Le lac d’Annecy, entre images et réalités : approche géographique d’un espace convoité
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Dans un mémoire de droit de l’environnement rédigé au milieu des années 1980, Roger Estève se demande si le lac d’Annecy ne serait pas en train de devenir « la piscine la plus propre d'Europe » (Estève, 1984, p. 5). L’expression fait référence à un poncif qui s’est installé dans la communication institutionnelle relative à ce lac, régulièrement présenté comme le plus « propre » ou le plus « pur » d’Europe à partir des années 1970 (Vernex et Martin, 2009) à la suite des efforts d’assainissement engagés par les acteurs locaux à partir de la fin des années 1950, démarche novatrice à l’époque. En annexe du mémoire, figure un dessin du lac qui fait écho à cette interrogation (document 1) et qui ne peut manquer d’intriguer les géographes.
Attardons-nous sur cette représentation singulière du lac comme une « piscine » ou plus exactement comme une baignoire (document 1), en la comparant à une carte plus classique réalisée par nos soins (document 2). Notons que cette carte est fondée sur des données plus récentes (décennie 2010). Moyennant quelques précautions, elle autorise une double comparaison. Spatialement, elle permet de rapporter le dessin à la configuration générale du lac. Temporellement, elle permet d’insister sur le fait que la tendance à l’artificialisation, dénoncée en 1984, s’est confirmée depuis.
Document 1. Le lac d’Annecy, baignoire alpine ? Dessin de Françoise Estève, avec l’aimable autorisation de l’autrice (source : Estève, 1984). |
Document 2. Le lac d’Annecy au début du XXIe siècle, un objet « naturel » profondément anthropisé et aménagé. Source : Nikolli, 2019. Pour voir l'image en très grand, cliquez ici. |
La baignoire est orientée à l’est : la ville d’Annecy, située au nord du lac, apparaît à gauche du dessin tandis que les deux robinets placés à droite représentent l’Eau morte, principal affluent qui se jette au sud du lac. On reconnaît en outre le château de Menthon-Saint-Bernard, quelque peu décalé vers le sud par rapport à sa localisation réelle. La topographie des rives est simplifiée : ni le roc de Chère – petit promontoire rocheux situé sur la rive est – ni la presqu’île de Duingt et son château, sur la rive ouest, n’apparaissent. Ce dessin met en revanche l’accent sur la profusion d’usages dont font l’objet les rives – urbanisation, axes de transport, aménagements touristiques (plages, camping, téléphérique du Mont Veyrier ((Inauguré en 1934, ce funiculaire cesse d’être exploité en 1984 avant d’être démoli en 2001 suite à un accident mortel.))…) – ainsi que le plan d’eau (baignade, sports nautiques variés, bateau de croisière lacustre…). On repère également un tuyau qui fait le tour de la baignoire – référence à l’égout circulaire aménagé pour enrayer l’eutrophisation du lac – et qui, ici, semble montrer des signes de faiblesse (fuites, risque d’explosion). De même, le blason de la ville d’Annecy – un omble – est remplacé par un poisson mort qui n’est pas sans rappeler le pictogramme signalant la toxicité pour l’environnement de certains produits chimiques. L’intention rhétorique est donc claire : le dessin pointe du doigt l’artificialisation de l’environnement lacustre et questionne la pérennité des mesures mises en œuvre pour préserver celui-ci. À la lumière de la carte plus récente, on voit que ce questionnement du milieu des années 1980 est toujours d’actualité.
Le lac d’Annecy offre en effet un cas d’étude intéressant. Objet naturel profondément anthropisé et aménagé, dont les paysages constituent une ressource touristique largement mise en avant, il voit s’affronter des dynamiques et des intérêts contradictoires que cet article se propose d’analyser dans une approche géographique englobante. Il s’agira ainsi de considérer le lac comme un espace convoité, objet de rivalités entre des acteurs aux intérêts divergents.
1. Un lac d’origine naturelle profondément aménagé
Comme ses voisins du Bourget et du Léman, le lac d’Annecy est un lac d’origine naturelle, en l’occurrence glaciaire. Il se situe dans la cluse préalpine du même nom, qui sépare le massif des Bauges, au sud-ouest, du massif des Bornes, à l’est. On le qualifie volontiers de « périalpin », par opposition aux lacs « alpins », situés plus hauts en altitude, plus petits et peu anthropisés.
1.1. Un lac dont le niveau est régulé…
Sur le plan hydrologique, les grands lacs périalpins présentent, dans leur fonctionnement naturel, un régime monomodal caractérisé par des hautes eaux printanières ou estivales, liées à la fonte nivale, et des basses eaux de fin d’été ou de début d’automne (Touchart, 2002). Cela étant, le régime de ces lacs n’est plus naturel, dans la mesure où leur niveau est régulé par des ouvrages anthropiques, et le lac d’Annecy ne fait pas exception. Le lac est régulé depuis 1876 par les vannes situées sur son exutoire, le Thiou (un affluent du Fier et donc un sous-affluent du Rhône). Il est cependant resté assez proche de son régime naturel de type pluvio-nival – qu’Henri Onde décrivait encore dans sa monographie hydrologique au milieu du XXe siècle (Onde, 1944) – pendant une longue période (document 3a). Mais depuis 1965 et la rénovation des vannes du Thiou, « le contrôle est […] beaucoup plus efficace et donc le niveau beaucoup plus constant », avec une amplitude ne dépassant pas une dizaine de centimètres (document 3b), hors épisodes exceptionnels de crue ou d’étiage importants (Montuelle et Clemens, 2015, fiche 6-05).
Le régime que cette régulation imprime au lac est donc bien spécifique (très différente de celui du Bourget ou du Léman par exemple), dans la mesure où il est articulé autour d’une seule cote de référence, le principe étant que le niveau de l’eau soit toujours maintenu au plus près de celle-ci. Cela s’explique par les raisons qui ont historiquement motivé la régulation (assurée par la municipalité d’Annecy) : maintenir un débit suffisant dans le Thiou, pour les industries situées en aval du lac, et éviter les désagréments esthétiques et olfactifs liés aux étiages. Ce principe d’un niveau stable facilite également d’autres usages, comme la navigation de plaisance.
1.2. … au prix d’une forte artificialisation de l’écosystème lacustre
Cela ne va pas sans conséquences pour la physionomie des rives ni sur l’environnement (Montuelle et Clemens, 2015, fiche 6-05). Ce principe d’un niveau stable – et supérieur de 20 à 25 cm au niveau moyen naturel (Onde, 1944) – réduit drastiquement l’exondation de l’espace littoral (la grève lacustre), ce qui nuit à l’oxydation et à la dépollution des sédiments. Il a également de lourdes conséquences pour les roselières, qui constituent la formation végétale typique des littoraux des lacs périalpins dans les secteurs de pente douce (surtout la rive ouest, concernant le lac d’Annecy) et qui jouent un rôle écosystémique majeur (vie et reproduction des organismes vivants, tenue des berges, autoépuration de l’eau) (Montuelle et Clemens, 2015, fiche 2-05). Par l’effet combiné de l’urbanisation du rivage et de la régulation du niveau de l’eau, les roselières du lac d’Annecy ont drastiquement reculé, passant d’une centaine d’hectares au début du XXe siècle à seulement une dizaine en 2007, la principale période de régression s’étendant des années 1960 aux années 1990 (Syndicat mixte du lac d’Annecy [SILA], 2017). En effet, outre les destructions directes liées à l’aménagement des rives, le régime stable du lac nuit au développement des roseaux, pour des raisons à la fois mécaniques et écologiques.
1.3. L’évolution récente du mode de régulation
Dans ce contexte, les gestionnaires du lac d’Annecy, mais également du lac du Bourget ((Voir cette page : https://www.cisalb.fr/baisse-exceptionnelle-niveau-lac.)), ont récemment développé des projets visant à modifier le mode de régulation afin de redonner plus d’amplitude aux variations du niveau de l’eau. Il s’agit en particulier d’approfondir les étiages, afin de permettre une meilleure minéralisation des sédiments, d’améliorer l’autoépuration du lac et d’accompagner la restauration des roselières lacustres entreprise par ailleurs (plantations, zonages de protection). Pour le lac d’Annecy, le Syndicat mixte du lac d’Annecy (SILA) a établi dès 2010-2011 un scénario fondé sur un marnage moyen annuel de 50 cm, avec un niveau haut en fin d’hiver et un niveau bas en fin d’été, inférieur de 40 cm au niveau de référence de la régulation antérieure. Par opposition au régime choisi à la fin du XIXe siècle, fondé sur le maintien (artificiel) d’un niveau le plus stable possible tout au long de l’année, il s’agit ici d’imiter (toujours artificiellement) le régime naturel du lac. Ce projet a fait l’objet d’un important travail de concertation en 2013, avec les acteurs représentant les différents usages du lac. Les niveaux bas ayant été perçus comme particulièrement gênants du fait de leur coïncidence avec la période touristique (conséquences techniques, esthétiques et paysagères), ce projet semblait avoir été peu à peu enterré avant de revenir sur le devant de la scène en 2019 et d’être mis en œuvre à titre expérimental depuis lors, avec un marnage de moindre amplitude que celui prévu initialement (document 3c). Ce déblocage s’est fait à la faveur d’un fort épisode d’étiage naturel (–67 cm par rapport à la cote de régulation, soit le niveau le plus bas atteint par le lac depuis 1947) (document 4), lié à un important déficit de précipitations à l’automne 2018, qui a permis de relancer la discussion. L’un des objectifs de cette nouvelle régulation est d’ailleurs de stocker davantage d’eau en fin d’hiver, pour faire face aux potentiels déficits de précipitations, dans une optique d’adaptation au changement climatique ((Pour compléter, voir cet article sur le site de France Bleu Haute-Savoie : « Lac d’Annecy : le marnage volontaire va être expérimenté, une aubaine pour les roselières », 12 mars 2019.)).
Document 3a. Le régime du lac d’Annecy au début du XXe siècle (régime régulé, antérieur à la modernisation de 1965). Source : d'après Milon F. (1939), « Le lac d’Annecy, étude géographique », Annales de Géographie, vol. 48, n°272, p. 120‑137. |
Document 3b. Représentation simplifiée du régime du lac d’Annecy suite à la modernisation du système de régulation en 1965. Source : Montuelle et Clémens (2015), fiche 6-05. |
Document 3c. Nouveau mode de régulation du niveau du lac d’Annecy depuis 2019. Source : SILA, 2019. |
Document 4. Lac d’Annecy au plus bas suite à la canicule de l’été 2018. Cliché : Alice Nikolli, octobre 2018. Cette photographie a été prise lors d’un épisode de très fort étiage (–67 cm par rapport à la cote de régulation, soit le niveau le plus bas atteint par le lac depuis 1947). Habituellement, le lac atteint l'enrochement le long duquel est installé le panneau « baignade interdite ». Des photographies de ce genre ont été abondamment relayées et commentées dans la presse et sur les réseaux sociaux à l’automne 2018, les riverains et riveraines du lac n’étant pas du tout habitués à de telles fluctuations du niveau de l’eau. On remarque ainsi, à gauche de la photographie, un passant qui s’aventure sur cet espace habituellement immergé. En effet, du fait du standard de régulation établi à la fin du XIXe siècle (maintien d’un niveau stable toute l’année, supérieur au niveau naturel), cette zone d’interface a été durablement ennoyée et le paysage que cette photographie représente est devenu incongru. |
Cette question de la régulation du niveau de l’eau illustre les interrelations complexes entre le lac en tant qu’objet naturel, avec des fonctionnements écologiques et hydrologiques propres, et le lac en tant qu’espace social, qui fait l’objet de représentations et d’usages variés motivant des interventions sur ces fonctionnements. Ces interrelations sont le résultat d’un équilibre dynamique, qui évolue dans le temps, sous l’impulsion de facteurs tant environnementaux que sociaux.
2. Comme des grenouilles autour d’une mare : le lac, ressource multifonctionnelle
Historiquement, le lac d’Annecy était utilisé comme axe de transport, dans un contexte topographique où les communications terrestres sont longtemps restées malaisées (Gauchon, 2021) et comme gisement de ressources complémentaires au travail des champs et de la vigne, à travers la pêche mais également le faucardage des roseaux, utilisés comme engrais et comme litière (Vernex, 1985). En revanche, à quelques rares exceptions près (village de pêcheurs de Bredannaz dans la commune de Doussard, château de Duingt), l’habitat s’est longtemps tenu à distance craintive des rives, peu stabilisées et sujettes à des inondations fréquentes, d’autant plus que les eaux stagnantes étaient associées à divers risques sanitaires et à des représentations négatives. Ces représentations connaissent un renversement au cours du XIXe siècle : selon une trajectoire similaire à l’invention du « désir du rivage » qu’Alain Corbin (1990) a mise en lumière au sujet des littoraux maritimes, les lacs ont progressivement acquis une fonction esthétique, paysagère puis touristique. Aussi, au début des années 1940, le géographe Raoul Blanchard, fondateur de la géographie alpine, peut-il écrire du lac d’Annecy que « le spectacle de ces belles eaux enchâssées dans leur écrin de montagnes est un des plus enchanteurs que réservent les Alpes françaises » (Blanchard, 1941).
Comme l’illustrait le document 1, le lac d’Annecy fait aujourd’hui l’objet de nombreux usages, à la fois en tant qu’espace, que paysage et que plan d’eau. Dans cette deuxième partie, il s’agira donc de faire le point sur les différents domaines dans lesquels le lac fait ressource.
2.1. Une ressource paysagère et résidentielle socialement située
La qualité du cadre de vie étant devenue un moteur de développement territorial dans la deuxième moitié du XXe siècle, au moins dans les discours, les acteurs du lac d’Annecy ont su capitaliser sur cette image positive. Le bassin du lac fait ainsi l’objet d’une forte urbanisation, favorisée par la croissance démographique et le dynamisme économique du territoire haut-savoyard (Laslaz et al., 2015). La plupart des communes riveraines du lac ont ainsi vu doubler voire tripler leur population entre 1968 et 2013 (document 5), date retenue pour se placer avant les fusions de communes qui ne permettent plus une lecture aussi fine des dynamiques affectant le territoire le plus proche du lac. Dans une étude paysagère de 2006, la DIrection Régionale de l’Environnement (DIREN) Rhône-Alpes qualifie cette urbanisation de « spectaculaire » et insiste sur le fait qu’après s’être développée « partout où cela a été possible dans les parties planes du bassin et sur les berges » (sur la base des données du Corine Land Cover de 2006, on peut estimer à 70 % la part artificialisée du linéaire littoral), elle continue de s’étendre « plus en hauteur », sur les pentes ((Voir les fiches de la DIREN, « Grand lac d’Annecy » et « Petit lac d’Annecy », juillet 2017.)). Cette urbanisation génère une forte pression foncière et une flambée des prix immobiliers (Laslaz et al., 2015). Si ces dynamiques ne peuvent évidemment pas être réduites à la seule attractivité du paysage lacustre, les représentations positives dont celui-ci fait l’objet restent cependant l’un des facteurs qui contribuent à expliquer l’urbanisation du bassin du lac.
Document 5. Évolution de la population des communes riveraines du lac d’Annecy (1968-2013). Source : INSEE, populations légales.
Territoire | Population légale 1968 | Population légale 1999 | Population légale 2013 | Évolution 1968-2013 | Évolution 1999-2013 |
Communes riveraines du lac d'Annecy | |||||
Annecy | 54 484 | 50 348 | 52 029 | -5 % | 3 % |
Annecy-le-Vieux | 6 754 | 18 885 | 20 166 | 199 % | 7 % |
Doussard | 1 239 | 2 781 | 3584 | 189 % | 29 % |
Duingt | 297 | 797 | 871 | 193 % | 9 % |
Menthon-St-Bernard | 702 | 1 659 | 1905 | 171 % | 15 % |
Saint-Jorioz | 1 831 | 5 002 | 5747 | 214 % | 15 % |
Sevrier | 1 790 | 3 421 | 4121 | 130 % | 20 % |
Talloires | 700 | 1 448 | 1 733 | 148 % | 20 % |
Veyrier-du-Lac | 1 311 | 2 063 | 2 355 | 80 % | 14 % |
Total lac d'Annecy | 69 108 | 86 404 | 92 511 | 34 % | 7 % |
Haute-Savoie | 378 550 | 631 679 | 769 677 | 103 % | 22 % |
France métropolitaine | 49 714 275 | 58 518 395 | 63 697 865 | 28 % | 9 % |
Note : les données statistiques prises en compte dans l’article ne vont pas au-delà de 2013, afin de se situer en amont des fusions de communes impulsées par la loi NOTRe et de discriminer le plus finement possible les communes riveraines du lac du reste du territoire local. Deux cas de fusion sont en effet à signaler autour du lac. En 2016, Talloires a fusionné avec la petite commune d’altitude de Montmin (318 habitants en 2013), non riveraine du lac, devenant Talloires-Montmin. En 2017, Annecy a fusionné avec cinq communes voisines, dont celle d’Annecy-le-Vieux qui était elle aussi riveraine du lac. La population municipale d’Annecy est ainsi passée de 52 029 habitants en 2013 à 130 175 en 2017, la commune nouvelle conservant le nom d’Annecy. Le lac ne compte donc plus, postérieurement à 2017, que huit communes riveraines.
Soulignons également, dans une approche de géographie sociale, que les communes riveraines du lac d’Annecy constituent des espaces socialement privilégiés, tant à l’échelle départementale que nationale (document 6). En 2013, le revenu disponible médian par unité de consommation s’élevait à 20 184 € en France métropolitaine et à 24 022 € en Haute-Savoie, mais atteignait 27 638 € en moyenne pour les communes riveraines du lac d’Annecy. L’intégralité des neuf communes se situent ainsi dans les 50 % des communes les plus riches de France métropolitaine selon cet indicateur, et sept d’entre elles se situent même parmi les 10 % des communes les plus riches. Le bassin du lac se singularise donc par le niveau de richesse élevé de sa population, avec une opposition entre la rive est, la plus ensoleillée et la plus huppée, et la rive ouest, où cette dimension socialement privilégiée est moins marquée. Veyrier-du-Lac et Menthon-Saint-Bernard, situées sur la rive est, appartiennent ainsi au 1 % des communes françaises les plus riches, atteignant respectivement la 34e (37 809 €) et la 139e place (32 953 €) selon le revenu disponible médian, à l’échelle nationale. Sur cette rive, le paysage est ainsi marqué par de grandes villas entourées de vastes parcs (document 7) et par des établissements hôteliers et gastronomiques réputés, liée à une tradition de villégiature élitaire remontant à la fin du XIXe siècle. La commune de Veyrier-du-Lac est d’ailleurs non seulement la plus aisée, mais également celle dont le linéaire littoral présente le taux le plus élevé de privatisation à l’échelle du lac (80 % de propriété privée et 70 % d’accès privatif, cf. infra).
Document 6. Des communes riveraines socialement privilégiées. Source : INSEE, 2013. Réalisation : Nikolli, 2019.
Commune | Population 2013 | Revenu disponible médian par unité de consommation en euros (2013) | Rang à l'échelle nationale (n = 32 941) | À l’échelle nationale, la commune se situe parmi les : |
Veyrier-Du-Lac | 2 355 | 37 809 | 34 | 1 % les plus riches |
Menthon-Saint-Bernard | 1 905 | 32 953 | 139 | |
Sevrier | 4 121 | 27 808 | 659 | 5 % les plus riches |
Annecy-Le-Vieux | 20 166 | 27 337 | 763 | |
Talloires | 1 733 | 26 653 | 974 | |
Saint-Jorioz | 5 747 | 26 125 | 1 188 | |
Duingt | 871 | 25 009 | 1 839 | 10 % les plus riches |
Doussard | 3 584 | 23 374 | 3 743 | 50 % les plus riches |
Annecy | 52 029 | 21 677 | 7 868 |
Note : en 2013, la France comptait encore 36 681 communes. Le fait que seules 32 941 soient renseignées ici s’explique par la nature fiscale des données, auxquelles s’applique le secret statistique pour les communes dont la population est inférieure à un certain seuil.
Document 7. Villa « pieds dans l’eau » à Veyrier, sur la rive est du lac d’Annecy, vue depuis la voie publique (gauche) et depuis le lac (droite). Clichés : à gauche, Alice Nikolli (mars 2016) ; à droite, Mélanie Duval (juin 2017). |
2.2. Une ressource touristique qui suscite une forte fréquentation
Les paysages offerts par le lac sont aussi valorisés comme ressource touristique. Autour du lac d’Annecy, le tourisme lacustre émerge dans le dernier quart du XIXe siècle et se développe au début du XXe siècle avec la construction d’hôtels en bord de lac, de villas « pieds dans l’eau » et d’aménagements publics donnant accès au lac (quais-promenades, plages). Le tourisme représente aujourd’hui une activité importante dans les communes riveraines du lac, qui reste cependant difficile à chiffrer du fait des difficultés à distinguer précisément les contours du « tourisme lacustre » (Hall et Härkönen, 2006). Quelques activités directement liées au lac permettent cependant de se faire un ordre d’idées : au cours de la saison estivale 2019, les six plages payantes du lac ont enregistré près de 300 000 entrées (Savoie Mont Blanc Tourisme, 2021), tandis que pour l’année 2013, les compagnies de bateaux ont transporté plus de 150 000 personnes (Montuelle et Clemens, 2015, fiche 5-03). On peut aussi mesurer cette attractivité récréative à la fréquentation nautique du lac. Le SILA a mis en place en 2018 un observatoire dédié (lien), par prise de clichés aériens réitérés huit fois entre juin et octobre, qui permettent de connaître le nombre total d’embarcations présentes simultanément sur le plan d’eau. Pour l’année 2018, les chiffres varient – en fonction des jours de la semaine, du moment de la saison et des conditions météorologiques – de 163 à près de 788. En 2019, ils s’établissent entre 124 et 809 tandis qu’en 2020, ils varient de 110 à 1128 embarcations. Cette série de données, trop récente, ne permet pas encore d’établir une tendance mais permet au moins de chiffrer les fréquentations maximales. On note en particulier le niveau élevé de fréquentation atteint à l’été 2020, qui tient sans doute aux conséquences de la crise sanitaire et au repli massif sur des destinations touristiques nationales. Les observations de terrain permettent aussi de se faire une idée de l’affluence possible à la belle saison, ce dont attestent les photographies du document 8. La congestion routière autour du lac, problème chronique lié aux mobilités pendulaires et qui se trouve aggravé à la belle saison par la fréquentation touristique, est un autre indicateur de cet engouement pour le lac.
Document 8. Affluence au bord du lac d’Annecy à la belle saison. Clichés : Alice Nikolli. |
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Plage municipale de Duingt (dimanche 14 août 2016). |
Plage spontanée en bord de route à Bredannaz (dimanche 14 août 2016). |
Plage municipale de Doussard (dimanche 14 août 2016). |
Duingt vu depuis le Taillefer (vendredi 4 août 2017). |
2.3. De l’égout à ciel ouvert à la préservation de l’environnement
Outre sa dimension paysagère et touristique, le lac est aujourd’hui valorisé en tant qu’écosystème à protéger. Cette valeur écologique, qui est plus globalement accordée aux milieux aquatiques et humides, est relativement nouvelle, dans la mesure où le lac a longtemps été utilisé par les sociétés riveraines comme un égout à ciel ouvert. Cette pollution agricole et urbaine, constituée à la fois d’effluents et de déchets solides, a conduit à une sévère eutrophisation du lac. Les premières alertes remontent aux années 1940 et se formalisent dans les années 1950, notamment sous l’impulsion d’un médecin annécien, Paul-Louis Servettaz. Le Syndicat des communes riveraines du lac d’Annecy (SICRLA, devenu ensuite le SILA, avec un territoire et des compétences élargies), est ainsi créé en 1957 pour remédier à cette crise d’eutrophisation. Il procède à l’aménagement d’un égout collecteur, d’une usine de traitement des eaux usées et d’une usine de traitement des ordures. Ces mesures, précoces par rapport aux lacs voisins (Léman, Bourget), ont permis une baisse rapide de la charge en phosphore, le lac restant néanmoins vulnérable à l’augmentation des pollutions urbaines diffuses (Montuelle et Clemens, 2015, fiche 3-08). La qualité écologique du lac est d’autant plus importante que celui-ci constitue un réservoir d’eau potable majeur pour la population de la communauté d’agglomération du Grand Annecy (créée en 2017, celle-ci regroupe 34 communes – dont sept des huit communes riveraines du lac – et compte 207 000 habitants en 2020) : près de 11,5 millions de m3 ont ainsi été pompés dans le lac en 2019, soit 70 % de l’eau potable distribuée, après traitement, sur le territoire intercommunal.
Sur un plan spatial, le lac d’Annecy fait l’objet de multiples zonages de protection du paysage et de l’environnement (document 2) : site inscrit depuis 1937, il constitue également un site du réseau européen Natura 2000 tandis que différents espaces riverains font l’objet de réserves naturelles (RN du Bout du lac, créée en 1974, et RN du Roc de Chère, créée en 1977), d’arrêtés préfectoraux de protection de biotope (APPB) datant pour l’essentiel du début des années 1990 ou encore de la politique départementale des espaces naturels sensibles. Le lac fait également partie du périmètre d’intervention du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (CELRL), qui y a acquis 125 ha depuis sa création en 1975 (CELRL, mars 2016). Les surfaces de roselières lacustres sont particulièrement protégées, du fait de leur importance écologique. La plupart de ces zonages de protection se superposent dans les trois dernières coupures d’urbanisation significatives : les marais de l’Enfer sur la rive ouest, les marais du Bout du lac au sud et le Roc de Chère, sur la rive est (document 2). Outre l’environnement, des dispositifs visent à protéger le patrimoine et en particulier les sites palafittiques immergés dans le lac (classés aux Monuments historiques), dont trois sont inscrits à l’UNESCO depuis 2011 au sein du bien sériel transnational « Sites palafittiques préhistoriques autour des Alpes ».
>>> Sur les sites palafittiques et leur patrimonialisation, lire : Ana Brancelj, Mélanie Duval et Christophe Gauchon, « Analyse des modalités de construction d’un bien sériel en vue d’une inscription sur la Liste du patrimoine mondial. Exemple du bien "Sites palafittiques préhistoriques autour des Alpes" », Géoconfluences, janvier 2022. |
3. Quand la carte postale dissimule les dysfonctionnements du territoire
Le lac d’Annecy et le territoire dans lequel il s’insère font donc l’objet de nombreuses dynamiques géographiques – urbanisation, fréquentation récréative et touristique, protection de l’environnement et du patrimoine… – qui ne vont pas sans entrer en tension les unes avec les autres. Dans le même temps, la renommée touristique du lac contribue à la diffusion d’images idylliques (encadré 1 et encadré 3) qui tendent à occulter certaines aspérités de la réalité et, en particulier, certains enjeux sociaux et spatiaux (Vernex et Martin, 2009). Dans cette dernière partie, il s’agira donc de revenir sur deux de ces aspérités : l’extension de l’urbanisation et la privatisation des rives.
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3.1. Une urbanisation difficile à maîtriser
La question de l’urbanisation constitue un enjeu bien identifié, en particulier dans les territoires touristiques. Dans le cas du lac d’Annecy, la situation est tendue : à la croissance démographique soutenue (document 5) répondent des possibilités d’urbanisation limitées par la topographie de la cluse, d’une part, et par certaines dispositions du droit de l’urbanisme, d’autre part. Le lac, d’une superficie de 27 km², relève en effet de la loi Littoral qui s’applique aux rivages des lacs de plus 10 km². Cela contraint fortement la constructibilité, en particulier dans la bande des 100 mètres les plus proches du rivage. La situation est d’autant plus compliquée que la plupart des communes riveraines relèvent également de la loi Montagne, superposition qui a mené à des débats houleux à la fin des années 2000 (encadré 2). Cette urbanisation est régulièrement critiquée : le rapport de la DIREN de 2006 cité plus haut évoque une « désorganisation du paysage », des paysages ruraux « menacés » par la « pression urbaine » et considère que « l’enjeu est de réussir à limiter fortement l’étalement urbain ».
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Le projet avorté d’inscription du lac d’Annecy à l’UNESCO, à la fin des années 2000, est révélateur de cette urbanisation considérée comme excessive. Le projet remonte au début des années 2000 et trouve son origine dans « une divergence assez ordinaire sur la politique d’urbanisme » annécienne, des « associations de riverains dénon[çant] le laxisme des élus dans l’attribution de terrains à construire » et le « respect jugé approximatif de la loi Littoral » (Gauchon, 2010, p. 172-173). Le projet est ensuite récupéré par le SILA qui dépose en 2008 un dossier d’inscription sur la liste indicative, argumentant l’inscription au titre de la qualité paysagère et du caractère exemplaire du système de gestion des eaux mis en place dans les années 1960. En 2009, le Comité national des biens français du Patrimoine mondial retoque cette candidature, au motif principal que ce système de gestion des eaux n’a rien d’exceptionnel à l’échelle mondiale et qu’il n’est pas lié à des traditions territoriales particulières. La rapporteuse du dossier incrimine également l’urbanisation et les atteintes occasionnées au paysage. Elle écrit : « si effectivement le grand paysage est remarquable, il est aujourd'hui gravement atteint par une urbanisation très importante », d’une qualité architecturale qu’elle qualifie de « médiocre », soulignant ensuite que cette urbanisation s’organise en « fer à cheval autour du Lac », donc « visible de partout » et qu’elle « continue à se développer rapidement » ((Extraits du rapport d’Anne-Marie Cousin, reproduits par une association locale de protection de l’environnement dans son bulletin Lacs et reflets, n° 102, printemps 2010.)). Cet exemple est donc particulièrement révélateur de l’ampleur de l’urbanisation dans le bassin du lac, et des perceptions divergentes dont elle fait l’objet entre les acteurs locaux et les acteurs nationaux de la patrimonialisation.
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3.2. La privatisation des rives
La privatisation des rives est un autre problème, lié à l'urbanisation, que tendent à faire oublier les images idylliques du paysage lacustre (encadré 1, encadré 3). Les images touristiques font généralement comme si l’accès du plus grand nombre au lac et à l’eau allait de soi, ce qui contraste avec la réalité de l’appropriation des terrains littoraux (document 12). Un détour par le droit est nécessaire pour comprendre la situation. Le lac d’Annecy, comme ses voisins du Bourget et du Léman, est un lac domanial : il appartient à l’État et fait partie du domaine public fluvial. Il s’agit donc d’un bien inaliénable, imprescriptible et dont l’accès est libre, gratuit et égalitaire pour tout un chacun. Cependant, le lac fait l’objet d’un paradoxe géo-légal (Nikolli, 2021) : ce statut domanial ne s’applique qu’au plan d’eau, tandis que ses rives (à partir du niveau des plus hautes eaux) en sont exclues. Les terrains riverains peuvent donc aussi bien relever de la propriété publique que de la propriété privée, en fonction des historiques fonciers locaux. En l’occurrence, la cartographie du statut de propriété à l’échelle des parcelles cadastrales riveraines du lac permet d’établir que 60 % du linéaire littoral est en mains publiques contre 40 % en mains privées (Nikolli, 2019, d’après les données MAJIC-DGFIP 2016). Mais la propriété foncière reste insuffisante pour analyser l’appropriation de l’espace (Bergel, 2005) et il importe de s’intéresser, en contrepoint, aux modalités réelles d’accès aux rives. D’après des relevés de terrain, on peut établir que 47 % des rives sont totalement libres d’accès, contre 32 % qui relèvent d’un accès strictement privatif, 9 % qui sont conditionnés au paiement d’un droit d’entrée (plages publiques payantes) ou à la consommation d’un service (hôtels, restaurants, campings avec accès privatif au lac), 8 % qui sont physiquement difficiles d’accès (topographie, végétation) et 4 % qui sont interdits d’accès par un dispositif de protection de l’environnement ne tolérant aucune fréquentation (Nikolli, 2019).
Parmi ces différentes restrictions d’accès, c’est la privatisation résidentielle qui cristallise les critiques (et dans une moindre mesure la question des plages publiques payantes). Ce phénomène est en effet au cœur d’un problème public local qui remonte au tournant du XIXe et du XXe siècles. La construction de villas « pieds dans l’eau » qui a débuté, pour le lac d’Annecy, à la toute fin du XIXe siècle ((L’historique du phénomène de privatisation est difficile à retracer dans le détail, ce qui empêche d’expliquer finement la variabilité de la situation que l’on constate, aujourd’hui encore, d’une commune riveraine à une autre (document 12), que ce soit sous le critère de la propriété ou sous celui de l’accès. Si les opérations foncières de « déprivatisation » menées par les pouvoirs publics – qui expliquent les cas où l’intégralité du littoral se trouve publicisé – sont généralement faciles à documenter (cf. infra), il est plus difficile de retracer, du moins à l’échelle communale, l’historique détaillé de la privatisation et d’identifier les facteurs qui ont localement facilité le phénomène. Il s’agirait là d’un chantier de recherche à part entière, relevant de l’histoire du foncier.)) s’est accompagnée d’une offensive des propriétaires riverains pour être exemptés du respect de la traditionnelle servitude de halage découlant de la domanialité du lac. L’administration cède dans les années 1910, s’appuyant sur la jurisprudence rendue quarante ans plus tôt sur la rive française du Léman, et les usages résidentiels du bord de lac se sont donc construits selon un principe hermétique, avec des clôtures parallèles à la voie publique faisant disparaître le lac du paysage (document 13), complétées par des clôtures perpendiculaires à la rive empêchant le passage en bord de lac, souvent prolongées de quelques mètres dans l’eau pour prévenir toute intrusion (document 14, type C). Les politiques d’acquisition foncière déployées à partir de la deuxième moitié du XXe siècle pour reconquérir l’accès aux rives ont abouti à des résultats timides, en-dehors de quelques communes ayant mené des politiques ambitieuses comme Annecy ou Saint-Jorioz (document 15). Depuis, une loi de 2006 a réactivé et renforcé une disposition juridique ancienne, la servitude de marchepied (encadré 4), qui interdit aux propriétaires riverains des lacs et cours d’eau relevant du domaine public fluvial de faire obstacle au cheminement des piétons par quelque moyen que ce soit (clôtures, plantations et constructions), sur une largeur de 3,25 m à partir de la limite du domaine public (voir le schéma explicatif sur cette page). Cette évolution législative, largement déconnectée de la réalité de terrain, a donné lieu à plusieurs polémiques locales à partir de la fin des années 2000, parmi lesquelles on peut citer le conflit relatif au quai de Chavoire qui a défrayé la chronique locale entre 2008 et 2014 (document 16). Elle reste à ce jour inappliquée autour du lac d’Annecy (à la différence de la rive française du Léman, où des progrès notables ont récemment eu lieu), et des associations de défense du cadre de vie en revendiquent l’application. Elles se heurtent cependant à des forces d’inertie puissantes, qui tiennent à la fois à un manque de volonté politique et à la capacité d’organisation et de défense des propriétaires riverains du lac, qui détiennent un capital économique mais également social et politique élevé.
Document 12. Cartographie de la propriété foncière (à gauche) et de l’accès réel aux rives (à droite). Source : Nikolli, 2019. |
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Document 13. Rivage privatisé à Doussard, vu depuis la route départementale longeant le lac (rendu invisible par les clôtures des villas, à gauche) et depuis la piste cyclable située en contrehaut, d’où le lac réapparaît (à droite). Clichés : Alice Nikolli, mars 2016. |
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Document 14. L’accès aux rives lacustres : une grande diversité de configurations spatiales sur cette « ligne magique où la terre et l’eau se conjuguent » ((Cette citation est empruntée au rapport Piquard de 1973 (p. 12), qui a posé les bases de la politique française d’aménagement et de protection du littoral.)). Source : document extrait de la thèse de l’autrice (Nikolli, 2019). Note : cette typologie s’appuie sur l’étude conjointe du lac d’Annecy, du lac du Bourget, du Léman et du lac de Côme. Les sous-types C7, C8 et D1 ne se rencontrent pas autour du lac d’Annecy. |
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Document 15. Saint-Jorioz : un cas d’école de la déprivatisation du rivage lacustre. Source : document extrait de la thèse de l’autrice (Nikolli, 2019). |
Document 16. Quand l’accès aux rives met le feu au lac : le conflit relatif au Quai de Chavoire (Veyrier-du-Lac, 2009-2014). Depuis 2014, l’accès au quai est demeuré interdit et la polémique s’est éteinte. Suite à ce conflit, l’Association Lac d’Annecy Environnement (ALAE) a cependant élargi la revendication de l’application de la servitude de marchepied à l’échelle du lac. Depuis 2020, sur la scène associative locale, cette question est plutôt prise en charge par les Amis de la Terre 74. Source : document extrait de la thèse de l’autrice (Nikolli, 2019). Pour voir l’image en très grand, cliquez ici. |
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Conclusion
Milieu supposé naturel et idyllique dans les nombreux discours et images dont il fait l’objet, le lac d’Annecy apparaît en réalité comme un espace profondément anthropisé, approprié et convoité. Ces rivalités d’usages s’inscrivent dans un historique qui a vu les représentations des paysages lacustres basculer au cours du XIXe siècle, les lacs devenant des espaces appréciés et valorisés qui ont fixé une population socialement privilégiée et qui continuent d’attirer de nouvelles populations mais également une importante fréquentation récréative et touristique. Une analyse géographique englobante, touchant à la fois à des questions d’environnement, d’urbanisation, de tourisme, d’inégalités sociales et d’enjeux politiques, révèle la multiplicité des pratiques, des normes et des rapports de pouvoir qui s’y jouent.
Bibliographie
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- Nikolli Alice (2019), Accéder aux rives des lacs périalpins : un droit aux espaces publics au défi de la privatisation (Annecy, Bourget, Léman, Côme), thèse de doctorat en géographie, Chambéry, Université Savoie Mont Blanc, 601 p.
- Nikolli Alice (2021), « Lacs publics mais rives (en partie) privées : analyse d’un paradoxe géo-légal », in A. Nikolli, M. Duval et C. Gauchon (dir.), Lacs et sociétés : éclairages alpins, pyrénéens et andins, Chambéry, Collection Edytem, n°21, p. 51‑61.
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- Piquard Michel (1973), Le littoral français : perspectives pour l’aménagement. Rapport au gouvernement, DATAR, Paris, La Documentation française, 266 p. >>> Voir dans le glossaire : Rapport Piquard.
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- Vernex J.-C. et Martin M. (2009), « Vendre le lac. Quelles images, quels imaginaires ? », in B. Liabeuf (dir.), Avec vue sur lac. Regards sur les lacs alpins du XVIIIe siècle à nos jours, Lyon, Annecy, Fage, Musée-château d’Annecy, p. 93‑97.
Pour aller plus loin sur le lac d’Annecy et sur d’autres grands lacs
- Magni D. et Chinaglia N. (2007), Alpine Lakes. A common approach to the characterization of lakes and their catchment area, rapport du projet Alpine Lakes Network (Interreg III B Alpine Space), 241 p.
- Nikolli, Alice, Duval, Mélanie et Gauchon, Christophe (dir.) (2021), Lacs et sociétés : éclairages alpins, pyrénéens et andins, Chambéry, Collection Edytem, n°21, 249 p.
Mots-clés
Retrouvez les mots-clés de cet article dans le glossaire : conflit d’usage | Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres | contrainte spatiale | Lac domanial | loi Littoral | loi Montagne | rapport Piquard | réserve naturelle.
Alice NIKOLLI
Agrégée et docteure en géographie, université de Pau et des pays de l'Adour, UMR TREE 6031.
Édition et mise en web : Jean-Benoît Bouron
Pour citer cet article :Alice Nikolli, « Le lac d’Annecy, entre images et réalités : approche géographique d’un espace convoité », Géoconfluences, mars 2022. |
Pour citer cet article :
Alice Nikolli, « Le lac d’Annecy, entre images et réalités : approche géographique d’un espace convoité », Géoconfluences, mars 2022.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-regionaux/la-france-des-territoires-en-mutation/articles-scientifiques/lac-annecy-espace-convoite