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Métagéographie

Publié le 25/04/2025
Auteur(s) : Vincent Capdepuy, docteur en géographie, professeur d'histoire-géographie - académie de La Réunion
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La métagéographie désigne un découpage spatial du monde, qui permet à la fois de nommer et d’ordonner. L’usage du mot est établi depuis 1997, date de publication de l’ouvrage de Kären Bliden et Marin Lewis, The Myth of Continents : A Critique of Metageography. Dès la préface, le terme est défini ainsi :

« Par métagéographie, nous entendons l’ensemble des structures spatiales à travers lesquelles les gens ordonnent leur connaissance du monde : les cadres souvent inconscients qui organisent les études d’histoire, de sociologie, d’anthropologie, d’économie, de science politique ou même d’histoire naturelle. » (Bliden & Lewis, 1997)

Le terme est repris dans le même sens peu de temps après par Philippe Pelletier dans un article consacré à la dénomination « mer du Japon » (Pelletier, 2000), puis par Christian Grataloup dans Vision(s) du Monde : histoire critique des représentations de l’Humanité (Grataloup, 2018).

« Dans un tel contexte, il est urgent de reprendre à nouveaux frais l’analyse des grilles de lecture qui encadrent tout discours sur le Monde. Depuis 1997, le concept de métagéographie s’est progressivement imposé comme objet de réflexion. Dans le contexte de l’après-Guerre froide, ou plutôt, pour être cohérent en utilisant une formule métagéographique, de l’après Est/Ouest, la lecture du planisphère n’avait plus rien d’évident. S’intéresser à toutes les cartes mentales, qui nous permettent de découper de grandes parties à la surface de la Terre, de créer des régions du Monde et de les nommer (comme Nord et Sud, Atlantique, Moyen-Orient, Occident, Tiers-Monde, Europe, Amérique latine…), c’est vite se rappeler leur totale historicité, leur capacité à projeter dans le présent des visions vétustes et parfois fort anciennes. » (Grataloup, 2018)

La géohistoire, comme historicisation de la géographie, permet de retracer l’archéologie de ces découpages spatiaux, de mettre en évidence leur dimension culturelle, et de déconstruire par-là même toute naturalité atemporelle. De ce point de vue, la géohistoire des métagéographies a une dimension critique évidente. Néanmoins, on soulignera qu’elle n’a pas le pouvoir de substituer une autre métagéographie qui serait plus juste ou plus pertinente, « post-continentale » par exemple : nous demeurons tributaires des métagéographies passées, dans le langage courant. La géohistoire peut simplement émettre des mises en garde contre certaines analyses scientifiques ou certains discours politiques qui ne questionneraient pas suffisamment ces découpages faussement évidents. Ainsi, de façon paradoxale et contre-intuitive, la précision et la rigueur appellent à une définition floue de la majorité des découpages métagéographiques.

La métagéographie est cet ordonnancement du monde dont les géographes eux-mêmes sont peu responsables, qui leur échappe, mais qu’ils ne peuvent ignorer.

Vincent Capdepuy, avril 2024.


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