et les Alpes du Sud, les exploitations qui ressentent le moins la présence des loups ont conservé ou réactivé un gardiennage et une conduite précise des brebis (Garde, 1998 ; Benhammou, 1999) et elles montrent que l'élevage ovin peut évoluer. Ce n'est pas le cas pour ceux qui refusent toute modification des pratiques et qui, souvent, n'adoptent pas la conduite la plus raisonnée de leur troupeau (Benhammou, 1999 ; Durand, 1999).
Les pouvoirs publics et les représentants agricoles ont laissé l'élevage de montagne tendre vers certaines dérives, abandonnant littéralement cette activité marginale saupoudrée par des subventions. Bien qu'elles représentent moins de 5% du total des aides agricoles, elles contribuent à hauteur de 80% en moyenne au Revenu brut d'exploitation [7] des éleveurs ovins (Agreste, 2002). La situation actuelle de l'élevage ovin doit beaucoup à la PAC, dont les aides ont surtout favorisé les céréaliers français et les éleveurs britanniques dans les années 1980, alors que la filière ovine avait besoin de soutien pour se restructurer efficacement (Legeard, 2000). Un système "productiviste" précaire a donc été encouragé de fait puisque la course à la prime poussait à avoir de plus en plus de têtes sans se soucier des impacts sur le territoire. La prime à l'herbe de la réforme de la PAC de 1992 (voir en pop-up ci-dessous) a, par la suite, davantage incité à l'entretien des espaces difficiles en montagne. Depuis une décennie les louanges des pratiques agro-environnementales ont pris de l'ampleur dans les discours mais sans être vraiment suivies d'une politique concrète d'encouragement.
Complément, en pop-up : La PAC et ses conséquences pour l'agriculture de montagne et le pastoralisme Quelques mots-clefs : OMC ; Groupe de Cairns, G20, G33 ; boîte rouge, verte, bleue, orange ; Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ; Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) ; Organisations communes de marché (OCM) ; Agenda 2000 ; politiques agro-environnementales ; Prime au maintien des systèmes d'élevage extensif (PMSEE dite "prime à l'herbe") ; Prime herbagère agri-environnementale (PHAE) ; Prime à la brebis et à la chèvre (PBC) ; Contrats territoriaux d'exploitation (CTE) ; Contrats d'agriculture durable (CAD) ; éco-conditionnalité ; programme LEADER |
Encadré 2. Une histoire de la PAC et de ses conséquences pour les agricultures de montagne
En caractères gras : quelques mots et informations clefs impactant plus particulièrement le pastoralisme et l'agriculture de montagne.
La Politique agricole commune (PAC) a été adoptée en 1960
L'objectif était d'accroître la production agricole pour assurer l'autosuffisance alimentaire de l'Europe (on sortait de la Seconde guerre mondiale, avec un déficit alimentaire européen) en augmentant la productivité agricole favorisant ainsi la migration de la main-d'œuvre vers l'industrie. La PAC a été organisée sur la base des trois principes fondateurs préconisés dans le rapport européen Mansholt :
- l'unicité du marché qui nécessite l'harmonisation des réglementations sanitaires et administratives réalisée progressivement jusqu'au "marché unique" de 1993
- la préférence communautaire par laquelle l'approvisionnement des pays membres de la Communauté doit se faire en priorité sur le marché intérieur, de manière à ne recourir aux importations des pays tiers que lorsqu'il y a un réel déficit de la production communautaire ; un mécanisme de protection vis-à-vis des importations des pays tiers est mis en place ; lorsque le cours mondial est inférieur au prix intérieur européen, ce qui est généralement le cas, une taxe variable à l'importation est prélevée (prélèvement), qui correspond à la différence entre le prix intérieur européen et le cours mondial ; à l'inverse, une subvention (restitution) variable est versée aux produits exportés, pour qu'ils puissent être vendus au prix du marché mondial ;
- la solidarité financière, destinée à financer les mécanismes de la PAC, qui doit être supportée par les États membres ; le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) a été créé à cet effet et sa redistribution est indépendante du niveau de contribution de chaque État membre.
Des organisations communes de marché (OCM) visaient à atteindre les objectifs de la PAC (stabilisation les marchés et régime des prix, niveau de vie équitable aux agriculteurs, accroissement de la productivité de l'agriculture, modalités et gestion des échanges avec les pays tiers). Elles ont fini par couvrir environ 90% de la production agricole finale communautaire.
La pratique de la PAC de 1960 à la réforme de 1992
La production a rapidement augmenté et, vers la fin des années 1970, des excédents sont apparus. Le fonctionnement des mécanismes d'intervention s'est traduit par la constitution de stocks croissants et extrêmement coûteux de céréales, de beurre, de poudre de lait et de viande. En 1984, des quotas de production laitière ont permis de stabiliser la production européenne.
La réforme de la PAC, qui s'imposait, a été accélérée par les négociations de l'OMC du Cycle d'Uruguay de 1986 à 1994. La réforme de 1992 abaisse le niveau des prix d'intervention, baisse compensée par des aides directes aux producteurs, versées à l'hectare pour les céréales et les oléoprotéagineux (plus élevées pour ces derniers), et à la tête de bétail pour les viandes ovines et bovines. Pour toucher ces aides, les agriculteurs sont obligés de pratiquer des mises en jachère destinées à abaisser le niveau de production. Mais l'augmentation de la productivité et le choix fréquent de mise en jachère des terres les moins fertiles n'ont pas permis d'enrayer la hausse de la production céréalière européenne.
Par ailleurs, une prime au maintien des systèmes d'élevage extensif (PMSEE, dite "prime à l'herbe") accompagnait la réforme de 1992. Elle a eu un impact important pour tous les éleveurs herbagers extensifs montagnards, car elle a permis de reconquérir un certain nombre d'espaces pastoraux en voie d'abandon. Cette prime était cependant d'un faible montant (300 francs/hectare).
L'OCM "viande ovine et caprine", créée en 1980, a été remaniée en 1989 et 1992 (puis à nouveau fin 2001, car oubliée dans l'Agenda 2000). Elle comportait alors deux types d'aides directes : la Prime compensatrice ovine (PCO) et la Prime "monde rural" (PMR). Le montant de la PCO, calculé par tête de brebis détenue, dépendait du prix de la viande ovine relevé sur les marchés européens, de la taille et de la localisation des troupeaux en zone défavorisée ou non. La PMR était un complément forfaitaire, attribué aux élevages situés en zone défavorisée, en fonction des effectifs détenus.
Entre élargissement et négociations de l'OMC, nouvelles réformes de la PAC en 1999 et en 2003
En mars 1999, le Conseil européen réuni à Berlin (ministres de l'Agriculture des 15 pays membres) a décidé une nouvelle réforme de la PAC, partie de l'ensemble de propositions appelées Agenda 2000. Ses objectifs de la réforme étaient les suivants :
- accompagnement de l'élargissement de l'Union européenne aux Pays d'Europe centrale et orientale (PECO) dont l'agriculture représente une part importante de l'économie ;
- accroissement de la compétitivité de l'agriculture européenne sur les marchés mondiaux et anticipation des futures négociations de l'OMC ;
- préparation de l'Union européenne à ces négociations par la prise en considération des revendications du "Groupe de Cairns" (Afrique du Sud, Argentine, Australie, Bolivie, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa-Rica, Fidji, Guatemala, Indonésie, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Paraguay, Philippines, Thaïlande, Uruguay) ;
- intégration de nouveaux objectifs "non commerciaux" de l'agriculture : promotion d'une agriculture respectueuse de l'environnement et fournissant des produits de qualité ; diversification des activités agricoles (tourisme par ex.) ; aides à la gestion des ressources en eau, à la restauration des villages, au boisement ; aides aux producteurs dans les zones difficiles.
Les mesures concrètes ont été les suivantes :
- nouvelle baisse des prix d'intervention (de 15% pour les grandes cultures, de 20% pour la viande bovine), diminution des droits de douane et des subventions aux exportations donc des aides de la "boîte orange" [voir Annexe] ;
- mise en place d'aides à la protection de l'environnement ou au développement rural autorisant un classement en "boîte verte" [voir Annexe] d'une partie plus importante du soutien européen.
Par ailleurs, dans le cadre de Contrats territoriaux d'exploitation (CTE), le ministère de l'Agriculture avait prévu que des aides puissent être attribuées à des agriculteurs qui s'engageront à produire des produits de qualité, ou à créer de l'emploi, à gérer le patrimoine naturel et culturel, à mener des actions en faveur de la prévention des risques naturels et des incendies, ou à changer de pratiques agricoles pour protéger l'environnement.
La nouvelle baisse des prix d'intervention de la réforme de 1999 est compensée par une hausse des aides directes uniformisées dans les secteurs des grandes cultures (même aide quelle que soit la production) de façon à accentuer le découplage aides / production. Comme en 1992, cette réforme conduit à rapprocher les prix européens des prix mondiaux, afin de pouvoir exporter sans restitution. Mais certains produits ne sont alors pas concernés (lait, sucre, fruits et légumes, viandes blanches).
Cependant, une grande partie des aides directes accordées ne sont toujours pas totalement découplées car elles sont liées à la surface cultivée. Elles restent classées dans la "boîte bleue" [voir Annexe] (augmentation de 35% du volume des aides classées dans cette catégorie) ce que certains, dont les États-Unis, voudraient supprimer.
Par la baisse des prix d'intervention cette nouvelle PAC incite toujours à l'amélioration de la compétitivité de l'agriculture européenne. Lors des négociations de Seattle en décembre 1999, contrainte d'arbitrer entre la conquête de débouchés pour les produits agricoles européens sur les marchés étrangers et la défense du concept de multifonctionnalité de l'agriculture (soutiens en "boîte verte"), l'Union européenne a semblé opter pour le premier choix. Elle conserve des instruments (aides classées en boîtes orange et bleue) attaquables lors des négociations agricoles ultérieures à l'OMC.
Un réexamen d'étape de l'efficacité des mesures arrêtées était prévu mais il s'est transformé, en 2003, en une nouvelle réforme profonde qui s'imposait (accord de Luxembourg du 26 juin 2003). D'autant que l'impact des crises sanitaires sur l'opinion publique (crise de l'ESB particulièrement) obligeait à mieux orienter les moyens budgétaires affectés à la PAC pour favoriser une agriculture plus conforme aux aspirations des consommateurs et des contribuables européens, en matière de qualité des produits, de bien être animal, de préservation de l'environnement et de développement rural.
Enfin, dans le cadre des négociations de l'OMC, la pression internationale (groupe de Cairns, G20, G33, etc. [1]) vise à réduire les distorsions de concurrence engendrées par les soutiens publics à l'agriculture et incite à franchir une nouvelle étape dans les mécanismes d'aides aux agriculteurs.
La réforme de 2003 portant sur le volet "soutien aux marchés" doit être mise en œuvre par les États membres au plus tard en 2007. Elle introduit un nouveau système de paiement : droit à paiement unique par exploitation ; découplage encore plus radical entre aides directes payées aux agriculteurs et production (découplage) ; "conditionnalité" de ces aides au maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles, au respect des textes réglementaires européens et des normes en matière de santé publique, de santé des animaux et des végétaux, d'environnement et de bien-être des animaux (respect de respect de dix-neuf directives européennes au total). L'absence de mise en conformité se traduira par une diminution des aides, variable selon qu'elle résulte d'un comportement négligent ou délibéré. Le taux de réduction des aides est de 3% en 2005, puis de 4% en 2006 et de 5% à partir de 2007. Ces différentes réformes ont réduit les écarts entre les prix européens et les prix mondiaux plus faibles, ce qui a limité les possibilités d'action sur l'environnement par les prix. Quant à elle, la France a choisi de maintenir le couplage des aides directes au maximum réglementaire offert, à hauteur de 50%.
L'introduction de l'éco-conditionnalité des aides est censée permettre d'aller au-delà en terme de protection de l'environnement. Dans le cadre de la réorientation des soutiens vers les mesures agri-environnementales, l'UE a refusé la reconduction de la Prime de maintien des systèmes d'élevage extensif (PMSEE, dite "Prime à l'herbe"), en raison de son caractère national et insuffisamment environnemental. Elle a été remplacée par des mesures agri-environnementales élaborées au niveau régional et co-financées par l'UE à hauteur de 50% dans le cadre du deuxième pilier de la PAC (développement rural) : en 2003, la Prime herbagère agri-environnementale (PHAE) la remplace avec un montant majoré mais une application plus restrictive.
Par ailleurs, dans le cadre de l'OCM "viande ovine et caprine", la Prime compensatrice ovine (PCO) est remplacée depuis 2002 par une Prime à la brebis et à la chèvre (PBC), d'un montant fixe, variant selon la localisation des élevages en zone défavorisée ou non. La France établit un paiement additionnel versé aux éleveurs des zones non défavorisées en 2003 et à ceux engagés dans une production de viande sous signe officiel de qualité en 2004.
En complément de la réforme des marchés et des aides directes de 2003, la Commission européenne a proposé, à partir de la période 2007-2013, un instrument unique de financement de la politique européenne de développement rural : le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) qui aidera à la réalisation de trois objectifs pour améliorer :
- la compétitivité de l'agriculture et de la sylviculture par un soutien à la restructuration,
- l'environnement et la gestion de l'espace rural,
- la qualité de vie dans les zones rurales et la diversification des activités économiques.
Par ailleurs, il est prévu de poursuivre l'initiative LEADER (2) qui s'appuie, elle, sur une approche ascendante privilégiant les projets locaux, les coopérations et les mises en réseau.
Les difficultés de mise en œuvre et d'évaluation d'impact des politiques agri-environnementales
À l'origine la politique agri-environnementale a poursuivi des objectifs bien définis et n'a porté que sur des zones limitées. Progressivement, une approche intégrée de l'exploitation agricole et du développement rural a conduit à l'élaboration de programmes ambitieux combinant de nombreuses mesures intéressant l'environnement, le territoire et les aspects sociaux. De ce fait, leur conception et leur mise en œuvre passent par des organisations complexes qui impliquent des coûts de transaction publics et privés particulièrement élevés et leurs effets sont difficiles à apprécier. À court ou plus long terme les politiques mises en oeuvre peuvent avoir des impacts divers, voire opposés sur l'environnement. L'application du critère d'éco-conditionnalité induit de nouveaux ajustements des systèmes productifs mais en même temps, son application peut se traduire par des coûts supplémentaires mettant à mal la rentabilité de certaines exploitations. Si cette évolution conduit à l'abandon de terres dans des zones à handicaps naturels, l'éco-conditionnalité contredit les objectifs des politiques sur les zones défavorisées.
La conctractualisation de politiques agri-environnementales tentée par l'établissement de Contrats territoriaux d'exploitation (CTE) en 1999 n'a pas été convaincante, aux yeux du gouvernement en tout cas, leur mise en œuvre avait révélé des dysfonctionnements : dérapage de la dépense ; manque d'efficacité environnementale. Leur nombre est resté très inférieur au nombre de bénéficiaires de la prime à l'herbe qui a pris fin en avril 2003. De tels contrats ne peuvent donc concerner qu'un nombre restreint d'agents. De plus, il convient de ne les faire porter que sur des mesures contrôlables. Les CTE ont donc été supprimés et remplacés par les Contrats d'agriculture durable (CAD) co-financés avec l'UE sur les principes suivants : démarche contractuelle ; approche consistant à rémunérer les missions de l'agriculture en termes économique, social et de préservation de l'environnement.
Au total, les réformes de la PAC, dans leurs aspects agro-environnementaux, respectent un certain nombre de contraintes découlant d'engagements internationaux, tels que le Protocole de Kyoto, et de Directives européennes, en particulier les directives oiseaux et habitats ainsi que la Directive Cadre sur l'eau. Elles ont favorisé l'extensification par l'augmentation des jachères, une moindre utilisation des intrants et une diminution de la densité d'animaux. Elles ont donc eu des impacts positifs sur la biodiversité.
Le sixième programme d'action environnementale (2000 - 2010) conduit à ne plus verser d'aides pour le seul respect de la législation, au-delà d'une période de transition. Dans cette optique, les aides agri-environnementales seraient réservées à la fourniture de services environnementaux supplémentaires. Les discussions en cours sur la future politique de développement rural et sur la mise en œuvre de la réforme de 2003 devraient être l'occasion de remettre à plat les programmes agri-environnementaux actuels qui poursuivent des objectifs multiples parfois mal définis ou contradictoires, qui, en conséquence, sont coûteux à appliquer et à contrôler et qui sont difficiles, voire impossibles à évaluer en terme d'efficacité économique et environnementale. Par ailleurs, leur poursuite est étroitement liée aux ressources budgétaires qui leur seront consacrées. L'incertitude reste donc grande quant à l'après 2007.
Annexe : la classification internationale des aides à l'agriculture
Les différents types de soutien à l'agriculture ont été définis selon l'importance des distorsions de concurrence qu'ils entraînent et classés, de façon imagée, comme des boîtes de différentes couleurs.
La boîte rouge comprend les mesures susceptibles d'introduire des distorsions manifestes dans les échanges agricoles et elles doivent, à terme, être supprimées (hormis celles autorisées). Les subventions directes à l'exportation sont, a priori, rangées dans cette catégorie.
La boîte verte regroupe l'ensemble des mesures considérées comme n'ayant pas d'effet sur les échanges et sur les distorsions de concurrence. Elles sont autorisées car "découplées". Il s'agit notamment des : services de caractère général (recherche, lutte contre les parasites et maladies, formations, inspection, commercialisation et promotion, infrastructures) ; détention de stocks publics à des fins de sécurité alimentaire ; aide alimentaire intérieure ; soutien au revenu découplé (versement direct aux producteurs sans obligation de produire sur la base d'une référence historique) ; programmes de garantie des revenus, d'indemnisation des catastrophes naturelles et d'aides à la cessation d'activité ; aides aux retraits de ressources de la production (gel de 3 ans minimum pour les terres, abattage du bétail) ; aides liées à la protection de l'environnement, limitées aux coûts supplémentaires ou aux pertes de revenu découlant de l'observation d'un programme public environnemental ; aides liées à des programmes régionaux pour les régions défavorisées (limitées à la compensation du désavantage compétitif pour les producteurs de ces régions).
La boîte bleue comprend les mesures tolérées par les accords. Ce sont des aides transitoires liées à un programme de limitation de la production). Fondées sur la superficie, le rendement ou le nombre de têtes, elles sont peu découplées aux produits mais elles échappent à une réduction et à une action contentieuse tant que la somme totale de toutes les boîtes des soutiens reste inférieure au montant de 1992 et qu'elles ne provoquent pas de dommages chez un partenaire.
La boîte orange comprend les mesures soumises à des disciplines, il s'agit, pour l'essentiel, des mesures de soutien aux prix de marché ainsi que de quelques aides directes pouvant entraîner des distorsions sur les marchés. Ces mesures entrent dans le calcul de la Mesure globale de soutien (MGS). Elles sont donc soumises à engagement de réduction au titre du soutien interne. Les principaux mécanismes de la PAC d'avant 1992 en faisaient partie.
Notes
[1] On peut discerner deux principales catégories d'acteurs sur la scène des négociations internationales :
> les pays qui ont un fort potentiel agro-exportateur et qui souhaitent l'ouverture maximale des marchés mondiaux : il s'agit notamment du "G20" qui réunit des pays émergents (Brésil, Afrique du Sud, Thaïlande….) et du "groupe de Cairns" qui rassemble certains de ces pays et des pays agro-exportateurs du "Nord" (Australie, Nouvelle-Zélande, Canada…)
> les pays qui souhaitent préserver leur marge de manœuvre en matière de politique commerciale et protéger leur agriculture : parmi eux, le "G33" qui réunit des pays à revenus faibles ou intermédiaires, le groupe des pays les moins avancés (PMA) ou le groupe des pays africains.
[2] Le programme LEADER 1 a initié une approche territoriale de la politique de développement rural poursuivie par la suite avec toutefois une inflexion en faveur des aspects innovateurs des projets dans LEADER 2. Le programme LEADER + favorise des projets pilotes de développement endogène intégrés, ainsi que des coopérations entre territoires et des réseaux de zones rurales. Les 73 programmes approuvés par LEADER + devraient favoriser la revitalisation de communautés rurales ce qui a des effets environnementaux directs ou induits. Il convient de rappeler que tous les États Membres sont éligibles au titre des mesures de type LEADER. Le programme LEADER 1 a initié une approche territoriale de la politique de développement rural poursuivie par la suite avec toutefois une inflexion en faveur des aspects innovateurs des projets dans LEADER 2. Le programme LEADER + favorise des projets pilotes de développement endogène intégrés, ainsi que des coopérations entre territoires et des réseaux de zones rurales. Les 73 programmes approuvés par LEADER + devraient favoriser la revitalisation de communautés rurales ce qui a des effets environnementaux directs ou induits.
Principales sources
- Les Organisations communes des marchés agricoles : http://europa.eu/scadplus/leg/fr/lvb/l11047.htm
- Le point de vue de la diplomatie française sur la PAC :
www.diplomatie.gouv.fr/fr/actions-france_830/agriculture_1061/politique-agricole-commune_3370/presentation-actualite_9150.html
- INRA - Département des sciences sociales, agriculture et alimentation, espace et environnement (SAE2) - Le "découplage" des aides à l'agriculture, un nouvel enjeu de négociations internationales et européennes : www.inra.fr/Internet/Departements/ESR/comprendre/index.php
- Dossier sur l'OMC de la Mission économique du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie - Direction générale du Trésor et de la politique économique : www.missioneco.org/omc
Synthèse, adaptation : Sylviane Tabarly, le 15 mai 2006
Certains services déconcentrés du ministère de l'Agriculture et des organismes agricoles d'aménagement ont favorisé expertises, initiatives et travaux intéressants en termes d'entretien et d'exploitation pastorale des milieux. Cependant, cela ne concerne pas tous les territoires montagnards qui en auraient besoin et les moyens ne sont pas toujours au rendez-vous. Tous ces bouleversements sont mal vécus par le milieu agricole et la présence des grands prédateurs soulève de vrais enjeux territoriaux, politiques et économiques et révèle un véritable malaise.
Entre instrumentalisation et récupération politiques
L'ours est utilisé comme le symbole d'une attaque supplémentaire contre un monde déjà victime d'autres mutations moins passionnelles mais beaucoup plus profondes : exode rural, disparition d'exploitations, concurrence internationale. Certains élus sont tentés d'en faire une exploitation démagogique qui passe par un discours sur la défense de l'identité et des racines : "L'identité pyrénéenne, c'est d'abord nos racines, et nos racines, excusez-moi, elles sont agricoles" disait Augustin Bonrepaux (député de la 1ère circonscription de l'Ariège) à une réunion publique à Toulouse en juin 2000.
L'activité pastorale, peu viable économiquement en l'absence d'aides, évolue vers d'autres fonctions et tend à être rémunérée non pas pour sa production directe, mais pour un service : l'entretien des paysages par exemple. Mais c'est difficilement conforme aux canons de l'identité paysanne véhiculés par les principales organisations agricoles vouées au productivisme. Les milieux paysans refusent aussi de concevoir un partage de l'espace dans lequel ils ne seraient plus dominants. Ce partage existe pourtant et est ancien. L'ouvrage de Renaud de Bellefon sur l'histoire des guides de montagne montre qu'il remonte au XIXe voire au XVIIIe siècle dans les Pyrénées et dans les Alpes. En montagne, les paysans et les éleveurs ont dû cohabiter voire céder la place aux forestiers, aux guides de montagne. Or, à écouter le discours développé par les opposants à l'ours et au loup, les seuls vrais tenants des territoires de montagne resteraint les éleveurs, les autres acteurs ou agents ne sont que "tolérés" et le prédateur est rejeté car perçu comme l'outil de ces envahisseurs. Bien que minoritaires, les agriculteurs restent influents localement par l'ancienneté de leurs réseaux clientélistes, par leur surreprésentation relativement à leur poids démographique réel dans la société française contemporaine. Le monde pastoral a néanmoins changé lui aussi puisqu'il est devenu perméable aux idées de protection de l'environnement et de la faune comme l'a montré par exemple la constitution de l'Association pour la cohabitation pastorale dans les Pyrénées.
Des causes mobilisatrices
Au cœur des conflits
La géopolitique s'applique très bien à des échelles locales, notamment pour des questions d'environnement où des conflits territorialisés mettent en scène des rivalités entre groupes différents [8]. La problématique des grands prédateurs en est un bon exemple où l'on parle, de manière médiatique, de "guerre de l'ours" entre les partisans de leur conservation et leurs détracteurs, à différentes échelles (de l'échelle communale à l'échelle internationale).
La question de la conservation des grands prédateurs, celle de l'ours en particulier, est un problème d'environnement et de territoire. En effet, quels usages dévouer à des zones rurales montagnardes où survivent certaines activités humaines en situation difficile comme le pastoralisme ? Zones où la chasse, le tourisme, l'exploitation forestière cherchent également à maintenir leur place.
Parallèlement, un fort courant de l'opinion publique est demandeur d'une nature préservée. En outre, l'imaginaire de la "bête" ne laisse pas indifférent et accroît la portée dramatique des événements qui lui sont associés. Chaque force en présence, pro-ours et anti-ours pour faire simple, tente de manier à son avantage les représentations individuelles et collectives. Par le biais des médias, pour séduire l'opinion publique, chaque acteur se met en position de victime ou met en scène ses thématiques mobilisatrices mais antagonistes : perte de biodiversité, disparition du pastoralisme, déshumanisation de la montagne, peurs ancestrales.
La presse n'hésite pas à utiliser dans ses titres et ses Unes un vocabulaire alarmiste ou guerrier, souvent bien moins pondéré que le contenu des articles. Dans l'ensemble, les médias ont du mal à rendre compte des rapports de force fluctuants entre les camps, en lien direct avec le terrain. Lorsque la perte de 400 brebis à l'été 2003 a été imputée au loup, ses opposants ont obtenu la mise en place d'une commission parlementaire à l'origine de l'autorisation annuelle de tir de quatre loups, en dérogation avec son statut d'espèce protégée. À l'inverse, après la mort de Cannelle (2004), ce sont plutôt les protecteurs de l'ours qui ont eu l'avantage auprès des pouvoirs publics.
Les "contre", les "pour" et … les pragmatiques
Médias et pouvoirs publics ne semblent sensibles qu'aux opposants les plus radicaux à la présence des prédateurs qui revendiquent la légitimité du local alors que l'opinion publique et nationale est plutôt favorable à leur protection. Les locaux seraient les seuls ayant le droit de parler au nom des populations vivant dans ces régions. Les organisations agricoles jouent à plein cette carte et sont activement relayées par des élus, souvent membres de l'Association nationale des élus de montagne (ANEM). Certains députés, dans les Pyrénées comme dans les Alpes, n'hésitent pas à mettre en avant leur mandat républicain pour affirmer qu'ils représentent l'opinion des "montagnards". Or si l'opposition aux prédateurs est une réalité, notamment dans le monde de l'élevage, elle n'est pas unanime. Localement l'ambiance n'est pas propice au débat, à la concertation et les personnes favorables à l'ours ou au loup peuvent subir de fortes pressions dans les vallées. Dans ces territoires peu peuplés, les opinions de chacun sont vite connues d'où une discrétion ou une neutralité d'apparence fréquente sur ces sujets. Les éleveurs acceptant, de manière pragmatique, les mesures de protection de leurs troupeaux sont considérés comme des traîtres et parfois la cible de violences sociales (exclusion de certains pâturages) voire physiques.
Un débat passionné
Des "pro-ours"Cliché : Laurent Nédélec 2500 personnes réunies à Oloron-Sainte-Marie (Pyrénées-Atlantiques), le 28 novembre 2004 pour réclamer la réintroduction d'ours |
Des "anti-ours"Cliché Farid Benhammou, Arbas, septembre 2005. Slogan anti-ours déployé lors des Automnales du Pays de l'ours organisées par des acteurs favorables à la conservation de l'espèce |
Confrontés aux loups ou aux ours, la plupart des éleveurs finissent par adapter leurs pratiques grâce à l'appui des pouvoirs publics ou de leur propre initiative. Ils réussissent même souvent à intégrer les prédateurs comme une variable de leur exploitation et à éliminer les contraintes majeures. Pour l'ours, dont les prédations sont moindres, de nombreuses mesures efficaces ont été encouragées, par exemple, l'utilisation de chiens de protection Patou et l'aide à l'embauche de bergers. Elles ont aussi permis de diminuer les dégâts liés aux attaques de chiens. De plus, des acteurs locaux œuvrent sur le terrain pour favoriser l'acceptation de l'ours dans les Pyrénées et les récents sondages de 2003, 2004 et 2005 [10] montrent que les Pyrénéens, zone de montagne comprise, sont majoritairement favorables au sauvetage de l'ours par des opérations de réintroductions. Le Fonds d'intervention éco-pastorale (FIEP) a été pionnier en Béarn car, dès 1975, cette association a initié les premières indemnisations d'attaques d'ours et des aides directes aux bergers pour favoriser la cohabitation (prêts de radio-téléphones, premiers héliportages de matériel), dispositifs repris par les pouvoirs publics et généralisés aujourd'hui. De même, dans les Pyrénées centrales, "Pays de l'ours – ADET", association regroupant des élus et des acteurs économiques locaux (restaurateurs, commerçants, accompagnateurs en montagne, éleveurs), cherche à promouvoir le territoire concerné par la réintroduction en misant sur l'image environnementale et touristique de l'ours et en menant une réflexion sur le développement durable du monde pastoral. Elle a notamment aidé une association d'éleveurs et d'usagers de la montagne, l'Association pour la cohabitation pastorale (ACP), à lancer une charte qualité d'éleveurs de broutards "Estives du pays de l'ours" (cf. ci-dessous à droite et www.agneaubroutard.com), agneaux de montagne dont l'élevage respecte un cahier des charges à la fois agricole et environnemental. La cohabitation avec l'ours et toute la biodiversité y figure en bonne place.
Deux systèmes d'agriculture en montagne
Pour lire les schémas :
- Les signes + correspondent à des interactions positives et les - à des interactions négatives.
- Dans la colonne "Durabilité", la flèche vers le haut correspond à une amélioration ou augmentation et la flèche vers le bas, une dégradation ou une diminution.
Système "productiviste", par exemple : la société est majoritairement favorable à l'ours (+), mais le plantigrade peut manger des brebis (-) ; ces dernières, si elles sont laissées à elles-mêmes sans gardiennage, risquent fortement de sous-pâturer certains secteurs et d'en surpâturer d'autres, conduisant à une dégradation des milieux de montagne (-). |
Système "durable", un exemple de lecture : le chien patou protège le troupeau (+) contre l'ours (-) ; la présence d'un berger en montagne (absent dans le système productiviste) est bénéfique pour l'entretien et la surveillance des brebis (+) dont l'action sur le milieu est guidée et contrôlée (+). Conception et réalisation : Alain Reynes |
Quelles perspectives pour ces espèces et pour les territoires concernés ?
Les politiques hésitantes des pouvoirs publics
L'ours, en danger de disparition, est probablement le grand prédateur dont la protection est la plus symbolique. Ses besoins écologiques supposent la prise en compte de vastes territoires et l'adoption de mesures de préservation qui bénéficieraient à des milieux remarquables et à des espèces végétales et animales bien moins mobilisatrices (plantes endémiques, grands tétras, desman des Pyrénées, etc.). À la suite de l'abattage de Cannelle qui avait ému toute la France (2004), l'État a décidé de passer outre l'imbroglio politique dans lequel il s'était laissé piéger en Béarn [11]. Dès janvier 2005, le ministre de l'Écologie de l'époque, propose la réintroduction d'une quinzaine d'ourses femelles sur plusieurs années. La mobilisation de militants agricoles et l'hostilité médiatisée de certains élus béarnais et ariégeois notamment, a entraîné la réduction de ce programme à cinq ours. Certains responsables de l'Institution patrimoniale du Haut-Béarn (IPHB), qui a longtemps bénéficié de financements importants au titre de l'ours, font pourtant partie de l'opposition à sa réintroduction [12]. En conséquence, bien que plusieurs élus locaux béarnais, en dépit de fortes pressions, aient proposé leur commune comme territoire de lâcher, aucune ourse ne sera réintroduite en Béarn. La réintroduction programmée au printemps 2006 se fait donc uniquement en Pyrénées centrales (Haute-Garonne, Hautes-Pyrénées), dans les territoires de communes où des acteurs et des élus locaux agissent concrètement en faveur du plantigrade, fréquentés principalement par les descendants des ours slovènes introduits en 1996-1997. Cette réintroduction, qui engage tout un jeu d'acteurs impliquant le sommet de l'État (Conseil d'Etat, ministre), se fait peu à peu, dans une atmosphère passionnée, sur fond de manifestations locales "anti-ours" parfois violentes.
Pour ce qui est du loup, la situation évolue en faveur d'une "régulation" de plus en plus poussée des effectifs dérogeant au statut d'espèce protégée. Afin de contenter les organisations professionnelles agricoles, certains élus des Alpes ont obtenu des pouvoirs publics l'élimination de quatre loups pour 2004 et de six pour 2005 [13]. Ce "quota de tir" est destiné à obtenir la paix sociale avec le monde des éleveurs. Mais, au regard de la dépense publique et du temps de travail engagés par l'État, les résultats sont décevants. Ces tirs aléatoires n'ont eu aucun impact sur les dégâts causés par les loups. Le seul département des Alpes-Maritimes a concentré plus d'un tiers de la croissance des dégâts et 30% des attaques en 2005 après plus de 10 ans de présence du loup [14].
Reconsidérer les territoires de montagne
Il n'est pas dans ce propos de minimiser l'impact des grands prédateurs mais les dérangements divers des troupeaux [15] et, surtout, la concurrence des agneaux néo-zélandais sont des menaces bien plus pesantes sur l'élevage ovin viande tel qu'il se pratique dans les montagnes françaises. Ces espèces ont soudainement incarné des difficultés davantage liées à l'exode rural, aux évolutions socio-économiques et à la concurrence internationale. Les grands prédateurs, s'ils incarnent ce retour du "sauvage", ont attiré l'attention sur des activités humaines, le pastoralisme ovin notamment, dont peu d'acteurs publics ne se souciaient sérieusement. Au-delà des discours, combien d'élus de zone de montagne ont découvert la réalité de l'existence des éleveurs à cette occasion ? Paradoxalement, les prédateurs sauvages ont permis de dégager de nouveaux moyens humains et financiers : plus de la moitié des fonds d'accompagnement à la présence de l'ours servent à créer des emplois de bergers et à faciliter les pratiques d'élevage en montagne. Mais les aides estampillées "prédateurs" conservent une image négative auprès d'une grande partie de la profession agricole.
Pour finir, une certaine injustice peut être soulignée. Les activités d'élevage de montagne, malgré certaines dérives, sont probablement le mieux à même d'intégrer la dimension environnementale prônée dans les discours politiques. Pourtant, les dernières moutures de la PAC censée les valoriser les vident de contenus et de moyens. Le pastoralisme de montagne, qui bénéficiait de nombreuses aides spécifiques, commençant à porter leur fruit, redevient le parent pauvre d'une politique contre laquelle nombre d'élus et d'organisations agricoles, hostiles aux grands prédateurs, ne trouvent rien à redire (cf. pop-up supra).
Notes
[1] Farid Benhammou, agrégé de géographie, doctorant à l'École nationale du génie rural, des eaux et des forêts
Crier au loup pour avoir la peau de l'ours. Une géopolitique locale de l'environnement à travers la gestion et la conservation des grands prédateurs en France, la thèse de l'auteur (obtention du grade de Docteur de l'Ecole Nationale du Génie Rural, des Eaux et Forêt de Paris, spécialité Sciences de l'environnement, mention Géographie) soutenue le 22 Novembre 2007 peut être téléchargée ici (environ 21 Mo)
Pour se procurer les Actes du colloque "La cohabitation Hommes / Grands Prédateurs en France (Ours et Loup) - 21 et 22 mars 2004 à Orléans, document .pdf à télécharger.
Présentations d'ouvrages : http://ours-loup-lynx.info/article.php3?id_article=434 et www.loup-ours-berger.org/2005/09/ours_4_verites.html
[2] La Convention de Berne, entrée en vigueur en septembre 1982, a pour objectif d'assurer la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe par une coopération entre les États de l'UE. Elle définit les espèces à protéger et les niveaux de protection dont elles doivent bénéficier : http://europa.eu/scadplus/leg/fr/lvb/l28050.htm
La directive Habitat (comme la directive Oiseaux) s'inscrit dans le cadre du réseau Natura 2000 de l'UE, destiné à maintenir la biodiversité. La Convention de Berne et les directives Oiseaux et Habitat engagent les États membres à protéger espèces et milieux.
[3] Ces aires protégées sont concernées par la présence du loup : Parcs nationaux du Mercantour, des Écrins, de la Vanoise, Parc naturel régional du Queyras, camp militaire de Canjuers, Réserve des Hauts-Plateaux du Vercors etc.
[4] Dorioz dénonce la perte culturale et culturelle liée à une spécialisation ovine qui s'est accrue dans les Alpes. Elle a souvent conduit au remplacement de vaches laitières par des ovins à viande dont la conduite a des conséquences néfastes sur beaucoup d'alpages (dégradation, appauvrissement).
[5] Élevage, principalement de montagne en France, fondé sur des mouvements saisonniers de troupeaux, appelés transhumance (s), dans le cadre de "l'estive" qui est à la fois la période et la zone où vont paître les bêtes en montagne.
[6] Les termes de berger et d'éleveur recouvrent des réalités différentes. L'éleveur est le propriétaire du troupeau tandis que le berger, souvent salarié, est responsable du gardiennage et de la conduite des bêtes. Un berger peut être éleveur, c'est-à-dire avoir des bêtes à lui qu'il mêlera au troupeau d'un ou plusieurs éleveurs pour l'estive. Tous les éleveurs n'ont pas forcément de berger salarié et s'arrangent pour assurer eux-mêmes le gardiennage.
[7] Le Revenu brut d'exploitation (RBE) est l'équivalent du chiffre d'affaire. La politique d'indemnisation des dégâts de prédateurs sauvages, prise en charge par l'État contrairement aux dégâts causés par les chiens par exemple, pousse les représentants agricoles à affirmer qu'ils ne veulent pas être achetés. Ils dénoncent ces subventions comme une négation de leur capacité à produire de la richesse en oubliant que, jusqu'à une date récente, l'essentiel de la PAC fonctionnait sur la base de subventions : Prime à l'herbe, Prime compensatrice ovine (PCO), remplacée par une Prime à la brebis et à la chèvre (PBC) depuis 2002, cf. pop-up sur la PAC.
[8] Concernant l'analyse stratégique et géopolitique appliquée à l'environnement se reporter à Benhammou F. et Mermet L., 2003. "Stratégie et géopolitique de l'opposition à la conservation de la nature : le cas de l'ours des Pyrénées", in Nature, Sciences, Sociétés, 11 : 381-393.
[9] Installation de chiens de protection, clôtures mobiles, aide-bergers… souvent initiés par le programme européen LIFE loup. Les initiatives des éleveurs eux-mêmes ne doivent pas être sous-estimées néanmoins. Les programmes LIFE : http://europa.eu/scadplus/leg/fr/lvb/l28021.htm
[10] Sondage réalisé en décembre 2002 et janvier 2003 sur 403 personnes de 15 ans et plus vivant dans des communes classées "zone montagne des Pyrénées", ainsi que sur 1 006 personnes représentatives de la population française / Sondage commandé par le groupe Pyrénées-Presse de Pau à l'Institut ARSH-Opinion les 7 et 8 décembre 2004 selon la méthode des quotas auprès de 400 personnes de 18 ans et plus, représentatives de la population de l'ensemble du département des Pyrénées-Atlantiques / Sondage réalisé par l'IFOP en février 2005 sur 906 personnes représentatives de l'Ariège, de la Haute-Garonne et des Hautes-Pyrénées.
[11] Pour plus d'éléments sur l'utilisation d'une rhétorique de concertation utilisée au détriment de la protection des ours en Béarn voir :www.rgte.centre-cired.fr/rgte/IMG/pdf/RE_21_-_09-21.pdf et
www.rgte.centre-cired.fr/rgte/IMG/pdf/faux_dilemmes.pdf
[12] Voir les travaux de Mermet, 2001 et 2002 et Benhammou, 2001, 2005a et 2005b ainsi que ce document, en pop-up, sur le financement de l'IPHB et l'utilisation des fonds.
[13] Trois, légalement, par les services de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et un abattu illégalement par un berger qui s'est fait connaître. Les loups tués dans l'illégalité la plus totale, qui sont une réalité, ne sont bien évidemment pas comptés. www.oncfs.gouv.fr
[14] Une enquête administrative est lancée en 2006 en raison de soupçon d'absence de contrôle des indemnisations. Plus généralement, concernant les pertes de bétail attribuées aux deux prédateurs, en 2005 elles s'élèvent à 3 000 brebis pour le loup et 200 à 300 brebis pour l'ours. Pour comparaison, sur 200 000 brebis qui pâturent en zone à ours dans les Pyrénées, chaque année, 17 000 à 28 000 ne reviennent pas de la transhumance pour diverses raisons : maladies, chute dans des ravins, attaques de chiens ou de sangliers, intempéries, disparition en montagne (source : Reynes A., 2005).
[15] Ces dérangements divers sont causés notamment par des prédations autres que celles des loups. Les dégâts provoqués par les chiens divagants sont une gêne ponctuelle ou chronique qui peut sérieusement handicaper un éleveur. Mais pour la plupart des éleveurs c'est vécu et perçu différemment (Bobbé, 2000 ; Pistolési, 2000).
Farid Benhammou,
professeur agrégé de géographie,
doctorant à l'École nationale du génie rural, des eaux et des forêts
(Engref - benhammou@engref.fr),
Pour Géoconfluences le 15 mai 2006
Annexe documentaire : Un exemple de cohabitation homme / grands prédateurs en Espagne : Le Parc naturel de Somiedo (Asturies)
Le Parc naturel de Somiedo (PNS) s'étend sur 29 164 ha (291 km²) au coeur de la Cordillère Cantabrique aux caractéristiques climatiques et morphologiques comparables aux Pyrénées. Le pastoralisme de montagne y est encore actif mais fondé surtout sur l'élevage bovin, à la différence des Pyrénées. La faune sauvage, diversifiée, comporte des ours (la population ursine espagnole serait de 60 à 90 ours répartis en deux noyaux situés dans le Nord du pays) et des loups (90 à 126 loups dans les Asturies).
Réserves et parcs des Asturies
Le Conseil constitutionnel espagnol a décidé de confier la gestion des parcs nationaux aux régions autonomes. Trois régions (Asturies, Cantabrie, Castille-Leon) se partagent les territoires protégés dans le cadre des différents parcs de la Cordillère Cantabrique ce qui, en cas de désaccord politique, peut poser des problèmes de cohérence.
Voir le "Sistema de Información Ambiental del Principado de Asturias (SIAPA)" : http://tematico.princast.es/mediambi/siapa/web/espacios/biosfera/index.php
Différentes étapes aboutissent à faire du parc une "Réserve de la biosphère". Tout d'abord, en 1966, la création d'une réserve nationale de chasse. Puis, en juin 1988, Somiedo obtient le statut de Parc national en Espagne. Et c'est en 2000 que l'Unesco lui accorde, dans le cadre de son programme Man and Biosphere, le label de Réserve de la biosphère.
Organiser le partage de l'espace : zonages et signalétique
La circulation et le partage du territoire entre éleveurs et visiteurs du parc sont organisés : Cliché : Sylviane Tabarly, avril 2005 |
Le territoire du PNS est organisé en zones à usages différents : usage général, usage agro-pastoral, zone de pâturages, usage restreint et de protection intégrale. À cela s'ajoute, depuis 2000 et dans le cadre du programme MAB de l'Unesco, le zonage de la Réserve de la biosphère :
Le programme MAB (Man and Biosphere) fut adopté par l'Unesco en 1971. En 1974, conjointement avec le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), fut décidé un zonage des réserves ou territoires concernés en trois catégories de zones : centrale, tampon et de transition. Les premières "Réserves de biosphère" sont désignées en 1976 mais seules sont retenues les zones protégées consacrées à la recherche. Après une longue période de tâtonnements, en 1995 à Séville, un "Cadre Statutaire du réseau mondial des réserves de biosphère" est adopté. Cette "Stratégie de Séville" définit, dans le cadre des accords signés par les États membres de l'Unesco, des principes de fonctionnement des réserves. L'application des directives associées reste sous la juridiction du pays dans lequel elles se trouvent et les réserves s'appuient en partie sur des espaces légalement protégés, comme des parcs ou des réserves naturelles. Les réserves de biosphère ont trois fonctions distinctes mais étroitement liées.
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De fait, le titre de Réserve de la biosphère est moins une nouvelle couche réglementaire qu'un moyen de drainer de nouvelles subventions pour des projets de développement. Ce statut permet au PNS d'être reconnu internationalement. Le zonage d'origine du Parc naturel et celui de la Réserve de la biosphère se superposent donc et tentent d'intégrer et de développer l'aspect "éco-tourisme" [1] qui permet de maintenir certaines activités et d'en créer : mise à disposition et entretien de chemins de randonnée, activités d'accompagnement et d'animation diverses, etc.
Le double statut de Parc naturel et de Réserve de la biosphère permet également au territoire de Somiedo de bénéficier de la présence d'organismes de gestion efficaces et indispensables à son fonctionnement : les gardes du Parc, de l'ONG FAPAS, de la Fondation Oso Pardo (FOP) ou les gendarmes du SEPRONA [2].
Au-delà des succès engrangés par cette démarche, différents défis restent à relever. Au nom du développement économique les gestionnaires du Parc peuvent être tentés de rentrer dans une logique de "marchandisation de l'espace terrestre" [Grenier C., 2000] et de la faune sauvage. Sans garde-fou l'étiquette "MAB", devenue un argument marketing attirant fonds et touristes, peut engendrer des impacts contraires à ses objectifs. Or, la politique d'image prime souvent sur une mise en application stricte des réglementations.
Les touristes, en nombre croissant, complexifient la gestion du territoire et, malgré la présence des gardes, ne respectent pas toujours les limites des zones. Plus que les touristes eux-mêmes, ce sont souvent les développements induits qui peuvent poser problème. Le PNS semble en effet avoir du mal à éviter la multiplication des structures d'accueil, les asphaltages systématiques de routes et chemins qui facilitent l'accès des touristes mais aussi des braconniers à certaines zones de montagne fragiles.
Des images pour promouvoir le Parc de Somiedo
Un dépliant de présentation du parc |
Le parc de Somiedo utilise largement l'image de l'ours (oso pardo cantábrico) pour assurer sa promotion. La présence des grands prédateurs est un moyen efficace pour attirer les touristes. Des sentiers, musées ou maisons de l'ours et du loup accompagnent ce tourisme de nature. Les boutiques vendent parallèlement des produits à l'effigie des deux grands prédateurs. Sur la page de présentation du dépliant, ci-contre, on relève deux des principaux emblèmes du parc : l'ours et la cabaña de teito* en arrière-plan. Un extrait d'une brochure de promotion :
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Par ailleurs, l'activité touristique, source de revenus plus faciles à acquérir, décourage les activités dites traditionnelles comme l'élevage, l'apiculture, la production de fromage, la charcuterie qui sont peu à peu délaissées par les nouvelles générations. L'importation de viande bovine argentine décourage les éleveurs et le système des indemnités qui leur sont accordées en cas de pertes attribuées à la faune sauvage peut aussi avoir des effets pervers car, qu'ils veillent ou non sur leurs troupeaux, ils ne sont pas perdants. Ainsi, la distinction entre territoires sauvages et territoires entretenus est moins bien préservée par les activités humaines. Le déclin de l'élevage se traduit par une reprise de la forêt et par la diminution, voire la disparition des pâtures. Or, les effets de lisières et les milieux ouverts favorisent un cortège d'espèces végétales et animales dont profite l'ours.
On a donc ici un ensemble de contradictions qui sont autant de défis à relever pour les responsables et les gestionnaires du Parc naturel.
[1] L'éco-tourisme est une activité touristique qui est censée allier retombées économiques et souci de préservation de la nature. Cette notion est souvent liée à celle de tourisme vert ou tourisme de nature.
[2] Fondo Asturiano para la Protección de los Animales Salvajes (Fonds asturien pour la protection des animaux sauvages)
[3] Servicio de Protección de la Naturaleza (de la Guardia Civil) (Service de la protection de la nature de la Gendarmerie) qui joue un rôle essentiel dans la lutte contre le braconnage.
Annexe en .pdf (2 Mo) : La gestion des grands prédateurs (ours et loups) dans le Parc Naturel et la Réserve MAB de Somiedo (Espagne) : un modèle d'éco-développement ? Natalia Bonnet et Farid Benhammou. Paru dans : Benhammou F. et al. (eds), 2004. “ La cohabitation Hommes / Grands Prédateurs en France (Ours et Loup) : enjeux didactiques pour la conservation de la nature et le développement durable? ” Actes du colloque du 21 et 22 mars 2204, Museum d'Orléans, Recherche Naturaliste en Région Centre.
Synthèse, adaptation de l'annexe documentaire : Sylviane Tabarly
Bibliographie
- Arnould P. - La forêt française : entre nature et culture - Habilitation à Diriger des Recherches, Paris IV, 375 p., 1994
- Arnould P. - La recherche français en biogéographie, BAGF, n°4, pp. 404 - 413, 1994
- Bellefon R. (de) - Histoire des guides de montagne, Alpes, Pyrénées - Cairn et Milan [Bayonne, Toulouse], 2003
- Benhammou F. - Vivre avec l'ours - Editions Hesse, St Claude de Diray, 225 p., 2005
- Benhammou F. - "Vendre la peau de l'ours avant de l'avoir sauvé ? Une géopolitique locale de la conservation d'une espèce animale emblématique", in L'ours des Pyrénées, les 4 vérités, Editions Privat, Toulouse : 77-120., 2005
- Benhammou F., Baillon J. et Senotier J.-L. al. (eds.) - La cohabitation homme / grands prédateurs (ours et loup) en France : enjeux didactique pour la conservation de la nature et le développement durable ?, Acte du colloque au Muséum d'Orléans, mars 2004, Recherche Naturaliste, n°14,décembre 2004, 215 p.
- Benhammou F. - "Les grands préateurs contre l'environnement ? Faux enjeux pastoraux et débat sur l'aménagement des territoires de montagne" - Courrier de l'Environnement de l'INRA, 48 : 5-12 - 2003
- Benhammou F., Baillon J. et Senotier J.-L. (coord.) - La cohabitation homme / grands prédateurs (ours et loup) en France, Acte du colloque au Muséum d'Orléans, mars 2004 - Recherche Naturaliste, n°14, Nature Centre, décembre 2004
- Benhammou F. - La réapparition du Loup en France : protection contre nature ou cohabitation durable ? - Mémoire de Maîtrise de Géographie, Université d'Orléans, 155 p, - 1999
- Benhammou F. - Rôles et dynamiques des porte-parole dans les débats sur l'ours dans les Pyrénées, analyse stratégique et géopolitique d'un problème d'environnement - Mémoire de DEA Aménagement-Développement-Environnement, IRD, Université d'Orléans-ENGREF de Paris, 131 p. - 2001
- Blanco J.C., de la Cuesta L., Reig S. - El lobo (Canis lupus) en España : situación, problemática y apuntes sobre su ecologia - ICONA, coll. Tecnica, Madrid, 118 p. - 1990
- Bobbé S - Du folklore à la science. Analyse anthropologique des représentations de l'ours et du loup dans l'imaginaire occidentale - Thèse de 3ème cycle, EHESS, Paris, 419 p. - 1998
- Bobbé S. - L'ours et le loup. Essai d'anthropologie symbolique - coédition INRA/MSH, Paris, 258 p. - 2002
- Bonnet N. - Gérer les grands prédateurs dans le Parc Naturel et la Réserve de la Biosphère de Somiedo (Espagne) : Espaces protégés, garants d'une cohabitation durable ? - Mémoire de Maîtrise de Géographie, Université d'Orléans, 142 p. - 2003
- Chabert J.-P, Lécrivain E. et Meuret M. - Éleveurs et chercheurs face aux broussailles. Courrier de l'environnement de l'INRA, 35 : 5-12 - 1998
- Delibes M. - Statut et conservation du loup (Canis lupus) dans les états membres du conseil de l'Europe - Conseil de l'Europe, Strasbourg, 45 p. - 1990
- Dorioz J.M. - Alpages, prairies et pâturages d'altitude, l'exemple du Beaufortain - Courrier de l'environnement de l'INRA, 35, 33-42, 1998
- Grande del Brio R. - El lobo ibérico, biología y mitología, H. Blume, Madrid, 344 p. - 1984
- Grenier C. - Conservation contre nature. Les îles Galápagos - IRD éditions, coll. Latitude 23, Paris, 375 p. - 2000
- Hartasanchez A., Vignon V. - "L'homme et les grands prédateurs : quelle cohabitation en Espagne ?" - La Gazette des Grands Prédateurs, 3 : 10-12. - 2002
- Landry J.-M. - Der Wolf (Le loup), [CD-ROM], éditeur : Finajour - 1999
- Planhol, Xavier (de). - Le paysage animal. L'homme et la grande faune : une zoogéographie historique. Fayard, Paris - 2004
- Reynes A. - "Éléments de compréhension de la relation éleveurs - ours en Pyrénées Centrales par l'approche systémique", in Acte du colloque La cohabitation hommes / grands prédateurs, Nature Centre, décembre 2004
- Sales P. - Vivre avec le loup des Asturies aux Carpates, L'Atelier technique des espaces naturels, Gestion des milieux et des espèces, Cahiers Techniques n° 69, Montpellier, 96 p. - 2002
Des ressources en ligne pour aller plus loin, une sélection
Recherche, sites experts, sites officiels (collectivités, professionnels)
- L'École nationale du génie rural, des eaux et des forêts (Engref) : www.engref.fr
- Activités et productions du Groupe "Recherche en gestion sur les territoires et l'environnement (RGTE)", créé à l'Engref : www.rgte.centre-cired.fr/rgte
- Agreste, la statistique agricole, données sur l'élevage ovin et le pastoralisme, bilans conjoncturels, etc. : www.agreste.agriculture.gouv.fr
- INRA, Courrier de l'environnement, par Farid Benhammou - Les grands prédateurs contre l'environnement ? faux enjeux pastoraux et débat sur l'aménagement des territoires de montagne : www.inra.fr/dpenv/benhac48.htm
- Par l'Institut français de l'environnement (IFEN) , des documents sur les grands prédateurs (données statistiques, graphiques, cartes) : www.ifen.fr/dee2003/fauneflore/fauneflore4.htm
- Les "Cahiers du PROSES", working papers sans périodicité de Sciences Po - www.proses.sciences-po.fr - Le Loup, "affaire d'État", n°9 (mai/juin 2004) : www.proses.sciences-po.fr/fr/Cahier9.htm
- La Mission d'animation des agro-biosciences (MAA) en Midi-Pyrénées : www.agrobiosciences.org
- Parmi les thèmes des Cafés géographiques :
- Y-a-t-il une géographie du territoire animal ? :www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=612
- Le loup dans le Mercantour, un conflit d'utilisation de l'espace :www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=120
- Dossier de Futura Sciences - Les loups, apprenons à mieux les connaître : www.futura-sciences.com/comprendre/d/dossier544-1.php
- Site ministériel officiel sur la réintroduction de l'ours dans les Pyrénées (ministère de l'Écologie) : www.ours.ecologie.gouv.fr
- L'Office national de la chasse et de la faune sauvage : www.oncfs.gouv.fr
- Rapport de la commission d'enquête parlementaire sur les conditons de la présence du loup en France et l'exercice du pastoralisme dans les zones de montagne (Assemblée nationale le 2 mai 2003) : www.assembleenationale.fr/12/rap-enq/r0825-t1.asp
- Les auditions : www.assembleenationale.fr/12/rap-enq/r0825-t2.asp
- L'Office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (Ofival / Onilait) : www.ofival.fr/o-e/index.html ou www.office-elevage.fr
- Association nationale des élus de montagne : www.anem.org
Du côté associatif, quelques exemples
- Association pour la promotion du pastoralisme dans les Alpes maritimes : www.appam.net
- Pays de l'ours - ADET : www.paysdelours.com
- La Monde des Pyrénées : www.pyrenees-pireneus.com
- Association pour la cohabitation pastorale dans les Pyrénées : www.pyrenees-pireneus.com/ACP.htm
- Association de producteurs de broutard "Estives du pays de l'ours" : www.agneaubroutard.com
- Association France Nature Environnement (FNE) : www.fne.asso.fr/index.htm
- La Buvette des alpages (pastoralisme et biodiversité, promotion de la cohabitation entre bergers, troupeaux et grands prédateurs) : www.loup-ours-berger.org
- Le Groupe Loup France et ARTUS sont désormais réunis dans une même association, FERUS ( "ce qui est sauvage" en latin) est née de la fusion d'ARTUS et du Groupe Loup France (association née en 1993 avec l'apparition des premiers loups sur le territoire français) : www.ours-loup-lynx.info
- Les positions de la Confédération paysanne : www.confederationpaysanne.fr
- Site dédié au loup (France, Italie, Espagne principalement) : www.loup.org
- Le WWF : www.wwf.fr/index2.php
À propos du Parc naturel de Somiedo :
- Système d'information environnemental de la région des Asturies (Sistema de Información Ambiental del Principado de Asturias/SIAPA) : http://tematico.princast.es/mediambi/siapa/web/espacios/biosfera/somiedo
- Institut des ressources naturelles et d'aménagement du territoire (Instituto de Recursos Naturales y Ordenación del Territorio / INDUROT), organisme dépendant de l'Université d'Oviedo dont les experts et les chercheurs ont participé à la démarche d'acquisition du label "Réserve de la biosphère" du PNS : http://156.35.47.1/default.aspx
- Fonds asturien pour la protection des animaux sauvages (Fondo Asturiano para la Protección de los Animales Salvajes / FAPAS) : www.fapas.es
- La Fondation Ours Brun (Oso Pardo) : www.fundacionosopardo.org
- La Fondation Ours des Asturies (Oso de Asturias) : www.osodeasturias.es/index.asp
- Le Programme de l'Unesco "L'homme et la biosphère" (Man and Biosphere /MAB) www.unesco.org/mab/mabProg_fr.shtml
- En anglais, des documents sur la présence du loup et de l'ours en Espagne et leurs conséquences (The Iberian Wolf/Wolves in Spain - Brown bears in Spain news) : www.iberianature.com/material/wolf.html et www.iberianature.com/material/spainbearnews.htm
- Informations générales sur le Parc naturel de Somiedo et les Asturies : www.desdeasturias.com/asturiasbasica/rutas.asp?idruta=115
- Par la FAO, le programme de l'Unesco pour la montagne : www.fao.org/documents/show_cdr.asp?url_file=/docrep/x0963F/x0963f08.htm
Compléments et réalisation de la page web : Sylviane Tabarly
Mise à jour : 28-04-2008
Pour citer cet article :
Farid Benhammou, « Archive. Territoire des animaux, territoire des hommes : aspects et enjeux du retour des grands prédateurs », Géoconfluences, avril 2008.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/developpement-durable-approches-geographiques/corpus-documentaire/territoire-des-animaux-territoire-des-hommes-aspects-et-enjeux-du-retour-des-grands-predateurs