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Surtourisme

Publié le 12/06/2025
Auteur(s) : Emanuele Giordano, maître de conférences en géographie - université de Toulon
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Le surtourisme (overtourism en anglais), désigne les effets négatifs produits par une fréquentation touristique excessive dans certains lieux, à l’échelle du site, du quartier, ou de la ville.  Si les débats concernant les effets négatifs du tourisme ne sont pas nouveaux (Doxey, 1975), ces critiques ont aujourd’hui pris une ampleur sans précédent. Ce terme, inutilisé avant 2017, a ainsi connu depuis un énorme succès médiatique et est aujourd’hui couramment employé dans le débat scientifique et dans le cadre des politiques publiques.

Bien que plusieurs définitions aient été proposées, elles s'accordent à associer le surtourisme à une fréquentation « jugée excessive » en raison de ses conséquences sur l’environnement, les résidents et/ou l’expérience touristique (Knafou, 2023). Ainsi, en France, La Direction générale des entreprises (2024) définit le surtourisme comme : « une fréquentation d’une destination ou d’un site touristique jugée excessive, pour au moins l’une de ces trois raisons :

  • des dommages causés à l’environnement, à la biodiversité, ou encore au patrimoine naturel et/ou historique de la destination ou du site ;
  • une dégradation de la qualité de vie de la population locale se traduisant par une croissance significative au sein de cette population de la non acceptabilité du tourisme ;
  • des conditions de visite nuisant à la qualité de l’expérience touristique ».

Cependant, le succès croissant de la notion de surtourisme s'accompagne également de nombreuses critiques, principalement en raison d’un certain flou conceptuel. La nature très générale de la définition rend le concept vague et peu opérationnel. Il en résulte que le terme « surtourisme » est aujourd'hui utilisé dans des contextes très différents, pour définir des problèmes quantitativement et qualitativement variés, qui ne sont pas toujours exclusivement générés par l’activité touristique (Koens et al., 2018). À cela s’ajoute la difficulté de définir à partir de quels seuils une fréquentation est jugée excessive, et à qui revient leur définition. Ainsi, si le surtourisme « reflète davantage les limites du changement acceptable exprimées par une population de référence, celle-ci étant le plus souvent celle des habitants permanents » (Gravari-Barbas, 2021), il est à noter qu’au sein d’une même population, la vision du tourisme et de ses effets est rarement homogène. Plusieurs études montrent que, chez les résidents, l’appréciation des effets de l’activité touristique sur la qualité de la vie n’est pas uniforme, mais dépend de plusieurs facteurs, par exemple la corrélation entre leurs revenus et l'activité touristique (Uysal et al., 2016).

Enfin, d’autres expriment des critiques encore plus radicales envers le concept, accusé d’être la dernière manifestation d’une tourismophobie aux origines anciennes (Gay, 2023). Sa croissante médiatisation serait donc l’expression d’un « mépris de classe » qui tend à stigmatiser les pratiques touristiques des classes populaires, incapables de s’approprier des normes du « bon touriste », mobilisé par des acteurs économiques et sociaux dans des logiques de distinction et de protection d’un entre-soi élitiste (Knafou, 2023). Autour de ces débats, plusieurs positions ont émergé : certains chercheurs, bien qu'ils reconnaissent la nécessité d'une clarification conceptuelle, jugent le terme encore pertinent (Mihalic, 2020), tandis que d’autres, au contraire, préfèrent mobiliser d’autres concepts (gentrification touristique, touristification) pour analyser les inégalités économiques, sociales et environnementales qui structurent les mobilités touristiques (López-Gay et al., 2021).

En effet, au-delà des débats sur la pertinence de la notion de surtourisme, il reste indéniable que, dans certaines destinations, le tourisme a transformé le logement, le commerce et les espaces publics pour répondre aux besoins des visiteurs au détriment de la qualité de vie des résidents. Le centre historique de Venise, une des destinations touristiques les plus connues et fréquentées au monde, est un exemple emblématique de ces dynamiques. En raison des pressions que l’activité touristique exerce sur les résidents, la ville a fréquemment été décrite comme le « pire des scénarios » dans la littérature sur la planification touristique et un cas exemplaire de « surtourisme ».

Emanuele Giordano, mai 2025. Dernière modification : juin 2025.


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