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Le charbon, une consommation toujours en hausse en dépit du changement climatique

Publié le 21/11/2024
Auteur(s) : Sinan Efendioglu, professeur agrégé de géographie, ancien élève de l’École Normale Supérieure de Lyon - académie de Toulouse
La consommation mondiale de charbon a doublé en quarante ans. Au cours des dix dernières années, malgré la multiplication des engagements à l'égard du climat, la consommation est restée stable à son maximum historique. Les efforts consentis par certains États sont gommés par la forte croissance de la Chine dans la production et dans la consommation mondiale : ce pays consomme aujourd'hui à lui seul la moitié des ressources mondiales en charbon.

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Le 12 novembre 2024, la centrale à charbon de Saint-Avold, en Meurthe-et-Moselle, a repris du service afin de faire face à la hausse de la consommation électrique hivernale. Dans un contexte de grandes conventions mondiales pour le climat, les discours de verdissement ne semblent pas peser lourd face aux impératifs énergétiques. Le charbon occupe toujours, en effet, une place prépondérante dans le bouquet énergétique mondial. Il correspond à un quart de l’énergie primaire mondiale et ajouté aux autres ressources fossiles, on dépasse les trois quarts. Les dernières données rendent compte d’une consommation mondiale de charbon qui continue de plafonner autour de 8 milliards de tonnes par an, soit une tonne par personne en moyenne. Cette ressource, qui était au cœur de la première révolution industrielle à partir de la fin du XVIIIe siècle, est aujourd’hui inégalement utilisée à l’échelle de la planète, selon les contextes économiques et politiques qui lui laissent une place de choix ou bien le considèrent comme une ressource énergétique à remplacer à plus ou moins long terme.

Document 1. La consommation mondiale de charbon a doublé en quarante ans

Charbon consommation mondiale par pays et région

Le 30 septembre 2024, le Royaume-Uni annonce avoir sorti le charbon de son bouquet énergétique (Pécout, 2024). Cela fait écho à la promesse signée par les États membres du G7 suite à la COP28 pour le climat. Le Canada et les États-Unis pour l’Amérique du nord ; le Japon en Asie ; et la France, l’Italie, l’Allemagne et le Royaume-Uni se sont engagés à l’horizon 2035 à ne plus produire d’énergie à partir du charbon. La fermeture de la dernière mine de charbon au Royaume-Uni, dans les Midlands de l’Est, rend compte d’une trajectoire entamée par grand nombre d’États développés à l’échelle de la planète dans le cadre d’une transition énergétique.

Dans le détail, l’accord du G7 n’interdit nullement de continuer à produire de l’électricité à partir du charbon, à condition de l’associer à des dispositifs de captage du dioxyde de carbone dans l’atmosphère (Garric, 2024). De plus, bien que l’engagement porte à plus long terme sur l’ensemble des énergies fossiles, sortir du gaz et du pétrole semble plus difficile tant leur place dans la production énergétique mondiale est forte.

À l’inverse du Royaume-Uni, la Chine se présente comme le champion de la consommation mondiale (92 exajoules en 2023, voir documents 1 et 2). La plupart de la production du charbon du pays est issue de projets miniers récents, à hauteur de 80 % selon l’ONG Global Energy Monitor, ce qui témoigne d’un investissement massif par l’État et les acteurs économiques dans le secteur du charbon. Le pays multiplie par ailleurs les projets miniers et de centrales à charbon à travers le monde comme le Bangladesh ou bien le Zimbabwe. La Chine est suivie par l’Inde (22 exajoules) dans la consommation de charbon. Les deux géants démographiques doivent faire face au défi énergétique que représente des populations aussi importantes à tel point que la Chine s’inscrit dans une dépendance au reste au monde pour sa consommation de charbon. Géant de la production de charbon, en produisant cinq fois plus que l’Indonésie qui est pourtant le premier exportateur, elle doit malgré tout en importer massivement pour satisfaire sa demande.

Document 2. Production et consommation de charbon dans le monde, 2013–2023

carte production et consommation de charbon dans le monde

Ainsi le charbon fait l’objet d’un commerce mondial qui vient principalement alimenter l’est du continent asiatique. Pour ce qui est des exportations, l’Indonésie, l’Australie et la Russie représentent à eux seuls autour de 70 % des exportations de charbon. Le premier exportateur, l’Indonésie, représente à elle seule 28 % des ventes de charbon. La principale destination est l’Asie-Pacifique, important 82 % du charbon échangé dans le monde, avec la Chine comme principal État importateur, suivie par l’Inde et le Japon. Au-delà du seul défi démographique pour l’Inde, et partiellement pour la Chine, les objectifs élevés de production et de croissance de ces États expliquent le captage des flux de charbon vers l’est du continent asiatique.

L’exploitation du charbon n’augmente pas uniquement la quantité de CO2 dans l’atmosphère, mais également de méthane (CH4). Ce gaz, qui se forme dans les couches géologiques lors de la maturation du charbon, est libéré lors de l’extraction minière de charbon. Le pays est à l’origine de 75 % des émissions de méthane issues de mines de charbon, selon l’ONG Global Energy Minotor, ce qui s’avère extrêmement néfaste pour le climat : l’ONU énonce que « sur une période de 20 ans, son effet de réchauffement est 80 fois plus puissant que celui du dioxyde de carbone ».

L’élection de Donald Trump à la Maison-Blanche en 2024 vient remettre en question la présence des États-Unis au sein de l’Accord de Paris (ils l’avaient réintégré en 2020 avec l’élection de Joseph Biden), et donc d’un recul du charbon dans le bouquet énergétique américain. Or les États-Unis restent le deuxième émetteur mondial de CO2 et le quatrième en émissions par habitant (Loïzzo, 2023).


Références citées

Mots-clés

Retrouvez les mots-clés de cet article dans le glossaire : carbone | bouquet énergétique | énergie | intensité énergétique.

 

Sinan EFENDIOGLU

Professeur agrégé de géographie dans l'académie de Toulouse, ancien élève de l’École Normale Supérieure de Lyon

 

Édition et mise en web : Jean-Benoît Bouron

Pour citer cet article :

Sinan Efendioglu, « Le charbon, une consommation toujours en hausse en dépit du changement climatique », Géoconfluences, novembre 2024.
URL : https://geoconfluences.ens-lyon.fr/actualites/veille/breves/charbon-consommation-mondiale