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Les ports de Shanghai et Ningbo-Zhoushan, géants mondiaux en constante évolution

Publié le 27/03/2025
Auteur(s) : Benjamin Claverie, géographe - académie de Bordeaux
En 2025, la presse spécialisée annonce que Shanghai est le premier port à dépasser les 50 millions de conteneurs manutentionnés (Auvray, 2025), et confirme simultanément la place de Ningbo-Zhoushan comme premier port mondial en tonnage pour la seizième année consécutive (Teillard, 2025).

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Les ports de Shanghai et de Ningbo-Zhoushan appartiennent à la rangée chinoise, la rangée portuaire la plus active au monde avec plus de 10,8 milliards de tonnes manutentionnées en 2023 (China Statistical Yearbook, 2024). Cette rangée portuaire a été construite au moyen de la planification à partir des premières réformes de modernisation et d’ouverture du pays à l’époque de Deng Xiaoping et témoigne du développement industriel et technologique de la Chine. La domination de sa rangée portuaire sur les échanges maritimes mondiaux fait de la Chine une thalassocratie commerciale.

Lire aussi : Benjamin Claverie, « La rangée portuaire chinoise et ses arrière-pays, connecter la Chine au Monde », Géoconfluences, avril 2024.

Dans ce contexte, les ports de Shanghai et de Ningbo-Zhoushan polarisent à eux deux environ 19 % du trafic de marchandises manipulé par les ports à l’échelle nationale et règnent en maîtres sur les classements portuaires internationaux : Shanghai est le premier port mondial en EVP – plus de 50 millions en 2024 – (Teillard, 2025), pendant que Ningbo-Zhoushan domine en tonnage – 1,377 milliard de tonnes en 2024 – (Auvray, 2025).

Ces deux ports sont pilotés par un capitalisme d’État, mais d’échelle provinciale, qui a émergé à la faveur de plusieurs grandes réformes de la gouvernance portuaire (décentralisation, création des cinq pôles portuaires régionaux puis des groupes portuaires provinciaux). Zhejiang Seaport Group, propriétaire du port de Ningbo-Zhoushan, est un conglomérat public de l’économie maritime, détenant 310 entreprises et ayant embauché 30 000 collaborateurs. De son côté, l’entreprise Shanghai International Port Group, gestionnaire du port de cette municipalité autonome, a un effectif de plus de 16 000 employés et a pour société mère China Harbour Engineering, entreprise d’État elle-même filiale de la puissante CCCC. Ce capitalisme d’État provincial respecte les directives du gouvernement central et s’évertue à bâtir des ports de classe mondiale. C’est la raison pour laquelle ces deux ports connaissent des évolutions constantes.

Document 1. Le port de Ningbo-Zhoushan, premier port mondial en tonnage

carte du port de Ningbo-Zhoushan / Ningbo port harbor map

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D’un point de vue spatial, les deux ports multiplient leurs sites et les postes d’amarrage en eau profonde. L’objectif est double : d’une part maintenir la polyfonctionnalité des ports tout en spécialisant les quais, et d’autre part accueillir des navires possédant un tirant d’eau plus important. Ainsi, le port de Ningbo-Zhoushan dispose de 19 zones portuaires le long desquelles se trouvent 200 postes en eau profonde capables de faire accoster des navires de plus de 10 000 Tpl et 115 autres postes d’amarrage pour accueillir les vaisseaux de plus de 50 000 Tpl (Zhejiang Seaport, 2025). Le port de Shanghai, lui, a été transformé par le déplacement de ses équipements, d’abord partis du centre-ville pour l’estuaire avec la zone de Waigaoqiao, puis vers le large avec les îles poldérisées de Yangshan. Ajoutons la reconversion d’anciens sites jugés polluants comme dans le cas du verdissement du terminal shanghaïen de Luojing, anciennement destiné à recevoir des cargaisons en vrac de minerai de fer et de charbon. Sa mutation logistique commence en décembre 2022 et son inauguration en tant que terminal conteneurisé, ayant à terme une capacité annuelle de 6 millions d’EVP, a lieu en août 2024. Situé à 38 kilomètres du centre-ville, ce terminal rénové a pour but d’accentuer l’intégration de la métropole shanghaïenne avec l’axe fluvial du Yangzi (Cai, 2024 ; Ovcina Mandra, 2024).  

Dans le cadre d’une Chine qui mise sur le développement d’une économie axée sur les nouvelles technologies, ces deux ports se modernisent et se muent en ports intelligents où l’automatisation des engins de levage et de transport va de pair avec la numérisation des opérations portuaires et le recours à l’intelligence artificielle. Par exemple, le terminal de Dapukou, situé dans le port de Ningbo-Zhoushan, possède 28 grues ferroviaires à double levier automatisées, 13 camions grues « intelligents » et 14 ponts roulants télécommandés (Yin, 2023). La collaboration avec les entreprises de télécommunication China Mobile et Huawei met à disposition du port de Ningbo-Zhoushan un réseau 5G devenu indispensable à la gestion d’une flotte de camions porte-conteneurs automatisés présentés officiellement, en particulier sur le terminal conteneurisé de Meishan, comme le gage d’une meilleure productivité et sécurité portuaire (Huawei, 2021).

La dernière évolution ayant trait aux ports de Shanghai et de Ningbo-Zhoushan tient à leur renforcement en tant que grands nœuds logistiques intégrés aux Nouvelles routes de la soie au moyen de nouvelles routes maritimes les reliant à des ports étrangers. La diplomatie chinoise lorgnant toujours plus vers l’Amérique du Sud, et le Pérou en particulier, des lignes maritimes entre le nouveau port de Chancay ont été ouvertes en priorité avec Shanghai et Ningbo-Zhoushan, afin de réduire les temps et les coûts de navigation de 20 % par rapport aux routes faisant escale au Mexique. Le port de Chancay, dont COSCO détient 60 % du capital (les 40 % restant sont détenus par une entreprise minière péruvienne), a été inauguré en présence de Xi Jinping le 14 novembre 2024. D’un point de vue géoéconomique, ces liaisons recouvrent une dimension stratégique afin de garantir l’approvisionnement de la Chine en minerai de fer extrait des mines péruviennes et en lithium provenant de Bolivie, Chili et Argentine. Elles contribuent aussi à la diversification et à la sécurité alimentaires des grands foyers de consommation de Shanghai et du Zhejiang au moyen de l’importation de fruits péruviens (myrtilles, raisins, mangues, avocats… Siekman, 2024).   

Bibliographie

Références citées
Du même auteur, sur Géoconfluences

Mots-clés

Retrouvez les mots-clés de cet article dans le glossaire : conteneur | Nouvelles routes de la soie | port | port intelligent | rangée portuaire | Shanghai.

 

Benjamin CLAVERIE

Géographe, académie de Bordeaux

 

Édition et mise en web : Jean-Benoît Bouron

Pour citer cette brève :

Benjamin Claverie, « Les ports de Shanghai et Ningbo-Zhoushan, géants mondiaux en constante évolution », Géoconfluences, mars 2025.
URL : https://geoconfluences.ens-lyon.fr/actualites/veille/breves/ports-shanghai-ningbo-zhoushan

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