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Métropole (sens historique et politique)

Publié le 17/09/2025
Auteur(s) : Vincent Capdepuy, docteur en géographie, professeur d'histoire-géographie - académie de La Réunion
Ne pas confondre avec :
  • Métropole (grande ville ayant des fonctions de commandement)
  • Métropole (statut administratif en France)

En histoire et en géographie politique, la métropole est le territoire d’un État, particulièrement la France, par rapport à ses territoires d’outre-mer. Il est emprunté à l’histoire de la colonisation grecque. Signifiant littéralement la « cité-mère », la mētrópolis était une cité fondatrice, le foyer d’émigration pour les fondateurs une colonie – en grec, on disait une apoikía, un « habitat distinct/distant » –, qui était une cité indépendante. Il n’y avait pas de relation de domination. Le mot « métropole » a été repris en français pour désigner la France comme territoire colonisateur au XVIIIe siècle (Capdepuy, 2025). Montesquieu le dit dans L’esprit des lois : « L’extrême éloignement de nos colonies n’est point un inconvénient pour leur sûreté. Car si la métropole est éloignée pour les défendre, les nations rivales de la métropole ne sont pas moins éloignées pour les conquérir. »

Cependant, malgré la distance, les colons sont restés durablement et sincèrement attachés à cette mère-cité – comme le rappelait Raymond Vergès, député de La Réunion, le 12 mars 1946 dans son discours à l’Assemblée :

« Sans être aux antipodes, l’île de la Réunion se situe à une dizaine de milliers de kilomètres dans les mers du Sud, c’est-à-dire très loin de la métropole. Cependant nulle autre colonie ne s’y rattache par des liens plus étroits ni plus solides. Contrairement à toutes les terres d’outre-mer, la Réunion ne résulte pas, en effet, de notre installation pacifique ou guerrière chez des peuples consentants ou non consentants. Là-bas, il n’y avait personne. […] Depuis toujours aussi, nous avons demandé notre intégration à la France. »

Annales. Assemblée nationale constituante. Débats, vol. 3, p. 663, 12 mars 1946.

Ce qui fut fait le 19 mars 1946, avec la départementalisation de La Réunion, de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane. Deux mois auparavant, le 26 janvier 1946, le ministère des Colonies avait été rebaptisé ministère de l’Outre-mer ; mais la métropole est restée la métropole. Ni la départementalisation d’un côté, ou l’accès à des statuts divers pour les autres territoires d’outre-mer, ni l’indépendance des colonies, dont la dernière en date, celle du Vanuatu, a eu lieu en 1980, n’ont changé les usages. La décolonisation ne s’est pas traduite par une « démétropolisation ». Le 24 mai 2023, certes, un amendement proposé à l’initiative du député guadeloupéen Olivier Serva a été voté par l’Assemblée nationale pour remplacer le terme « métropole » par celui d’« Hexagone ». Il n’en reste pas moins qu’il y a toujours, pour l’instant, des sujets de baccalauréat portant la mention « Métropole, La Réunion, Mayotte, Antilles, Guyane ». Le mot, au demeurant très usité, peut être considéré comme la trace d’un rapport de domination et d’une décolonisation inachevée.

Dans les territoires d’outre-mer, les habitants de la métropole sont souvent appelés « métropolitains », ou « métro », tout simplement, quand ils ne sont pas qualifiés de zoreils, à La Réunion et en Nouvelle-Calédonie, ou de mzungu, à Mayotte.

Vincent Capdepuy, septembre 2025.


Références citées
  • Annales. Assemblée nationale constituante. Débats, vol. 3, p. 663, 12 mars 1946.
  • Capdepuy Vincent (2025), « Métropole », La Géographie, n° 1598 (automne 2025), p. 64–65.
  • Montesquieu, De l’esprit des loix, Genève, chez Barrillot & fils, tome 2, p. 292.
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