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Front, front pionnier

Publié le 16/02/2024
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Un front est une séparation formant, en vue zénithale, une ligne ou une bande étroite et traduisant un rapport de force entre les espaces situés de part et d'autre. En langage militaire, c'est la ligne où se déroule les combats, et qui est aussi la frontière de fait entre les belligérants. En météorologie, le front sépare deux masses d'air dont l'une exerce une pression sur l'autre. Un front d'urbanisation désigne l'avancée de l'artificialisation des sols, en périphérie urbaine, généralement au détriment de l'agriculture et des espaces dits « naturels ».

Un « front pionnier » désigne un type de frontière intérieure à un État, séparant deux types d'usages du sol radicalement différents, l'un des deux cédant le pas face à l'avancée du second. Il est un lieu de rencontre mais surtout, le plus souvent, d'affrontement, dans lequel deux logiques inconciliables se font face, dans des espaces de marge où le pouvoir central ne joue que lointainement le rôle d'arbitre qui lui serait normalement dévolu. Parmi les oppositions binaires pouvant se jouer et se cumuler sur un front pionnier, citons par exemple nomadisme/sédentarité ; forêts/espaces ouverts ; autochtonie/peuplement exogène ; pastoralisme/agriculture ou chasse et cueillette/agriculture.

En 1893, Frederick Jakson Turner théorise le premier la notion de Frontier, front pionnier de la conquête de l’Ouest américain et modèle de la construction du territoire des États-Unis, par opposition aux termes classiques désignant la frontière administrative : boundary, border. La géographie a longtemps célébré ces fronts comme le symbole de l'avancée de la civilisation sur ce qui relevait du sauvage. La figure du pionnier évoquait alors une vie nouvelle écrite sur une page blanche, comme en témoigne cette citation d'Albert Demangeon (1932) :

«

« Il existe à la surface de la Terre des régions que l'occupation sédentaire des hommes n'a pas encore conquises, régions de lisière, zones-frontières où ils avancent en tâtonnant, luttant pied à pied contre les rigueurs d'un climat trop chaud, trop froid ou surtout trop sec, terres d'essais et d'expériences, où ils tentent leur chance, où souvent après de dures épreuves ils parviennent à fonder un foyer. »

Albert Demangeon, « Pionniers et fronts de colonisation », Annales de géographie, année 1932, 234, p. 631-636.

»

Le front pionnier renvoie à un processus d’aménagement du territoire qui peut être décomposé en plusieurs étapes :

  • une valorisation du territoire par une spéculation foncière et une légalisation des terres appropriées sans réelle transformation ;
  • un peuplement progressif accompagné d’un contrôle du territoire le long d’axes routiers ;
  • une organisation spatiale de la région pionnière fondée sur la connexion de quelques pôles urbains en croissance par de grands axes de transports en voie de consolidation.

La progression du front pionnier se déroule très rarement de manière linéaire et s’apparente davantage à une frange d’épaisseur variable. Ainsi, il procède davantage de sauts discontinus le long d’axes privilégiés, en laissant derrière lui des îlots non transformés, et conduit à la création d’un territoire en archipel.

(ST) 2009. Dernières modifications (JBB) novembre 2021, mai 2022, février 2024.


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