Espace périurbain
>>> Voir : Périurbanisation
L'espace périurbain est l'espace situé en périphérie d’une agglomération et dont une part importante des habitants travaille dans cette agglomération.
Au sens strict, les espaces périurbains sont les espaces polarisés par une agglomération urbaine (notamment par les mobilités domicile-travail), mais dont le bâti n’est pas en continuité avec celle-ci. Étymologiquement, le mot désigne les espaces situés autour de la ville, mais d’autres mots désignent déjà des espaces situés hors du noyau de peuplement initial : les faubourgs et les banlieues. Contrairement au périurbain, ces espaces sont caractérisés par un bâti continu, sans espaces ouverts, avec l’agglomération. L’étalement urbain s’y effectue non pas en nappe continue mais en mosaïque avec une alternance d’espaces bâtis et d’espaces non-bâtis.
Par extension, dans un sens affaibli mais commode, on appelle parfois aussi espaces périurbains la dernière couronne d’urbanisation, la moins dense, même s’il y a continuité du bâti, parce que les paysages y sont les mêmes que dans le périurbain au sens strict. Dans cette acception, certains utilisent le terme de suburbain, d'origine anglophone (suburb signifie banlieue), pour distinguer la partie du périurbain située au-delà de la lisière de l'agglomération.
Deux formes urbaines dominent le périurbain : la zone d’activité et le lotissement pavillonnaire, même si d’autres formes existent : petit habitat collectif, quartier résidentiel fermé, noyaux villageois anciens, centralités secondaires. Le périurbain accueille aussi bon nombre d'activités, résultat du desserrement urbain (exurbanisation) ou d'implantations ex nihilo : surfaces commerciales, centres de recherche, zones d'activités diverses. Les espaces non bâtis représentent une part importante des surfaces.
Dans les pays développés, le périurbain comme phénomène émerge dans les années 1950-1960. Les premiers mouvements s’observent avec le développement d’un réseau de train et de tramways ruraux très dense entre 1880 et 1930, permettant l’essor de nouveaux noyaux de peuplement autour des petites stations périphériques à l’écart des agglomérations. Mais c’est la massification de l’usage de l’automobile qui entraîne la croissance démographique rapide et continue des espaces périurbains pendant plusieurs décennies (1945-1975). Alors que l’exode rural s’arrête dans la plupart des pays après 1975, la périurbanisation se poursuit jusqu’à aujourd’hui.
En France, le périurbain devient une catégorie statistique officielle de l’Insee en 1996. La statistique nationale a toujours des difficultés à caractériser l’espace périurbain, ce qui se traduit par plusieurs définitions successives sur un pas de temps très court par rapport au rythme décennal des recensements : ZPIU, zonage en aire urbaine de 1996 et de 2010, zonage en aire d’attraction des villes de 2020. Ce dernier ne parvient par réellement à saisir le fait périurbain : il est défini par l’aire d’attraction d’une ville, mais celle-ci s’étend très loin dans l’espace rural et de fait, la presque totalité des espaces ruraux sont compris dans l’aire d’attraction des villes définie par l’INSEE : 51% de la population vivrait dans un pôle urbain, 43 % dans les « couronnes », définies de façon très extensive, et 6 % hors de toute attraction urbaine. Selon un autre zonage adopté en 2021, celui de la grille de densité, les communes de « densité intermédiaire » représenteraient 30 % de la population, ce qui inclue des espaces périurbains mais pas uniquement puisque certaines banlieues ou petites villes peuvent relever de cette définition, et que certains espaces périurbains peuvent être classés dans la catégorie des communes peu denses (30 % de la population française en 2021).
Entre urbain et rural, certains auteurs estiment que l’espace périurbain pourrait être considéré comme un « tiers-espace » sui generis, ni urbain, ni rural, ou à la fois urbain et rural.
Plusieurs critiques sont faites au périurbain comme modalité de la croissance urbaine : critiques socio-politiques (déficit en espaces publics, choix de l’entre-soi), esthétique (uniformité de la construction pavillonnaire voire laideur des zones commerciales), économique (coût de la dépendance automobile pour les particuliers et de la desserte en réseaux pour la collectivité) ou encore environnemental (consommation d’espaces agricoles). Lorsqu’elles émanent des citadins et non des périurbains eux-mêmes, ces critiques peuvent relever d’une assignation spatiale voire d’une forme de mépris de classe, dans lequel l’espace de résidence, qu’il soit subi ou choisi, remplacerait la classe sociale. Les auteurs qui étudient le vote périurbain insistent sur la nécessaire prudence au sujet d’une corrélation entre espaces périurbains et vote d’extrême droite (Girard, 2017). S’il y a bien surreprésentation du vote Rassemblement National dans les espaces périurbains à toutes les élections récentes, d’autres facteurs entrent en jeu : le périurbain de Nantes ne vote pas comme celui de Toulon ni comme celui de Nancy, et l’explication du vote par le lieu de résidence peut relever d’un raisonnement spatialiste.
Les études récentes insistent sur la profonde diversité des pratiques habitantes qui produisent ces nouveaux territoires.
(collectif), dernières modifications (JBB) : mai 2022, février 2023.
Liens externes
- Une vidéo du CNRS : « Le périurbain, de ville compacte à ville diffuse » , un épisode de la série « Urbanisme Habitat Société » avec l’intervention de Sandrine Berroir (Université Paris Diderot), CNRS Images, 2013, 10 min.
- Éric Charmes, Lydie Launay et Stéphanie Vermeersch, « Le périurbain, France du repli ? », La Vie des idées, 28 mai 2013.
- Violaine Girard, Le vote FN au village. Trajectoires de ménages populaires du périurbain, Éditions du Croquant, coll. « Sociopo », 2017, 314 p. Compte-rendu d’Alexandre Chevalier dans Lectures.
- Jacques Lévy, « Liens faibles, choix forts : les urbains et l’urbanité », La Vie des idées, 29 mai 2013
Pour compléter avec Géoconfluences
- Jean-Benoît Bouron et Nathalie Reveyaz, « Les aires urbaines en France en classe de troisième : que faire de cet objet géographique aujourd’hui ? », Géoconfluences, avril 2023.
- Olivier Bouba Olga, « Qu’est-ce que le « rural » ? Analyse des zonages de l'Insee en vigueur depuis 2020 », Géoconfluences, mai 2021.
- Claire Fonticelli, « La densification sous contrainte : bâtir des immeubles dans le périurbain francilien », Géoconfluences, avril 2020.
- Claire Aragau « Le périurbain : un concept à l’épreuve des pratiques », Géoconfluences, avril 2018.
- Catherine Didier-Fèvre, « La nuit : une nouvelle frontière pour les jeunes des espaces périurbains ? », Géoconfluences, avril 2018.
- Pierre Pistre et Frédéric Richard, « Seulement 5 ou 15 % de ruraux en France métropolitaine ? Les malentendus du zonage en aires urbaines », Géoconfluences, avril 2018.
- Lou Herrmann, « Le lotissement en France : histoire réglementaire de la construction d’un outil de production de la ville », Géoconfluences, avril 2018.