Impédimentologie

L’impédimentologie est un champ de recherche interdisciplinaire dont le but est d’étudier les obstacles aux changements sociaux, en particulier ceux s’appliquant aux processus de transition sociale, et les divers moyens de les appréhender. La transition entendue ici est celle consistant à passer de l’ère de l’Anthropocène à une ère du respect des limites planétaires.

Dans son acception impédimentologique, l’obstacle est compris comme « la tendance d’un système à maintenir un comportement initial, malgré l’introduction de forces de changement » (Verhelst et al., 2025). Il se décline en trois niveaux : les obstacles paradigmatiques, par essence « invisibles et immuables » et sur lesquels aucune action directe n’est possible ; les obstacles attitudinaux, « perceptibles et durables », et sur lesquels il est possible d’agir à l’échelle collective ; les obstacles comportementaux, « visibles et éphémères », sur lesquels il est possible d’agir préférentiellement à l’échelle individuelle. En vis-à-vis de chaque obstacle correspondent des expédients, dont les effets sur le monde physique sont pensés pour être inverses à ceux produits par les obstacles.

Quel que soit le niveau auquel ils agissent (paradigme, attitude ou comportement), on peut distinguer quatre sous-catégories d’obstacles : neuropsychologique, épistémologique, politologique et sociologique (ibid.). Parmi les obstacles, on retrouve par exemple les biais cognitifs, la pensée binaire, le capitalisme patrimonial, la dépendance au chemin emprunté, le monopole masculin, ou encore l’insolvabilité environnementale. Chacun de ces obstacles explique en partie pourquoi l’humanité a tant de mal à changer de trajectoire, et comment il est possible d’y remédier.

L'impédimentologie se fonde sur le postulat selon lequel il ne serait pas possible d'enclencher et poursuivre un processus de transition sociale en un temps très limité sans s'atteler en parallèle au traitement des dispositifs faisant obstacle à ces mêmes transitions. Elle s'inscrit à la croisée de multiples champs disciplinaires, notamment la systémique, la philosophie, les neurosciences, la sociologie, la géopolitique, l'économie, l'environnementalisme, la climatologie, l'écologie politique, le droit, l'anthropologie, la sémiologie, la théologie, le management ou encore la santé. Son avènement en tant que champ disciplinaire s'inscrit dans la continuité des travaux de Jack Harich (2010), systémicien, et des divers penseurs de la complexité.

Les deux axes structurant de la pensée de l’obstacle sont le travail de recensement (des obstacles et des expédients) et la définition de méthodes de travail visant au traitement des obstacles. De nombreux concepts s’en dégagent, tel que « le triptyque ciblage – criblage – déverrouillage ».

L’impédimentologie s’applique à toutes les formes de transition, notamment la transition écologique, la transition énergétique, la transition agro-alimentaire, la transition territoriale, ou encore la transition hydrique.

(JBB), janvier 2025.

Références citées

• Harich Jack, 2010. “Change resistance as the crux of the environmental sustainability problem”, System Dynamics Review, vol. 26, n° 1, 2010, p. 35–72.
• Verhelst Lucas (dir.), 2025, Manuel d’un monde en transition(s). 101 obstacles au changement, 101 pistes d’action. Éd. de l’Aube, 351 p.