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Charbon

Publié le 08/12/2025
Auteur(s) : Laurent Carroué, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, directeur de Recherche à l’IFG - université Paris VIII
Jean-Benoît Bouron, agrégé de géographie, responsable éditorial de Géoconfluences - DGESCO, ENS de Lyon.

Le charbon est un combustible issu du bois, connu depuis l’Antiquité, devenu la principale source d’énergie du premier âge industriel avec la machine à vapeur, et dont la consommation continue d’augmenter : elle a même doublé en quarante ans (Efendioglu, 2024).

Le mot peut désigner le charbon de bois, issu d’une combustion particulière appelée la carbonisation.  Le procédé est connu de longue date, par exemple par les charbonniers qui ont alimenté en énergie la proto-industrie rurale (forges, verreries…). Il est utilisé aujourd’hui par exemple au Brésil pour transformer en énergie les plantations industrielles d’eucalyptus (Morère, 2018).

Production artisanale de charbon de bois sur une parcelle défrichée, Yucatan, Mexique. Cliché de Kelly Redouté, 2018.

Production artisanale de charbon de bois sur une parcelle défrichée, Yucatan, Mexique. Cliché de Kelly Redouté, 2018. Source : Kelly Redouté, « Communs fonciers en conflit au Mexique : les ejidos dans l’économie mondialisée », Géoconfluences, mars 2025.

Production de charbon de bois issu de plantations sylvicoles en monoculture après déforestation, Minas Gerais, Brésil. Cliché de Lucie Morère, 2013.

Production de charbon de bois issu de plantations sylvicoles en monoculture après déforestation, Minas Gerais, Brésil. Cliché de Lucie Morère, 2013. Source : Lucie Morère, « Les mosaïques d’aires protégées au Brésil, entre protection et développement », Géoconfluences, novembre 2018.

Le charbon dit « de terre » est une roche sédimentaire riche en carbone, présente dans le sous-sol sous forme de gisements organisés en filons. Sa formation s’explique par l’accumulation puis la sédimentation durant plusieurs millions d’années d’énormes masses de débris végétaux sous climat tropical chaud et humide, en particulier à une période géologique appelée le Carbonifère (littéralement « qui produit du charbon »). Ces couches horizontales peuvent ensuite avoir été bouleversées par les mouvements tectoniques postérieurs. L’invention et le perfectionnement de la machine à vapeur au XVIIIe siècle font exploser les besoins en bois de chauffe, puis en charbon, qui devient le moteur du premier, puis du second âge industriel.

La variation dans les conditions de minéralisation des débris végétaux explique localement les grandes différences de teneurs en carbone, de l’anthracite (90 %) à la houille (60/90 %) et au lignite (50/60 %). Celles-ci entraînent la différenciation des usages entre charbon à coke, de meilleure qualité et plus cher, réservé par exemple à la métallurgie (16 % de la production mondiale), et le charbon thermique pour la production d’électricité (81 %), face au lignite (3 %). De même, la nature des structures géologiques explique une répartition bien différenciée de gisements plus ou moins facilement exploitables (profondeur, présente de failles, orientations et épaisseurs des couches et donc du front de taille...) et aux coûts de production différenciés (Barré et Mérenne-Schoumaker, 2021).

Historiquement, l’exploitation de gisements souterrains débouche, autour des puits de mine, sur la formation de régions industrialo-urbaines spécifiques. Elles se caractérisent par des structures urbaines (centralité de la mine, habitat ouvrier en corons, cités-jardins et urbanisme paternaliste...), sociales (poids des mineurs, les « gueules noires », des associations, du patronat des charbonnages, naissance du syndicalisme et du socialisme...) et productives (intégration amont/aval, innovations avec machines à vapeur, chemin de fer, sidérurgie, métallurgie, carbochimie...) qui constituent autour de la mine un puissant système régional (Mérenne-Schoumaker, 2018). On retrouve ce modèle en Europe (Manchester, Sheffield, Glasgow, Ruhr, Sillon wallon, Pas-de-Calais, Oural, Donetsk dans le Donbass), aux États-Unis (Pennsylvanie, Kentucky, Virginie occidentale), en Inde (Dhanbad au Jharkhand), en Afrique du Sud (Highveld, Witbank) ou en Chine (Shanxi). C’est pourquoi la fermeture des mines entraine dans ces territoires de violentes crises structurelles de reconversion, urbaine, sociale et économique. La mise en évidence de cycles miniers pose la question de l’après-mine, qui a une dimension paysagère (Deshaies, 2008) et patrimoniale (Marichez, 2020).

La localisation des gisements, présents dans plus de 70 pays, font du charbon une énergie bien mieux répartie que les hydrocarbures. Par ailleurs les réserves sont considérables (plus d’un siècle au rythme actuel). Aujourd’hui, on assiste lorsque c’est possible à un abandon progressif des exploitations profondes au profit des gisements de surface à l’exploitation mécanisée (Wyoming, Queensland en Australie, Indonésie...), bien plus rentables. L’épuisement des gisements anciens, l’amélioration des systèmes logistiques avec la construction d’énormes navires vraquiers, la mondialisation des marchés et des firmes transnationales (Carroué, 2025) dominant le secteur (BHP, Anglo American, Rio Tinto, Alcoa) et la concurrence croissante des autres énergies expliquent les nombreuses recompositions en cours. Interviennent enfin les choix politiques des États producteurs, comme l’illustrent les hésitations de l’Australie selon le parti au pouvoir ou les ambiguïtés de la Chine.

Réalisation : S. Efendioglu et JB Bouron, Géoconfluences, 2024

Production et consommation de charbon dans le monde, 2013–2023. Carte de S. Efendioglu et JB Bouron, Géoconfluences, 2024. Source : Sinan Efendioglu, « Le charbon, une consommation toujours en hausse en dépit du changement climatique », Géoconfluences, novembre 2024.

Depuis plusieurs décennies, le rôle du charbon dans le changement climatique est établi : cette source d’énergie est reconnue comme responsable de 41 % des émissions mondiale de CO2. Il existe en effet depuis le milieu du XIXe siècle une étroite corrélation entre l’exploitation charbonnière, l’explosion des rejets de CO2 et le réchauffement climatique (Arnould et Veyret, 2022). Localement, les effets sur la qualité de l’air et les maladies respiratoires sont connus depuis le premier âge industriel et l’invention, en Angleterre, du mot « smog », qui est aujourd’hui une réalité quotidienne vécue par des millions d’humains. Cela n’empêche pas la production mondiale d’augmenter de 22 % en quinze ans et le charbon de représenter encore 34,5 % de la production électrique mondiale, contre 40 % il y a quinze ans. La forte réduction de la production en Amérique du Nord et en Europe est en effet largement compensée par la croissance de celle de la Chine (55 % de la production mondiale) et de l’Inde (15 %). En 2025 Donald Trump pousse à la relance charbonnière aux États-Unis à la fois pour satisfaire sa base électorale des Appalaches et répondre aux énormes besoins énergétiques liés à l’explosion de l’intelligence artificielle et des centres de données (Carroué, 2025). 

Laurent Carroué et Jean-Benoît Bouron, décembre 2025.


Références citées
Pour compléter avec Géoconfluences
Des études de cas sur le site partenaire, Géoimage du CNES
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