Vous êtes ici : Accueil / Articles scientifiques / Dossiers thématiques / Géographie de l'école, géographie à l'école / Géographie à l'école / Les aires urbaines en France en classe de troisième : que faire de cet objet géographique aujourd’hui ?

Les aires urbaines en France en classe de troisième : que faire de cet objet géographique aujourd’hui ?

Publié le 03/04/2023
Auteur(s) : Jean-Benoît Bouron, agrégé de géographie, responsable éditorial de Géoconfluences - DGESCO, ENS de Lyon.
Nathalie Reveyaz, agrégée de géographie, IA-IPR d'histoire-géographie - académie de Grenoble

Mode zen PDF

Les aires urbaines restent un objet d’étude dans le programme de troisième, alors que leur existence statistique s’est achevée en 2020 avec le renouvellement des zonages par l’INSEE. On peut se saisir de ce changement pour réfléchir à la façon d’enseigner le fait urbain, en insistant moins sur les catégories statistiques et davantage sur le vécu des habitants.

Bibliographie | mots-clésciter cet article

Le programme scolaire de 2015, modifié en 2020 (accessible ici : B.O. n° 31 du 30 juillet 2020, p. 89), s’ouvre, en classe de troisième, sur un thème intitulé « Dynamiques territoriales de la France contemporaine ». Il comporte trois sous-thèmes dont le premier est « Les aires urbaines, une nouvelle géographie d’une France mondialisée. » La colonne Démarches et contenus d’enseignement précise : « La géographie des aires urbaines permet de sensibiliser les élèves à la diversité des espaces (centraux, péricentraux, périurbains, suburbains) concernés par l’urbanisation et aux relations entre les aires d’influences urbaines. » On le comprend immédiatement, et ce point est très important pour la suite, le programme ne demande pas à traiter les aires urbaines pour elles-mêmes, mais pour affiner la connaissance du fait urbain par les élèves, dans la continuité des programmes de sixième et de quatrième. Aires urbaines est d’ailleurs employé au pluriel. Les recommandations de mise en œuvre incitent explicitement à réaliser des schémas et des croquis, et de fait, en classe comme dans les manuels scolaires, le schéma théorique d’une l’aire urbaine selon la définition de l’INSEE est devenu un incontournable. Les recommandations introduisent aussi une précision importante : il s’agit de traiter les « aires d’influences urbaines » et non pas la notion d’« aire urbaine » qui correspondait également, en 2015, à une catégorie statistique de l’INSEE.

Les aires urbaines, au sens statistique du terme, n’existent plus aujourd’hui. Ce zonage, en vigueur depuis 1996, a été abandonné en 2020. À cette date, l’INSEE l’a remplacé par un nouveau zonage, les aires d’attraction des villes. Les programmes du collège ont été modifiés pendant l’été 2020, avant les publications de l’INSEE d’octobre 2020 rendant officielle la nouvelle terminologie. Le programme de troisième conserve l’expression « aires urbaines », ce qui atteste que la dimension statistique de la notion n’est pas celle qui est attendue dans la mise en œuvre dans les classes. Ce n’est pas sans interroger la pertinence de l’usage du schéma théorique de l’aire urbaine pour fixer la connaissance et la représentation, par les élèves, des dynamiques territoriales en France.

L’objet de ce texte est de démontrer que les attentes du programme n’engagent nullement à étudier le contenu des délimitations statistiques de l’INSEE, et qu’elles incitent plutôt à aborder les aires urbaines par des entrées concrètes, telles que les mobilités et les paysages. Il s’agit enfin de nous interroger sur les outils mobilisés pour l’enseignement des dynamiques urbaines en France en troisième.

 

1. Ne pas remplacer l’enseignement des aires urbaines par celui des aires d’attraction des villes

Une interprétation du programme identifiant « les aires urbaines » à la catégorie de l’INSEE correspondante conduirait à se contenter de remplacer simplement « aires urbaines » par « aires d’attraction des villes ». C’est le parti-pris de la plupart des manuels scolaires, dans leurs éditions mises à jour après 2020. Cette démarche repose sur une intention prêtée au programme, mais ce n’est qu’une interprétation. Arrêtons-nous, toutefois, sur ce que contraindrait à faire, avec les élèves, une géographie des aires d’attraction des villes (encadré 1).

 
Encadré 1. Que sont les aires d’attraction des villes ?

Comme les aires urbaines, les aires d’attraction des villes regroupent deux espaces de nature très différente : le pôle urbain, qui correspond grossièrement à une agglomération urbaine, et la couronne périurbaine, qui regroupe des espaces dont le bâti n’est pas contigu à celui de l’agglomération, mais dont une partie des habitants font quotidiennement le trajet vers la ville-centre pour aller travailler. Toutefois, au-delà de cette similitude de fond, ces deux espaces sont définis différemment dans les deux zonages. Dans le zonage en aires urbaines, le pôle urbain correspondait à une unité urbaine (définie par un seuil d’habitants associé à la continuité du bâti) regroupant un nombre minimal d’emplois. Dans le zonage en aires d’attraction des villes, le pôle est défini grâce à la grille de densité, qui classe les communes en fonction de leur densité à partir d’un carroyage. La définition des couronnes périurbaines diffère également : pour les aires urbaines, une commune était polarisée lorsqu’au moins 40 % de ses actifs travaillaient dans l’aire urbaine, y compris dans une autre commune polarisée. Dans les aires d’attraction des villes, ce seuil est abaissé à 15 %, mais seuls les actifs travaillant dans le pôle urbain sont pris en compte, alors que précédemment, les actifs travaillant dans une autre commune polarisée étaient inclus.

Document 1. Aires d’attraction des villes en 2020 selon le nombre d’habitants en 2017 d’après l’INSEE

aires d'attraction des villes


 

On le voit dans l’encadré 1, même en simplifiant autant que possible les définitions de l’INSEE, elles obligeraient à s’attarder sur les détails techniques de la fabrique des statistiques. En plus de dessiner une géographie de la France aride et désincarnée, cela ne permet que façon trop allusive de comprendre les dynamiques territoriales de la France contemporaine, ce qui est l’objectif du thème.

Notre propos n’est aucunement de remettre en cause la travail de l’INSEE, mais de rappeler que, concernant en particulier les zonages, qu’il s’agisse du précédent (aires urbaines) ou de l’actuel (aires d’attraction des villes), celui-ci n’a pas vocation à devenir le contenu du cours. La connaissance de ces zonages fait évidemment partie du bagage scientifique approprié par les professeurs. Comme toute connaissance scientifique, celle-ci n’est pas nécessairement transférée en l’état dans la mise en œuvre des programmes et dans les choix pédagogiques opérés par l’enseignant (démarches, sélection des documents, évaluation). Géoconfluences a publié plusieurs ressources destinées à explorer la construction par l’INSEE de ses statistiques (Bouba-Olga, 2021 et 2022, Bouron, 2023). L’expression elle-même, « aires d’attraction des villes », peut être simplement considérée en classe comme une classification de l’INSEE, et sans entrer dans les détails de sa fabrication, les cartes produites (document 1) permettent de conduire une analyse géographique avec les élèves.

Au-delà de tous ces écueils, l’enseignement des aires urbaines en tant que catégorie statistique, n’est pas une attente du programme. D’ailleurs, la ressource d’accompagnement publiée par Éduscol ne recommande nullement d’entrer dans le détail de la construction statistique des aires urbaines.

 

2. Les aires urbaines : une lecture du programme

« La géographie des aires urbaines permet de sensibiliser les élèves à la diversité des espaces (centraux, péricentraux, périurbains, suburbains) concernés par l’urbanisation et aux relations entre les aires d’influences urbaines. ». Dans cette formulation, les aires urbaines ne sont pas une fin en soi. Les attentes du programme distinguent deux échelles, intra-urbaine et interurbaine. À l’échelle intra-urbaine, la typologie présentée – espaces « centraux, péricentraux, périurbains et suburbains » – ne correspond pas aux zonages de l’INSEE. Elle est à la fois morphologique (forme du bâti), paysagère et fonctionnelle (liée aux pratiques, notamment les mobilités). À l’échelle interurbaine, avec les « relations entre les aires d’influences urbaines », il s’agit d’étudier la façon dont des villes différentes tailles sont reliées entre elles, sur le plan matériel (par les axes et les réseaux de transport) et sur le plan fonctionnel (les relations de domination que les principales métropoles peuvent exercer sur les villes moins influentes). Dans ce texte, c’est l’échelle intra-urbaine qui retiendra notre attention.

La typologie du programme permet de remobiliser la notion d’habiter, c’est-à-dire du vécu des habitants, que les élèves ont déjà rencontrée tout au long du cycle 3. Les « exemples concrets », cités parmi les démarches de mise en œuvre, vont bien dans le sens d’une géographie du quotidien et des espaces de vie.

Les mobilités sont au cœur de la question au programme. C’est l’accroissement continu des mobilités domicile-travail (en nombre d’actifs concernés et en distance parcourue quotidiennement) qui a modifié la morphologie des périphéries urbaines et généré des paysages nouveaux (encadré 2).

 
Encadré 2. Les mobilités déterminent l’urbanisation et forgent les paysages

En France, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale voire jusqu’aux années 1970, et malgré l’extension des banlieues à l’âge industriel, la ville pouvait être considérée comme une unité de peuplement relativement autonome et facile à distinguer des espaces ruraux. La transition entre l’urbain et le rural se faisait dans les faubourgs et les banlieues, marqués par un bâti plus lâche que les centres, par un maintien de fonctions agricoles (petit élevage, jardinage) et surtout artisanales.

C’est l’accroissement des mobilités quotidiennes, pendant ce qu’il est convenu d’appeler les « trente glorieuses », et plus encore dans la période suivante jusqu’à aujourd’hui, qui a fait naître, autour des banlieues déjà constituées, un espace indéfini, de plus en plus vaste, ni complètement urbain, ni tout à fait rural. La façon de les nommer a donné lieu à des hésitations, du périurbain au rurbain (Bauer et Roux, 1976) en passant par le suburbain sous l’influence des géographes anglophones étudiant l’Amérique du Nord où le phénomène a été plus précoce et plus ample.

Ces mobilités quotidiennes sont la conséquence d’une mobilité résidentielle, c’est-à-dire de déménagements, majoritairement depuis l’intérieur vers l’extérieur de l’agglomération. La motorisation croissante des ménages leur permet de se procurer des logements plus grands et de passer d’un logement collectif (l’immeuble) à un logement d’une seule famille (la maison dite individuelle). Il peut s’agir aussi d’un moment d’accès à la propriété, qui revêt en France une importance sociale et symbolique très importante, encouragée par les pouvoirs publics (Herrmann, 2018).

Les paysages traduisent ces évolutions. Les paysages périurbains sont marqués par l’automobile : la desserte routière est très fine, l’habitat est peu dense avec plusieurs places de stationnement pour chaque ménage, l’offre commerciale quitte les centres-villes pour occuper de vastes espaces en périphérie (Le Clec’h, 2020). C’est l’urbanisme en « boîtes à chaussures » : des entrepôts de grande taille entourés par de vastes parkings reliés entre eux par des ronds-points. Au-delà des lisières urbaines, les espaces ruraux n’échappent pas aux transformation : le lotissement pavillonnaire en est un marqueur paysager omniprésent.


 

Un débat a existé, et se poursuit, en géographie sur la façon de nommer les types d’espaces situés dans un gradient de l’urbain au rural. Le programme scolaire s’en fait l’écho, sauf le terme rurbain dont l’usage scientifique a été progressivement abandonné. La démarche part des espaces centraux avec un gradient décroissant d’urbanité. Les espaces centraux sont constitués du noyau urbain (le centre historique) ou par la commune-centre, c’est-à-dire la commune qui donne son nom à toute l’agglomération. Les espaces péricentraux regroupent à la fois les centralités secondaires (La Défense à Paris, la Part-Dieu à Lyon) et les communes de banlieue. Le périurbain désigne généralement les espaces urbanisés sans continuité de bâti avec l’agglomération, mais ici, le terme renvoie plutôt aux extensions récentes de l’agglomération, et au paysage particulier qui leur est associé : entrepôts, zones commerciales, lotissements pavillonnaires. Le terme suburbain, habituellement utilisé pour les villes nord-américaines (en référence aux suburbs) pour décrire à la fois les banlieues et le périurbain, reste rare dans la géographie française. Dans le programme de troisième, il désigne les espaces situés au-delà des limites de l’agglomération (les lotissements en périphérie des noyaux villageois, les espaces ruraux dont les habitants sont des navetteurs quotidiens vers le centre). Une aire urbaine ne comprend donc pas que des espaces urbains mais de l’urbain, du périurbain et du rural polarisé.

Les mobilités sont donc une bonne entrée dans la compréhension des dynamiques territoriales de la France contemporaine. La typologie présentée dans le programme (le gradient du centre vers le suburbain) n’est pas figée dans l’espace et dans le temps, mais bien le résultat de deux dynamiques simultanées : les mobilités résidentielles et les mobilités quotidiennes. Ce sont elles qui ont transformé tous les espaces intermédiaires entre l’urbain et le rural. Pour comprendre ce que sont les aires urbaines, l’élève peut retenir que l’espace périurbain est l’espace d’urbanisation diffuse, dont une part importante des habitants travaille dans cette agglomération. Le professeur peut se saisir du périurbain comme entrée dans une géographie de la mobilité en lien avec les impératifs de transition écologique : si l’étalement des banlieues est à relier à l’avènement du train et de la bicyclette, l’avènement du périurbain est lié à la massification de la voiture individuelle. C’est l’un des faits majeurs de compréhension de bien des questions d’aménagement actuelles (mobilités douces, pollution de l’air, accessibilité à l’emploi et aux services, ségrégation et justice spatiale…).

L’étude des dynamiques territoriales dans les aires urbaines ne peut pas se faire sans aborder les mobilités intra-urbaines. Du centre vers la périphérie, la diversité des modes de transport va décroissant, laissant progressivement la place à un usage presque exclusif de la voiture. Les mobilités se font principalement à l’intérieur de l’agglomération (document 2). Depuis le début du XXIe siècle, les municipalités multiplient les projets de réseaux de transports en site propre : tramway (document 3) ou bus à haut niveau de service (BHNS). Évoquer cette question d’aménagement urbain permet d’aborder l’étude des paysages urbains pour comprendre le fonctionnement d’une aire urbaine.

Le travail sur les mobilités est l’occasion de nuancer une vision du périurbain comme dépendant exclusivement du centre. Tous les périurbains ne travaillent pas dans le centre, la majeure partie d’entre eux se déplacent à l’intérieur de leur secteur périurbain ou vers un autre secteur (document 2). Les travaux de recherche récents insistent sur les centralités secondaires au sein des aires urbaines (Didier-Fèvre 2019 ; Ghorra Gobin, 2020). Cette polycentralité des aires urbaines concerne un très grand nombre d’élèves vivant dans le périurbain, qui ne vont pas au collège dans le pôle urbain mais bien dans des polarités secondaires, surtout dans les aires urbaines grandes et moyennes.

Document 2. Les mobilités domicile-travail dans l’aire urbaine de Lyon (2016)

mobilités dans l'aire urbaine de Lyon

Source des données : Descroux Thibaud, 2016. Enquête déplacements 2015 de l’aire métropolitaine lyonnaise. Tiré de Didier-Fèvre, 2019 (voir l'article).

Document 3. Le tramway de Besançon, place de la Révolution, au cœur du centre historique de la ville (2014)

tramway besançon

Cliché : Raymond Woessner, 2014 (voir l’article).

 

3. Peut-on repenser les outils et les démarches ?

Le propos est ici de suggérer des supports et des outils possibles, sans exhaustivité ni volonté prescriptive : schéma, photographie, image satellite.

3.1. Du schéma normatif à la carte mentale

L’étude des aires urbaines, en classe et dans les manuels scolaires, s’appuie très souvent sur le schéma théorique d’une aire urbaine, en présentant les différents types d’espaces en auréole : ville-centre, banlieue, périurbain, rural. Ce schéma reprend en fait implicitement le zonage en aires urbaines de l’INSEE avec son pôle urbain et ses communes polarisées formant une couronne périurbaine. Ce schéma tend à devenir normatif. D’autres représentations sont possibles, par exemple en s’appuyant sur l’expérience des élèves. On peut s’inspirer du travail de Catherine Didier-Fèvre dans sa thèse sur les mobilités des lycéens (document 4) pour l’adapter au vécu des élèves de troisième. Le schéma peut ainsi être construit collectivement à partir des déplacements quotidiens des élèves.

Document 4. Essai de schématisation du territoire de vie d’un adolescent du périurbain

territoire de vie d'un adolescent périurbain

Les mobilités d’un adolescent périurbain francilien dessinent une centralité décalée par rapport à l’habituel schéma de l’aire urbaine : le centre est ici le domicile de lu lycéen ou de la lycéenne, et le pôle urbain est l’une des destinations possibles de ses sorties quotidiennes (pour aller au lycée) ou hebdomadaires. Source : D'après Didier-Fèvre C. 2015. The place to be ? Vivre et bouger dans les « entre-deux » : jeunes et mobilités dans les espaces périurbains. Université Paris-Nanterre-La Défense. Prix Mobilithèse du Forum Vies Mobiles 2017. Repris sur Géoconfluences dans Didier-Fèvre, 2018 (lire l’article).

 

3.2. De la photographie de paysage au transect urbain ou à la carte sonore

On peut utiliser la banque d’images de Géoconfluences pour trouver une photographie de paysage. En sélectionnant les mots clés : « photographie », « paysage » et « France », on obtient 59 résultats dont plusieurs permettent de visualiser les différentes composantes paysagères d’une aire urbaine. On trouve une photographie du centre de Lyon prise depuis la banlieue (document 5a) et un paysage suburbain de la même aire urbaine (document 5b).

Document 5a. Paysage métropolitain. Vue du quartier de la Confluence à Lyon depuis Sainte-Foy-lès-Lyon

paysage urbain, la confluence vue de sainte foy

La photographie est prise en direction du nord-est depuis la rive droite de la Saône, laquelle n'est pas visible sur la photographie. Tout le centre de la photographie correspond à la partie sud de la Presqu’île, le quartier de la Confluence. La tour Ycone est bien visible au deuxième plan et, au centre de l’image, derrière les toits bombés du centre commercial, la tour BelvY (voir figure 8). On devine au troisième plan le Rhône, qui sépare le quartier du 7e arrondissement. Les tours de la Part-Dieu sont visibles à l’arrière-plan, sur la gauche. Cliché : Geoffrey Mollé, 2019 (lire l’article).

Document 5b. Le « suburbain », un paysage rural. Thurins (Rhône), vu de la route d’Yzeron

suburbain = rural

Cliché : Catherine Didier-Fèvre, avril 2019 (lire l’article).

 

On peut aller plus loin en s’inspirant des travaux de l’historienne des formes urbaines Anne-Sophie Clémençon, pour réaliser un transect urbain photographique (Clémençon, 2019). Il s’agit de mettre en images la succession des paysages observables depuis la périphérie vers le centre d’une ville : les élèves peuvent profiter d’un trajet en train, en voiture, en vélo, ou même d’une navette quotidienne en car scolaire, pour collecter des paysages, sous de la forme de photographies, de dessins, ou même d’enregistrements sonores. Pour ces derniers, on peut s’inspirer des paysages sonores de Violaine Jolivet (2015) pour réaliser une carte ou un schéma d’une aire urbaine saisie par les sons.

3.3. L’image satellite pour saisir la morphologie urbaine

Le site Géoimage du CNES propose un nombre très varié de ressources construites sur l’interprétation de l’imagerie satellite. Cet outil se révèle particulièrement adapté à l’étude de la morphologie urbaine, c’est-à-dire de la façon dont s’agence le bâti, les réseaux viaires, et les espaces libres, observés depuis le ciel verticalement. Les différents types de morphologies composant une aire urbaine sont faciles à identifier, dès le niveau troisième. L’exemple d’Agen (document 6) développe une analyse pour chaque zoom indiqué sur l’image, du centre historique à la commune périurbaine de Bon Encontre en passant par le péricentre.

Document 6. L’aire urbaine d’Agen saisie par l’imagerie satellite

Agen image satellite

Cette image provient du satellite Pléiades, elle a été prise le vendredi‎ ‎8‎ ‎novembre‎ ‎2013. Contient des informations PLEIADES © CNES 2013, Distribution Airbus DS, tous droits réservés. Usage commercial interdit. Cliquez ici pour accéder à la ressource sur le site Géoimage.

 

Conclusion

Le programme, dans sa formulation, ne préconisait nullement d’étudier les aires urbaines en fonction de la définition qu’en donnait l’INSEE au moment de sa rédaction. Pourtant, cette approche a parfois pu être privilégiée dans la mise en œuvre. Or, l’irruption des aires d’attraction des villes permet de réfléchir concrètement à ce qu’on attend d’une géographie des aires urbaines en France en classe de troisième. L’important à retenir, pour comprendre « les dynamiques territoriales de la France contemporaine », n’est pas le seuil statistique à partir duquel une commune est polarisée. En revanche, le vécu des habitants, saisi par les mobilités quotidiennes et par les paysages qu’elles traversent, permet de dessiner un portrait des types d’espaces composant les aires urbaines, dans un gradient allant des centres urbains aux espaces ruraux en partie polarisés. De nombreux outils existent pour sortir des représentations stéréotypées de ces différents paysages ; nous avons tenté d’en suggérer quelques-uns sans limiter la liste des possibles dans les choix ni dans les adaptations envisageables.

 


Bibliographie

Mots-clés

Retrouvez les mots-clés de cet article dans le glossaire : aires d’attraction des villes | aires urbaines | géographie du quotidien | géographie scolaire | mobilités domicile-travail | paysages | périurbain | unité urbaine.

 

 

Jean-Benoît BOURON

Agrégé de géographie, responsable éditorial de Géoconfluences, DGESCO, École normale supérieure de Lyon

Nathalie REVEYAZ

Agrégée de géographie, IA-IPR d'histoire-géographie

 

 

Édition et mise en web : Jean-Benoît Bouron

Pour citer cet article :  

Jean-Benoît Bouron et Nathalie Reveyaz, « Les aires urbaines en France en classe de troisième : que faire de cet objet géographique aujourd’hui ? », Géoconfluences, avril 2023.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/geographie-espaces-scolaires/geographie-a-l-ecole/aires-urbaines-france-troisieme