Déchet
Un déchet est un objet, ou une certaine quantité d'objets, qui a une valeur nulle ou négative pour son propriétaire. Celui-ci est prêt à s'en séparer gratuitement ou à payer pour en être débarrassé. Le déchet est une donnée sociale et un construit historique : alors que la nature fonctionne en cycles, et qu'une grande partie de l'humanité minimise ses déchets par réparation, réemploi ou recyclage, une petite partie de l'humanité produit une grande partie des déchets. Le fait de considérer quelque chose comme une ressource ou comme un déchet est une représentation. Cette représentation est variable par nature : les restes ménagers organiques peuvent être considérés comme des déchets dont il faut se débarrasser ou bien comme une ressource valorisable par le compostage. Les déchets ont aussi une histoire, récente, car avant l'âge industriel, presque rien n'était jeté. La science des déchets, de leur traitement et de leur valorisation, est la rudologie.
Le déchet est une marchandise à part. Sur le plan juridique, en droit français ou européen, il est défini par référence à l'abandon. Les conditions dans lesquelles un déchet peut devenir une marchandise sont floues car le concept de recyclage est mal défini sur les plans juridique et économique. La gestion des déchets comprend des activités de collecte, de transport, de tri, de stockage intermédiaire, de traitement, de stockage final, forme inquiétante de durabilité pour certains déchets. La valorisation désigne, dans le langage technique, la transformation d'un déchet en ressource, par exemple par le recyclage ou la production d'énergie (Dillenseger et al., 2024).
Un déchet est dit ultime lorsqu'il n'est plus susceptible d'être traité dans les conditions techniques et économiques du moment. La production de déchets est une externalité négative accompagnant la plupart des processus de fabrication. Les normes, règles et taxes visant à réguler cette production et à l'empêcher de devenir une pollution visent à internaliser les déchets.
La gestion des déchets est devenue depuis la fin du XXe siècle l'une des préoccupations environnementales majeures. La prise de conscience de l'envergure mondiale du problème est liée à la médiatisation de catastrophes de grande ampleur comme la formation d'un « continent de plastiques » ou « soupe de plastiques », dans l'océan Pacifique, et depuis dans d'autres océans. Le slogan Zéro déchet (sous-entendu : en décharge et en incinération) est l'un des mots d'ordre de la transition environnementale promue notamment à l'échelle des municipalités. San Francisco s'est ainsi dotée d'un programme de réduction des déchets ambitieux et précurseur en 2002, qui a abouti à 80 % de déchets valorisés par compostage ou recyclage (Le Monde, 2014).
Certains auteurs parlent aussi d'espaces-déchets pour traduire l'expression wasteland en anglais.
(ST) Dernières modifications (JBB) : novembre 2017, février 2024, septembre 2024.
Références citées
- Clément Dillenseger, Héloïse Gaboriaud, Margot Favreau et Aliénor de Viry, « Les décharges formelles et informelles en France, de la montagne de déchets à la colline végétalisée », Géoconfluences, novembre 2024.
Pour compléter avec Géoconfluences
- De plus en plus d'États interdisent les sacs plastiques dans le monde, brève de Géoconfluences, novembre 2017
- Marie-Noëlle Carré, « Buenos Aires, ou les territoires de la récupér-action », 2008.
- Fabrizio Maccaglia et Sylviane Tabarly, Gouvernance territoriale et gestion des déchets : l'exemple de la Campanie (Italie), 2008.
Pour aller plus loin
- Sociétés urbaines et déchets, veille du Réseau de recherche en sciences sociales sur les déchets. Voir : articles | ouvrages | thèses | filmographie | photographie | sites web
- N. Benelli, D. Corteel, O. Debary, B. Florin, S. Le Lay, S. Rétif, Que faire des restes ? Le réemploi dans les sociétés d’accumulation. Presses de Sciences-po, 2017, 112 p.
- Vies d'ordures, catalogue de l'exposition du MUCEM, mars 2017
- Joulian Frédéric , Tastevin Yann-Philippe et Furniss Jamie (dir.), 2016, Réparer le monde. Excès, restes et innovations, Revue Techniques & cultures.
- F. Maccaglia, « Planifier sans les citoyens. Résistance à l’action des pouvoirs publics en Sicile : l’exemple de l’incinérateur de Palerme (2002-2010) », in L. Bobbio, P. Melé, V. Ugalde (dir.), Entre conflit et concertation : gérer les déchets en France, en Italie et au Mexique, Lyon, ENS Editions, 2016, p. 117-137.
- Cirelli Claudia, Florin Bénédicte (dir.), Sociétés urbaines et déchets. Éclairages internationaux. Tours, PUFR, 2015, 450 p. [en archives ouvertes]
- F. Maccaglia, C. Cirelli, « Les politiques publiques des déchets à l’épreuve des contextes locaux : la difficile territorialisation de la proximité », dans M. Durand, Y. Djellouli, C. Noarine (dir.), Gestion des déchets. Innovations sociales et territoriales, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2015, p. 217-228.
- F. Maccaglia, « Les ressorts informels du gouvernement local : l’action municipale officieuse à Palerme », Géocarrefour, 2014, n° 3, p. 251-261.
- F. Maccaglia, « Trafic d’influence et privatisation de l’État : le cas de la passation des marchés publics dans la filière déchets en Sicile », Espaces et sociétés, 2013, n° 156, p. 13-33.