Les régions de l’Arctique entre États et sociétés
Bibliographie | citer cet article
Figure 1. La Ville de Tromsø dans l’Arctique norvégien, à 13h en janvier. Cliché : Camille Escudé-Joffres, 2017. |
L’Arctique n’est pas une des cinq régions retenues par les Nations-Unies dans leur division du monde. Dans le découpage de l’ONU, les régions arctiques sont divisées entre Amérique, Asie et Europe, remettant en cause une possible unité de l’Arctique. À première vue en effet, les régions arctiques s’appréhendent bien davantage en termes de diversité que d’unité : diversité politique, sociale, économique, culturelle, géographique, climatique. Quelle unité entre Mourmansk, ville industrielle de la mer de Barents qui compte plus de 300 000 habitants, et une communauté inuite du Nunavut de quelques dizaines d’habitants ? À y regarder de plus près cependant, les régions arctiques possèdent des caractéristiques communes : au-delà des conditions proprement climatiques sur lesquelles nous reviendrons, ce sont des territoires très peu denses, colonisés récemment, éloignés à présent des centres économiques et politiques, dont les populations notamment autochtones connaissent souvent des situations sociales de crise.
Réfléchir aux régions de l’Arctique au pluriel invite tout d’abord à penser l’Arctique pour lui-même, alors que cette partie du monde a tant été décrite de l’extérieur. Cependant, il est impossible aujourd’hui d’ignorer les acteurs et les logiques externes à l’œuvre en Arctique, ne serait-ce que parce qu’une grande partie reste aujourd’hui encore sous dépendance économique de leurs capitales du « sud » et du reste du monde. À cela s’ajoute que depuis une trentaine d’années, les régions arctiques ont fait face à de grands bouleversements. Victimes visibles du changement climatique, elles ont connu un coup de projecteur médiatique en raison de toutes les opportunités économiques et commerciales supposément engendrées par la fonte accélérée des glaces : possibilité de routes maritimes internationales, zones de pêche élargies, ressources minérales et d’hydrocarbures. Ces enjeux éveillent l’intérêt des États du monde entier, interrogeant les limites de la région, ainsi que la place des acteurs nationaux et locaux, y compris autochtones, dans les décisions qui les concernent.
Il s’agira dans cet article de comprendre les éléments de différenciation régionale de l’Arctique et de ses populations dans un contexte de changements environnementaux et géopolitiques. Nous reviendrons dans un premier temps sur les changements climatiques et environnementaux qui affectent de manière différente les régions de l’Arctique. Dans un deuxième temps, nous analyserons comment l’irruption de la mondialisation dans les hautes latitudes affecte les régions de l’Arctique. Enfin, nous reviendrons sur les questions de géopolitique à toutes les échelles engendrées par la perception accrue de l’importance des ressources arctiques : dans un contexte d’intérêt international, qui doit décider pour les régions arctiques ?
1. Des régions arctiques diversifiées en cours de recomposition sous l’influence du changement climatique
Nous allons ici d’abord présenter les multiples définitions de l’Arctique comme unité, avant de remettre en cause cette unité face aux caractéristiques géographiques de ses territoires.
1.1. Des régions particulièrement vulnérables face au changement climatique
Un des principaux facteurs des bouleversements récents que connaissent les régions arctiques et qui les affectent de manière différenciée est climatique. Le rythme régulier des alertes du GIEC (Groupe International d’Experts sur le Changement Climatique) rappelle les importantes conséquences du changement climatique pour les écosystèmes et les sociétés humaines. La température moyenne à la surface de la Terre aurait augmenté de 0,8°C depuis la fin du Moyen-Âge, et augmenterait de 1,5°C à 4,8°C d’ici 2100 selon le rapport du GIEC de 2018 (IPCC, 2018). Or, les variations climatiques sont plus fortes pour les milieux polaires aux hautes latitudes (Godard et André, 2013, p. 46) ; les rapports du GIEC comme ceux du groupe de travail AMAP (AMAP, 2018, p. 32) sont formels : au-dessus du 60e parallèle, la température moyenne augmente deux à trois fois plus vite qu’ailleurs et on a pu observer un écart de 2°C entre la première et dernière décennie du XXe siècle, chiffre supérieur à toutes les autres régions du monde. L’étendue de la glace à la fin de l’été dans l’océan Arctique recule drastiquement depuis trente ans et le changement s’est accéléré depuis 2000, la banquise estivale commençant à fondre de plus en plus tôt au printemps. L’observation d’images satellites permet de constater que la banquise estivale a perdu 50 % de sa superficie et 75 % de son volume depuis trente ans.
Figure 2. Évolution de l’étendue de la banquise arctique à son minimum de septembre, 1979-2018
Source : données NSIDC compilées par F. Lasserre. Voir cet article dans Géoconfluences.
Les images satellite ci-dessous montrent le minimum annuel de la banquise arctique en 1979 et 2018, record jamais enregistré pour l’instant par la NASA.
Figure 3. Minimum de la banquise arctique en 1979 et en 2018
Source des données : observations satellite. Crédit : NASA Scientific Visualization Studio, 2019
Pourquoi le réchauffement climatique est-il plus particulièrement marqué en Arctique que dans le reste du monde ? Il faut tout d’abord souligner que la glace réfléchit 80 % du rayonnement solaire quand l’océan n’en renvoie que 10 % (Godard et André, 2013, p. 47). L’atténuation de l’albédo accélère encore le réchauffement dans les régions polaires. C’est donc la combinaison entre l’augmentation de l’effet de serre, le réchauffement de la température de l’air et la réduction de la banquise qui est responsable de cette très forte hausse des températures.
La fin de la banquise estivale est programmée ; à un horizon plus ou moins proche, la disparition de la banquise libèrera l’océan de glaces pendant une partie de l’année, tandis que la banquise hivernale devrait se reformer durant quelques décennies encore. Les estimations de la date de la disparition de la banquise estivale divergent mais sont de moins en moins optimistes. Le rapport du GIEC en 2007 annonçait la disparition complète de la banquise estivale à la fin de l'été autour de 2080, tandis que le rapport de 2018 avançait cette date à 2040. La disparition de la banquise estivale avant la fin du centenaire fait donc consensus dans la communauté scientifique.
|
1.2. Les multiples définitions de l’Arctique
A priori, les régions arctiques possèdent ainsi des caractéristiques physiques communes liées au froid, à la nuit polaire, à l’englacement. L’inclinaison de 23°26’ de l’axe de la Terre par rapport au plan de l’écliptique empêche les rayons du soleil d’atteindre le pôle Nord pendant une partie de l’année (l’hiver boréal), phénomène dont découle la nuit polaire et les températures extrêmes qui refroidissent les eaux océaniques arctiques. De ce fait, la banquise constitue une surface de mer gelée qui fond en été jusqu'au mois de septembre, pour se reformer en hiver, et atteint son étendue maximale au mois de mars. Ainsi, pendant l’hiver, la banquise arctique s’étend sur presque 14 millions de km², tandis que l’été pendant la débâcle la banquise réduit son épaisseur et divise sa superficie par trois avant de se reformer l’hiver suivant (Godard et André, 2013).
Il existe plusieurs définitions de la zone Arctique qui reposent sur des critères géographiques et physiques, représentés sur la figure 5. La ligne de latitude 66°33’ Nord qui définit le cercle polaire arctique, la ligne de Köppen qui circonscrit l’isotherme de 10°C pour le mois de juillet ; la limite de l'arbre qui marque la limite continentale sud de la végétation sans arbres typique du climat polaire ou toundra, sans compter les diverses définitions qui reposent sur des critères humains. La définition politique la plus souvent utilisée de l’Arctique comprend les huit États qui ont des territoires au nord du cercle polaire : Canada, Danemark, États-Unis, Finlande, Islande, Suède, Norvège, Russie. Chacune de ces définitions a une pertinence dans une spécialité donnée (écologie, océanographie, climatologie, etc.) et aucune d’entre elles ne peut prétendre à l’universalité. Il faut de plus noter que dans le contexte du changement climatique, les limites naturelles de la zone arctique connaissent une variabilité accrue et accusent une dérive vers le Nord. Les géographes utilisent en général une définition de l’Arctique qui repose sur une combinaison de critères naturels et humains.
Figure 5. Quelques délimitations de l’Arctique
Source : Traduit de l’anglais d’après Arctic Portal, 2016. |
Il faut cependant insister sur la très grande diversité entre les régions arctiques, comme entre l’Arctique eurasiatique et l’Arctique américain. Cette diversité s’explique à la fois par des raisons proprement climatiques, et politiques, économiques et sociales et culturelles. On peut prendre l’exemple pour cela de deux villes, Mourmansk et Iqaluit, sur les deux photographes suivantes (figures 6 et 7).
Figure 6. Le port de Mourmansk en RussieCliché : Martin Lie, 2005, libre de droits (source). |
Figure 7. La ville d’Iqaluit au Canada, NunavutCliché : Camille Escudé-Joffres, 2018. |
Les deux photographies permettent de distinguer des traits très divers. Mourmansk est une ville industrielle russe de 300 000 habitants située à 68°58’ nord. Ce port sur la presqu’île de Kola été créé par l’État russe en 1915 pour avoir un débouché sur l’océan Arctique (Escudé-Joffres, 2019). La ville résulte donc d’une volonté de développement politique du sommet de l’État, et également de logiques économiques liées à l’importance de la Route maritime du Nord pour les acteurs économiques russes. La présence du Gulf Stream, courant chaud venu du golfe du Mexique, assure une température relativement douce toute l’année pour cette latitude qui fait que le port est libre de glace. Dans les années 1980, Mourmansk est la base la plus importante de la Flotte du Nord où elle accueille la moitié des sous-marins russes et les deux-tiers de ses sous-marins nucléaires.
De l’autre côté de l’Atlantique, Iqaluit est la plus grande ville du Nunavut au Canada, située à 63°45’ nord. La ville qui est situé à une latitude plus basse que Mourmansk connaît pourtant un climat bien plus rude : -30°C de moyenne au plus fort de l’hiver, contre -10°C à Mourmansk. 7 500 personnes vivent à Iqaluit, dont 60 % d’Inuit, dans cette capitale du territoire fédéral créé en 1999 à la suite des revendications inuites sur leur territoire ancestral. Durant l’hiver, la ville est accessible uniquement par motoneige et traineau à chiens lorsque le détroit d’Hudson est gelé, et par l’aéroport, une ancienne base militaire états-unienne. L’économie locale dépend encore beaucoup des subventions du gouvernement fédéral, à côté des activités traditionnelles (pêche, chasse).
Cette comparaison rapide permet d’esquisser des traits très différents de l’urbanisme arctique, qui sont autant de manières d’habiter ces régions, peuplées par quatre millions de personnes, dont plus de 500 000 autochtones (ACIA, 2004, p. 6-7).
1.3. Des régions arctiques diversement peuplées et habitées
Les populations autochtones des régions arctiques se répartissent de manière inégale au-dessus du cercle polaire comme le montre la carte ci-dessous. Ces populations ont également des modes différents d’habiter le territoire (Collignon, 1996). Le nom de la ville Iqaluit, qui signifie « les poissons » en inuktitut, nommée jusqu’en 1987 Frobisher Bay par l’explorateur britannique Martin Frobisher est une illustration parmi d’autres de ce passé colonial. L’Arctique a longtemps été pensé comme un espace pour l’exploration, la compétition pour de nouvelles terres et de nouvelles ressources, et de fait espace de fantasmes décrit de l’extérieur plutôt que de l’intérieur.
Figure 8. Les populations autochtones dans les régions arctiques
Réalisation : Géoconfluences d’après Nordregio, 2013 (voir l'original en anglais) |
Les régions arctiques ont en effet pour point commun d’être des territoires colonisés plus ou moins récemment. L’orientalisme au sens de Saïd (2005) a eu de fortes répercussions au-delà de l’espace géographique étudié dans la manière dont les représentations de l’Orient ont été utilisées par l’Occident pour justifier une présence coloniale. Le terme d’orientalisme arctique décrit la façon dont les personnes vivant dans les régions nordiques polaires ont été imaginées et construites de manière essentialisée, exotique et atemporelle. L’Arctique orientalisé a construit par exemple les personnes autochtones comme des enfants de la nature (Slezkine, 1994), et de telles constructions ont été utilisées pour justifier une colonisation européenne dans les régions nordiques.
Un exemple est à trouver dans la colonisation de l’Extrême-Orient russe depuis la conquête de la Sibérie par la Russie au XVIe siècle à nos jours. L’anthropologue Yves-Marie Davanel souligne l’omniprésence de la « perception exotisante » avec laquelle l’État russe considère les populations sibériennes depuis quatre siècles (2013). Cela rejoint les travaux du géographe Jean-François Staszak (2008) pour qui l’exotisme n’est pas le propre d’un lieu mais d’un point de vue et d’un discours sur ceux-ci. L’exotisation est pour lui un processus de construction de l’altérité propre à l’Occident colonial, qui montre une fascination condescendante pour certains ailleurs, déterminés essentiellement par l’histoire de la colonisation et des représentations. L’exotique n’est alors pas tant ce qui n’est pas « là » que ce qui n’est pas « moi » : l’exotisation passe par une mise en scène de l’Autre au service d’intérêts politiques, économiques et sociaux.
Même si les situations ne sont pas comparables entre elles, beaucoup connaissent des difficultés socio-économiques par rapport au reste de la population.
|
Nombre d’habitants de l’Arctique sont également confrontés à des difficultés de représentation politique. Les territoires arctiques sont encore administrés en majorité par des capitales et des gouvernements plus ou moins éloignés géographiquement et politiquement de ces territoires. Les habitants de ces régions sont sous-représentés ou pas représentés du tout au sein des instances nationales quand l’attention des gouvernants est bien davantage concentrée sur l’exploitation des ressources et des intérêts stratégiques. Les populations autochtones se sont cependant organisées pour leur représentation politique en plusieurs groupes dont six des principaux sont présentés ci-dessous, pour revendiquer davantage de droits à toutes les échelles des régions arctiques.
Figure 9. Répartition des principales populations autochtones dans les territoires arctiques
|
Nom de l’organisation (date de création) |
Répartition des populations représentées par État | Nombre total des populations représentées |
Conseil circumpolaire inuit (1977) | 50 000 États-Unis (Alaska) 50 000 Canada 50 000 Danemark (Groenland) |
150 000 |
Conseil arctique de l’Athabaska (2000) | 12 000 États Unis (Alaska) 10 000 Canada (Yukon) 20 000 Canada (Territoires du Nord-Ouest) |
42 000 à 45 000* |
Conseil international des Gwich'in (1999) | États-Unis (Alaska) Canada (Yukon et Territoires du Nord-Ouest) |
9 000 |
Association aléoute internationale (1998) | États-Unis (Alaska) Russie (péninsule du Kamtchatka) |
18 000 |
Association des peuples autochtones du Nord, de la Sibérie et de l'Extrême-Orient de la Fédération de Russie (1993) | Une quarantaine de peuples autochtones de la Russie. | 250 000 |
Conseil des Samis (1956) | 40 000-60 000 Norvège 15 000-25 000 Suède 6 000-9 000 Finlande 2000 Russie (péninsule de Kola) |
60 000 à 100 000* |
Total | 532 000 à 572 000 |
* Selon les estimations
Sources : AHDR, 2004 ; Dubreuil, 2014.
|
2. Des régions diversement affectées par les changements géoéconomiques
Les conséquences du changement climatique et le développement technologique, ainsi que l’accélération de la mondialisation, provoquent un intérêt accru des grands groupes industriels pour les ressources de l’Arctique. Même si la première découverte commerciale de pétrole en Arctique, le gisement de Norman Wells au Canada, remonte à 1920, elle reste isolée. C’est à partir des années 1960 qu’ont lieu les premières grandes découvertes d’hydrocarbures en Arctique en Russie (gisement de Tazovskoe en 1962) et en Alaska (gisement de Prudhoe Bay en 1968). La mondialisation et le développement de nouvelles technologies permettent la mise en place de mégaprojets comme celui de Yamal, en Sibérie. Il faut cependant déconstruire le mythe de la réserve de ressources arctiques océaniques, en raison des grandes difficultés d’exploitation.
2.1.Une exploitation aléatoire des hydrocarbures arctiques
Selon une étude du département de l’US Geological Survey en 2008, 10 % des réserves de pétrole et 30 % des réserves de gaz qui restent à découvrir dans le monde se trouveraient dans les régions arctiques. Cette étude a été largement remise en cause, car il demeure très difficile d’évaluer les ressources « potentiellement exploitables ». Néanmoins, elle permet de dresser une cartographie des ressources minières et d’hydrocarbures actuellement produites et qui pourraient l’être.
Figure 10. Les activités industrielles et les réserves d’hydrocarbures en Arctique
Source : CAAF, 2001. Traduction : Géoconfluences |
Dans le cas du pétrole, les ressources demeurent coûteuses et difficiles à exploiter, même si leur exploitation est ancienne. Ainsi, l’entreprise Shell a annoncé en 2012 la suspension de ses campagnes d’exploration pétrolière arctique en raison des conditions opérationnelles très difficiles. De même, l’ancien PDG de Total, Christophe de Margerie, avait promis que jamais Total n’irait forer en Arctique en raison des risques trop importants. Sur terre, la fonte du pergélisol et le raccourcissement de la durée des routes de glace rendent la logistique plus complexe qu’autrefois. Les multiples reports de la mise en exploitation, les changements de plans sont la preuve de la difficulté d’établir la rentabilité de gisements dans la région. Enfin, la très forte dépendance de ces entreprises envers les cours mondiaux des ressources rend cette exploitation trop souvent incertaine, sans compter bien sûr les dégâts que pourrait provoquer une éventuelle marée noire dans une région si fragile, qui entacherait durablement la réputation de l’entreprise concernée.
>>> Pour compléter sur ce thème, lire : Frédéric Lasserre, « La course à l’appropriation des plateaux continentaux arctiques, un mythe à déconstruire », Géoconfluences, septembre 2019. |
|
|
En revanche, l’extraction de gaz est développée en Arctique. La production est ancienne mais prend de nouvelles formes à travers le gaz naturel liquéfié (GNL, LNG en anglais) dans des immenses projets qui produisent des formes nouvelles d’habiter en Arctique.
|
L’exploitation minière enfin est également développée en Arctique, à travers plusieurs chantiers de grande ampleur en Amérique du Nord, en Russie ou au Groenland, avec des conséquences complexes pour les populations locales (Duc, 2017).
>>> Sur l’extraction des ressources au Groenland, lire : Marine Duc, « L’extractivisme sans extraction ? Au Groenland, des politiques de développement territorial entre volontarisme minier et dépossessions », Géoconfluences, novembre 2017. |
2.2. Les réalités contrastées des routes maritimes internationales
Malgré les difficultés qui sont loin d’être surmontées, les États riverains pourraient être tentés de valoriser les potentialités de nouvelles routes arctiques. La fonte des glaces et le développement technologiques ouvre en effet de nouvelles routes, qui représenteraient sur le papier d’immenses gains de distances pour le commerce international : jusqu’à 40 % de gain de distance l’Europe et l’Asie en passant par le Passage du Nord-Ouest, au large du Canada, au lieu de Suez. La distance ne se réduit cependant pas en géographie à une simple notion géométrique, et plusieurs éléments permettent de nuancer cette approche.
Il faut tout d’abord distinguer les deux routes maritimes, la route du Nord-Ouest et la route du Nord-Est. La route du Nord-Ouest, pour des raisons climatiques, est aujourd’hui gelée la majorité de l’année. Pour des raisons politiques et économiques ensuite, cette région de l’Arctique a été beaucoup moins développée qu’en Russie. Aujourd’hui, il existe très peu d’infrastructures comme des ports en eau profonde, des brise-glaces canadiens etc. Le trafic y est donc très faible : entre 1906, date du premier transit complet du Passage du Nord-Ouest, et 2008, on ne compte que 120 navires ayant effectué le transit complet du passage du Nord-Ouest (Lasserre, 2017).
En revanche, la Route maritime du Nord constitue une voie navigable stratégique pour l’URSS puis la Russie depuis le début du XXe siècle. Les infrastructures et les ports y sont donc plus présents. La Russie est le pays arctique qui a également – et de loin – la plus grande flotte de brise-glace, avec cinquante-cinq brise-glaces opérationnels, soit la moitié de la flotte mondiale et cinq fois plus que le Canada, le deuxième mondial (Baudu, 2018). La route est libre de glace toute l’année dans sa partie occidentale, et durant l’été sur toute la route. Le trafic local y est croissant en raison l’exploitation des ressources et leur approvisionnement vers les ports arctiques mais c’est encore très loin d’être une route commerciale d’ampleur mondiale. Le développement de la route reste cependant un objectif majeur de la Russie : Moscou a également réaffirmé en avril 2019 son objectif d’atteindre 80 millions de tonnes de fret annuel par la Route maritime du Nord d’ici 2025, quatre fois plus qu’actuellement.
|
|
Figure 11. Les possibles routes maritimes de l’Arctique d'après Arctic Econ
Source : Arctic Econ, 2012. Traduction du texte : « Des années de récession de la banquise arctique ont ouvert des périodes transit libre glace pour des passages qui auraient normalement requis l’assistance de brise-glace toute l’année. La navigabilité future des eaux arctiques est visualisée ici en respectant l’extension actuelle de la banquise. » |
De nombreux inconvénients au développement commercial des routes subsistent en effet. Les conditions de navigation sont imprévisibles : sans compter la nuit polaire pendant une partie de l’année et le froid, la fonte de la banquise provoque la multiplication des growlers, petits blocs de glace flottants et constitue un danger pour les navires. Les obstacles techniques sont encore nombreux, avec un manque d’infrastructures et de hubs et de brise-glaces. Les obstacles financiers sont également divers, avec le prix des taxes, des assurances pour les cargaisons compte-tenu des risques, le coût du personnel formé et des équipements. Les risques environnementaux enfin sont très présents. Le tout fait qu’actuellement, les routes maritimes ne sont compatibles avec la logique de flux tendu du commerce international. Comme l’explique Frédéric Lasserre (2017, 2019), les routes arctiques sont encore loin de constituer des « autoroutes » pour le commerce international mais un trafic de destination et de cabotage.
2.3. La progression rapide du tourisme de croisière
Les régions arctiques voient également le tourisme, et notamment le tourisme de croisière dit « de la dernière chance » augmenter de manière rapide, non sans risques environnementaux. En Islande, le nombre de croisiéristes a été multiplié par 30 en 25 ans.
Un exemple de ce tourisme est à trouver dans la compagnie norvégienne Hurtigruten, qui propose des pratiques touristiques haut de gamme (à partir de 5 000 € les deux semaines). La compagnie propose un cabotage le long des villes de la côte norvégienne jusqu’au Cap Nord. Hurtigruten signifie en norvégien « route rapide ». Cet express côtier assurait un service régulier de navires entre 34 ports en Norvège depuis les années 1890. Subventionné par le gouvernement, lien vital pour approvisionner les villages alors que les communications terrestres sont difficiles, il dessert 34 ports entre Bergen et Kirkenes à la frontière de la Russie en mer de Barents. Avec le développement du trafic routier et aérien, aujourd’hui la compagnie représente essentiellement une attraction touristique qui transporte 500 000 passagers par an, dont 70 % des touristes.
3. Questions de géopolitique à toutes les échelles
Les changements climatiques comme l’exploitation accrue des ressources provoquent de nombreux conflits en Arctique. Les questions juridiques à l’échelle régionale restent circonscrites dans le cadre du droit, n’en déplaise aux unes alarmistes sur des perspectives de nouvelle « guerre froide » (Escudé, 2017). De nouvelles tensions émergent avec les revendications politiques des habitants à l’échelle locale à bénéficier de l’exploitation des ressources des régions – ou au contraire à refuser leur exploitation (Duc, 2017).
3.1. Une poignée de questions juridiques encore en suspens
La délimitation des zones maritimes en Arctique est un autre enjeu de taille pour l’appropriation des fonds marins et de leurs ressources du sol et du sous-sol. La Convention de Montego Bay, convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer (CNUDEM) adoptée en 1982, établit différents régimes de souveraineté pour les eaux maritimes selon la distance aux côtes. Le sol et le sous-sol de la haute mer sont considérés comme un patrimoine commun de l’humanité par la Convention de Montego Bay. Cependant, des plateaux continentaux étendus à 350 milles marins pour le Canada, le Danemark, les États-Unis et la Russie conduiraient à l’attribution de droits souverains sur la totalité des fonds de l’océan Arctique((Mais pas sur la colonne d’eau (donc pas sur la pêche) ni sur la surface (donc pas sur la circulation), c’est-à-dire uniquement sur des ressources géologiques qui restent difficile à exploiter.)) par la Commission des limites du plateau continental, organisation des Nations chargée d’examiner les preuves géologiques de l’extension du plateau (Bouron, 2017). La volonté de la Russie à étendre son plateau continental est souvent relayée, mais en mai 2019, le Canada est le dernier pays à avoir déposé son dossier pour un plateau continental étendu (Pic, 2019).
La Convention de Montego Bay a l’avantage d’être peu contestée en tant que cadre juridique et a permis d’entériner un certain nombre de revendications dans les mers arctiques. La Norvège et la Russie ont délimité leurs frontières communes en mer de Barents et dans l’océan Arctique par un accord en septembre 2010 et la frontière maritime entre les deux États est entrée en vigueur en juin 2011. Les États-Unis sont cependant le seul grand pays de la région arctique à ne pas avoir ratifié la Convention de Montego Bay, tout en la respectant dans les grandes lignes.
|
Figure 12. Frontières et espaces maritimes contestés et négociésSources : compilation des revendications officielles ou des projets de revendication, F. Lasserre, 2019 ; Nations Unies, Submissions to the CLCS. Extrait de : Frédéric Lasserre, « La course à l’appropriation des plateaux continentaux arctiques, un mythe à déconstruire », Géoconfluences, septembre 2019. |
Certaines questions juridiques restent cependant en suspens, comme dans le cas du statut juridique des routes maritimes. En 1969, les États-Unis, préoccupés par l'évacuation du pétrole récemment découvert en Alaska décidèrent de tester le passage du Nord-Ouest en envoyant symboliquement le pétrolier Manhattan forcer les détroits. Cet événement a ouvert un contentieux avec le Canada qui considère le passage comme faisant partie de ses eaux intérieures. Pour le Canada comme pour la Russie, les détroits que traversent le passage du Nord-Ouest comme du Nord-Est constituent des eaux intérieures, selon le droit de la mer, sur lesquelles Ottawa comme Moscou ont pleine souveraineté. Les deux pays revendiquent donc le droit de contrôler l’accès, de faire payer des taxes, une escorte de brise-glaces etc. Or, pour les États-Unis, comme pour l’Union européenne, qui revendiquent la liberté de navigation, ils constituent des détroits internationaux et sont donc ouverts au transit international.
Région stratégique de la guerre froide, l’Arctique est souvent présenté comme un eldorado en prise à de nombreuses possibilités de conflit. La coopération technique continue cependant malgré la situation géopolitique mondiale (crise ukrainienne et sanctions contre la Russie) et les conflits se règlent dans le cadre du droit international car tout le monde y a intérêt. Il faut souligner de plus que 95 % des ressources de l’océan se trouvent en deçà des 200 miles nautiques, donc dans les ZEE que personne ne conteste, ce qui limite la portée des litiges.
3.2. Quelle place pour les habitants des régions arctiques dans les décisions qui les concernent ?
Alors que des régions arctiques sont l’objet d’un intérêt accru d’une multitude d’acteurs, comment s’organise la gouvernance de l’Arctique, et quelle place laisse-t-elle aux habitants de ses régions ? Les débats sur la manière dont la région doit être gouvernée s’illustrent dans la controverse autour de la mise en place d’un Traité arctique. En 2008, l’Union européenne propose de mettre en place un traité de protection de l’Arctique sur le modèle du traité de l’Antarctique (1959). Cette proposition a déclenché un tollé chez les États souverains dans la région, qui ont souligné le fait que, contrairement à l’Antarctique, les régions de l’Arctique habitent des populations qui dépendent des activités économiques de celles-ci.
Plusieurs initiatives de protection de l’environnement existent, depuis la protection des ours polaires (Benhammou, Marion, 2017) à l’interdiction de la pêche dans l’océan Arctique central, premier accord multilatéral juridiquement contraignant signé en 2018. Le Conseil de l’Arctique est le cadre privilégié de la gouvernance régionale depuis 1996. Ce forum fondé sur les travaux scientifiques possède un mandat technique destiné à la protection de l’environnement et le développement durable. Il ne peut cependant pas mettre en œuvre des mesures contraignantes juridiquement (Escudé, 2017). Si cette organisation est parmi les rares à laisser une place à six organisations de peuples autochtones, la question des habitants de la région dans les décisions qui les concernent, dans un contexte d’intérêt international se pose.
Figure 13. Photographie des représentants étatiques et autochtones du Conseil de l’Arctique
Cliché pris à l’issue de la 11e réunion ministérielle de 2019. Source : Conseil de l’Arctique, 2019, licence Creative Common by-nc-sa. Voir sur Flickr. |
L’arrivée d’investissements chinois massifs dans plusieurs régions de l’Arctique (Groenland, Islande, Scandinavie, Russie…) est ainsi sujette à controverses. Le secrétaire d’État états-unien Mike Pompeo a accusé en mai 2019 Pékin de « comportement agressif » dans les régions arctiques, soupçonnant publiquement la Chine d’utiliser une présence civile pour renforcer sa présence militaire à travers le déploiement de sous-marins (Pompeo, 2019). Selon lui, entre 2012 et 2017, la Chine a investi en Arctique 90 milliards de dollars notamment dans des infrastructures au Canada ou en Sibérie. La société Yamal GNL évoquée plus haut est par exemple détenue à 20 % par une filiale de China National Petroleum Corporation (CNPC) et à 9,9 % par le Silk Road Fund, le fonds d'investissement du gouvernement chinois – à côté de l’entreprise française Total (10%) et du groupe russe Novatek (50,1%).
Ces tensions se répercutent à plusieurs échelles, et notamment à celle locale des habitants de l’Arctique. Ainsi, les investisseurs étrangers sont parfois bien reçus par les populations autochtones, qui peuvent y voir une source de revenu alors que celles-ci sont très fragilisées socioéconomiquement par ailleurs – que cela soit un leurre ou pas est une autre question (Duc, 2017).
|
Ainsi en 2010 a eu lieu un conflit entre Greenpeace et Cairn Energy, une entreprise britannique ayant eu le projet d’exploiter du pétrole à l’ouest du Groenland. On peut voir sur la figure 14 Pilu Bech, créateur d’un mouvement pro-développement pétrolier, à la tête d’une manifestation anti-Greenpeace à Nuuk, capitale du Groenland. Selon le Premier ministre Groenlandais à l’époque, Kuupik Kleist, ce projet finalement avorté aurait pu rapporter un milliard de dollars de revenu annuel au Groenland. Le Groenland, selon lui, posséderait les deuxièmes réserves de gaz et de pétrole après l’Arabie Saoudite, qui gagne 150 milliards de dollars annuels de sa rente pétrolière (George, 2010). À ce titre, les positions environnementalistes de l’ONG Greenpeace sont mal reçues au Groenland, et même taxées « d’éco-colonialisme ». Si cette prise de position n’est cependant pas représentative de tous les Groenlandais, elle illustre les divisions internes et la complexité des rapports de force au sein des régions arctiques.
Figure 14. Manifestation anti-Greenpeace à NuukCliché provenant de la page Facebook du mouvement. Extrait de George, 2010 (source) |
|
Conclusion
Les régions arctiques dans leur diversité sont soumises inégalement à des changements environnementaux, économiques et sociaux, politiques et géopolitiques. Celles-ci sont ainsi soumises à une tension entre une logique d’exploitation des ressources et une logique de protection, voire de sanctuarisation, et laissent les acteurs concernés divisés. Quelques rares questions politiques restent en suspens, comme le partage de l’espace maritime, ou l’appropriation des ressources. En revanche, de nouvelles tensions apparaissent autour de la légitimité des acteurs à prendre place dans la gouvernance des régions arctiques et de leurs populations, entre populations autochtones, ONG et entreprises internationales.
Bibliographie
- ACIA, Impact of a warming Arctic: Arctic climate change impact assessment, Cambridge, UK, Cambridge University Press, 2004.
- Baudu Hervé, La flotte mondiale de navires brise-glaces, 28 novembre 2018, consulté le 5 juin 2019.
- Benhammou Farid et Marion Rémy, « Arctique : Les dessous géopolitiques de la protection de l’ours polaire », Géoconfluences, 2017.
- Bouron Jean-Benoit, « Mesurer les Zones Économiques Exclusives » — Géoconfluences, , consulté le 7 juin 2019.
- Brunet Roger, « Géographie du Goulag », L’Espace géographique, 1981, vol. 10, no. 3, p. 215‑232.
- Canova Émilie et Pic Pauline, « Le rôle des minorités ethniques en Europe du Nord, dialogue avec une députée samie de Norvège », Le Grand Continent, 8 mai 2019.
- Collignon Béatrice, Les Inuit : ce qu’ils savent du territoire, Paris, L’Harmattan (coll. « Collection “Géographie et cultures” »), 1996, 254 p.
- Davanel Yves-Marie, « Des inorodcy aux korennye narody : modalités de la reconnaissance des peuples "autochtones" en Fédération de Russie » dans Irène Bellier (ed.), Peuples autochtones dans le monde: Les enjeux de la reconnaissance, s.l., éditions L’Harmattan, 2013, p. 165‑180.
- Dubreuil Antoine, « La construction de territoires identitaires régionaux et locaux en Arctique », Prospective et stratégie, 2014, vol. 4‑5, no. 1, p. 157‑174.
- Duc Marine, « L’extractivisme sans extraction ? Au Groenland, des politiques de développement territorial entre volontarisme minier et dépossessions », Géoconfluences, 2017.
- Escudé Camille, « Le Conseil de l’Arctique, la force des liens faibles », Politique étrangère, 2017, Automne, no. 3, p. 27‑36.
- Escudé-Joffres, Camille « Mourmansk, capitale arctique et port militaire stratégique », CNES-Géoimage, 2019.
- George Jane, Greenland touted as billion-a-year oil beneficiary, 2010, consulté le 7 juin 2019.
- Godard Alain et André Marie-Françoise, Les milieux polaires, Paris, A. Colin, 2013.
- Intergovernmental Panel on Climate Change, Summary for Policymakers. Global warming of 1.5°C, Switzerland, 2018, 32 p.
- Lasserre Frédéric, « Géopolitique du passage du Nord-Ouest. Une perspective de relations internationales, Geopolitics of the Northwest passage in an international relations perspective », Relations internationales, 31 juillet 2017, no. 170, p. 107‑124.
- Lasserre Frédéric, « La course à l’appropriation des plateaux continentaux arctiques, un mythe à déconstruire », Géoconfluences, septembre 2019.
- Marchand Pascal, « La Russie et l’Arctique », Le Courrier des pays de l’Est, 5 août 2008, no. 1066, p. 6‑19.
- Pic Pauline, « Le Canada a déposé sa demande de plateau continental étendu auprès de la commission de l’UNCLOS » Le Grand Continent, consulté le 7 juin 2019.
- Pompeo Mike, Looking North: Sharpening America’s Arctic Focus, Rovaniemi, Finlande, 2019, consulté le 7 juin 2019.
- Posca Julia, « Portrait des inégalités socioéconomiques touchant les Autochtones au Québec », L’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), 2018, p. 16.
- Saïd Edward William, L’Orientalisme : l’Orient créé par l’Occident, Paris, Seuil (coll. « La couleur des idées »), 2005, 422 p.
- Saramo Samira, “Unsettling Spaces: Grassroots Responses to Canada’s Missing and Murdered Indigenous Women During the Harper Government Years”, Comparative American Studies An International Journal, 1 octobre 2016, vol. 14, no. 3‑4, p. 204‑220.
- Slezkine Yuri, Arctic Mirrors: Russia and the Small Peoples of the North, Revised edition., Ithaca, Cornell University Press, 1996, 476 p.
- Staszak Jean-François, « Qu’est-ce que l’exotisme ? », Le Globe. Revue genevoise de géographie, 2008, vol. 148, no. 1, p. 7‑30.
- Stewart Briard, Sinking into the sea: N.W.T. coast is eroding, and scientists can’t keep up, 12 octobre 2017, consulté le 7 juin 2019.
- Vincent Clément, « La Méditerranée, un modèle spatial de référence ? », Géoconfluences, 2004.
Ressources complémentaires
- Canobbio Éric, cartographie d’Aurélie Boissière, Atlas des pôles. Régions polaires : questions sur un avenir incertain, Paris, Autrement, 2007.
- Canobbio Eric, Mondes arctiques - miroirs de la mondialisation, s.l., Cnrs, 2011, 64 p.
- Garcin Thierry, Géopolitique de l’Arctique, Paris, Economica, 2013, 186 p.
Camille ESCUDÉ-JOFFRES
Camille Escudé-Joffres, professeure agrégée de géographie, doctorante à Sciences Po – Centre de recherches internationales
Mise en web : Jean-Benoît Bouron
Pour citer cet article :Camille Escudé-Joffres, « Les régions de l’Arctique entre États et sociétés », Géoconfluences, septembre 2019. |
Pour citer cet article :
Camille Escudé, « Les régions de l’Arctique entre États et sociétés », Géoconfluences, septembre 2019.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-regionaux/arctique/articles-scientifiques/regions-arctiques-entre-etats-et-societes