Géohistoire
La géohistoire est une démarche consistant à utiliser les outils et les méthodes de la géographie dans des périodes passées. Elle se distingue de la géographie historique qui est la connaissance des lieux et des espaces dans le passé, donc une branche de l’histoire. Cette démarche trouve son origine chez les penseurs, tels Fernand Braudel au milieu du XXe siècle, qui ont fait le lien entre les deux disciplines mariées dans l'enseignement secondaire mais séparées dans le supérieur, géographie et histoire (Ribeiro, 2012 ; Janier-Dubry et al., 2018).
Plus récemment, l’un des promoteurs de la géohistoire est Christian Grataloup, qui à partir d’un objet d’étude majeur de la géographie, la mondialisation, a cherché à reconstituer un récit de la mise en relation des parties du monde par les échanges. Il identifie ainsi plusieurs étapes dans le « bouclage du monde » avant la mondialisation (ou plutôt avant que ce mot n’existe), des grandes migrations néolithiques au basculement atlantique de l’époque moderne. L’une des caractéristiques de la géohistoire est de s’appuyer sur les cartes, non comme simples illustrations du discours mais comme outils mobilisés dans la compréhension des phénomènes. Pour reprendre l’exemple de la mondialisation, il s’agit par exemple d’utiliser des projections comme celle mise au point par Jacques Bertin en 1953 (la « Bertin 1953 »), qui facilite la représentation des flux à l’échelle mondiale, pour faire apparaître les mises en relation des lieux du Monde.
D'un des propos de la géohistoire est également de questionner les découpages géographiques et d'en affirmer l'historicité, dans une démarche constructiviste. Les continents, les océans, les ensembles géographiques sous-continentaux ou régionaux (Sahel, Inde, Europe, Balkans...), ne sont pas un « toujours déjà-là » mais le fruit d'une construction intellectuelle et de conventions (voir par exemple Grataloup, 2015).
(JBB), avril 2022. Dernières modifications : mai 2024.
Références citées
- Grataloup Christian (2015), « L’invention des océans. Comment l’Europe a découpé et nommé le monde liquide », Géoconfluences, janvier 2015.
- Janier-Dubry Françoise, Olivier Grenouilleau et Laurent Carroué (2018), La géohistoire. Quand l’espace, les territoires et le temps sont inséparables, Inspection générale de l'Éducation nationale, groupe histoire-géographie, mars 2018.
- Ribeiro Guilherme (2012), « La genèse de la géohistoire chez Fernand Braudel : un chapitre de l'histoire de la pensée géographique », Annales de géographie 2012/4 (n° 686), p. 329–346.
Pour compléter avec Géoconfluences
- Vincent Capdepuy, « D’où vient le Sahel ? Enquête géohistorique sur une invention coloniale », Géoconfluences, novembre 2024.
- Léa Paly, « Zones humides du littoral atlantique français, des patrimoines hybrides à la lumière de la démarche géohistorique », Géoconfluences, novembre 2024.
- Frédéric Durand, « Timor, géohistoire des frontières stratifiées », Géoconfluences, juin 2020.
- Un exemple de démarche géohistorique appliquée aux noms des océans : Christian Grataloup, « L’invention des océans. Comment l’Europe a découpé et nommé le monde liquide », Géoconfluences, janvier 2015.
- La géohistoire, passerelles et liens entre programmes d'histoire et de géographie, brève de mars 2018.
Liens externes
- « Géohistoire » sur Gaïaclio-Géohistoire, blog consacré à la géohistoire.