Les migrations environnementales : un nouvel objet d’enseignement

Publié le 10/07/2020
Auteur(s) : Bernadette Mérenne-Schoumaker, professeur ordinaire honoraire - Université de Liège

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À partir d'idées reçues sur les migrants climatiques et environnementaux, l'autrice examine la difficulté à nommer et à quantifier ce phénomène avant de faire le point sur l'état actuel des connaissances. Elle montre ensuite comment cette question peut s'insérer dans les programmes de géographie de l'enseignement secondaire. Une place particulière est accordée aux documents, aux outils et aux démarches possibles.

Bibliographie | citer cet article

Le rôle des facteurs environnementaux dans les migrations est de plus en plus médiatisé mais le thème est encore peu abordé dans les cours de géographie qui traitent pourtant des mobilités humaines comme dans les programmes français de quatrième et seconde. Pourquoi ce faible intérêt : la question est-elle trop récente pour être intégrée dans les programmes scolaires ? Est-ce à cause du manque de statistiques fiables ou d’un corpus documentaire non encore disponible ?

Comme nous allons le voir, la question est en fait étudiée dans le monde scientifique depuis près de trente ans (point 1.2.), mais par contre, les données statistiques posent problème (point 2.1.) comme d’ailleurs le peu de ressources directement disponibles pour la classe. D’où cet article qui propose une réflexion sur le sujet en cherchant également à apporter une réponse aux grandes idées reçues qui circulent à ce propos (voir encadré).

 
Encadré 1. Quelques idées reçues sur les migrations environnementales
  • Les migrations climatiques sont un phénomène nouveau qui résulte de l'action humaine sur l’environnement.
  • Les migrations climatiques touchent les pays en développement, mais pas l'Europe.
  • Le climat est surtout un prétexte de migration pour des migrants économiques qui cherchent à s’installer dans des régions mieux développées.
  • L’Europe va se retrouver à gérer des millions de migrants poussés dehors par la raréfaction de leurs ressources. 
  • La question est déjà bien prise en compte par les instances internationales.
  • Les personnes qui fuient leur lieu de vie pour des raisons climatiques doivent être considérées comme des réfugiés.
  • Bientôt il existera un statut de réfugié climatique dans le droit international. 

Source : d’après Alexandra Yeh, « Sept idées reçues sur les migrations climatiques », France Culture, 14 décembre 2018.


 

La réflexion sera menée en trois étapes. Après avoir abordé les considérations terminologiques, historiques et juridiques, nous dégagerons des traits majeurs des migrations environnementales. Nous verrons enfin l’intérêt du sujet pour l’enseignement et des pistes d’intégration.

 

1. Ce que les mots signifient. Considérations terminologiques, historiques et juridiques

Afin de mieux cerner le sujet de cet article, il a semblé utile de préciser d’abord les termes utilisés, de dresser un court bilan de l’évolution des idées autour de cette thématique et de s’interroger sur la manière dont la question est traitée dans le droit international.

1.1. Mise au point terminologique

Notre article traite des migrations environnementales et non des migrations climatiques, car les migrations climatiques ne constituent qu’une part des migrations environnementales (document 1), ces dernières comprenant aussi des migrations liées à des phénomènes de nature géophysique comme des tremblements de terre ou des éruptions volcaniques (voir 2.2.). 

Document 1. Migrations climatiques et migrations environnementales

Bernadette Mérenne Schoumaker - différence entre migrants environnementaux et migrants climatiques

 

Il parle aussi de migrants et non de réfugiés, car le terme « réfugié climatique » le plus souvent utilisé est un abus de langage non seulement en raison de l’adjectif climatique, mais encore parce que le terme « réfugié » désigne une personne qui bénéficie d’un statut institué par la Convention de Genève de 1951 dont les conditions d’attribution sont strictement définies : il faut être l’objet de persécutions dans son pays d’origine et vouloir le quitter ; le réfugié peut aussi prétendre à une protection internationale (contrairement aux migrants « économiques » dont l’accueil est du ressort des États d’accueil). Or le migrant environnemental n’a pas un statut officiel et, contrairement à une idée avancée ci-dessus, la situation risque de perdurer dans le contexte sécuritaire d’aujourd’hui : pensons à la difficulté des États tant dans l’Union européenne qu’aux États-Unis à gérer les réfugiés déplacés par les conflits. 

Toutefois, le terme « migrant environnemental » choisi ici n’est pas totalement adéquat car un « migrant » est une personne qui se déplace et qui jouit d’un certain degré de liberté au niveau de la prise de décision dans le départ, la durée et la destination de la migration ; le terme occulte donc les nombreuses migrations forcées rencontrées dans les déplacements environnementaux. Le terme le plus adéquat aurait été « déplacés environnementaux » mais il n’est guère utilisé par les organismes internationaux comme l’Organisation internationale pour les migrations (OIM, 2011) qui n’évoque que les migrants environnementaux, qu’elle définit de la manière suivante : « les personnes ou groupes de personnes qui, essentiellement pour des raisons liées à un changement environnemental soudain ou progressif influant négativement sur leur vie ou leurs conditions de vie, sont contraintes de quitter leur foyer habituel ou le quittent de leur propre initiative, temporairement ou définitivement et qui de ce fait, se déplacent à l’intérieur de leur pays ou en sortent ». C’est la raison du choix du titre de notre article.

1.2. Courte histoire de la thématique et des débats dont elle a été l’objet

Le concept « réfugiés de l’environnement » apparaît pour la première fois en 1985, dans le titre d’un rapport du PNUE (Programme des Nations Unies pour l'Environnement) rédigé par Essam El Hinnawi, universitaire égyptien. Le même terme est utilisé par les médias à partir de 1995. Les premiers travaux scientifiques sont réalisés à partir des années 1990 avec, dès le départ, de fortes discussions sur les chiffres, sur l’identification des personnes appartenant à la catégorie puis sur le concept lui-même (P. Gonin et al., 2002).

La thématique monte en puissance avec les changements climatiques, ce qui amène les concepts de « migrations climatiques » ou de « réfugiés climatiques » (voir dans le glossaire de Géoconfluences : migrants environnementaux, migration environnementale). Le premier rapport scientifique important est publié en 2011 : c’est le rapport Foresight commandité par le gouvernement britannique (Government Office of Science) dont il existe une synthèse en français « Migration et changements environnementaux planétaires ». Son grand intérêt est de mettre en évidence la diversité des causes de ces migrations. Depuis 2011, les publications se sont multipliées ; ce sont à la fois des travaux scientifiques avec de nombreuses études de cas et des rapports publiés par des organismes internationaux. De même, on ne compte plus les séminaires et les conférences consacrés à cette question. 

Les travaux scientifiques émanent de chercheurs de différentes disciplines : géographes, sociologues, politistes, démographes, spécialistes de l’environnement … tandis que les rapports sont issus de trois sources principales :

  • l’IDMC (Internal Displacement Monitoring Centre) : c’est la principale source de données et d’analyse des déplacements liés à des catastrophes géophysiques ou climatiques ; l’IDMC a été créé en 1998 au sein du Conseil norvégien pour les réfugiés (CNR) ; 
  • l’IOM (OIM en français) (Organisation internationale pour les migrations) : c’est une agence intergouvernementale, créée en 1951, basée à Genève et liée à l’ONU depuis le 19 septembre 2016 ; elle traite des migrations en général ;
  • la Banque Mondiale et plus spécifiquement son « Groupe du changement climatique » qui a notamment publié en 2018 des prévisions pour 2050 dans trois régions du Monde : l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Amérique latine.

Certaines ONG ou ASBL (associations à but non lucratif) se sont aussi penchées sur la question comme par exemple Zoï Environment Network, une agence indépendante de GRID-Arendal, une organisation norvégienne, créée en 2008 ; installée à Genève, cette association vise l’analyse, la communication et des actions en vue de sociétés durables ; elle traite notamment des changements climatiques et migrations (Zoï Environment Network, 2017). Toutefois, comme l’ont bien montré Ionesco, Mokhnacheva & Gemenne (2016, p. 16-17), les discours sur cette thématique divergent et ont changé dans le temps :

  • dans les années 1990, les discours alarmistes (« catastrophes humanitaires ») dominaient dans le monde des chercheurs en environnement comme dans celui des ONG ou médias ;
  • dans les années 1997-1998, les discours des chercheurs en migration sont devenus plus sceptiques : l’environnement est une cause de migration comme les autres ;
  • depuis 2010, les recherches empiriques ont conduit de nombreux chercheurs à considérer les migrations comme une stratégie d’adaptation aux changements et ce point de vue a été souvent adopté par le monde politique international.

Dès lors, on comprend mieux les difficultés rencontrées par le monde de l’enseignement pour intégrer le sujet dans les cursus. Il y faut ajouter la divergence des points de vue, au niveau du grand public et du monde politique, entre ceux par exemple qui se focalisent sur le désastre humanitaire et ceux qui pensent que l’environnement est une diversion par rapport aux causes réelles politiques ou économiques des migrations environnementales. En fait, comme nous le verrons au point 2.2, les causes sont toujours multifactorielles.

1.3. La difficile reconnaissance des droits des migrants environnementaux

Il existe deux obstacles principaux à la reconnaissance d’un statut juridique aux déplacés environnementaux : d’une part, les formes de ces migrations extrêmement variées (forcées ou volontaires, temporaires ou permanentes, nationales ou internationales) avec un seul point en commun (leur lien avec l’environnement) rendent très difficiles une réponse unique ; d’autre part, le contexte actuel est peu favorable à une extension des droits autour de la migration dans le monde.

Toutefois on peut observer quelques initiatives de prise en compte et de protection des migrants. Nous en épinglerons trois :

  • Lors des COP depuis Copenhague (2009), Cancun (2010) et surtout Paris (2015), des recommandations ont été validées puis remises aux États lors de la COP 24 (2018) (Katowice) ; elles concernent l’adoption d’approches intégrées pour prévenir, réduire au minimum et prendre en compte les déplacements liés aux effets néfastes des changements climatiques ;
  • L’initiative Nansen, un processus intergouvernemental lancé en 2012 par la Norvège et la Suisse, a produit un agenda qui précise un ensemble de mesures à mettre en œuvre par les États pour la protection des personnes déplacées hors de leur pays ; cet agenda a été validé par 109 gouvernements en 2015 ; cette même initiative a mis en place en 2016 la Plateforme sur les déplacements liés aux catastrophes naturelles pour accompagner les États dans la mise en œuvre de l’agenda de protection visant à établir un dialogue entre les pays concernés par les catastrophes naturelles et les pays potentiels de destination afin de trouver des pistes d’actions concrètes ;
  • Le Pacte mondial sur les migrations de l’ONU adopté par 152 pays à Marrakech en décembre 2018, cadre de coopération non contraignant, a reconnu pour la première fois le changement climatique comme une cause de départ forcé des populations. Il fournit des recommandations et des bonnes pratiques visant à encourager la coopération internationale pour parvenir à une gestion plus efficace, mais surtout plus humaine, des migrations internationales visant à mieux protéger les personnes déplacées à l’extérieur des frontières de leur pays d’origine à la suite d’une catastrophe naturelle.

Si tous ces textes sont non contraignants, ils montrent cependant que des solutions politiques émergent progressivement, confirmant du moins partiellement que « la question est déjà bien prise en compte par les instances internationales » sans aboutir toutefois à un statut de réfugié climatique comme dit plus haut.

 

2. Quelques traits majeurs des migrations environnementales

Après avoir rappelé que les déplacements existent depuis longtemps déjà, nous tenterons sur base des données (très partielles) de l’IDMC de chiffrer leur importance aujourd’hui, d’en analyser leur répartition spatiale puis de nous pencher sur leurs causes avant d’évoquer les futurs possibles.

2.1. Des déplacements environnementaux déjà anciens et encore mal connus aujourd’hui 

Contrairement à une idée reçue (voir introduction), les migrations pour des raisons environnementales ne sont pas un phénomène nouveau lié à la seule influence des hommes sur leur environnement. Même, si elles ne sont pas bien connues, elles existeraient selon les Historiens depuis le Néolithique et la sédentarisation, car auparavant le déplacement était la seule norme.

Deux raisons principales expliquent que les humains ont migré pour des raisons environnementales au cours du temps. La première est la recherche d’un climat plus favorable (soit globalement, soit à la suite d’épisodes climatiques peu favorables mais non catastrophiques) et de sols fertiles (comme par exemple, les migrations des régions côtières et deltaïques de la Mésopotamie vers l’Europe il y a environ 10 000 ans). La seconde sont les grandes catastrophes : on peut citer le tremblement de terre de Lisbonne suivi d’un tsunami (1755) ou la grande famine irlandaise (1845 à 1852) durant laquelle 2 millions de personnes ont quitté le pays (Ionesco et al., 2016, p. 14-15).

Et ces migrations (ibid.) ont parfois conduit à des changements démographiques majeurs comme en témoignent l’abandon des villes mayas suite à la sécheresse dans le Yucatan (800 à 900) ou la disparition des Vikings éleveurs au Groenland, victimes du « Petit Âge glaciaire » (entre le XIIIe et le XIXe siècle). Toutefois, il convient de souligner que les causes environnementales jouent rarement seules : elles impliquent pratiquement toujours des facteurs sociaux et culturels, comme ce fut par exemple le cas lors de la grande famine irlandaise liée aussi à la dureté de la domination anglaise. Par ailleurs, ce caractère multifactoriel des migrations environnementales explique également l’absence aujourd’hui de données exhaustives, facteur auquel il convient d’ajouter l’accès difficile aux informations relatives à certaines régions et la dimension potentiellement temporaire de beaucoup de ces migrations.

Les seules informations disponibles au niveau mondial sont en fait celles de l’IDMC évoquées ci-dessus. Disponibles depuis 2008, elles portent sur les populations évacuées lors de grandes catastrophes et ne prennent donc pas en compte les « petites » catastrophes, ni les déplacements liés à la sécheresse ou d’autres phénomènes de lente dégradation de l’environnement. Les catastrophes prises en compte sont de nature géophysique ou climatique. On y dénombre les personnes déplacées au sein de leur pays mais pas les destinations, ni les trajectoires, ni la durée des déplacements. Ceux qui seraient partis ailleurs (pays voisin, Europe…) ne sont pas non plus recensés. À l’inverse, on rencontre parfois des chiffres fantaisistes, peu étayés. Le phénomène des migrations environnementales est donc tantôt sous-estimé, tantôt surestimé.

2.2. Importance et répartition spatiale des déplacements consécutifs à des catastrophes

Sur base des rapports de l’IDMC, on découvre que, depuis 2008, les personnes déplacées représentent plus de 265 millions de personnes, soit en moyenne près de 25 millions par an, ce qui représente 3 fois plus que les déplacements liés à des conflits. Mais rappelons qu’il ne s’agit que des déplacements effectués au sein du pays où l’on a enregistré une catastrophe. Le document 2 fournit l’importance des personnes déplacées par types de causes.

Document 2. Part des personnes déplacées de 2008 à 2018 par types de causes

Bernadette Mérenne Schoumaker - migrations environnementales par cause

 

D’après ces données, les catastrophes climatiques regroupent 87,27 % du total des personnes déplacées avec deux causes majeures : les inondations et les tempêtes au sein desquelles sont classés les cyclones. Par contre, la sécheresse paraît ne générer que peu de déplacements. Ce faible poids des sécheresses est certainement lié au mode même de collecte de l’information : en effet, seules les personnes déplacées lors des catastrophes sont prises en compte. Or la sécheresse est un processus plus lent qui, en touchant profondément la population en réduisant les récoltes, ne les amène pas nécessairement à migrer massivement à un moment déterminé.

Et c’est là qu’il convient de rappeler que ce ne sont pas l’aléa (probabilité qu’un événement se produise), ni le risque (combinaison de l’aléa et de la vulnérabilité) en soi qui poussent les populations à partir, mais bien la répétition du phénomène dangereux. En effet, si les personnes peuvent s’adapter et prendre en compte la gestion du risque dans leur mode de vie, c’est surtout la récurrence et la multiplication des évènements qui les poussent à partir (C. Guillon, 2019, p. 76). Dans certains cas, comme sur les pentes des volcans, le risque peut même être la contrepartie d’un bénéfice (les pentes fertiles) incitant la population à revenir après chaque évacuation (de Bélizal, 2019).

Comme on pouvait s’y attendre, le nombre de catastrophes comme le nombre de déplacés varie d’une année à l’autre (document 3).

Document 3. Évolution annuelle du nombre de catastrophes et des personnes déplacées pour la période 2008-2018

Bernadette Mérenne Schoumaker - nombre de personnes déplacées évolution

Source : IDMC, Disaster Displacement. A global Review, 2008-2018, mai 2019, p. 6.

 

De même, la distribution régionale est très inégale (document 4). C’est la région de l’Est de l’Asie et du Pacifique qui est la plus touchée, ainsi que l’Asie du Sud. L’Asie est donc de loin le continent rassemblant le plus de déplacés.  Ce continent étant de loin le plus peuplé, il est normal qu’on y trouve le plus de déplacés ; mais il est proportionnellement plus touché : trois quarts des déplacés pour environ la moitié de la population mondiale. Par contre, l’Europe et le Moyen Orient sont peu concernés de même que l’Afrique (un dixième des déplacés pour un septième de la population). Il faut sans doute mettre ces résultats en lien avec les conditions naturelles des différentes régions, par exemple le poids de la mousson en Asie du Sud-Est ou encore celui des cyclones dans la zone intertropicale ; on peut aussi évoquer dans une moindre mesure la capacité à mieux se prémunir face à certains risques comme les tremblements de terre dans les pays plus développés, par exemple au Japon. L’idée reçue d’une Europe épargnée par les migrations climatiques semble donc vraie jusqu’à présent mais, comme le dit Alexandra Yeh (2018), pourrait être bousculée par les prévisions de hausse du niveau des eaux qui toucherait plusieurs pays européens (en premier lieu les Pays-Bas et aussi des États des Balkans menacés par la crue du Danube). L’Amérique du Nord n’est pas en reste, entre l’Alaska, touché par le dégel des sols arctiques, et la Louisiane où sévissent à la fois ouragans et montée des eaux. Sans surprise, le changement climatique n’épargne donc personne – même si bien sûr les pays développés sont beaucoup mieux armés pour l’affronter.

Document 4. Déplacés par grand ensemble spatial pour la période 2008-2018

Bernadette Mérenne Schoumaker - migrants environnementaux par continent ou région du monde

 

Sur base des mêmes données (mais limitées à l’année 2017), les auteurs de l’Atlas Espace Mondial ont établi une carte par pays. L’intérêt de cette carte (document 5) est de montrer une situation cartographiée à l’échelle nationale. On y observe notamment que les trois principaux pays regroupant le plus de personnes déplacées sont la Chine, l’Inde et les Philippines.

 
Document 5. Personnes déplacées à cause des catastrophes naturelles, 2008-2017

Atlas mondial migrants environnementaux planisphère monde

Source : « Migrations environnementales », Espace mondial l'Atlas, Sciences Po, 2018 [en ligne]. Informations sur les droits d'usage du document.

 

Les mêmes auteurs ont dressé, malgré les inévitables lacunes de la collecte de données à l’échelle mondiale, un graphique mettant en évidence les fluctuations annuelles selon les causes (document 6). Ces documents s’appuient sur les seules données officielles disponibles, celles de l’IDMC.

Document 6. Populations déplacées par type de catastrophes naturelles 2008-2017 

Atlas mondial migrants environnementaux par cause évolution

Source : « Migrations environnementales », Espace mondial l'Atlas, Sciences Po, 2018 [en ligne]. Informations sur les droits d'usage du document.

 

2.3. Un phénomène multifactoriel

Avant d’évoquer les facteurs à l’origine des migrations environnementales, il convient d’abord de souligner la diversité des situations, notamment en termes d’échelles spatiales et temporelles.

Théoriquement on peut distinguer deux échelles temporelles et trois échelles spatiales auxquelles peuvent répondre quatre types de réponses migratoires dans le temps et cinq dans l’espace  (tableau 1)

Tableau 1. Échelles temporelles et spatiales possibles des processus environnementaux et des réponses migratoires
Processus environnementaux Réponses migratoires
Temps Espace Temps Espace
Progressif Local Temporaire Local
Soudain National Saisonnier Du rural au rural
  Mondial Annuel Du rural à l’urbain
    Permanent De l’urbain au rural
      International

Source : OIM, 2009, p. 46.

 

En réalité, l’échelle « temps » des réponses migratoires varie plus que l’échelle « espace » car les migrations sont essentiellement internes à un pays et souvent à courte distance. La raison principale est d’ordre économique d’abord, mais aussi d’ordre culturel (attachement à la terre, aux réseaux familiaux…) ; rester dans un environnement connu (la région, le pays) est généralement soit une nécessité, soit un choix volontaire qui peut conduire à de plus fortes concentrations de populations dans certains espaces. Le cas du Bangladesh est un cas d’école : si face aux inondations et à la montée du niveau de la mer, les habitants du littoral fuient en direction de Dacca, la capitale qui se couvre de bidonvilles (C. Guillon, 2019, p. 77), d’autres ne se déplacent que de 50 à 100 m sur les mêmes charts du Brahmapoutre, ce qui relativise beaucoup la notion de migrant mais conforte celle de déplacé.  Sur les pentes du volcan Mérapi en Indonésie, les familles déplacées et relogées par le gouvernement après un épisode de lahars finissent par revenir dans leur village d’origine sur le volcan (De Bélizal, 2019).

En fait, les migrations environnementales se distinguent selon leur positionnement autour de trois axes : un axe « durée », un axe « niveau de préparation » et un axe « niveau de coercition » (document 7). Les migrations peuvent en effet être de courte ou de longue durée, réactives ou proactives (évacuation brutale ou au contraire migration planifiée) et volontaires ou forcées. Tout dépend souvent de l’importance de la dégradation. Quant aux facteurs à l’origine des migrations environnementales, ils sont à la fois macro, méso et micro, comme le montre le document 8 adapté du Rapport Foresight par Alex & Gemenne. 

Document 7. Les trois dimensions des migrations environnementales

B. Alex & F. Gemenne trois dimensions diagramme en cube

Source : Bastien Alex et François Gemenne, 2016, p. 7.

Document 8. Cadre conceptuel des facteurs de migration

Alex & Gemenne Cadre conceptuel des facteurs de migration

Source : Adapté du Rapport Foresight, 2011, p. 9 (Alex & Gemenne, 2016, p. 35). 

 

Deux conséquences en résultent : le changement environnemental n’est souvent qu’un facteur parmi d’autres et l’existence de facteurs de migration n’implique pas nécessairement qu’une migration s’ensuivra. Par ailleurs, tout indique des liens étroits avec le niveau socio-économique des populations. La migration est positivement associée à la richesse et au capital social tandis que la vulnérabilité (ou propension ou prédisposition à subir des effets néfastes) aux changements environnementaux est négativement associée à la richesse et au capital social. Les populations ne disposant guère de moyens sont de la sorte « prises au piège » dans des lieux qui les rendent vulnérables aux changements environnementaux (document 9).

Document 9. Représentation schématique des situations dans lesquelles des personnes sont « prises au piège » 

Représentation schématique des personnes « prises au piège »

Source : Rapport Foresight, 2011, p. 11.

 

Ainsi la croyance que « le climat est surtout un prétexte de migration pour des migrants économiques qui cherchent à s’installer dans des régions mieux développées », est en partie démentie par le fait que la majorité des déplacés suite à une catastrophe environnementale reste au sein de son pays, ce qui met aussi à mal une autre croyance : « L’Europe va se retrouver à gérer des millions de migrants poussés dehors par la raréfaction de leurs ressources », bien que, dans ce cas, on ne dispose d’aucun chiffre sur les départs à l’étranger et les destinations choisies.

Par ailleurs, rappelons qu’il est quasiment impossible d’isoler un facteur unique de migration : un agriculteur contraint de quitter son lieu de vie pour cause de sécheresse est-il un migrant climatique ou un migrant économique qui aurait perdu ses moyens de subsistance ?

2.4. Des prévisions difficiles

Quatre raisons rendent les prévisions difficiles : le concept même de déplacé environnemental, la faiblesse ou l’absence de méthodologies rigoureuses pour identifier les migrants, l’estimation des futures dégradations ou catastrophes ainsi que l’estimation de la croissance démographique et de la vulnérabilité des populations. En outre, il est nécessaire de sortir de la perspective déterministe (lien avec les dégradations de l’environnement) afin de prendre en compte le contexte politique, économique et démographique qui influence beaucoup les migrations.

Ces difficultés expliquent des chiffres parfois fantaisistes et exagérés, produits le plus souvent pour manipuler ou attirer l’attention sur la nécessité de politiques de renforcement de frontières ou de financements de l’adaptation. En fait, selon les sources, les valeurs fluctuent beaucoup. Ainsi un rapport de la Banque mondiale de mars 2018 évoque 143 millions de migrants climatiques d'ici à 2050 alors que l'ONU chiffre ces futurs flux à 1 milliard de personnes sur la même période.

Toutefois, le rapport de la Banque mondiale concerne uniquement les migrants internes en Afrique subsaharienne, Asie du Sud et Amérique latine et envisage trois scénarios (document 10).

Document 10. Projections de migrations climatiques internes, 2018-2050 selon la Banque mondiale

Atlas mondial migrants environnementaux scénarios banque mondiale

Source : « Migrations environnementales », Espace mondial l'Atlas, Sciences Po, 2018 [en ligne]. Informations sur les droits d'usage du document.

 

Ces scénarios intègrent à la fois les changements climatiques et les inégalités de développement. C’est à notre sens pertinent, vu les liens entre la vulnérabilité et le niveau socio-économique de la population (voir 2.4.).

En ce qui concerne les changements climatiques, un des problèmes majeurs devrait être les menaces pesant sur les populations des littoraux, sachant que déjà aujourd’hui environ 100 millions de personnes habitent dans des zones situées sous le niveau de la mer. Si le réchauffement climatique est limité sous 2°C, comme prévu par l’Accord de Paris, la hausse des océans devrait atteindre environ 50 centimètres d’ici 2100. Si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent à leur rythme actuel, l’élévation pourrait être presque deux fois plus importante. D’après une étude de l’organisation Climate Central (Kulp S.A. & Strauss B.H., 2019), 300 millions de personnes pourraient être menacées d’ici 2050, principalement en Asie où la montée des eaux devrait entraîner la perte de millions de km2 de terres fertiles nécessaires à l’agriculture et à l’alimentation. Une carte en ligne permet d’identifier toutes ces zones à différentes échelles (voir sitographie).

Pour progresser dans les prévisions, il est dès lors nécessaire de développer des recherches empiriques portant notamment sur :

  • le degré de vulnérabilité des populations (par exemple en étudiant les caractéristiques de l’environnement et des populations des zones ayant déjà été touchées, en distinguant les contextes ruraux des contextes urbains…) ;
  • les perceptions des populations face aux dégradations ou aux catastrophes ;
  • le rôle des réseaux familiaux (notamment de membres de la famille déjà partis) ;
  • l’importance et les lieux des retours.

3. Intérêt du sujet pour l’enseignement et pistes d’intégration

Dans cette dernière partie, nous nous interrogerons d’abord sur les raisons poussant à intégrer le sujet dans les cours de géographie de l’enseignement secondaire, puis nous suggérerons quelques pistes d’investigation.

3.1. Intérêt des thèmes « migration » et « migration environnementale »

Les migrations correspondent à une question civique fondamentale qui véhicule de nombreux préjugés. Même s’il s’agit d’une thématique nécessitant une approche interdisciplinaire (B. Stora et al., 2017), celle-ci présente un fort ancrage spatial car tous les flux s’inscrivent dans des espaces, à la fois comme points de départ, points d’arrivée et trajectoires ; de plus, les migrations transforment les espaces concernés. Le sujet est donc au cœur de la géographie et de sa question fondamentale : pourquoi là et pas (ou plus qu’) ailleurs, et de sa démarche : un raisonnement multiscalaire.

Plus que toute autre migration, la migration environnementale prend, quant à elle, en compte toutes les composantes d’un espace :

  • ses composantes physiques : climat, relief, structure géologique… ;
  • ses composantes humaines : répartition de la population, niveau de vie… ;
  • les effets des activités humaines sur l’environnement.

Beaucoup de facteurs de migrations environnementales sont d’ailleurs étudiés classiquement dans les cours de géographie comme :

  • les aléas géophysiques : tremblements de terre, éruptions volcaniques, glissements de terrain, tsunamis, raz-de marée… ;
  • les aléas climatiques : inondations, tempêtes (cyclones), sécheresses, températures extrêmes, feux de forêt naturels… ;
  • les autres effets des changements climatiques : élévation du niveau des mers et des océans, désertification, évènements extrêmes (pluies, températures exceptionnelles)… ;
  • certains facteurs humains : accaparement des terres, accidents industriels…  

3.2. Quelques pistes pour l’enseignement

Réfléchir à la place de ces questions dans la formation des adolescents impose de se poser trois questions.

Comment introduire les migrations environnementales dans les matières actuellement enseignées ?

Proposer un cours spécifique serait sans doute intéressant, mais ce n’est pas toujours possible quand le programme ne prévoit pas cette problématique. C’est le cas par exemple en Belgique et aussi en France où les programmes de 4e et 2de envisagent les migrations sous le seul angle transnational ou international, ce qui laisse de côté les migrations environnementales intervenant le plus souvent dans un cadre national. 

Par contre, il est possible d’intégrer la matière dans de nombreuses thématiques comme :

  • les aléas et risques (matière de 3e dans les programmes de la Belgique francophone((Les années du secondaire en Belgique vont de la première (début du secondaire) à la sixième (fin du secondaire), ce dernier commençant un an plus tard qu’en France.))) ou les risques et les ressources (2de en France) ; 
  • les changements climatiques (5e en Belgique) ;
  • les enjeux liés à l’accès à la nourriture (4e en Belgique) ;
  • l’urbanisation des espaces à risques, notamment côtiers (6e en Belgique), littoralisation des espaces productifs (1ère en France) ;
  • la mondialisation des flux (5e en Belgique) ;
  • l’étude de pays ou de régions (Afrique australe, 2de en France, espaces ruraux et Chine, 1ère en France).

Le travail peut se faire soit à l’échelle mondiale, soit sur des cas particuliers. 

 
Encadré 2. Quelques cas bien documentés 
Catastrophes
Processus récurrents
  • Atoll de Tuvalu et autres îles du Pacifique (Marshall, Salomon, Vanuatu…) menacées par la montée des eaux : mais attention aux récits fantasmés (voir Chevalier, 2017, ou cet article)
  • Village de Newtok, à la pointe de l’Alaska, qui repose sur un pergélisol dont la fonte s’accélère continuellement
  • Bangladesh : inondations liées à la montée du niveau de la mer et fonte des glaciers de l’Himalaya (+ cyclones) avec d’importantes migrations vers la capitale Dacca
  • Inde : îles du golfe du Bengale (ex : Lohachara) englouties suite à la fonte des glaciers de l'Himalaya
  • Philippines : touchées par des épisodes climatiques extrêmes, dont principalement des inondations, tempêtes et cyclones tropicaux
  • Afrique : sécheresse en Éthiopie, Somalie et Nigéria

 
Quels outils utiliser ?

Outre des textes, trois types d’outils semblent indiqués : les cartes, les images et les vidéos.

Les cartes offrent la possibilité de localiser les faits. Dans le domaine ici traité, les cartes ne sont guère abondantes : il s’agit le plus souvent de planisphères reposant sur les rares statistiques disponibles (comme le document 5) ou cherchant à classer les migrations selon leurs causes (le meilleur exemple trouvé est celui reproduit dans le document 11). Par contre, les cartes sur les cas locaux sont rares. 

Document 11. Une carte de synthèse : celle d’Alain Nonjon, 2012

alain nonjon planisphère

Source : Alain Nonjon, « Carte Migrations environnementales », Diploweb.com, 2012 

 

Les images peuvent souvent constituer un point d’accroche pour la thématique : on en trouve en ligne principalement sur deux thèmes : les inondations et les sécheresses. Attention toutefois aux messages qu’elles veulent transmettre, car beaucoup d’images accompagnent des réquisitoires ou des textes engagés. On peut aussi trouver quelques dessins comme ceux qui ont servi de base à la vidéo « Qui sont les réfugiés climatiques ? » de France TV Éducation (voir encadré 4).

 
Encadré 3. Quelles images utiliser pour illustrer les migrations environnementales ?

Il est difficile de trouver des illustrations libres de droits qui évitent l’écueil du catastrophisme ou de la caricature. Un sol craquelé n’est pas forcément le signe du changement climatique et les migrants environnementaux ne sont pas forcément des familles en hayons se déplaçant en file indienne dans un nuage de poussière, ou bien ayant de l’eau jusqu’à la taille et un baluchon sur les épaules.

France Diplomatie, le site du ministère français en charge des Affaires étrangères, met à disposition des usagers ses photothèques. Plusieurs photothèques sont utiles aux enseignants avec des images historiques (portraits du XVIIe au XXe siècles, rencontres diplomatiques et conférences internationales, Chine de 1947 à 1956, Algérie de 1950 à 1962, et bien d’autres thèmes), ou d’actualité (actualités diplomatiques, images de la France, rayonnement de la France à l’étranger…)

>>> Voir la page consacrée à ces banques d’images

Dans la rubrique climat, on trouve des photographies du Bangladesh et des Maldives, utilisables dans le cadre pédagogique, légendées et datées.

Frédéric de La Mure / ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 2015

Partir : maisons abandonnées suite au tsunami de décembre 2004 sur l’île de Mundoo, Maldives. Photographie : Frédéric de La Mure / ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 2015.

Frédéric de La Mure / ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 2015

Rester : buttes artificielles construites par l’ONG Friendship pour surélever des maisons au Bangladesh sur l’île de Kochkhali. Photographie : Frédéric de La Mure / ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 2015.

Le site propose de nombreuses autres images montrant des personnes déplacées ou des formes d’adaptation aux changements climatiques. On peut par exemple envisager d’approfondir le cas de l’île de Savar sur le Brahmapoutre, grâce à l’outil de recherche du site qui permet de générer une banque d’images : images d’actualité sur l’île de Savar. L’île fait l’objet d’une aide conjointe de l’ONG Friendship et de l’ambassade de France au Bangladesh pour lutter contre les effets des crues du fleuve et améliorer les conditions de vie des personnes déplacées.

Les deux images ci-dessus présentent l’avantage d’identifier des lieux de départ et les lieux d’arrivée des migrants mais elles ne montrent pas de personnes, or il est nécessaire d’incarner la migration, phénomène social et humain par essence. On peut donc sélectionner une troisième photographie qui présente deux hommes en train de travailler à la construction d’une maison. La photographie prend le contrepied de plusieurs idées reçues : les migrants ne sont pas tous jetés sur les routes dans un mouvement perpétuel, et leur destination n’est pas forcément à des milliers de kilomètres. Les 300 familles déplacées sur l’île de Savar, comme la majorité des migrants environnementaux, n’a franchi que quelques dizaines de kilomètres. Si les matériaux utilisés témoignent d’une relative précarité, la photographie n’est pas non plus misérabiliste.

Frédéric de La Mure / ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 2015

Deux hommes construisent une maison sur l'île de Savar après avoir quitté leur village inondé par la crue du Brahmapoutre. Photographie : Frédéric de La Mure / ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 2015.

Encadré : Jean-Benoît Bouron


 

Les vidéos semblent une des entrées les plus intéressantes, soit parce qu’elles présentent de courtes synthèses, soit parce qu’elles comportent des témoignages de trajectoires individuelles où l’accent est mis sur le vécu et les causes de déplacement. Les documents produits par des médias officiels nous apparaissent comme les mieux documentés et les plus corrects. 

 
Encadré 4. Quelques vidéos intéressantes

Un document de base : France TV Éducation, Les réfugiés climatiques - Décod'Actu, saison 1, 29-11-16 (2 :49) 

Autres documents généraux

Quelques études de cas


 
Quelles démarches privilégier ?​

Tout cours pourrait, à notre sens, articuler trois démarches en fonction des objectifs poursuivis :

  • pour la découverte du cas et une première analyse : travaux sur un ou plusieurs dossiers documentaires constitués par l’enseignant ;
  • pour la partie synthèse et mise au point des savoirs fondamentaux : une partie « classique » basée sur un dialogue professeur-élèves afin de préciser les concepts ou les processus ?
  • pour la partie éducation citoyenne : un débat qui peut notamment porter sur une ou deux idées reçues telles celles mises en évidence par Alexandra Yeh (voir encadré 1).

Par ailleurs, un point essentiel est d’apprendre aux élèves à s’interroger sur les sources des données ou sur la pertinence des documents utilisés. 

 

Conclusion 

Les migrations environnementales sont sans aucun doute un phénomène complexe, difficile à distinguer des autres migrations, car les causes naturelles se combinent le plus souvent à d’autres causes, économiques, sociales et politiques. Dans la grande majorité des cas, les migrations sont temporaires et se font à courte distance des lieux touchés. C’est la répétition de catastrophes et surtout l’incapacité matérielle d’y faire face qui pousse les gens à partir définitivement.

Cette complexité explique la difficulté rencontrée à pouvoir mesurer ces migrations.  Toutefois, cette réalité migratoire existe sur le terrain et bouleverse en profondeur la vie de nombreux êtres humains. Le processus risque aussi de croître avec les changements climatiques, ce qui conduit certains à céder au catastrophisme. C’est oublier un peu trop rapidement les capacités de résilience de nombreux peuples confrontés à des aléas naturels. C’est nier aussi la nécessité de mieux organiser la prévention, ce qui impose des moyens matériels beaucoup mieux répartis, à la fois spatialement parlant, et entre groupes d’individus pour pouvoir se prémunir des dangers, y faire face et après, se réorganiser. Ajoutons que les conséquences de ces migrations ne sont pas uniquement négatives à la fois sur les lieux de départ (en diminuant par exemple la pression sur l’environnement) et les lieux d’arrivée (en accroissant les forces de travail et la consommation, sur le même modèle que les migrations économiques). En tout cas, les cours de géographie ne peuvent plus ignorer cette question qui est très ancrée dans les territoires.

 


Bibliographie

Études générales
Quelques études de cas
Rapports
Cartes et atlas
Sitographie
Quelques vidéos

 

 

Bernadette MÉRENNE-SCHOUMAKER
Professeur ordinaire honoraire - Université de Liège

 

 

Mise en web : Jean-Benoît Bouron

Pour citer cet article :

Bernadette Mérenne-Schoumaker, « Les migrations environnementales : un nouvel objet d’enseignement », Géoconfluences, juillet 2020.
URL : http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/changement-global/articles-scientifiques/migrations-environnementales

 

Pour citer cet article :  

Bernadette Mérenne-Schoumaker, « Les migrations environnementales : un nouvel objet d’enseignement », Géoconfluences, juillet 2020.
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/changement-global/articles-scientifiques/migrations-environnementales